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12/05/2022 | FRANCE | N°20/01284

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 12 mai 2022, 20/01284


C7



N° RG 20/01284



N° Portalis DBVM-V-B7E-KM3B



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY



la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET





AU NOM DU PEUPLE

FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022





Appel d'une décision (N° RG F18/00487)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 20 février 2020

suivant déclaration d'appel du 16 mars 2020





APPELANTE :



SAS CAREA DISTRIBUTION, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ...

C7

N° RG 20/01284

N° Portalis DBVM-V-B7E-KM3B

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 MAI 2022

Appel d'une décision (N° RG F18/00487)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 20 février 2020

suivant déclaration d'appel du 16 mars 2020

APPELANTE :

SAS CAREA DISTRIBUTION, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

23 Burospace - Route de Gisy

91573 BIEVRES CEDEX

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Lysiane KARKI de la SELAS GUYARD-NASRI, avocat plaidant au barreau d'ANGERS

INTIME :

Monsieur [B] [Z]

né le 12 avril 1984 à ROUBAIX (59)

de nationalité Française

4 rue du Centre

38360 SASSENAGE

représenté par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 mars 2022,

Madame FRESSARD, Présidente, chargée du rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE

La société CAREA DISTRIBUTION est spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros (commerce interentreprises) de bois et de matériaux de construction. Son activité se réalise sur l'ensemble du territoire français.

Le 10 octobre 2016, Monsieur [B] [Z] a été recruté par contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable régional, statut cadre. Le secteur d'activité confié à Monsieur [Z] couvrait les départements Auvergne, Rhône-Alpes et Saône et Loire.

Pour la réalisation de sa mission, en sa qualité de salarié itinérant, Monsieur [Z] disposait d'un véhicule et était soumis à un forfait annuel de 218 jours.

Monsieur [Z] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 24 janvier 2018, reporté au 1er février suivant.

Le 12 février 2018, Monsieur [Z] s'est vu notifier son licenciement pour faute grave pour, de retour d'un rendez-vous professionnel, roulant à 141 km/h sur une route limitée à 90 km/h, s'être vu immédiatement retirer son permis de conduire, immobiliser son véhicule et remettre une convocation au tribunal pour le 5 février suivant, sans en informer son employeur, contrairement à ses obligations contractuelles.

Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble le 30 mai 2018 d'une contestation de son licenciement et de demande de paiement de diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail comme de l'exécution de celui-ci, compte tenu notamment des manquements de l'employeur dans l'exécution de la convention de forfait.

Par jugement rendu le 20 février 2020, le conseil de prud'hommes de Grenoble a notamment statué en ces termes':

- DIT que la convention individuelle de forfait en jours est nulle et de nul effet,

- Dit que le licenciement de Monsieur [Z] ne repose pas sur une faute grave et qu'il est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- CONDAMNE la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [B] [Z] les sommes suivantes :

- 27.721,54€ bruts au titre e rappel de salaire afférent aux heures supplémentaires,

- 2.772,15€ bruts au titre des congés payés afférents,

- 2.000€ nets au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait,

- 1.749,99 € bruts à titre de rappel de salaire lié à la mise à pied conservatoire injustifiée et donc annulée,

- 175 € brut au titre des congés payés afférents,

- 16.656,91 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.656,59 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 1.836,05 € nets d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 11.000€ nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- RAPPELLE que les sommes à caractère salarial bénéficient de l'exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution, en application de I 'article R.1454-28 du Code du travail, étant précisé que ces sommes sont assorties des intérêts de droit à compter du jour de la demande et la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire à retenir est de 5'417,00 €,

- DEBOUTE la SAS CAREA DISTRIBUTION de sa demande reconventionnelle,

- DIT qu'une copie du jugement sera adressée par le greffe du conseil à POLE EMPLOI,

- CONDAMNE la SAS CAREA DISTRIBUTION aux dépens.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec accusé de réception; la SAS CAREA DISTRIBUTION en a relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction du 16 mars 2020.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 février 2022, la SAS CAREA DISTRIBUTION sollicite de la cour de':

- D'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Dit que :

La convention de forfait en jours était nulle et de nul effet,

Le licenciement de Monsieur [Z] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Condamner la société CAREA au paiement des sommes ci-dessus rappelées,

A titre principal :

