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15/12/2020 | FRANCE | N°17/00441

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 15 décembre 2020, 17/00441


JD



N° RG 17/00441



N° Portalis DBVM-V-B7B-I3SD



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Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL ACO





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE

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CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 15 DECEMBRE 2020

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 20131012)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 08 décembre 2016

suivant déclaration d'appel du 10 janvier 2017



APPELANTE :



URSSAF RHONE ALPES - SITE DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant lég...

JD

N° RG 17/00441

N° Portalis DBVM-V-B7B-I3SD

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL ACO

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 15 DECEMBRE 2020

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 20131012)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 08 décembre 2016

suivant déclaration d'appel du 10 janvier 2017

APPELANTE :

URSSAF RHONE ALPES - SITE DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

SA LE DAUPHINE LIBERE, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Philippe THIVILLIER de la SELARL THIVILLIER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

M. Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,

M. Jérôme DIÉ, Magistrat Honoraire,

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 octobre 2020

M. [E] DIE, chargé du rapport, et Mme Magali DURAND-MULIN ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistés de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 15 décembre 2020, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 15 décembre 2020.

La société Le Dauphiné Libéré exploite une entreprise de presse. Elle dispose de 32 établissements et s'acquitte de ses obligations auprès de l'URSSAF de Rhône-Alpes selon les modalités du versement en un lieu unique.

Elle a fait l'objet d'un contrôle diligenté sur l'ensemble de ses établissements par des inspecteurs du recouvrement de l'URSSAF de l'Isère, aux droits de laquelle vient désormais l'URSSAF de Rhône-Alpes, pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010.

Une lettre d'observations en date du 12 octobre 2011 lui fut adressée comportant 22 chefs de redressement pour un total de 759.154 €.

Par lettre recommandée du 7 novembre 2011, la société Le Dauphiné Libéré admit certains chefs de redressement et formula diverses remarques à la suite desquelles les inspecteurs du recouvrement ramenèrent le redressement à 694.057 €.

La société Le Dauphiné Libéré reçut notification d'une mise en demeure, en date du 15 décembre 2011, d'avoir à payer un total de 800.522 € en contributions et majorations de retard.

Le 10 janvier 2012, elle saisit la commission de recours amiable de l'URSSAF en contestant la validité de la mise en demeure et les points 4, 6, 13 et 22 de la lettre d'observations.

Par décision du 25 juillet 2013, la commission de recours amiable ramena le redressement à hauteur de 351.834 € en cotisations.

Le 9 septembre 2013, la société Le Dauphiné Libéré introduisit un recours contentieux contre le rejet partiel de sa réclamation.

Par jugement en date du 8 décembre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble statua dans les termes suivants :

« Déclare recevable le recours formé par la SA LE DAUPHINE LIBERE à l'encontre de la décision de recours amiable.

Déclare irrecevables les contestations relatives aux chefs de redressement portant sur la taxe sur les contributions patronales finançant la prévoyance complémentaire et sur la C.S.G. et la C.R.D.S. sur la part patronale aux régimes de prévoyance complémentaires.

Annule la mise en demeure du 15 décembre 2011.

Annule le chef de redressement réduction forfaitaire spécifique pour les salariés travaillant en atelier de nuit à hauteur de 150.462 € ;

Confirme le chef de redressement tenant aux allocations compensatrices versées dans le cadre du plan de modernisation sociale ;

Déboute la SA DAUPHINE LIBERE de sa demande de crédit au titre de l'exonération pour sa prime mobilité.

Condamne la SA LE DAUPHINE LIBERE à payer à l'URSSAF RHONE ALPES venant aux droits de l'URSSAF de l'Isère la somme de 132.023 € au titre des cotisations, outre les majorations de retard sur cette somme à recalculer.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires. »

Le 10 janvier 2017, L'URRSAF de Rhône-Alpes interjeta régulièrement appel.

A l'audience, la Cour met dans les débats la question de la recevabilité de la demande de la société Le Dauphiné Libéré à entendre condamner l'URSSAF à lui rembourser diverses sommes.

