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14/06/2022 | FRANCE | N°19/03999

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 14 juin 2022, 19/03999


C1



N° RG 19/03999



N° Portalis DBVM-V-B7D-KFZM



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP MAISONOBE - OLLIVIER



Me Cécile SCHAPIRA

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


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Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022





Appel d'une décision (N° RG 19/00041)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 11 septembre 2019

suivant déclaration d'appel du 03 Octobre 2019



APPELANTES :



Madame [J] [Y], Née [O]

née le 28 Février 1962 à CHATEAUVILLAIN

de nationalité Française

...

C1

N° RG 19/03999

N° Portalis DBVM-V-B7D-KFZM

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP MAISONOBE - OLLIVIER

Me Cécile SCHAPIRA

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022

Appel d'une décision (N° RG 19/00041)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 11 septembre 2019

suivant déclaration d'appel du 03 Octobre 2019

APPELANTES :

Madame [J] [Y], Née [O]

née le 28 Février 1962 à CHATEAUVILLAIN

de nationalité Française

24, Avenue Bel Air

38150 ROUSSILLON

représentée par Me Elise OLLIVIER de la SCP MAISONOBE - OLLIVIER, avocat au barreau de GRENOBLE,

Syndicat SUD EDUCATION DE L'ACADEMIE DE GRENOBLE

3, Rue Federico Garcia Lorca

38100 GRENOBLE

représentée par Me Elise OLLIVIER de la SCP MAISONOBE - OLLIVIER, avocat au barreau de GRENOBLE,

INTIMEE :

Etablissement Public LYCEE GENERAL ET TECHNOLOGIQUE DU GRESIVAUDAN,

1, Avenue du taillefer

38240 meylan

représentée par Me Cécile SCHAPIRA, avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 Mars 2022,

Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 14 Juin 2022.

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [J] [Y], née [O], a été engagée par le Lycée général technologique du Grésivaudan (LGM), selon contrat d'accompagnement dans l'emploi en date du 1er novembre 2017 pour la période du 1er novembre 2017 au 31 août 2018, sur un « emploi vie scolaire ».

Par courrier du 25 juin 2018, le Lycée général technologique du Grésivaudan a informé la salariée de l'impossibilité de procéder au renouvellement de son contrat en raison de la décision prise par la Direction des Services Départementaux de l'Education Nationale de fermer le poste, et de l'impossibilité de la recruter sur un pose d'ASEH, faute pour Mme [Y] de remplir les conditions d'ancienneté.

Le 4 février 2019, Mme [Y] a saisi le Conseil de prud'hommes de Vienne d'une demande de requalification de son contrat de travail la liant au Lycée général technologique du Grésivaudan en contrat à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2017 et de demandes indemnitaires et salariales afférentes à cette requalification et à la rupture de la relation de travail.

Le syndicat Sud Education Académie de Grenoble est intervenu volontairement à l'instance.

Par jugement du 11 septembre 2019, le Conseil de prud'hommes de Vienne a :

- Dit et jugé que le Lycée général technologique du Grésivaudan a manqué à ses obligations de formation et d'accompagnement dans l'emploi à l'égard de Mme [J] [O], épouse [Y],

- Requalifié le contrat souscrit entre Mme [J] [O], épouse [Y], avec le Lycée général technologique du Grésivaudan en contrat à durée indéterminée de droit commun à compter du 1er novembre 2017,

- Fixé le salaire mensuel moyen brut de Mme [J] [O], épouse [Y], à la somme de 856,27 euros,

En conséquence,

- Condamné le Lycée général technologique du Grésivaudan à verser à Mme [J] [Y], née [O] les sommes de :

856,27 euros au titre de l'indemnité de requalification,

856,27 euros au titre de l'indemnité de préavis,

85,62 euros au titre des congés payés afférents,

856,27 euros au titre de l'indemnité relative à l'absence d'information au droit du salarié à l'assistance durant l'entretien préalable,

856,27 euros au titre de l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté Mme [J] [O], épouse [Y], du surplus de ses demandes,

- Débouté le syndicat Sud Education de l'Académie de Grenoble de ses demandes,

- Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées,

- Ordonné l'exécution provisoire de l'entier jugement au sens des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,

- Condamné le Lycée général technologique du Grésivaudan aux entiers dépens de l'instance.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec avis de réception des 12 septembre 2019.