- Ordonner à Monsieur [Z] le remboursement des sommes perçues et telles que fixées par le Conseil de prud'hommes de Grenoble, soit la somme de 42.198,65€,

- Débouter Monsieur [Z] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

A titre subsidiaire :

- Juger que les montants présentés par Monsieur [Z] au titre de sa réclamation des heures supplémentaires sont erronés et en réduire les sommes à plus juste proportion dans la limite de 4.704,21 euros,

- Ordonner à Monsieur [Z], le remboursement de la somme de 2.813,73 euros au titre des jours de réduction du temps de travail indus,

En tout état de cause :

- Ordonner à Monsieur [Z] le remboursement des sommes indument perçues par lui dans le cadre du jugement de première instance et de la décision à intervenir,

- Condamner Monsieur [Z] au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. ainsi qu'aux entiers dépens.

La société CAREA DISTRIBUTION fait valoir au soutien de ses prétentions que':

Monsieur [Z] était soumis à un aménagement du travail sous forme de forfait annuel jours. La validité de cet aménagement est soumise à l'existence d'éléments notamment de contrôle, mis en place par l'employeur et la société CAREA démontre avoir effectivement mis en place les outils nécessaires au contrôle et avoir respecté ses obligations. Le forfait annuel jours de Monsieur [Z] était valide, il n'a donc pu effectuer aucune heure supplémentaire.

Par ailleurs si les montants obtenus et présentés par Monsieur [Z] au soutien de sa demande de régularisation au titre des heures supplémentaires, parce que reposant sur des éléments pris dans leur globalité, ne peuvent être qualifié de précis, la société CAREA démontre que les résultats soumis par Monsieur [Z] sont erronés puisqu'ils intègrent des éléments exclus du temps de travail effectif.

Enfin, la suspension du permis de conduire et le comportement dangereux et persistant de ce dernier ont largement justifié la qualification de grave de la faute commise par Monsieur [Z].

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er mars 2022, M.[B] [Z] sollicite de la cour de':

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

-Dit que la convention individuelle de forfait en jours signée par Monsieur [Z] est nulle et de nul effet,

-Dit que le licenciement de Monsieur [Z] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Condamne la SAS CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [B] [Z] les sommes suivantes :

- 27 721,54 € bruts à titre de rappel de salaire afférent aux heures supplémentaires,

- 2 772,15 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 1 749,99 € bruts à titre de rappel de salaire lié à la mise à pied conservatoire injustifiée et donc annulée,

- 175,00 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 16 565,91 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.656,59 € bruts au titre des congés payés y afférents,

- 1.836,05 € nets d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'INFIRMER pour le surplus, s'agissant du quantum des indemnités allouées,

ET, statuant à nouveau,

CONDAMNER la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [Z] la somme de 10000 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre de l'exécution déloyale de la convention de forfait.

CONDAMNER la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [Z] la somme de 33000 € nets de CSG-CRDS à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les heures supplémentaires, si la Cour ne devait pas confirmer le jugement s'agissant des rappels de salaire alloués :

CONDAMNER à titre principal la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [Z] la somme de 25 392,43 € bruts à titre de rappel de salaire après déduction des RTT, outre 2 539,24 € bruts au titre des congés payés afférents.

CONDAMNER à titre subsidiaire la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [Z] la somme de 2 375,10 € bruts à titre de rappels de salaires, outre 237,51 € bruts au titre des congés payés afférents.

En tout état de cause,

DEBOUTER la société CAREA DISTRIBUTION de l'intégralité de ses demandes,

CONDAMNER la société CAREA DISTRIBUTION à verser à Monsieur [Z] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens.

Au soutien de ses prétentions le salarié fait valoir que':

Bien que soumis à une convention de forfait, il n'a pas bénéficié des garanties qui doivent y être rattachées et qui permettent de vérifier que la charge de travail qui lui est confiée est adaptée.

Ainsi il n'a bénéficié d'aucun entretien individuel annuel portant sur la charge de travail, l'organisation du travail dans l'entreprise, la rémunération ainsi que l'articulation entre l'activité professionnelle, la vie personnelle et la vie familiale, en violation des dispositions de l'article L.3121-46 du code du travail.