L'URSSAF de Rhône-Alpes fait oralement développer ses dernières conclusions numérotées 2 et parvenues le 19 novembre 2019. Elle conteste la recevabilité des demandes que la société Le Dauphiné Libéré n'a pas soumises à la commission de recours amiable ou aux premiers juges. Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris pour :

- valider la mise en demeure du 15 décembre 2011 ;

- confirmer les chefs de redressement relatifs à la déduction forfaitaire spécifique pour les travailleurs en atelier de nuit, et aux allocations compensatrices versées dans le cadre du plan de modernisation sociale ;

- débouter la société Le Dauphiné Libéré de sa demande de crédit au titre de l'exonération pour la prime de mobilité ;

- condamner la société Le Dauphiné Libéré à payer la somme de 218.389 € au titre des cotisations et majorations de retard restant dues, ainsi que 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Le Dauphiné Libéré fait oralement reprendre ses dernières conclusions numérotées 3 et parvenues le 6 décembre 2019 en réponse et au soutien d'un appel incident. Elle demande à la Cour :

« 1°/ Sur la forme du contrôle

1.1°/ A titre principal

Vu les articles L. 123-11 et R. 123-40 du Code de Commerce

Vu les articles R. 243-6-1, R. 243-59, R. 243-59-1, R. 243-59-2

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a annulé la mise en demeure ;

- CONDAMNER en conséquence l'URSSAF RHONE-ALPES à rembourser au

Dauphiné Libéré les sommes de :

- 361.968,00 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2012 ;

- 132.023,00 € avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2017.

1.2°/ A titre subsidiaire

Vu les articles L. 2333-64 à 75 et D.2531-15 du Code Général des Collectivités Territoriales

Vu la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 et son article 5 ' III

Vu la jurisprudence

Vu l'article L. 351-1 du Code de la Construction et de l'Habitat

Vu la décision du Conseil Constitutionnel n° 2014-706 DC du 18 décembre 2014

- CONFIRMER le jugement ce qu'il a annulé la mise en demeure ;

- CONDAMNER en conséquence l'URSSAF RHONE-ALPES à rembourser au

Dauphiné Libéré les sommes de :

- 17.587,00 € au titre du versement transport ;

- 46.648,00 € au titre des cotisations chômage et AGS ;

- 3.098,00 € au tire de la contribution FNAL

avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2012

2°/ Sur les chefs de redressement

Sur la déduction forfaitaire spécifique pour les salariés travaillant en atelier de nuit :

Vu l'article R. 243-59 du Code de la Sécurité Sociale

Vu la jurisprudence :

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a annulé le redressement opéré sur la déduction forfaitaire spécifique pour les salariés travaillant en atelier de nuit ;

- CONDAMNER l'URSSAF RHONE ALPES à rembourser au Dauphiné Libéré la somme de 150.462,00 € avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2012 ;

Sur les allocations compensatrices versées dans le cadre du plan de modernisation sociale

Vu l'article L. 1233-3 (nouvelle codification) relatif à la définition du licenciement économique

Vu l'article L.1233-8 (nouvelle codification) du Code du travail relatif à la procédure d'information et de consultation des instances de représentation du personnel en matière de

licenciement collectif pour motif économique ;

Vu l'article L.1233-45 (nouvelle codification) du Code du travail relatif à la priorité de réembauchage ;

Vu les articles L. 1233-63 et suivants relatifs au plan de sauvegarde de l'emploi

Vu la jurisprudence

Vu l'article 135 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificatives

Vu la déclaration commune des partenaires sociaux relative à la modernisation des entreprises de la presse quotidienne régionale du 2 novembre 2005 ;

Vu l'article 1 du Décret n° 2006-657 du 2 juin 2006 relatif à la cessation d'activité de certains salariés relevant de conventions collectives de la presse quotidienne régionale te de la presse départementale pris en application de l'article 135 susvisé ;

Vu l'accord de méthode sur la mise en oeuvre du plan de modernisation sociale des entreprises de la presse quotidienne régionale

Vu l'avenant technique à l'accord de méthode sur la mise en oeuvre du plan de modernisation des entreprises de PQR

Vu l'article 80duodecies du Code Général des Impôts

- INFIRMER le jugement en ce qu'il a confirmé le redressement opéré sur les allocations compensatrices versées dans le cadre du plan de modernisation sociale

- CONDAMNER en conséquence l'URSSAF RHONE-ALPES à rembourser la somme

de 132.023,00 € avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2017.

