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17/05/2022 | FRANCE | N°19/04145

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 17 mai 2022, 19/04145


C4



N° RG 19/04145



N° Portalis DBVM-V-B7D-KGG5



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP PYRAMIDE AVOCATS



la SELARL FTN

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'

APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 17 MAI 2022





Appel d'une décision (N° RG F 18/00243)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 09 octobre 2019

suivant déclaration d'appel du 14 Octobre 2019



APPELANTE :



SELARL DOCTEUR [E] [T], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit...

C4

N° RG 19/04145

N° Portalis DBVM-V-B7D-KGG5

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP PYRAMIDE AVOCATS

la SELARL FTN

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 17 MAI 2022

Appel d'une décision (N° RG F 18/00243)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 09 octobre 2019

suivant déclaration d'appel du 14 Octobre 2019

APPELANTE :

SELARL DOCTEUR [E] [T], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

2, Place Pierre Semard- Le CRISTAL

38200 VIENNE

représentée par Me Jean-Philippe VALLON de la SCP PYRAMIDE AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE

INTIMEE :

Madame [X] [F] née [R]

née le 05 Octobre 1979 à LYON (69007)

de nationalité Française

9 allée du Taffignon

69100 SAINTE FOY LES LYON

représentée par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant, et Me Pierre PALIX, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Mars 2022,

Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, en présence d'Amandine GAUCY, assistante de justice, assistée de Valérie RENOUF, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 17 Mai 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 17 Mai 2022.

Exposé du litige :

Le 30 août 2011, Mme [F] a été embauchée par la SELARL DOCTEUR [E] [T] en qualité d'assistante dentaire qualifiée.

Le 18 novembre 2016, elle a déposé une main courante à l'encontre de son employeur.

Le 21 novembre 2016, Mme [F] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mise à pied à titre conservatoire. Le 6 décembre 2016, l'employeur lui a finalement notifié l'absence de sanction à son encontre.

Le 8 décembre 2016, la salariée a fait l'objet d'un arrêt de travail.

Le 10 janvier 2017, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste.

Le 20 janvier 2017, elle a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Le 4 février 2017, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 28 avril 2017, Mme [F] a saisi le conseil des prud'hommes de Vienne aux fins de reconnaitre qu'elle a été victime de harcèlement moral de la part de l'employeur, en obtenir réparation, demander l'annulation de son licenciement ainsi que les indemnités afférentes, et des dommages et intérêts pour licenciement vexatoire.

Par jugement en date du 9 octobre 2019, le conseil des prud'hommes de Vienne a :

Dit et jugé que la salariée a été victime de harcèlement moral ;

En conséquence,

Condamner l'employeur à lui verser la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

Dit et jugé que le licenciement pour inaptitude de la salariée est nul ;

En conséquence,

Condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

5.165,39 € bruts à titre d'indemnité de préavis ;

516,53 € bruts au titre des congés payés afférents ;

2.000 € au titre des frais irrépétibles ;

Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes suite radiation, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;

Rappelé que sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail...) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne des salaires des trois derniers mois doit être fixée à la somme de 2.582,65 € ;

Débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement prononcé dans des circonstances vexatoires et humiliantes ;

Débouté l'employeur de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

L'a condamné aux entiers dépens de l'instance.

La décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception le 9 octobre 2019.

La SELARL DOCTEUR [E] [T] a interjeté appel de la décision par déclaration en date du 6 novembre 2019.

Par conclusions en date du 13 mai 2020, la SELARL DOCTEUR [E] [T] demande à la cour d'appel de :

Réformer en toutes ses dispositions le jugement ;

Statuant à nouveau,

Constater l'absence de caractérisation d'une situation de harcèlement moral ou d'exécution déloyale du contrat de travail ;

En conséquence,

Débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

La condamner à lui verser la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles ;

La condamner aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

Réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires présentées par la salariée.

