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21/01/2021 | FRANCE | N°18/03337

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 21 janvier 2021, 18/03337


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N° RG 18/03337 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JUEW



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :









Me Valérie PALLANCA



Me Michel PICCAMIGLIO





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 21 JANVIER 2021







Appel d'une décision (N° RG 18/00018)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 25 juin 2018

suivant déclaration d'appel du 24 Juillet 2018





APPELANTE :



SCEA DU MAS DE [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal en exerc...

FB

N° RG 18/03337 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JUEW

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Valérie PALLANCA

Me Michel PICCAMIGLIO

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 21 JANVIER 2021

Appel d'une décision (N° RG 18/00018)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 25 juin 2018

suivant déclaration d'appel du 24 Juillet 2018

APPELANTE :

SCEA DU MAS DE [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Valérie PALLANCA, avocat au barreau de VIENNE

INTIMÉE :

Mademoiselle [I] [G] [N]

née le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Michel PICCAMIGLIO, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

M. Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Sarah DJABLI, Greffier placé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Novembre 2020,Monsieur BLANC, Conseiller est entendu en son rapport.

Les parties ont été entendues en leurs observations et plaidoiries.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE :

Madame [I]-[G] [N] a été engagée par la SCEA DU MAS DE [Localité 4] selon contrat de travail à durée déterminée du 3 janvier 2017 pour des travaux saisonniers sur la période du 2 janvier 2017 au 30 juin 2017 en qualité d'animatrice coefficient 109 de la convention collective nationale des centres équestres à temps partiel selon un horaire hebdomadaire de 17h30.

L'exemplaire du contrat produit par la SCEA DU MAS DE [Localité 4] comporte une rayure de la date du 2 janvier 2017 avec la mention manuscrite d'une date du 3 janvier 2017 et en marge la signature du seul employeur étant relevé que la déclaration préalable à l'embauche produite précise le 2 janvier 2017 comme date d'embauche.

Un avenant a été régularisé le 30 juin 2017 avec une prolongation du contrat jusqu'au 31 décembre 2017 inclus.

Madame [I]-[G] [N] a été placée à compter du 7 septembre 2017 en arrêt de travail pour accident du travail en définitive non reconnu par la MSA d'après un courrier du 17 novembre 2017.

Par courrier en date du 24 octobre 2017, Madame [I]-[G] [N] a pris acte de la rupture de son contrat aux torts de son employeur en lui reprochant divers manquements.

Madame [I]-[G] [N] a saisi le Conseil de Prud'hommes de BOURGOIN-JALLIEU le 24 janvier 2018 pour solliciter notamment la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la requalification du temps partiel en temps plein, une indemnité pour travail dissimulé et qu'il soit jugé que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 25 juin 2018, le Conseil de Prud'hommes de BOURGOIN-JALLIEU a :

- requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame [I] [G] [N] en contrat de travail à temps complet avec effet rétroactif au 03 janvier 2017,

- requalifié le contrat de travail à durée déterminée de Madame [I] [G] [N] en contrat de travail à durée indéterminée,

- dit et jugé que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par madame [I] [G] [N] n'est pas fondée,

- dit et jugé que la prise d'acte de rupture du contrat de travail produits les effets d'une démission,

- condamné la SCEA MAS DE [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [I] [G] [N] les sommes de :

- 5351,04 euros de rappel de salaire,

- 535 euros au titre des congés payés afférents,

- 116,59 euros au titre de la retenue injustifiée de salaire sur le solde de tout compte,

- 1480,26 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée,

- 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la SCEA DU MAS DE [Localité 4] la rectification de l'attestation destinée à PÔLE EMPLOI

- rappelé qu'est exécutoire de plein droit à titre provisoire le paiement des sommes suivantes :

- 1480,26 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée,

- 5351,04 euros de rappel de salaire,

- 535 euros au titre des congés payés afférents,

- 116,59 euros au titre de la retenue injustifiée de salaire sur le solde de tout compte,

- débouté Madame [I] [G] [N] de ses autres demandes, fins et conclusions,

- débouté la SCEA DU MAS DE [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens,

La décision a été notifiée par le greffe par LRAR dont l'accusé de réception a été signé le 27 juin 2018 par Madame [I]-[G] [N] et le 28 juin 2018 par la SCEA DU MAS DE [Localité 4].

Par déclaration en date du 24 juillet 2018, la SCEA DU MAS DE [Localité 4] a interjeté appel à l'encontre de ladite décision.