Par ailleurs, Monsieur [Z] travaillait largement plus que les 218 jours maximum prévus par la convention de forfait et se voyait imposer ses congés.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'audience du 02 mars 2022 avant les débats et la décision a été mise en délibéré le 12 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

I Les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail':

- Sur les demandes au titre des manquements de l'employeur dans le cadre de l'exécution de la convention de forfait en jours

Il convient de rappeler, à titre liminaire, que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles.

Il résulte, ensuite, des articles 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, L. 3121-39 du code du travail, interprété à la lumière de l'article 17, paragraphes 1 et 4 de la directive 1993/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, paragraphe 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

Depuis la loi Travail n°2016-1088 du 8 août 2016, l'article L. 3121-58 du code du travail dispose que peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l'année, dans la limite du nombre de jours fixé en application du 3° du I de l'article L. 3121-64 :

« 1° Les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés ;

2° Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées ».

L'article L. 3121-59 précise que le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire. L'accord entre le salarié et l'employeur est établi par écrit.

Un avenant à la convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être inférieur à 10 %. Cet avenant est valable pour l'année en cours. Il ne peut être reconduit de manière tacite.

L'article L. 3121-60 prévoit que l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail et l'article L. 3121-61 que lorsqu'un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, nonobstant toute clause conventionnelle ou contractuelle contraire, saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, eu égard notamment au niveau du salaire pratiqué dans l'entreprise, et correspondant à sa qualification.

L'article L. 3121-62 dispose que les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives :

« 1° A la durée quotidienne maximale de travail effectif prévue à l'article L. 3121-18 ;

2° Aux durées hebdomadaires maximales de travail prévues aux articles L. 3121-20 et L.

3121-22 ;

3° A la durée légale hebdomadaire prévue à l'article L. 3121-27 ».

Au terme de l'article L. 3121-63, les forfaits annuels en heures ou en jours sur l'année sont mis en place par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche et de L. 3121-64 du code du travail':

I - l'accord prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année détermine :

« 1° Les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, dans le respect des articles L. 3121-56 et L. 3121-58 ;

2° La période de référence du forfait, qui peut être l'année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;

3° Le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de deux cent dix-huit jours s'agissant du forfait en jours ;

4° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;

5° Les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait ».

II - l'accord autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine:

« 1° Les modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

2° Les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise ;

3° Les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion prévu au 7° de l'article L. 2242-8 ».

L'accord peut fixer le nombre maximal de jours travaillés dans l'année lorsque le salarié renonce à une partie de ses jours de repos en application de l'article L. 3121-59. Ce nombre de jours doit être compatible avec les dispositions du titre III du présent livre relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et aux jours fériés chômés dans l'entreprise et avec celles du titre IV relatives aux congés payés.

Enfin l'article L. 3121-65 dispose que':

I - A défaut de stipulations conventionnelles prévues aux 1° et 2° du II de l'article L. 3121-64, une convention individuelle de forfait en jours peut être valablement conclue sous réserve du respect des dispositions suivantes :

« 1° L'employeur établit un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié ;

2° L'employeur s'assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;

3° L'employeur organise une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération ».

II - A défaut de stipulations conventionnelles prévues au 3° du II de l'article L. 3121-64, les modalités d'exercice par le salarié de son droit à la déconnexion sont définies par l'employeur et communiquées par tout moyen aux salariés concernés. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, ces modalités sont conformes à la charte mentionnée au 7° de l'article L. 2242-17.

Et, l'article L. 3121-66 précise qu'en cas de renonciation, par le salarié, à des jours de repos en application de l'article L. 3121-59 et à défaut de précision dans l'accord collectif mentionné à l'article L. 3121-64, le nombre maximal de jours travaillés dans l'année est de deux cent trente-cinq.

L'article D. 3171-10 du code du travail précise que la durée du travail des salariés mentionnés à l'article L. 3121-58 est décomptée chaque année par récapitulation du nombre de journées ou demi-journées travaillées par chaque salarié.

Au regard des dispositions et principes ainsi rappelés, toute convention de forfait en jours doit ainsi être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Au cas d'espèce, ce sont les dispositions de l'annexe VI du 17 octobre 2000 de la CCN de la Plasturgie, au sein de son article 5.5 intitulé « Forfait Annuel en jours », qui organisent le forfait annuel en jours.