Mme [Y] en a relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction le 3 octobre 2019.

A l'issue de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 12 mai 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [J] [Y], née [O] et le syndicat Sud Education Académie de Grenoble demandent à la cour de :

- Infirmer partiellement le jugement rendu le 11 septembre 2019 en ce qu'il a appliqué à Mme [Y] l'article L. 1235-3 du code du travail pour limiter sa prétention au titre de l'indemnité dépourvue de cause réelle et sérieuse, débouté la salariée au titre de sa demande de congés payés et d'indemnités de fermeture d'établissement, et débouté le syndicat Sud éducation,

Statuant à nouveau sur ces points,

- Condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à lui verser la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à lui verser la somme de 713,80 euros au titre des congés payés non pris est non rémunérés, outre des dommages intérêts à hauteur de 800 euros,

- Condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à lui verser la somme de 2768,50 euros au titre de l'indemnité de fermeture d'établissement est non rémunérés,

- Condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à verser au syndicat Sud éducation la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts,

- Condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à verser à son conseil la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner le lycée général du Grésivaudan aux entiers dépens de l'instance.

A l'issue de ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 mai 2021, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, le Lycée général technologique du Grésivaudan demande à la cour de :

- Débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes,

- Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions à l'exception de sa condamnation à verser à Mme [Y] la somme de 856,27 euros au titre de l'indemnité relative à l'absence d'information aux droits du salarié à l'assistance durant l'entretien préalable,

- Réformer le jugement ce qu'il l'a condamnée à lui verser la somme de 856,27 euros au titre de l'indemnité relative à l'absence d'information aux droits du salarié à l'assistance durant l'entretien préalable,

- Débouter Mme [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisser les dépens d'appel à la charge de Mme [Y].

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 février 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée :

Aux termes de l'article L. 5134-20 du code du travail, le contrat d'accompagnement dans l'emploi a pour objet de faciliter l'insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d'accès à l'emploi. A cette fin, il comporte des actions d'accompagnement professionnel, et aux termes de l'article L. 5134-22 du même code, la demande d'aide à l'insertion professionnelle indique les modalités d'orientation et d'accompagnement professionnel de la personne sans emploi et prévoit des actions de formation professionnelle et de validation des acquis de l'expérience nécessaire à la réalisation de son projet professionnel.

Il résulte des dispositions précitées que l'obligation pour l'employeur d'assurer des actions de formation, d'orientation professionnelle et de validation des acquis destinées à réinsérer durablement le salarié constitue une des conditions d'existence et de validité du contrat d'accompagnement dans l'emploi, à défaut de laquelle il doit être requalifié en contrat à durée indéterminée. En outre, le non-respect par l'employeur de son obligation à mettre en 'uvre ces actions est de nature à causer un préjudice dont le salarié peut lui demander réparation.

Aux termes de l'article L. 5134-23 du code du travail, la durée de l'aide à l'insertion professionnelle attribuée au titre du contrat d'accompagnement dans l'emploi ne peut excéder le terme du contrat de travail, et aux termes de l'article L. 5134-23-2 du même code, la prolongation de l'attribution de l'aide à l'insertion professionnelle et, s'il est à durée déterminée, du contrat de travail au titre duquel l'aide est attribuée, est subordonnée à l'évaluation des actions réalisées au cours du contrat en vue de favoriser l'insertion durable du salarié. Il en résulte que les actions de formation, d'orientation professionnelle et de validation des acquis doivent être mises en 'uvre au cours de chacune des périodes d'exécution des contrats.

Il apparaît au cas d'espèce que Mme [Y] a conclu un contrat de travail à durée déterminée d'accompagnement dans l'emploi avec le Lycée général technologique du Grésivaudan pour la période du 1er novembre 2017 au 31 août 2018.

Ainsi qu'il ressort de la demande d'aide à l'insertion professionnelle du 25 octobre 2017, le Lycée général technologique du Grésivaudan a désigné Mme [W] [V] en qualité de tuteur de Mme [Y], conformément aux dispositions des articles R. 5134-38 et R. 5134-39 du code du travail.