Par conclusions en réponse en date du 21 avril 2020, Mme [F] demande à la cour d'appel de :

Confirmant le jugement entrepris principalement,

Dire et juger qu'elle a été victime de harcèlement moral ;

Le reformant sur le montant,

Condamner l'employeur à lui verser la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

Subsidiairement,

Dire et juger que son contrat de travail a été exécuté de manière déloyale ;

Condamner l'employeur à lui verser la somme de 30.000 € titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Confirmant le jugement entrepris,

Annuler le licenciement ;

Le reformant sur le montant,

Condamner l'employeur à lui verser la somme de 30.991,80 € à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement ;

Le confirmant,

Condamner l'employeur à lui verser les sommes de :

5.165,30 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

516,52 € à titre de congés payés sur préavis ;

Reformant le jugement entrepris ;

Dire et juger que son licenciement a été prononcé dans les circonstances vexatoires et humiliantes ;

Condamner l'employeur à lui verser la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement prononcé dans des circonstances vexatoires et humiliantes ;

Le condamner à lui verser la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles ;

Le condamner aux entiers dépens qui comprendront ceux de première instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 janvier 2022 et l'affaire a été fixée à plaider le 8 mars 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

 

SUR QUOI :

Sur le harcèlement moral :

Moyens des parties :

Mme [F] soutient avoir été victime de harcèlement moral et expose qu'elle a été accusée à tort de vol par son employeur, qu'elle a fait l'objet d'arrêts maladie et qu'il ressort de l'avis d'inaptitude définitive rendu par le médecin du travail constatée en une seule visite, du fait que son maintien dans l'emploi était gravement préjudiciable à sa santé en raison du choc post-traumatique qu'avait représenté pour elle les accusations de vol. Elle explique qu'en réalité, elle recherchait un emploi plus proche de son domicile et a loyalement informé son employeur qu'elle allait partir et solliciter une rupture conventionnelle. Or, l'employeur l'a mal pris et refusé toute rupture conventionnelle. Par suite, elle aurait été victime d'une tentative de piégeage, où l'employeur l'a accusée d'avoir volé un objet électronique. Elle fait également valoir que le fait d'avoir commencé une procédure de licenciement pour faute grave pour une accusation de vol et de l'avoir abandonnée, participe de la notion de harcèlement moral. De plus, des erreurs et retards dans le règlement de ses salaires ont eu lieu à compter de leur conflit et au terme de son arrêt de travail, l'employeur a refusé d'organiser sa visite de reprise.

La SELARL DOCTEUR [E] [T] fait valoir que le harcèlement moral n'est pas caractérisé et fait valoir que la salariée invoque un fait isolé et qu'elle ne justifie pas de la matérialité de faits précis, répétés et concordants pouvant laisser présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral.

S'agissant de l'évènement survenu au sein du cabinet, l'employeur estimait justifier d'éléments objectifs l'ayant amené à envisager une procédure disciplinaire et une éventuelle mise à pied à titre conservatoire à savoir la disparition d'un IPad d'une commerciale intervenue au cabinet et sa découverte dans un sac appartenant à la salariée. L'employeur justifie également avoir recueilli les explications de sa salariée faute de pouvoir prouver l'imputabilité des faits et compte tenu de la contestation de la salariée, elle n'a finalement pas été sanctionnée. Mme [F] n'a jamais fait l'objet d'accusation calomnieuse ou de multiplication de procédures disciplinaires sans fondement.

Compte tenu de sa volonté de quitter l'entreprise précédemment, la salariée a fait parvenir un arrêt de travail pour maladie à compter du 8 décembre 2016, jour où elle pouvait reprendre son poste après l'entretien préalable. 7 jours après à peine, elle a obtenu une pré-visite auprès du médecin du travail. La salariée est également défaillante dans la démonstration d'une faute de l'employeur dans le paiement de son salaire.

S'agissant de l'organisation de la visite de pré-reprise, contrairement à ce que prétend la salariée, l'employeur a demandé l'organisation de celle-ci au terme de la prolongation de son arrêt de travail et la salariée n'a pas contesté son avis d'inaptitude.

En tout état de cause, la salariée ne justifie d'aucun élément médical venant étayer ses dires, le médecin du travail n'ayant reconnu aucune situation de harcèlement moral, ce dernier s'étant d'ailleurs prononcé dans le cadre d'une visite de reprise d'origine non professionnelle. De même, la salariée ne justifie pas avoir avisé l'inspection du travail. L'intégralité du personnel atteste des très bonnes relations qui existaient au sein du cabinet dentaire.