Ainsi, l'article 5-5-3-1 de l'accord du 15 mai 2013, étendu, prévoit un plafond conventionnel de 215 jours maximum de travail sur l'année civile, auxquels s'ajoute la journée de solidarité tandis que l'article 5.5.6.2 prévoit que chaque année, un entretien doit être organisé par l'employeur avec le salarié, qui peut être indépendant ou juxtaposé avec les autres entretiens (professionnel, d'évaluation,') au cours duquel doivent être abordés avec lui :

- sa charge de travail,

- l'amplitude de ses journées travaillées,

- la répartition dans le temps de son travail,

- l'organisation du travail dans l'entreprise et l'organisation des déplacements professionnels,

- l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale,

- sa rémunération,

- les incidences des technologies de communication (Smartphone'),

- le suivi de la prise des jours de repos supplémentaires et des congés.

L'article 5-5-7 - Contrôles du nombre de jours de travail ' prévoit que le forfait en jours s'accompagne d'un contrôle du nombre de jours travaillés. L'employeur est tenu d'établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées ou non travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification de ces journées ou demi-journées (jour de repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels, jours de repos supplémentaires,...). Afin de permettre à l'employeur d'établir ce décompte, le salarié renseignera mensuellement ces informations sur un support défini au sein de l'entreprise (formulaire papier, déclaration sur un intranet ou d'une manière générale sur tout support pouvant remplir cette fonction). Le support devra prévoir un espace sur lequel le salarié pourra y indiquer ses éventuelles difficultés en termes de charge de travail ou d'organisation du temps de travail.

D'une première part, M.[Z], qui soutient que la convention de forfait en jours est privée d'effet en ce que son employeur n'a pas appliqué les garanties prévues telles que rappelées ci-dessus, produit son contrat de travail qui mentionne une'«'convention individuelle de forfait établie sur une base annuelle à raison d'un maximum de 218 jours travaillés par an ['] donnant droit à en moyenne 8 à 11 jours de repos supplémentaires au salarié'».

Or, l'employeur fait valoir, sans cependant l'établir, que le surplus des droits acquis au titre du forfait annuel en jours a fait l'objet d'une indemnisation au bénéfice du salarié.

D'une seconde part, alors que M.[Z] expose n'avoir jamais bénéficié d'aucun entretien annuel portant sur sa charge de travail, l'organisation du travail dans l'entreprise, la rémunération, ainsi que l'articulation entre l'activité professionnelle, la vie personnelle et la vie familiale, l'employeur échoue à établir qu'il a effectivement respecté son obligation tirée de l'article 5-5-6-2 de la CNN.

En effet, alors que M.[Z] a été embauché le 10 octobre 2016, aucun compte-rendu d'un quelconque entretien avec son supérieur hiérarchique, M.[P], n'est versé aux débats. Sont produits, en revanche, de manière tout à fait inopérante, trois exemplaires d'entretiens professionnels au bénéfice d'autres salariés, tous postérieurs au licenciement de M.[Z], dont les pages n°3, dédiées au suivi de la «'charge annuelle de travail'» qui ne sont jamais renseignées, n'apportent aucun élément probant utile à éclairer la cour sur la situation propre du salarié intimé.

D'une troisième part, alors que M.[Z] soutient que le support, permettant au salarié de renseigner mensuellement le nombre de journées et demi-journées travaillées et prévoyant un espace sur lequel sont indiquées ses éventuelles difficultés en terme de charge de travail ou d'organisation du temps de travail, n'a jamais été mis à sa disposition, l'employeur verse aux débats des fiches intitulées «'état des absences du personnel'» renseignées mensuellement et informatiquement par M.[Z] et portant mention de sa signature.

Cependant, ces documents sont très insuffisamment renseignés pour répondre aux conditions rappelées ci-dessus à l'article 5-5-7 de la CNN, relatif aux outils de contrôle de la durée du travail du salarié soumis à une convention de forfait en jours, ce seul support ne prévoyant aucun espace sur lequel le salarié peut y indiquer ses éventuelles difficultés en termes de charge de travail ou d'organisation du temps de travail.

D'une quatrième part, M.[Z], qui soutient n'avoir pas bénéficié d'un droit à la déconnexion, produit de multiples échanges de courriels entre notamment M.[P] et lui, tôt le matin avant 7h30 ou tard le soir, après 20h et 22 h, ainsi que durant certains samedis ou dimanches.