Toutefois, l'employeur ne verse aux débats aucun élément permettant de constater qu'un accompagnement effectif de la salariée par son tuteur aurait effectivement été mis en 'uvre, conformément aux missions de tuteur énoncées par les dispositions susvisées, durant les périodes d'exécution du contrat.

L'employeur reconnaît que la salariée n'a suivi aucune formation durant son contrat, malgré la signature par la salariée et l'employeur d'une attestation portant sur le choix des formations à l'insertion professionnelle des CUI en date du 22 décembre 2017, prévoyant deux formations d'une durée de 30 heures chacune.

Il est sans incidence que l'organisme de formation, le GRETA, ait annulé l'une des formations, ce que l'employeur ne démontre pas au demeurant, ce fait n'étant pas de nature à l'exonérer de son obligation de formation.

En outre, l'employeur ne justifie pas qu'il aurait mis en 'uvre au profit de sa salariée, au cours de la relation de travail, des actions de validation des acquis.

Il résulte ainsi des énonciations qui précèdent qu'à l'occasion de son contrat d'accompagnement dans l'emploi, le Lycée général technologique du Grésivaudan a manqué à son obligation d'assurer des actions de formation, d'orientation professionnelle et de validation des acquis destinées à réinsérer durablement la salariée.

Il s'ensuit que le contrat de travail du 1er novembre 2017 doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée à compter de cette date, par confirmation du jugement entrepris.

La salariée est, dès lors, fondée à obtenir de son employeur le versement de l'indemnité de requalification prévue par l'article L. 1245-2 du code du travail, à hauteur de la somme de 856,27 euros. Le jugement entrepris doit également être confirmé sur ce point.

Sur la rupture de la relation de travail :

L'employeur qui prend l'initiative de la rupture du contrat de travail, le rompt ou le considère comme rompu, en dehors de toute manifestation de volonté expresse du salarié tendant à la rupture, doit engager la procédure de licenciement. A défaut, la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors qu'il apparaît que le contrat liant Mme [Y] au Lycée général technologique du Grésivaudan doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun, il appartenait à l'établissement public LGM, en application des dispositions prévues aux articles L. 1232-2 et L. 1232-6 du code du travail, d'engager une procédure de licenciement pour rompre la relation de travail, ce qu'il s'est abstenu de faire. La rupture de la relation de travail avec Mme [Y] doit ainsi s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il ressort de ces énonciations que la rupture de la relation de travail entre Mme [Y] et le Lycée général technologique du Grésivaudan est intervenue hors de tout formalisme.

Aux termes de l'article L. 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie règlementaire.

Toutefois, la salariée, qui bénéficiait de dix mois d'ancienneté au moment de son licenciement, ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions la condamnation de l'employeur à lui payer l'indemnité légale de licenciement. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ce point.

Conformément aux dispositions des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, la salariée est fondée à percevoir une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 856,27 euros, outre 85,62 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, le calcul de ces sommes n'étant pas contesté par l'employeur.

Le jugement entrepris doit ainsi être confirmé sur ce chef de condamnation.

Selon l'article L. 1235-2, alinéa 5, du code du travail, dans sa rédaction applicable à la date du litige, lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1232-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

Au regard des dispositions de l'article L. 1235-2 du code du travail, Mme [Y] ne peut valablement prétendre au versement d'une indemnité à raison du défaut d'information relative à l'assistance durant l'entretien préalable, dès lors que celle-ci ne peut se cumuler avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par les dispositions de l'article L. 1235-3 du même code.

Il y a donc lieu de rejeter la demande formulée par la salariée à ce titre, par infirmation du jugement entrepris.

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; et, si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par ce texte.

Or, Mme [Y] disposait d'une ancienneté au service du même employeur de moins d'une année et peut prétendre, par application des dispositions précitées, à une indemnisation du préjudice né de la perte injustifiée de son emploi d'un mois de salaire brut maximum mois de salaire.

Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct, les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.