La SCEA DU MAS DE [Localité 4] s'en est remise à des conclusions transmises le 11 avril 2019 et entend voir :

- Réformer le jugement en ce qu'il a requalifié le contrat de travail de Mme [N] en contrat de travail à temps plein avec effet rétroactif au 3 janvier 2017 et à durée indéterminée,

- Dire et Juger que le contrat de travail de travail de Mme [N] est un contrat à durée déterminée et à temps partiel,

- Le confirmer pour le surplus,

- Débouter Madame [N] de l'intégralité de ses demandes,

- Condamner Madame [N] à la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

Madame [I]-[G] [N] s'en est rapportée à des conclusions remises le 15 janvier 2019 et souhaite voir :

Vu les dispositions légales et la jurisprudence susvisées ;

Vu les pièces versées aux débats par Madame [I]-[G] [N] ;

Vu le Jugement du Conseil de Prud'hommes de BOURGOIN-JALLIEU en date du 25 juin 2018 ;

- CONFIRMER le Jugement entrepris en ce qu'il a :

Requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame [N] en contrat de travail à temps complet avec effet rétroactif au 3 janvier 2017 ;

Requalifié le contrat de travail de Madame [N] en contrat de travail à durée indéterminée ;

Condamné la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [N] les sommes suivantes :

351,04 euros à titre de rappel de salaire outre 535euros au titre des congés payés afférents ;

116,59 euros au titre de la retenue injustifiée de salaire sur le solde de tout compte ;

1480,26 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat du contrat de travail à durée déterminée ;

1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Débouté la SCEA DU MAS DE [Localité 4] du surplus de ses demandes ;

Ordonné la rectification des documents de fin de contrat ;

- REFORMER le jugement entrepris pour le surplus et statuant à nouveau :

- DIRE et JUGER que la SCEA DU MAS DE [Localité 4] a exécuté le contrat de travail de Madame [N] de manière fautive et déloyale ;

- DIRE et JUGER que l'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'heures sur les bulletins de paie est constituée ;

-DIRE et JUGER bien fondée la prise d'acte aux torts exclusifs de l'employeur intervenue le 24 octobre 2017, qui produit dès lors les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Par conséquent :

- CONDAMNER la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [N] les sommes suivantes :

8881,56 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé ;

5000 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des manquements de l'employeur au cours de l'exécution du contrat de travail à l'origine de la détérioration de l'état de santé de la salariée ;

1480,26 euros euros nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures sus-visées.

La clôture a été prononcée le 1er octobre 2020.

EXPOSE DES MOTIFS :

Sur la demande de requalification du temps partiel en temps plein :

L'article L 3123-6 modifié par la loi n°2016-1088 du 8 août 2018 dispose que :

Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.

Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif conclu en application de l'article L. 3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

L'avenant au contrat de travail prévu à l'article L. 3123-22 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d'heures peuvent être accomplis delà de la durée fixée par le contrat.

L'absence de mention de la durée du travail et de sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps plein et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

Au cas d'espèce, le contrat à temps partiel signé le 3 janvier 2017 indique uniquement le volume horaire de 17h30 hebdomadaire de travail mais ne comporte aucune précision sur la répartition des horaires entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

Il est uniquement fait référence au titre des horaires de travail à l'horaire collectif affiché dans l'entreprise.

Le temps partiel est dès lors irrégulier avec une présomption de temps plein.

La SCEA DU MAS DE [Localité 4] ne parvient pas à renverser cette présomption en justifiant que sont remplies les conditions cumulatives de preuve de la durée exacte hebdomadaire convenue et que Madame [N] était en mesure de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'était pas tenue de se tenir constamment à la disposition de son employeur en ce que :

- les plannings produits ne sont jamais signés par Madame [N] mais pour certains par d'autres salariés ou par l'employeur ou ne sont pas signés. L'employeur ne justifie aucunement des conditions effectives d'information desdits plannings affirmant sans le démontrer qu'ils étaient affichés dans le bureau, sans préciser le délai de prévenance et établir que Madame [N] en aurait pris effectivement connaissance. Surtout, les propres pièces produites par la SCEA DU MAS DE [Localité 4] mettent en évidence que ces plannings ont manifestement été établis pour les besoins de la cause a posteriori puisqu'elle produit en pièce n°8 un SMS qu'elle a adressé à Madame [N] le dimanche 3 septembre 2017 l'informant des horaires pour le lendemain de 8h à 12h et de 14h à 18h alors qu'il est produit un planning à partir du 4 septembre 2017 avec des horaires de 8h à 12 h du lundi au mercredi. De manière superfétatoire, alors que les plannings produits mentionnent des permanences assurées le dimanche par un dénommé [P], Madame [N] produit un échange de SMS avec Monsieur [P] [S] du 27 mars 2018 aux termes desquels celui-ci assure n'avoir jamais travaillé le dimanche car « il était trop cher »,