La société produit une «'NOTE INTERNE 2016'» émanant de la DIRECTION, à destination des RESPONSABLES REGIONAUX, datée du 6 avril 2016, leur rappelant les règles à suivre «'pour l'envoi des faits marquants': envoi le vendredi soir et en aucun cas le week-end. Nous vous rappelons également que sauf urgence, le destinataire d'un mail émis en dehors des horaires habituels du travail, n'est pas tenu d'y répondre et/ou d'y donner suite avant le début de sa prochaine journée de travail.'Cordialement ».

Or, l'employeur, qui ne justifie en rien avoir porté cette note à la connaissance de M.[Z], échoue à établir, ainsi qu'il en a la charge, en l'absence de dispositions conventionnelles, qu'il a bien respecté les obligations légales mises à sa charge telles qu'elles résultent des dispositions de l'article L. 3121-65 II du code du travail qui prévoient que les modalités d'exercice par le salarié de son droit à la déconnexion sont définies par l'employeur et communiquées par tout moyen aux salariés concernés.

En conséquence, il résulte de l'ensemble de ces énonciations, par confirmation de la décision entreprise, que les manquements de l'employeur à ses obligations légales et conventionnelles dans l'exécution de la convention de forfait en jours signée avec M.[Z], ouvrent droit pour ce dernier au versement de dommages et intérêts que les premiers juges ont valablement fixé à hauteur de 2000 € au titre de l'exécution déloyale ainsi caractérisée.

- Sur les demandes au titre des heures supplémentaires

Le non-respect par l'employeur des dispositions conventionnelles relatives aux modalités d'application du forfait en jours prive ce dernier d'effet à l'égard du salarié, la convention de forfait étant dès lors inopposable à M.[Z] pendant toute la durée de sa relation de travail avec la société CAREA DISTRIBUTION.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, que l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il s'ensuit qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme alors sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Et dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Au cas particulier, M.[Z] qui affirme avoir été amené à travailler au-delà des durées maximales de travail autorisées, verse aux débats au soutien de la réalisation d'heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées,'un tableau de calcul des heures supplémentaires effectuées fondé sur les extraits de son agenda, ses notes de frais, ainsi que de nombreux mails justifiant ses horaires de travail, qui établissent avec suffisamment de précisions les heures de début et de fin de chacune des journées de travail ainsi que l'amplitude de ces journées travaillées.

Ainsi, le salarié produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies pour permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société conteste pour sa part la valeur suffisamment probante de ces documents et soumet à la cour':

- des tableaux intitulés «'extrait CRM'» pour les mois d'octobre et décembre 2016, janvier, février, juin et juillet 2017

- des tableaux de notes de frais pour les mois d'octobre et décembre 2016, et janvier, février, juin et juillet 2017

- des justificatifs de paiement de frais de restauration

- des extraits partiels d'agenda pour les journées des 20, 21, 25, 26, 27 et 28/10/2016, 09/12/2016, 30/01/2017, 03/07/2017

- un tableau de temps de travail de M.[Z] rectifié sur la base notamment de sa contestation des éléments produits par celui-ci relatifs'aux temps de trajet et à la pause déjeuner qu'elle reproche au salarié d'avoir intégrés dans ses décomptes d'heures effectuées.

S'il est constant que le temps de trajet n'est pas du temps de travail effectif et ne peut entrer dans le calcul de la durée quotidienne du travail, en revanche les kilomètres effectués au cours d'une journée de travail entre deux chantiers sont comptabilisés comme du temps de travail effectif.

Cependant l'employeur échoue à l'établir que le rapprochement du tableau présenté par le salarié avec les indications des horaires de l'agenda de Monsieur [Z], qui matérialisent les rendez-vous enregistrés et transmis par la société CAREA, laisse nécessairement présumer que Monsieur [Z] a intégré le temps de trajet pour se rendre à son premier rendez-vous et celui pour revenir à son domicile, tout en omettant de déduire les temps de pause déjeuner.

En effet, la société n'apporte aucun élément pour combattre utilement l'organisation de son travail telle que présentée par le salarié, qui bénéficiant d'un véhicule mis à sa disposition conformément stipulations du contrat de travail, sans disposer d'aucun bureau au sein de l'entreprise, travaillait à son domicile quand il n'effectuait pas de déplacement, le siège de la société étant situé à Bièvres, dans l'Essonne, le domicile du salarié à Sassenage, en Isère, et son secteur d'activité couvrant les départements en Auvergne, Rhône-Alpes et Saône et Loire.