Sur ce,

Aux termes des articles L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Suivants les dispositions de l'article L 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient ensuite à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le harcèlement moral n'est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l'ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d'un salarié défaillant dans la mise en 'uvre de ses fonctions.

Les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse ne dispensent pas celle-ci d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu'elle présente au soutien de l'allégation selon laquelle elle subirait un harcèlement moral au travail.

En application des dispositions de l'article L.1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Le licenciement pour inaptitude est nul lorsque l'inaptitude trouve sa cause directe et certaine dans des actes de harcèlement moral commis par l'employeur.

En l'espèce, il est constant que Mme [F] avait annoncé à son employeur son intention de quitter l'entreprise. Ce fait est établi.

S'agissant de l'accusation de vol avec abandon des poursuites disciplinaires, Mme [F] verse aux débats une main courante, déposée le 18 novembre 2016 à 17 heures, au terme de laquelle elle explique que, récemment, elle a annoncé à son employeur qu'elle allait partir pour se rapprocher de son domicile et avait fait un essai chez un dentiste de St Genis Laval qui lui proposait une augmentation ; qu'à l'issue de la pause repas du jour avec ses collègues, son employeur l'a convoquée dans son bureau pour lui dire de rentrer chez elle car ils avaient trouvé un I phone volé dans son sac et ensuite lui a parlé d' IPad. Elle explique ignorer totalement de quoi il s'agissait et ne comprend pas pourquoi on serait allé fouiller dans son sac qui était dans son vestiaire et qu'elle n'avait jamais rien volé. L'objet aurait été rendu à la victime et l'employeur lui aurait indiqué qu'il allait faire une rupture conventionnelle. Elle précise, dans cette main courante, qu'elle va en référer aux prud'hommes.

Le Docteur [T] ne conteste pas avoir accusé Mme [F] de vol et avoir envisagé une procédure disciplinaire pouvant conduire à une éventuelle sanction ni l'avoir mise à pied à titre conservatoire, « suite à la disparition d'un iPad d'une commerciale intervenue au cabinet sa découverte dans un sac appartenant à la salariée ». Il admet avoir finalement notifié l'absence de toute sanction suite à la procédure disciplinaire faute de pouvoir prouver l'imputabilité des faits, par courrier recommandé avec accusé de réception le 6 décembre 2017 après avoir reçu ses explications.

Ce fait est établi.

S'agissant des retards de paiement de salaire, il ressort du courrier de Mme [F] à la SELARL DOCTEUR [E] [T] en date du 31 décembre 2016, qu'elle demande à l'employeur de lui adresser son salaire de décembre 2016 et lui rappelle sa bonne adresse, et du courrier du 9 janvier 2017 qu'elle n'a toujours pas été payée de son salaire du mois de décembre et de sa régularisation du mois de novembre 2016. Ce fait établi.

Mme [F] qui allègue enfin que son employeur a refusé d'organiser la visite de reprise après son arrêt de travail, verse aux débats un courrier du 31 décembre 2016 dans lequel elle demande à son employeur d'organiser sa visite de reprise pour le lundi 9 janvier 2017 et un courrier du 9 janvier 2017 aux termes duquel elle indique qu'elle n'a toujours pas reçu de courrier de convocation à la médecine de travail. Ce fait est établi.

Mme [F] établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

Il appartient dès lors à l'employeur de démontrer que les faits susvisés dont la matérialité est établie sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de l'attestation de Mme [J], assistante dentaire du cabinet et collègue de travail de Mme [F], que le 18 novembre 2016, elle a reçu un coup de téléphone de Mme [C], déléguée pharmaceutique indiquant qu'elle avait oublié son iPad sur la table de la salle d'attente et lui demandait de le mettre de côté. Elle explique que n'ayant pu trouver l'objet au lieu indiqué, elle en avait informé le Docteur [T], qui lui a demandé de chercher dans tout le cabinet, sachant qu'aucun patient n'était présent en salle d'attente. Elle précise que les recherches étant vaines à l'étage, elle les a poursuivies aux vestiaires. Le placard commun de Mme [F] et Mme [Y] était entrouvert et elle n'a eu aucun de mal à percevoir l'iPad décrit dans le sac de Mme [F].

Il est constant que le fait d'avoir fait l'objet d'une procédure disciplinaire pour des faits de vol peut légitimement avoir affecté Mme [F] dans son amour propre ainsi que vis-à-vis de ses collègues.