Aux termes de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (l'OIT), si les organismes mentionnés à l'article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou d'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Les dispositions susvisées de l'article 10 qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale de la convention ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne.

Selon le Conseil d'administration de l'Organisation internationale du travail, le terme "adéquat" visé à l'article 10 de la Convention signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

Or, la cour relève, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-3 de ce code n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3 du même code, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Il en ressort, d'une part, que les dispositions susvisées des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi, d'autre part, que le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions précitées de l'article L. 1235-4 du code du travail.

Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont donc de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

Il résulte de ces constatations que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la convention précitée. Il n'y a donc pas lieu d'écarter les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail.

S'agissant des dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne, également invoquées par la salariée pour voir écartée l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il résulte des dispositions de la Charte sociale européenne que les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs, poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en 'uvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application selon les modalités prévues par l'annexe de la Charte et l'article I de la partie V de la charte, consacré à la "mise en 'uvre des engagements souscrits", dont les Etats parties ont réservé le contrôle au seul système spécifique prévu par l'annexe de la Charte.

Il en résulte que les dispositions de la Charte sociale européenne, dont l'article 24, n'ont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers, et que le moyen tiré de l'article 24 ne peut avoir pour effet d'écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Par conséquent les dispositions de l'article L. 1235-3 code du travail sont applicables aux faits d'espèce.

En l'espèce, Mme [Y] justifie de la précarité de sa situation actuelle d'emploi, étant embauchée en contrat de travail à durée déterminée à temps partiel.

Il apparaît ainsi qu'une réparation d'un mois de salaire, par application des dispositions précitées de l'article L. 1235-3 du code du travail, constitue une réparation adéquate du préjudice et appropriée à la situation d'espèce telle qu'elle ressort des pièces produites aux débats par l'appelante.

Il convient, par conséquent, de condamner le Lycée général technologique du Grésivaudan à verser à Mme [Y] la somme de 856,27 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, par confirmation du jugement entrepris sur le quantum de la condamnation de ce chef.

Sur le rappel de salaire au titre des heures complémentaires :

La salariée ne demande pas l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté sa demande de rappel de salaire au titre des heures complémentaires réalisées au-delà des vingt heures hebdomadaires prévus par son contrat de travail, et ne formule aucune demande dans le dispositif de ses conclusions visant à ce que le Lycée général technologique du Grésivaudan soit condamné à lui payer un rappel de salaires à ce titre.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté sa demande formée à ce titre.

Sur le rappel de salaires au titre des congés payés :

Aux termes de l'article L. 3141-3 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur, soit trente jours ouvrables pour une année de référence complète, pour les salariés à temps partiel comme pour les salariés à temps plein.

Il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

En outre, l'article L. 3141-28 du code du travail dispose que lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L. 3141-24 à L. 3141-27.

Il ressort des pièces versées aux débats par l'employeur que celui-ci a calculé les congés payés dus à la salariée en heures, afin de les déduire de l'ensemble des heures de travail dues par la salariée au titre du contrat soit, pour vingt heures hebdomadaires prévues par le contrat, 100 heures de congés payés, une journée de congé payé équivalant à 4 heures (4 heures x 2,5 jours de congés par mois x 10 mois au titre du contrat = 100 heures).

Il est constant que l'employeur a déduit ce nombre d'heures de congés payés, ainsi que les heures au titre de la formation (60 heures), afin de pouvoir répartir les heures effectivement travaillées par la salariée sur l'ensemble des journées d'ouverture de l'établissement.

En conséquence, l'employeur, qui a rémunéré la salariée chaque mois pour vingt-heures de travail hebdomadaires, ce qui ressort des bulletins de salaire versés aux débats par la salariée, qui font mention d'une rémunération identique chaque mois correspondant à 86,67 heures par mois, a bien rémunéré la salariée pour les congés payés légaux.Tel n'aurait pas été le cas seulement si l'employeur avait inclus les 100 heures dans les heures de travail dues par la salariée en répartissant l'ensemble de ces heures sur les journées d'ouverture de l'établissement.

Le fait pour la salariée de ne pas travailler durant les périodes d'établissement l'aurait conduit à ne pas être rémunérée durant ces journées.