Et, la société CAREA DISTRIBUTION, au fondement des différents documents établis par le salarié dans l'exercice de ses fonctions, qui a entrepris de recalculer la durée du travail de Monsieur [Z], grâce aux heures déclarées par celui-ci, les déplacements kilométriques qu'il a déclarés, les rendez-vous qu'il a effectués, les heures de mails reçus, en y intégrant les temps de trajet et de pause méridienne, ne produit cependant aucun élément propre, suffisamment précis, de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

C'est ainsi par une juste appréciation des éléments de l'espèce, que la cour fait sienne, que les premiers juges ont pu faire droit aux demandes chiffrées du salarié au titres des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées, telles qu'établies par M.[Z] sauf à déduire la somme indument perçue par ce dernier au titre des RTT dès lors que la convention de forfait en jours a été jugée privée d'effets à son endroit.

En conséquence, la société CAREA DISTRIBUTION est condamnée à verser à M.[Z] la somme de 25'392,43 € bruts ( 27'392,54 ' 2329,11) au titre du rappel de salaire afférent aux heures supplémentaires outre 2539,24 € bruts au titre des congés payés.

II Les demandes au titre de la rupture du contrat de travail':

- Sur la faute

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

La faute grave est définie comme celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

La charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur, qui doit prouver à la fois la faute et l'imputabilité au salarié concerné.

La procédure pour licenciement pour faute grave doit être engagée dans un délai restreint après la découverte des faits.

En vertu de l'article L 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige, est, en l'espèce, libellée dans les termes suivants':

«'Monsieur, nous vous avons reçu le 1er février 2018 pour l'entretien préalable à la mesure de licenciement pouvant aller jusqu'au licenciement pour faute grave que nous envisagions de prononcer à votre encontre. Malgré les explications que vous nous avez fournies, nous avons décidé de prononcer votre licenciement pour faute grave.

Ainsi que nous vous l'avions exposé lors de l'entretien, les motifs de licenciement sont les suivants :

Le 11 janvier 2018 après-midi, alors que vous étiez en fonction, les forces de l'ordre vous ont arrêté en raison d'un très grand excès de vitesse de plus de 50 km/h, alors que vous conduisez le véhicule de fonction.

Vous reconnaissiez à l'occasion de l'entretien :

'que l'infraction a été commise à l'occasion d'un déplacement professionnel,

'que vous roulez à 141 km au lieu de 90 km/h,

'que suite à cette infraction commise à l'occasion de vos fonctions, votre permis de conduire vous a été retiré.

De surcroît, vous n'avez pas immédiatement alerté votre hiérarchie, qui, sans nouvelles, a dû vous contacter pour avoir des informations. Ce comportement routier dangereux et imprudent ne saurait être toléré, compte tenu de l'importance des déplacements dans le cadre de vos fonctions.

Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant entre impossible votre maintien, même temporaire dans l'entreprise.

Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture.

Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versée. [']'».

Et, la société CAREA DISTRIBUTION rapporte la preuve suffisante de la faute disciplinaire reprochée à M.[Z] dans la lettre de licenciement ayant consisté en la commission d'un grave excès de vitesse, caractérisant un comportement routier dangereux et imprudent, à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, consistant notamment en des déplacements routiers, sans avoir immédiatement alerté sa hiérarchie de la perte de son permis de conduire.

En effet, l'employeur se fonde utilement au soutien de l'établissement de la faute du salarié'à l'occasion d'un déplacement professionnel sur les éléments suivants :

- l'extrait de l'agenda de M.[Z] (pièce 2.7 dernière feuille)': « 14 :00 ' 15 : 00 Estival GQ rendre une visite à M. [N] 7 AV Aristide Briand 15000 Aurillac - 15h30 arrestation », corroboré par les renseignements portés par le salarié au titre de la journée du 11/01/2018 sur le tableau de décompte du nombre d'heures travaillées et celui de l'état des km effectués à titre professionnel à l'occasion de cette journée

- l'attestation de M.[P] qui témoigne de ce que «'Le 12 janvier 2018 matin M. [Z] m'a'contacté pour m'informé qu'il avait fait un excès de vitesse le 11/01/2018 (141 km/h au lieu de 90 km/h) et qu'il était convoqué au tribunal. Il devait revenir vers moi, le 15/01/2018, il ne m'a pas contacté, le 16/01 matin toujours pas de nouvelles. Le 16/1 à 13 h j'ai contacté M.[Z] et c'est à ce moment là qu'il m'a dit avoir assumé ses Rdv du 15 et 16/01/2018'»