Toutefois, il doit être constaté que l'employeur a légitimement, au vu de la présence de l'objet volé dans le sac de Mme [F] découvert par, et donc connu de sa collègue de travail, Mme [J], entamé une procédure disciplinaire dans le cadre de son pouvoir de direction, sachant que l'ayant entendue dans ses explications, il a finalement valablement jugé ne pas détenir suffisamment éléments pour la sanctionner. Mme [F] ne démontrant par avoir fait l'objet 'd'un piégeage' de la part de son employeur comme conclu.

S'agissant du retard de paiement des salaires, il doit être noté que non seulement Mme [F] ne le démontre pas, mais qu'elle fait état le 9 janvier 2017, du non-paiement du mois de décembre 2016, soit un retard de 9 jours outre une régularisation pour novembre 2016 dont on ignore le montant, qui ne s'est visiblement pas prolongé ni répété puisqu'elle a signé son solde de tout compte dès le 10 février 2017.

En outre, la SELARL DOCTEUR [E] [T] justifie de la convocation de Mme [F] à la médecine du travail le 10 janvier 2017 à 14 heures et que Mme [F] s'y est rendue puisqu'il a été destinataire d'un fiche d'aptitude.

Mme [F] ne verse, par ailleurs, aucun élément relatif à son état de santé et à ses arrêts de travail permettant de déterminer l'existence d'un lien entre ses conditions de travail et la dégradation de celui-ci, le médecin du travail ayant par ailleurs précisé que la visite de reprise faisait suite un accident ou une maladie non professionnel.

L'employeur démontre ainsi que les faits matériellement établis par Mme [F] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Les demandes relatives au harcèlement et au licenciement doivent par conséquent être rejetées par voie de réformation du jugement déféré.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

Mme [F] alléguant à titre subsidiaire l'exécution déloyale du contrat de travail sans développer cette prétention dans ses conclusions, la cour en déduit qu'elle se fonde sur les mêmes faits que ceux évoqués au titre du harcèlement moral.

Sur ce,

Aux termes des dispositions de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'employeur doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu. Le salarié doit s'abstenir de tout acte contraire à l'intérêt de l'entreprise et de commettre un acte moralement ou pénalement répréhensible à l'égard de l'entreprise. Il lui est notamment interdit d'abuser de ses fonctions pour s'octroyer un avantage particulier.

En l'espèce, faute de justifier de manquements fautifs de la part de l'employeur, comme la cour l'a jugé, Mme [F] doit être déboutée de sa demande à ce titre.

Sur le caractère vexatoire du licenciement :

Moyens des parties :

Mme [F] soutient qu'elle est fondée à demander réparation au titre des circonstances vexatoires et humiliantes du licenciement dont elle a fait l'objet pour avoir été piégée par son employeur.

La SELARL DOCTEUR [E] [T] fait valoir que la salariée ne justifie d'aucun préjudice. En effet, elle se fonde uniquement sur un événement isolé, alors même qu'elle n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire, et qu'elle n'a pas contesté l'avis d'inaptitude du médecin.

Sur ce,

Il est de principe que le salarié licencié peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi à la condition de justifier d'une faute de l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement de nature brutale ou vexatoire et de justifier de l'existence de ce préjudice et que le licenciement soit ou non fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, Mme [F] ne démontre pas avoir été 'piégée' par son employeur, une collègue attestant avoir trouvé un objet volé dans son sac et la SELARL DOCTEUR [E] [T] ayant légitimement engagé une procédure disciplinaire à son encontre, peu important le résultat de celle-ci. Aucun fait fautif de la part de l'employeur ni préjudice distinct de Mme [F] de celui de la perte de son emploi étant justifiés, il convient de la débouter de sa demande de dommages et intérêts à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.

Sur les demandes accessoires :

Mme [F], partie perdante sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE Mme [F] recevable en son appel,

INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts au titre du caractère vexatoire du licenciement,

STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,

Y ajoutant,

DEBOUTE Mme [F] de l'ensemble de ses demandes,

DIT n'y avoir à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE Mme [F] aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Valéry CHARBONNIER, conseillère faisant fonction de Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 19/04145
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;19.04145 ?
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