C8
N° RG 21/01875
N° Portalis DBVM-V-B7F-K227
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
la MDPH DE LA SAVOIE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU MARDI 10 MAI 2022
Ch.secu-fiva-cdas
Appel d'une décision (N° RG 19/00094)
rendue par le tribunal des affaires de sécurité sociale de CHAMBERY
en date du 15 mars 2021
suivant déclaration d'appel du 19 avril 2021
APPELANTS :
Mme [F] [C]
née le 20 février 1972 à BERGAME (ITALIE)
16 rue du Ventier
Lanslebourg Montcenis
73480 VAL CENIS
M. [B] [K]
né le 07 novembre 1965 à MODANE (73500)
16 rue du Ventier
Lanslebourg Montcenis
73480 VAL CENIS
représentés par Me Xavier DELACHENAL de la SCP DELACHENAL DELCROIX, avocat postulant au barreau de GRENOBLE substitué par Me Katell THOUEMENT, avocat au barreau de GRENOBLE,
et par Me Olivier COSTA de la SELARL BISMUTH AVOCATS, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMEE :
La MDPH DE LA SAVOIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
110 rue Sainte Rose
73000 CHAMBERY
comparante en la personne de Mme [X] [O], régulièrement munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,
Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,
Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseiller,
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 mars 2022
Mme Isabelle DEFARGE, chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistée de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, en présence de Mme Marine PESENTI, juriste assistant, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 10 mai 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 10 mai 2022.
EXPOSE DU LITIGE
M. [B] [K] et Mme [F] [C] épouse [K] sont les parents de l'enfant [M] né le 03 janvier 2022, diagnostiqué multidys en mai 2012 (dyslexique, dysorthographique, dyscalculique, dyspraxique, dysphasique et dysgraphique) avec troubles de la concentration et troubles neuro-visuels.
Une aide à la vie scolaire mutualisée de 6 heures par semaine a été accordée pour l'enfant pendant son année de CM2.
Le 04 juin 2018 ses parents ont saisi la Maison Départementale des Personnes Handicapées de la Savoie (la MDPH) d'une demande de maintien de l'aide à la vie scolaire de l'enfant mais individualisée et à raison de 18 heures par semaine, de renouvellement de son matériel informatique, de reconnaissance de son statut d'enfant handicapé à plus de 50 % avec allocation d'éducation (AEEH) et son complément ainsi que son orientation vers un service d'éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD).
Le 21 janvier 2019 ils ont saisi le tribunal de grande instance de Lyon de recours à l'encontre des décisions de la MDPH de la Savoie du 22 novembre 2018 :
- leur refusant le bénéfice de l'AEEH pour leur enfant,
- leur refusant l'orientation de celui-ci vers un SESSAD,
- leur attribuant pour lui une aide humaine mutualisée par aide à la vie scolaire pendant sa scolarisation pour la période du 20 novembre 2018 au 31 août 2019,
- leur attribuant pour lui la mise à dispositionde matériel pédagogique adapté (ordinateur portable ou tablette) pour la même période.
Par jugement du 15 mars 2021 après consultation médicale effectuée à l'audience le pôle social du tribunal de Chambéry, en faveur duquel le tribunal de Lyon s'est dessaisi :
- a dit que la demande d'attribution de matériel pédagogique était devenue sans objet,
- a débouté les requérants de leurs recours,
- les a condamnés aux dépens.
Le 19 avril 2021 Mme [F] [C] épouse [K] et M. [B] [K] ont interjeté appel de ce jugement qui leur a été notifié le 29 mars 2021.
Au terme de leurs conclusions déposées le 11 janvier 2022 reprises oralement à l'audience ils demandent à la cour :
- de réformer la décision déférée,
statuant à nouveau,
- de dire leur recours recevables,
- d'accorder l'orientation de [M] auprès d'un SESSAD,
- de leur attribuer l'allocation d'éducation d'un enfant handicapé,
- de leur attribuer pour lui une aide humaine individualisée à hauteur de 18 heures par semaine,
- de mettre à sa disposition un matériel pédagogique adapté jusqu'à la fin de sa scolarité,
- de condamner la MDPH aux dépens.
Au terme de son mémoire en réponse déposé le 23 novembre 2021 repris oralement à l'audience la MDPH de la Savoie demande à la cour :
- de confirmer les décisions du 20 novembre 2018 de sa commission des droits et de l'autonomie relatives à l'attribution d'une aide humaine mutualisée aux élèves handicapés et du matériel pédagogique adapté,
- de rejeter la demande d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et d'orientation vers un service d'éducation spéciale et de soins à domicile,
- de débouter l(es) intéressé(s)e dans son(leur) recours.
En application de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE :
Sur la demande d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé
Selon les dispositions combinées des articles L541-1 et R.541-1 du code de la sécurité sociale toute personne qui assume la charge d'un enfant handicapé a droit à une allocation d'éducation de cet enfant, si l'incapacité permanente de celui-ci est au moins égale à 80 %.
Le taux d'incapacité est apprécié suivant le guide-barème pour l'attribution de diverses prestations aux personnes handicapées annexé au décret n° 93-1216 du 4 novembre 1993 modifiant le code de l'action sociale et des familles.
Un complément d'allocation est accordé pour l'enfant atteint d'un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l'aide d'une tierce personne. Son montant varie suivant l'importance des dépenses supplémentaires engagées ou la permanence de l'aide nécessaire.