Sur les frais de mobilité professionnels :

Vu l'arrêté du 20 décembre 2002 modifié par l'article 5 de l'arrêté du 25 juillet 2005

- INFIRMER le jugement en ce qu'il a confirmé le redressement opéré sur les primes de mobilité ;

- CONDAMNER en conséquence l'URSSAF RHONE-ALPES à rembourser la somme

de 13.384,00 € assortis avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2010.

En tout état de cause :

- CONDAMNER l'appelante à payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens. »

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

SUR QUOI, la Cour :

1. sur la contestation de la validité du redressement en son entier :

La société intimée sollicite l'annulation du redressement en son entier pour deux motifs, à savoir :

- la nullité de la mise en demeure ;

- les limites de l'avis de contrôle.

1.1. sur la mise en demeure de payer

L'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale dispose :

« L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent (..). »

En l'espèce, au premier soutien de sa prétention à l'annulation de la mise en demeure du 15 décembre 2011, la société intimée fait grief à l'URSSAF appelante de n'avoir pas fait apparaître de ventilation par établissement des montants réclamés.

La société intimée invoque les dispositions de l'article R. 243-6.I du code de la sécurité sociale selon lesquelles les cotisations sont versées par les employeurs aux organismes de recouvrement dont relève chacun de leurs établissements.

Mais si la société intimée en tire qu'elle est tenue d'elle-même disposer de comptes pour chacun de ses établissements, notamment pour calculer les taux applicables à ses cotisations en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles comme l'ont relevé les premiers juges, elle ne caractérise pas les insuffisances qu'elle reproche à la mise en demeure.

Au surplus, la société intimée est soumise au régime du versement unique qui en application du même article R. 243-6.I du code de la sécurité sociale, prévoit que chaque entreprise de plus de deux mille salariés verse les cotisations afférentes à chacun de ses établissements à un seul organisme de recouvrement faisant fonction d'interlocuteur unique.

Au demeurant, la lettre d'observations mentionne : « en accord avec l'employeur, l'intégralité des redressements est affecté au compte directeur de la société ».

Il n'est pas contesté que cet accord a été donné par la directrice des ressources humaines [K] [X] qui disposait du pouvoir d'engager l'entreprise sur ce point, comme le confirment deux lettres ultérieurement adressées par la société intimée sous la signature de la même directrice, à savoir une lettre du 7 novembre 2011 par laquelle ont été acceptés les chefs de redressement 1,2,3,8,11,14,15 et les observations numérotées 9,10,12,16,17,18,21, et la lettre du 10 janvier 2012 par laquelle a été saisie la commission de recours amiable.

En tout cas, dès lors que les mentions de la mise en demeure permettaient à la société intimée de connaître la cause, la nature et le montant des sommes à elle réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquaient ainsi que la période à laquelle elles se rapportaient, l'URSSAF appelante n'était pas tenue de ventiler ces sommes par établissement. Nonobstant l'opinion des premiers juges, le moyen s'avère infondé et il doit être écarté.

Au deuxième soutien de sa contestation, la société intimée invoque une absence de mention du versement de transport en ce que la mise en demeure comporte, à la rubrique « nature des cotisations », la seule indication « régime général ».

La société intimée fait certes observer que la contribution « versement transport » est un impôt et non une cotisation sociale.

Le redressement du chef de versement de transport a cependant fait l'objet du point 2 de la lettre d'observations du 12 octobre 2011.

Par lettre recommandée du 7 novembre 2011, la société intimée a notamment indiqué à l'URSSAF sur quels points elle admettait le redressement et acceptait les régularisations, en particulier sur le point 2.

Il en résulte que la société intimée savait que la mise en demeure comprenait le montant qu'elle avait reconnu rester devoir au titre du versement de transport. L'absence de référence expresse au versement de transport dans la mise en demeure n'a pu lui faire grief, et le moyen doit aussi être écarté.

Au troisième et dernier soutien de sa contestation de la validité de la mise en demeure, la société intimée invoque une absence de mandat de recouvrement de l'URSSAF quant aux cotisations de chômage et AGS pour les années 2008, 2009 et 2010.

A cette fin, la société intimée se prévaut des effets de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi qui a confié aux URSSAF le recouvrement des contributions de chômage et AGS, et modifié les règles de recouvrement, de contrôle et de contentieux de ces contributions et cotisations.