- le jugement du tribunal de police d'Aurillac du 5 février 2018, qui condamne M.[B] [Z] au versement d'une amende de 1000 € et à une suspension du permis de conduire pendant un mois avec exécution provisoire pour un excès de vitesse commis le 11/01/2018 (141 km/h au lieu de 90) à Neussagues en Pinatelle

- Etant rappelé que M. [Z] a été embauché en qualité de responsable commercial, avec la charge d'une zone géographique couvrant 13 départements et que l'article 7.1 de son contrat de travail, dispose que «' M.[Z] [B] déclare posséder un permis de conduire de catégorie B en cours de validité, il s'engage à prévenir immédiatement la société CAREA DISTRIBUTION de toutes suspensions ou annulations de son permis de conduire'».

Cependant, M.[Z] fait utilement valoir que la suspension de son permis de conduire, qui a été de courte durée, ne l'a pas empêché de poursuivre ses activités professionnelles et d'honorer ses rendez-vous jusqu'à sa mise à pied, puisque les 12, 15 et 16 janvier 2018 des proches, dont il produit les attestations, se sont mobilisés pour pouvoir le véhiculer.

Dès lors, si l'absence de transmission immédiate à son supérieur hiérarchique de l'information relative à la suspension de son permis de conduire, consécutive à un comportement routier dangereux à l'occasion d'un déplacement professionnel, est avérée et si le salarié a continué à réaliser sa prestation de travail sans avoir alerté la société de cette situation impactant nécessairement les conditions dans lesquelles il était en capacité d'honorer ses obligations contractuelles, l'organisation mise en place pour éviter de causer un trouble dans le fonctionnement de l'entreprise est de nature à atténuer la gravité de la faute commise par M.[Z].

Dans ces conditions, les manquements du salarié à ses obligations, en l'absence de tout passé disciplinaire, s'ils justifient la rupture du contrat de travail aux torts du salarié, ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

En conséquence, il convient de requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et d'infirmer le jugement entrepris en ce sens.

- Sur les prétentions financières afférentes à la rupture du contrat de travail':

D'une première part, dès lors que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande indemnitaire de Monsieur [B] [Z] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

D'une seconde part, eu égard à la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, M.[Z] a droit à une indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés afférents et à l'indemnité de licenciement, aucun moyen critique n'étant développé par la partie adverse sur les montants retenus par le salarié, s'agissant des modalités de calcul de ces chefs de demande.

En conséquence, il y a lieu de condamner la société CAREA DISTRIBUTION à payer à M. [B] [Z] les sommes suivantes par confirmation de la décision entreprise de ces chefs :

-1836,05 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 16'565,91 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1656,59 € bruts au titre des congés payés afférents.

- 1749,99 € bruts à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied, outre 175 € bruts au titre des congés payés afférents

Sur les demandes accessoires':

L'équité commande de condamner la société CAREA DISTRIBUTION à payer à Monsieur [B] [Z] une indemnité de procédure de 1500 euros.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la société CAREA DISTRIBUTION, partie perdante partiellement à l'instance, aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris en celles de ses dispositions ayant condamné la SAS CAREA DISTRIBUTION aux dépens et à verser à [B] [Z] les sommes suivantes':

- 2 000€ nets au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait,

- 1 749,99 € bruts à titre de rappel de salaire lié à la mise à pied conservatoire injustifiée et donc annulée,

- 175 € brut au titre des congés payés afférents,

- 16 656,91 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 656,59 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 1 836,05 € nets d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

L'INFIRME pour le surplus et y ajoutant

CONDAMNE la SAS CAREA DISTRIBUTION à verser à [B] [Z] les sommes suivantes':

- 25'392,43 € bruts au titre de rappel de salaire afférent aux heures supplémentaires,

- 2 539,24 € bruts au titre des congés payés afférents,

REQUALIFIE le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse

DEBOUTE [B] [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SAS CAREA DISTRIBUTION à verser à [B] [Z] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l'indemnité de procédure

CONDAMNE la SAS CAREA DISTRIBUTION aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 20/01284
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;20.01284 ?
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