- la SCEA DU MAS DE [Localité 4] ne démontre aucunement qu'elle aurait remis à la salariée un projet d'avenant à son contrat de travail le 3 septembre 2017 prévoyant un passage à temps plein que la salariée aurait refusé de signer puisque la copie d'écran de SMS produite en pièce n°8 n'évoque aucunement un avenant mais des horaires de travail, soit un planning. Les pièces n°3 et 6 de Madame [N] mettent en évidence une tentative maladroite de l'employeur de régulariser après coup une prétendue proposition d'avenant le 3 septembre 2017, en adressant le 8 octobre un MMS avec comme commentaire 't'es horaires de la semaine' puis un autre SMS le 15 octobre 2017 prétextant un prétendu bug du téléphone ayant conduit à ce que le message du 8 octobre 2017 aurait été celui qui devait être envoyé le 3 septembre 2017 et diverses explications sur une proposition d'avenant refusé résultant des seules affirmations de l'employeur, la Cour observant que les SMS d'octobre 2017 interviennent après que le conflit entre les parties se soit accentué suite à la déclaration d'accident du travail du 7 septembre 2017 par la salariée et à son arrêt maladie subséquent,

- le fait que Madame [N] ait pu exercer en parallèle une activité d'esthéticienne est un moyen inopérant puisque cela ne prouve pas pour autant qu'elle pouvait prévoir son rythme de travail au sein des haras et ce d'autant, qu'elle justifie de sa radiation du registre des métiers au 31 décembre 2016 et que les documents produits par la SCEA DU MAS DE [Localité 4] n'émanent pas d'un registre officiel mais d'une société commerciale de sorte que des erreurs sont possibles et en tout état de cause ont trait à la fermeture d'un établissement. Outre qu'elles n'établissent aucunement que Madame [N] était en mesure de prévoir son rythme de travail mais font état d'un comportement correspondant à un abandon de poste ou à des absences non autorisées, les attestations de Messieurs [V] [H] et [D] [Z] sont considérées par la Cour comme dépourvues de valeur probante comme l'ensemble des attestations produites par l'employeur dès lors qu'il est mis en évidence que la gérante SCEA DU MAS DE [Localité 4] a rédigé des modèles d'attestations à plusieurs salariés de l'entreprise dans des conditions incompatibles avec l'article 202 du code de procédure civile impliquant que leur auteur atteste de faits auxquels il a assistés ou dont il a personnellement été témoin, sur lesquelles certains sont depuis revenus. La Cour relève par ailleurs qu'un procès-verbal a été dressé par l'inspection du travail et transmis au parquet,

- aucune conséquence ne peut davantage être tiré du fait que Madame [N] ait pu travailler les fins de semaine à la discothèque LE GLAM'S CLUB puisque cela ne démontre aucunement qu'elle connaissait par avance ses horaires de travail à la SCEA DU MAS DE [Localité 4] et ce d'autant, qu'il s'agit d'un emploi nocturne et ne s'exerçant pas tous les jours de la semaine.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame [I] [G] [N] en contrat de travail à temps complet avec effet rétroactif au 3 janvier 2017, condamné la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [N] la somme de 5351,04 euros à titre de rappel de salaire, outre celle de 535 euros au titre des congés payés afférents, sauf à préciser qu'il s'agit de sommes brutes, la Cour observant au demeurant que dans le dispositif de ses conclusions qui seule lie la Cour, la SCEA DU MAS DE [Localité 4] n'a demandé l'infirmation du jugement entrepris que sur les requalifications à temps plein et en contrat à durée indéterminée et la confirmation du surplus, soit notamment et de manière contradictoire des condamnations au titre du rappel de salaire et des congés payés afférents.

Sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :

L'article L 1242-2 du code du travail prévoit que :

Sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :

(')

3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

Au cas d'espèce, le contrat de travail à durée déterminée signé le 3 février 2017 avec un terme au 30 juin 2017 a fait l'objet d'un avenant jusqu'au 31 décembre 2017.

Le recours au contrat à durée déterminée est motivé par la réalisation de travaux saisonniers.