Cette réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 2011 par l'effet du décret n° 2009-1708 du 30 décembre 2009 ce qui conduit certes à distinguer deux périodes.

Pour les exercices 2008, 2009 et 2010, les URSSAF ne disposaient que d'un mandat de contrôle mais pas de recouvrement. A partir de l'exercice 2011, les URSSAF ont disposé aussi d'un mandat de recouvrement des cotisations de chômage et AGS pour le compte de Pôle Emploi.

Mais à compter de l'entrée en vigueur de la réforme, les URSSAF ont reçu pleine compétence pour le recouvrement de toutes les cotisations, indépendamment de la date de leur exigibilité.

Il s'ensuit qu'à la date de la mise en demeure du 15 décembre 2011, l'URSSAF appelante avait compétence pour les opérations de recouvrement des cotisations de chômage et AGS, y compris pour celles afférant aux années 2008, 2009 et 2010.

Au demeurant, la mise en demeure précise expressément qu'elle porte notamment sur les contributions d'assurance chômage et AGS pour les années 2008, 2009 et 2010, en sorte l'URSSAF appelante a satisfait à son obligation d'information de la société intimée.

En définitive, n'est caractérisé aucun manquement aux dispositions de l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale. La demande d'annulation de la mise en demeure doit être rejetée.

1.2. sur l'avis de contrôle :

En application de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, tout contrôle opéré par une URSSAF doit être précédé de l'envoi d'un avis.

En l'espèce, le contrôle opéré par les inspecteurs du recouvrement l'URSSAF de l'Isère a été précédé d'un avis à la société intimée l'avertissant d'une « vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires à compter du 1er janvier 2008 ».

Au premier soutien de sa contestation, la société intimée fait observer l'absence de référence expresse au versement de transport dans l'avis de contrôle en soulignant que le versement de transport est un impôt qui ne relève pas des législations de sécurité sociale mais des articles L. 2333-64 et suivants du code général des collectivités territoriales.

Mais l'article L. 2333-65 dudit code dispose que le versement de transport est recouvré dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties que les cotisations de sécurité sociale. L'article D. 2333-92 du même code précise que le versement destiné au financement des transports en commun est soumis aux même règles que celles applicables aux cotisations du régime général.

Dès lors que pour le recouvrement, et donc pour les opérations de contrôle diligentées par les inspecteurs du recouvrement, le versement de transport est assimilé aux cotisations et contributions relevant de la législation de sécurité sociale, il n'y avait pas lieu de le mentionner spécifiquement dans l'avis de contrôle adressée à la société intimée.

Au second soutien de sa contestation, la société intimée fait de la même manière observer l'absence, dans l'avis de contrôle, de référence expresse à la contribution au Fonds National d'Aide au Logement alors que cette contribution constitue un impôt et non une cotisation au sens du code de la sécurité sociale.

Mais l'article R. 834-7 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur au temps du contrôle en cause, disposait que la cotisation était recouvrée pour le compte du Fonds National d'Aide au Logement par les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale. L'article R. 834-8 précisait que pour son versement, les employeurs étaient soumis aux règles applicables aux cotisations de sécurité sociale, en particulier quant au recouvrement et au contrôle.

Il s'ensuit que nonobstant le caractère fiscal de la contribution au Fonds National d'Aide au Logement, dès lors que les règles qui lui étaient applicables en matière de recouvrement et de contrôle suivaient celles des cotisations de sécurité sociale, il n'y avait pas lieu de la mentionner spécifiquement dans l'avis de contrôle adressée à la société intimée.

En définitive, aucun des moyens articulés par la société intimée ne justifie l'annulation du redressement en son entier.

2. sur la contestation du point 6 de la lettre d'observations quant à la déduction forfaitaire spécifique pour les salariés travaillant en atelier de nuit :

Au titre des sommes représentatives de frais professionnels qui échappent au principe d'universalité des avantages soumis à cotisations sociales en vertu de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts prévoit notamment une déduction forfaitaire spécifique de 5% sur les rémunérations servies aux « ouvriers d'imprimerie de journaux travaillant la nuit ».