Le Lycée général technologique du Grésivaudan verse aux débats un emploi du temps pour les mois de novembre 2017 à août 2018 au nom de la salariée, indiquant les jours de congés payés.

La salariée ne conteste pas qu'elle n'a pas travaillé durant les jours mentionnés comme "congés payés" sur cet emploi du temps.

La salariée ne conteste pas non plus qu'elle n'a pas travaillé durant les périodes de fermeture de l'établissement, qui étaient supérieures à la durée légale des congés payés.

En conséquence, la cour retient que l'employeur démontre que la salariée a bien pu prendre les jours de congés payés qui lui étaient dus, peu important que les bulletins de paie ne décomptent pas les jours de congés payés, l'omission de cette formalité n'étant qu'un indice devant être pris en compte pour statuer sur le point de savoir si le salarié a bien pris les congés payés qui lui étaient dus.

Eu égard à l'ensemble de ces constatations, il y a lieu de rejeter la demande d'indemnité compensatrice de congés payés formée par la salariée au motif que celle-ci n'aurait pas été payée durant ses jours de congé. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

La demande de la salariée portant sur la réparation de son préjudice subi en raison de l'absence de congés payés pris et rémunérés est également rejetée, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur l'indemnité journalière due en raison de la fermeture de l'établissement :

Il ressort des énonciations qui précèdent que la relation de travail entre Mme [Y] et le Lycée général technologique du Grésivaudan était soumise aux dispositions encadrant le contrat de travail à durée indéterminée de droit commun.

Il ressort des termes de l'article L. 3141-31 du code du travail que, lorsqu'un établissement ferme pendant un nombre de jours dépassant la durée des congés légaux annuels, l'employeur est tenu de verser à son salarié, pour chacun des jours ouvrables de fermeture excédant cette durée, une indemnité qui ne se confond pas avec l'indemnité de congés, et qui ne peut être inférieure à l'indemnité journalière de congés.

Les dispositions précitées restent applicables lorsque la fermeture de l'entreprise, au-delà de la durée des congés payés est motivée par des circonstances extérieures telles que le rythme de l'activité scolaire, l'employeur ne pouvant dès lors se prévaloir du fait que la salariée ne pouvait ignorer qu'elle n'allait pas travailler pendant les périodes de fermeture de l'établissement.

Selon l'article L. 3111-1 du code du travail, les dispositions du présent livre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés.

Elles sont également applicables aux établissements publics à caractère industriel et commercial.

Il a été retenu précédemment que le contrat d'accompagnement dans l'emploi, qui est un contrat de travail de droit privé selon les termes de l'article L. 5134-24 du code du travail, avait été requalifié en contrat à durée indéterminée de droit commun. Il en résulte que ce contrat est soumis aux dispositions de l'article L. 3141-31 du code du travail, peu important les dispositions susvisées de l'article L. 3111-1 du code du travail.

Il n'est pas contesté qu'au cours de sa période d'embauche, Mme [Y] a supporté des périodes de fermeture de l'établissement dans lequel elle était affectée, d'une durée supérieure à la durée légale des congés annuels, la salariée réalisant davantage d'heures de travail que celles prévues au contrat durant les périodes d'ouverture de l'établissement, et aucune heure de travail durant les périodes de fermeture de l'établissement dépassant la durée des congés légaux annuels.

Toutefois, il est constant que la salariée a perçu chaque mois travaillé une rémunération identique correspondant à vingt heures hebdomadaires, conformément au contrat de travail.

L'employeur ne pouvant moduler la durée hebdomadaire du travail sur tout ou partie de la période couverte par le contrat conformément aux dispositions de l'article L. 5134-26 du code du travail, il a été retenu précédemment que la salariée était fondée à demander un rappel de salaire pour les heures réalisées durant les périodes d'ouverture de l'établissement dépassant la durée hebdomadaire prévue au contrat, ces heures constituant des heures complémentaires.

Ces heures complémentaires lui étant dues, il en découle que la salariée, qui a bien perçu une rémunération identique pour les heures prévues par le contrat, soit 20 heures hebdomadaires, durant les périodes de fermeture de l'établissement dépassant la durée des congés légaux annuels, ce dont il résulte que son contrat de travail n'a pas été suspendu durant ces périodes, a bien été remplie de ses droits et ne peut prétendre à l'indemnité de fermeture prévue par l'article L. 3141-31 du code du travail.