Madame [N] objecte à juste titre qu'il ne saurait y avoir de travaux saisonniers pour un emploi occupé pendant toute l'année, étant relevé que la SCEA DU MAS DE [Localité 4] reste taisante dans ses conclusions d'appel sur la critique du jugement de première instance et les motifs retenus.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et accordé une indemnité de requalification à Madame [I]-[G] [N] de 1480,26 euros sauf à préciser qu'il s'agit d'une somme nette.

Sur le travail dissimulé :

Au visa de l'article L 8221-5 du code du travail, l'élément matériel du travail dissimulé ayant consisté d'une part à ne pas rémunérer certaines heures de travail et à ne pas les faire figurer sur les bulletins de salaire est établi au vu de la requalification du temps partiel en temps plein et à raison du fait que la SCEA DU MAS DE [Localité 4] a consenti à Madame [N] divers avantages en nature, notamment un prix réduit pour la pension de son cheval ainsi qu'un logement de fonction.

L'élément intentionnel de la dissimulation des heures travaillées et non payées ainsi que des avantages en nature non déclarés est également démontré puisqu'il résulte des propres déclarations du gérant de la SCEA DU MAS DE [Localité 4] lors de l'enquête administrative suite à la déclaration d'accident du travail dans les termes suivants :

« vous évoquez un chalet qu'en est-il '

Nous lui avons mis à disposition gratuitement un chalet qui se trouve juste à côté du centre. Cela fait une surveillance et ça nous arrange d'avoir quelqu'un sur place. Elle ne payait pas de loyer mais seulement les charges. En contrepartie nous lui demandons de faire un tour le soir pour voir si toute les lumières sont bien éteintes.

Vous parlez du cheval d'[I], payait-elle une pension '

Non. C'est comme pour son logement, nous ne lui faisons rien payer, c'est une petite jeune qui n'a pas beaucoup de moyen et nous essayons de l'arranger. Elle montant quelques chevaux en plus, ça compensait ».

Des avantages en nature pour le logement et la pension sont-ils mentionnés sur les fiches de paye de la salariée '

Non. »

La Cour observe également que cet entretien de la MSA avec l'employeur a eu lieu le 9 octobre 2017 à 14h30, soit le lendemain du prétendu bug téléphonique ayant consisté d'après une version non crédible de l'employeur et n'étant étayée par aucune donnée technique, à envoyer le dimanche 8 octobre 2017 un MMS à Madame [N] avec ses horaires de la semaine mettant en évidence une semaine de 43 heures, qui aurait dû être expédié le dimanche 3 septembre 2017 à la suite du SMS effectivement reçu par la salariée lui indiquant des horaires pour le lendemain de 8h à 12h et de 14h à 18h différents de ceux déclarés au préposé de la MSA.

L'élément intentionnel du travail dissimulé est dès lors d'autant plus démontré par ce stratagème pour tenter de dissimuler les horaires effectivement réalisés par la salariée.

Infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [I]-[G] [N] la somme de 8881,56 euros nets à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur la retenue sur salaire sur le solde de tout compte :

le Conseil de Prud'hommes a fait droit à la demande de Madame [N] au titre de la retenue sur salaire sur le solde de tout compte en condamnant la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à lui payer à ce titre la somme de 116,59 euros.

En appel, au visa de l'article 954 du code de procédure civile, cette dernière stigmatise la mauvaise foi alléguée de Madame [N] dans les motifs de ses conclusions mais demande la confirmation du jugement à ce titre dans le dispositif, qui seul lie la Cour, tout comme d'ailleurs Madame [N].

Il s'ensuit que le jugement est purement et simplement confirmé à ce titre.

Sur la prise d'acte :

La prise d'acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu'il reproche à son employeur.

Elle n'est soumise à aucun formalisme en particulier mais doit être adressée directement à l'employeur.

Elle met de manière immédiate un terme au contrat de travail.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais ils doivent de surcroît être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

A défaut, la prise d'acte est requalifiée en démission.

Pour évaluer si les griefs du salarié sont fondés et justifient que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement, les juges doivent prendre en compte la totalité des reproches formulés par le salarié et ne peuvent pas en laisser de côté : l'appréciation doit être globale et non manquement par manquement.

Par ailleurs, il peut être tenu compte dans l'appréciation de la gravité des manquements de l'employeur d'une éventuelle régularisation de ceux-ci avant la prise d'acte.

En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l'employeur, c'est au salarié, et à lui seul, qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur. S'il n'est pas en mesure de le faire, s'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission.