La même allocation et, le cas échéant, son complément peuvent être alloués, si l'incapacité permanente de l'enfant, sans atteindre 80 %, reste néanmoins égale ou supérieure à 50 %,
- dans le cas où l'enfant fréquente un établissement mentionné au 2° ou au 12° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles,
ou
- dans le cas où l'état de l'enfant exige le recours à un dispositif adapté ou d'accompagnement au sens de l'article L. 351-1 du code de l'éducation ou à des soins dans le cadre des mesures préconisées par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
La prise en charge de l'enfant par un tel service ou bénéficiant de soins à domicile est celle qui est accordée soit au titre de l'assurance maladie, soit par l'Etat, soit par l'aide sociale sur décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
Les appelants se prévalent du 3ème alinéa de l'article L.341-1 précité pour soutenir que l'AEEH pouvait leur être attribuée dans la mesure où leur enfant était scolarisé au sein d'un établissement au sein duquel il bénéficiait d'un dispositif d'accompagnement.
Mais au jour de la demande [M] [K] était scolarisé en classe de 3ème au collège La Vanoise de Modane, et non dans un établissement social ou médico-social au sens des articles L.312-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-1 du code de l'éducation tel que ceux auxquels ce texte fait référence.
Il n'est pas démontré par ailleurs que des soins aient été préconisés par la commission des droits et de l'autonomie.
Les appelants soutiennent encore à l'appui de leur demande d'allocation que le taux d'incapacité présenté par leur fils est supérieur à 50 % et qu'il appartient à la MDPH de transmettre les éléments médicaux sur la base desquels elle s'est fondée pour estimer qu'il était inférieur.
Mais la juridiction de sécurité sociale de Chambéry s'est prononcée après avoir organisé à cet effet une consultation médicale.
Et le taux de 50 % d'incapacité, au sens du guide-barème applicable correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale.
Or au jour de la demande en juin 2018, [M], qui était à l'époque en 3ème générale et avait effectué un stage dans un cabinet d'expert-comptable poursuivi à mi-temps envisageait une orientation en série STMG afin de travailler en comptabilité.
Si le compte-rendu de suivi en ergothérapie du 03 octobre 2017 notait une vitesse d'écriture déficitaire et que son écriture, dans la moyenne attendue pour son âge présentait cependant une dégradation dans la durée, il était autonome avec l'utilisation d'un ordinateur et sa vitesse de frappe était nettement supérieure à sa vitesse d'écriture manuscrite.
Si ses bulletins scolaires de 3ème démontrent la fragilité de ses acquis à cette période, ils ne révèlent pas de gêne notable dans la vie sociale, ce que confirme l'évaluation effectuée au cours de son année de seconde au Lycée Paul Héroult de St-Jean de Maurienne, qui conclut qu'il est à l'aise socialement avec son matériel, qu'il se sent bien dans sa classe, est intégré et à sa place et que sa scolarisation ne pose pas de problème.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M.et Mme [K] de leur demande d'allocation d'éducation pour leur enfant [M].
Sur la demande d'orientation en SESSAD
Cette demande ne figurait pas au formulaire renseigné par Mme [K] le 15 mai 2018, celle-ci ayant rempli la case ' demande relative à un parcours de scolarisation et/ou de formation avec ou sans accompagnement par un établissement ou service médico-social' en indiquant seulement 'demande de prise en charge des transports pour se rendre au Lycée et (au séances de) rééducation et médecin. Demande de prise en charge des frais d'internat'.
De plus [M] [K] étant désormais âgé de 20 ans, son orientation en SESSAD n'est pas plus possible qu'elle ne l'était en juin 2018 alors qu'il était déjà âgé de plus de 16 ans.
Le jugement sera également confirmé de ce chef.
Sur la demande d'aide humaine individualisée
Selon l'article D. 351-16-4 du code de l'éducation, l'aide individuelle a pour objet de répondre aux besoins d'élèves qui requièrent une attention soutenue et continue, sans que la personne qui apporte l'aide puisse concomitamment apporter son aide à un autre élève handicapé.
Elle est accordée lorsque l'aide mutualisée ne permet pas de répondre aux besoins d'accompagnement de l'élève handicapé.
Pour demander 'le maintien de la présence de l'AVS INDIVIDUALISEE 18h/semaine' pour épauler l'enfant dans les cours et les devoirs, Mme [K] n'a pas démontré en quoi l'aide humaine mutualisée déjà accordée s'était révélée insuffisante à cet égard.
Le jugement sera en conséquence encore confirmé de ce chef.
Sur la mise à disposition du matériel pédagogique adapté
Le matériel pédagogique adapté a été attribué suite à la demande du 04 juin 2018, jusqu'au 31 août 2019, et cette attribution a été renouvelée en dernier lieu jusqu'au 31 août 2021, fin de l'année de terminale.
La MDPH indique sans être contredite que cette attribution a été prolongée le 12 mai 2020 jusqu'en 2022.
L'appel est donc sans objet de ce chef.
M.et Mme [K] devront supporter les dépens de l'instance en application de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt rendu contradictoirement, publiquement par mise à disposition au greffe après en avoir délibéré conformément à la loi
Confirme le jugement en toutes ses dispositions
Y ajoutant,
Déclare sans objet la demande d'attribution de matériel adapté
Condamne M. [B] [K] et Mme [F] [C] épouse [K] aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président et par M. OEUVRAY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Conseiller