Au point 6 de la lettre d'observations, les inspecteurs du recouvrement ont réintégré dans l'assiette de calcul des cotisations de l'entreprise les déductions forfaitaires spécifiques que la société appelante avait appliquées sur les rémunérations de ses salariés non ouvriers travaillant la nuit dans son imprimerie.

Au soutien de sa contestation, la société intimée tente d'exciper d'un accord tacite qu'elle considère résulter de précédents contrôles.

Mais il résulte de l'article R. 243-59, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur au temps du contrôle en cause, antérieure au décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, que l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les seules pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause, le redressement ne pouvant porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme. La preuve en incombe à la partie qui se prévaut d'un accord tacite.

Or la société intimée se limite à invoquer les termes :

- d'une lettre d'observations du 31 août 1999, par laquelle il lui a été notifié: « ...nous vous précisons que la déduction supplémentaire de 5% est exclusivement réservée aux imprimeurs qui travaillent dans une imprimerie de journaux et qui exercent leur fonction la nuit » ;

- d'une lettre d'observation de 2002, par laquelle il lui a été rappelé : « ' lors du précédent contrôle notifié le 2 novembre 1999, une régularisation avait été faite sur l'abattement de 5% effectué au personnel ne travaillant pas exclusivement la nuit, et il avait été précisé que pour certains salariés, l'abattement ne pourrait être pratiqué à compter de 1999 qu'avec une autorisation expresse de l'administration fiscale ».

La société intimée, qui produit une liste de techniciens, cadres et assimilés cadres sur la rémunération desquels elle affirme avoir déjà appliqué la déduction depuis 1999, ne démontre pas pour autant que lors des précédents contrôles, les inspecteurs du recouvrement ont eu connaissance de sa pratique, qu'elle prétend ancienne, d'appliquer la déduction spécifique forfaitaire à des personnels non ouvriers travaillant de nuit dans son imprimerie.

Au contraire, le rappel qui lui a été fait dans la lettre d'observations du 31 août 1999 ne pouvait souffrir d'équivoque, même si le contrôle portait plus spécialement sur la situation de personnels travaillant partiellement de nuit. La société intimée ne pouvait ignorer que la déduction forfaitaire spécifique de 5% était réservée aux ouvriers d'imprimerie de journaux travaillant la nuit.

En tout cas, faute pour la société intimée d'apporter la preuve de l'accord tacite qu'elle invoque, le redressement opéré s'avère justifié.

3. sur la contestation du point 22 de la lettre d'observations relatif à l'allocation compensatrice versée dans le cadre du plan de modernisation sociale :

Au point 22 de la lettre d'observations, les inspecteurs du recouvrement ont mis en compte les sommes que la société intimée avait omises au titre de la CSG, de la CRDS et de la cotisation ouvrière maladie sur les allocations compensatrices prévues dans le cadre d'un « plan de modernisation sociale » et servies à des salariés admis à une cessation anticipée d'activité.

Au premier soutien de sa contestation, la société intimée revendique l'exonération applicable aux indemnités de licenciement.

A cette fin, la société intimée se prévaut d'un « avenant technique » à l'accord de méthode sur la mise en 'uvre du plan de modernisation sociale de la presse quotidienne régionale, signé par les partenaires sociaux le 21 juillet 2006 et stipulant : « Le contrat de travail est rompu dans les conditions prévues par l'article L. 321-1 du code du travail.(...)Toutes les sommes versées aux bénéficiaires du PMS ou pour le compte de ceux-ci par l'entreprise au-delà de l'allocation spéciale et sur toute la période de bénéfice du PMS, y compris l'indemnité définie aux alinéas 7, 8 et 9 du paragraphe 2.1 ci-dessus, tiendront lieu d'indemnités conventionnelles de licenciement et viendront se substituer aux indemnités prévues par les conventions collectives des ouvriers, des employés et du personnel d'encadrement de la PQR. »

Mais si cet avenant technique prévoit que les sommes versées aux bénéficiaires du plan de mobilité sociale remplacent les indemnités de licenciement et ne peuvent être cumulées avec ces dernières, il ne les qualifie ni ne les assimile à des indemnités de licenciement.

Au contraire, dans son paragraphe 2.1, l'avenant technique désigne expressément les sommes en cause comme un revenu de remplacement.