Tel n'aurait pas été le cas si l'employeur avait engagé la salariée pour une durée hebdomadaire de travail correspondant exactement au nombre d'heures réalisé durant les périodes d'ouverture de l'établissement, en calculant sa rémunération annuelle sur la seule base des heures réalisées durant les périodes d'ouverture de l'établissement, puis lissé l'ensemble de la rémunération sur l'année, afin que la salariée perçoive chaque mois une rémunération identique. Dans ce cas de figure, la salariée n'aurait pas été fondée à prétendre au paiement d'heures complémentaires, mais au paiement de l'indemnité pour fermeture de l'article L. 3141-31, ce mécanisme contractuel conduisant de facto à ne pas la rémunérer durant les périodes de fermeture dépassant la durée des congés légaux annuels.

La demande de la salariée doit être rejetée et le jugement dont appel est confirmée de ce chef.

Sur l'intervention volontaire du syndicat Sud Education :

Il résulte de l'article L. 2132-3 du code du travail que les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice et peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

Il apparaît en l'espèce que le Lycée général technologique du Grésivaudan a manqué à son obligation d'assurer des actions de formation, d'orientation professionnelle et de validation des acquis destinés à réinsérer durablement Mme [Y]. Le Lycée général technologique du Grésivaudan ayant eu recours de manière abusive au contrat d'accompagnement dans l'emploi, profitant des avantages qu'il procure à l'employeur, sans supporter l'intégralité des charges qui s'imposaient à lui en contrepartie au préjudice de la salariée qui a été maintenue dans sa situation de précarité.

Le contournement des dispositions applicables aux contrats d'accompagnement dans l'emploi ainsi mis en évidence porte directement atteinte à l'intérêt collectif de la profession.

L'intervention du Syndicat Sud Education doit donc être déclarée recevable.

Eu égard à l'ampleur de la violation des dispositions applicables au contrat d'accompagnement dans l'emploi, l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession, dont le Syndicat Sud Education assure la défense, peut être évaluée à la somme de 500 euros, somme à laquelle le Lycée général technologique du Grésivaudan doit être condamnée.

Il convient par conséquent d'infirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Le jugement dont appel est confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.

Le Lycée général technologique du Grésivaudan, partie perdante à l'instance, doit en supporter les entiers dépens et en outre être condamné à verser respectivement à Mme [Y] et au syndicat Sud Education - Académie de Grenoble la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré ce qu'il a :

- Dit que le Lycée général technologique du Grésivaudan a manqué à ses obligations de formation et d'accompagnement dans l'emploi à l'égard de Mme [J] [O], épouse [Y],

- Requalifié le contrat souscrit entre Mme [J] [O], épouse [Y], avec le Lycée général technologique du Grésivaudan en contrat à durée indéterminée de droit commun à compter du 1er novembre 2017,

- Fixé le salaire mensuel moyen brut de Mme [J] [O], épouse [Y], à la somme de 856,27 euros,

- Condamné le Lycée général technologique du Grésivaudan à payer à verser à Mme [J] [Y], née [O], les sommes suivantes :

856,27 euros au titre de l'indemnité de requalification,

856,27 euros au titre de l'indemnité de préavis,

85,62 euros au titre des congés payés afférents,

856,27 euros au titre de l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées,

- Ordonné l'exécution provisoire de l'entier jugement au sens des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,

- Condamné le Lycée général technologique du Grésivaudan aux entiers dépens de l'instance.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE le Lycée général technologique du Grésivaudan à payer au syndicat Sud Education - Académie de Grenoble la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession,

CONDAMNE le Lycée général technologique du Grésivaudan à payer à Mme [J] [Y], née [O], la somme de 600 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE le Lycée général technologique du Grésivaudan à payer au Syndicat Sud Education - Académie de Grenoble la somme de 600 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE le Lycée général technologique du Grésivaudan aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 19/03999
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;19.03999 ?
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