Lorsque la prise d'acte est justifiée, elle produit les effets selon le cas d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul de sorte que le salarié peut obtenir l'indemnisation du préjudice à raison de la rupture injustifiée, une indemnité compensatrice de préavis ainsi que l'indemnité de licenciement, qui est toutefois calculée sans tenir compte du préavis non exécuté dès lors que la prise d'acte produit un effet immédiat.

Par ailleurs, le salarié n'est pas fondé à obtenir une indemnité à raison de l'irrégularité de la procédure de licenciement.

En l'espèce, Madame [N] n'établit pas que les consorts [C], gérants de la SCEA DU MAS DE [Localité 4], aient pu tenir à son égard des propos déplacés et insultants d'après les pièces qu'elles visent et qui concernent d'autres salariés.

De plus, elle n'explicite pas de manière suffisante en fait et surtout en droit ce qu'elle entend par violation des dispositions en matière de repos, la Cour étant laissée dans l'incapacité de savoir s'il s'agit du repos hebdomadaire ou du repos journalier.

Elle ne précise pas non plus de quel diplôme, elle n'aurait pas été titulaire qui l'aurait empêché d'effectuer des accompagnements de balades à cheval avec des clients.

En revanche, il a été vu précédemment que l'employeur a gravement et durablement méconnu le temps partiel de la salariée et a commis des faits de travail dissimulé multiples, tant s'agissant d'heures travaillés que davantage en nature non déclarés, lesdits manquements n'étant absolument pas régularisés au jour de la prise d'acte le 24 octobre 2017.

La gravité des manquements et l'absence de toute régularisation empêchaient la poursuite du contrat de travail si bien qu'infirmant le jugement entrepris, il convient de dire que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [I]-[G] [N] selon courrier du 24 octobre 2017 est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts de la SCEA DU MAS DE [Localité 4].

En réparation du préjudice nécessairement subi par la perte injustifiée de l'emploi, il lui est alloué la somme de 1480,26 euros nets à titre de dommages et intérêts.

Par ailleurs, au vu du préjudice moral avec des répercutions sur sa santé attestées par les éléments médicaux produits aux débats, il convient de lui accorder la somme de 3000 euros nets de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à raison des manquements commis par l'employeur dans l'exécution de son contrat de travail, Madame [N] étant déboutée du surplus de sa demande de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure de 1000 euros allouée en première instance à Madame [I]-[G] [N] et de lui accorder une indemnité complémentaire de procédure de 1500 euros en cause d'appel.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la SCEA DU MAS DE [Localité 4], partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour,

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire après en avoir délibéré, conformément à la loi :

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- requalifié le contrat de travail à temps partiel de Madame [I] [G] [N] en contrat de travail à temps complet avec effet rétroactif au 03 janvier 2017,

- requalifié le contrat de travail à durée déterminée de Madame [I] [G] [N] en contrat de travail à durée indéterminée,

- condamné la SCEA DU MAS DE [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [I] [G] [N] les sommes de :

- 5351,04 euros de rappel de salaire, sauf à préciser qu'il s'agit d'une somme brute,

- 535 euros au titre des congés payés afférents, sauf à préciser qu'il s'agit d'une somme brute,

- 116,59 euros au titre de la retenue injustifiée de salaire sur le solde de tout compte, sauf à préciser qu'il s'agit d'une somme brute,

- 1480,26 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée, sauf à préciser qu'il s'agit d'une somme nette,

- 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- ordonné à la SCEA DU MAS DE [Localité 4] la rectification de l'attestation destinée à PÔLE EMPLOI

- débouté la SCEA DU MAS DE [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [I]-[G] [N] selon courrier du 24 octobre 2017 est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts de la SCEA DU MAS DE [Localité 4].

CONDAMNE la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [I]-[G] [N] les sommes suivantes :

- huit mille huit cent quatre-vingt-un euros et cinquante-six centimes (8881,56 euros) nets à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- trois mille euros (3000 euros) nets de dommages et intérêts au titre des manquements de l'employeur,

- mille quatre cent quatre-vingt euros et vingt-six centimes (1480,26 euros) nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

DEBOUTE Madame [I]-[G] [N] du surplus de sa demande indemnitaire.

CONDAMNE la SCEA DU MAS DE [Localité 4] à payer à Madame [I]-[G] [N] une indemnité complémentaire de procédure de 1500 euros.

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la SCEA DU MAS DE [Localité 4] aux dépens de première instance et d'appel

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 18/03337
Date de la décision : 21/01/2021

Références :

Cour d'appel de Grenoble 13, arrêt n°18/03337 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-21;18.03337 ?
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