Au second soutien de sa contestation, la société intimée revendique le régime exonératoire dont bénéficient les indemnités conventionnelles de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi par application de l'article 80 duodecies du code général des impôts.

Mais les sommes en cause ont été versées dans le cadre d'un plan de modernisation sociale, et non d'un plan de sauvegarde de l'emploi, et le régime exonératoire revendiqué ne leur est pas applicable.

Dès lors que les allocations compensatrices en cause sont expressément qualifiées et constituent effectivement des revenus de remplacement, elles sont soumises à la CSG, à la CRDS et à l'assurance maladie au même titre que les revenus d'activité.

Le redressement s'avère donc justifié de ce chef.

4. sur la demande de remboursement d'un trop-payé au titre de « frais de mobilité professionnelle »:

La société intimée réclame le remboursement d'un total de 13.384 € qu'elle considère avoir trop payé en 2008, 2009 et 2010 au titre de primes d'installation qu'elle affirme avoir servies à ses journalistes mutés d'une agence à une autre, et sur lesquelles elle n'a pas appliqué l'exonération dont bénéficient les frais professionnels.

Sa prétention n'a pas été préalablement soumise à la commission de recours amiable de l'URSSAF de Rhône-Alpes. Elle s'en trouve dès lors irrecevable.

Au demeurant, cette prétention s'avère une remise en cause du point 11 de la lettre d'observations, par lequel les inspecteurs du recouvrement ont réintégré dans l'assiette des cotisations la prise en charge de frais de déménagement qui ne pouvaient constituer des frais professionnels comme étant relatifs à des mutations de moins de 50 km.

Comme l'ont relevé les premiers juges, la société Le Dauphiné Libéré n'a pas contesté ce chef de redressement opéré pour le montant de 3.734 €.

En tout cas, la société intimée est irrecevable de ce chef.

5. sur les dispositions finales :

Aucune des parties ne critique le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les contestations relatives aux chefs de redressement portant sur la taxe sur les contributions patronales finançant la prévoyance complémentaire et sur la C.S.G. et la C.R.D.S. sur la part patronale aux régimes de prévoyance complémentaires. Cette disposition sera donc maintenue.

Aucun chef de redressement ne devant être annulé, il s'impose de condamner la société intimée à verser la somme de 218.389 € au titre des cotisations et majorations qu'elle ne conteste en son calcul et que l'URSSAF appelante chiffre exactement ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, il est équitable que la société intimée contribue aux frais irrépétibles qu'elle a contraint l'URSSAF à exposer.

En application de l'article 689 du même code, il échet de mettre les dépens à la charge de la société intimée qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare recevables l'appel principal et l'appel incident ;

Infirme le jugement entrepris ;

Valide la mise en demeure du 15 décembre 2011 ;

Déclare irrecevables les contestations relatives aux chefs de redressement portant sur la taxe sur les contributions patronales finançant la prévoyance complémentaire et sur la C.S.G. et la C.R.D.S. sur la part patronale aux régimes de prévoyance complémentaires ;

Déclare la société Le Dauphiné Libéré irrecevable en sa prétention au remboursement d'un trop-perçu de 13.384 € au titre de « frais de mobilité professionnelle » ;

Déboute la société Le Dauphiné Libéré de sa prétention à l'annulation du redressement en son entier ;

Déboute la société Le Dauphiné Libéré de ses contestations des points 6 et 11 de la lettre d'observations du 12 octobre 2011, relatifs respectivement à la déduction forfaitaire spécifique pour les ouvriers imprimeurs en atelier de nuit, et aux allocations compensatrices versées dans le cadre du plan de modernisation sociale ;

Condamne la S.A. Le Dauphiné Libéré à payer à l'URSSAF de Rhône-Alpes la somme de 218.389 € (deux cent dix huit mille trois cent quatre-vingt neuf euros) au titre des cotisations et majorations de retard restant dues ;

Condamne la S.A. Le Dauphiné Libéré à payer à l'URSSAF de Rhône-Alpes la somme de 3.000 € (trois mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la S.A. Le Dauphiné Libéré aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de président et par Mme Chrystel ROHRER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 17/00441
Date de la décision : 15/12/2020

Références :

Cour d'appel de Grenoble TA, arrêt n°17/00441 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-12-15;17.00441 ?
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