N° RG 19/04850 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KIME
N° Minute :
ALP
Copie exécutoire délivrée
le :
à
la SELARL GERBI
la SELARL CDMF AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 01 DECEMBRE 2020
Appel d'un Jugement (N° R.G. 18/00999)
rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grenoble
en date du 14 novembre 2019
suivant déclaration d'appel du 04 Décembre 2019
APPELANT :
M. [X] [U]
né le [Date naissance 4] 1975 à MEKNES (MAROC)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté et plaidant par Me Hervé GERBI de la SELARL GERBI, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEES :
Société d'assurances PACIFICA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée et plaidant par Me Denis DREYFUS de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me BANDOSZ, avocat au barreau de GRENOBLE
CPAM DE L'ISERE (RCT) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 9]
[Localité 6]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Emmanuèle Cardona, Présidente
Anne-Laure Pliskine, Conseillère,
Laurent Grava, Présidente,
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 Septembre 2020, Anne-Laure Pliskine, conseillère chargée du rapport d'audience, assistée de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seule les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile.
Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [X] [U] a été victime d'un accident de la circulation et du travail survenu le 17 octobre 2011 sur la commune de [Localité 10], impliquant le véhicule au volant duquel se trouvait Madame [L] [N], assurée par la SA Pacifica.
Par ordonnance rendue le 28 octobre 2015, le juge des référés de Grenoble a :
-ordonné une mesure d'expertise
-condamné la Société Pacifica à régler à :
*Monsieur [X] [U], agissant en son nom personnel, la somme de 50.000 € à valoir sur la réparation définitive de son préjudice corporel ;
*Madame [R] [T], agissant en son nom propre, la somme de 3.000 € à valoir sur la réparation définitive de son préjudice personnel ;
*[P] [U] et [E] [U] la somme de 1.000 € chacun à valoir sur la réparation définitive de leur préjudice personnel.
Par arrêt du 5 juillet 2016, la Cour d'appel de Grenoble, statuant sur l'appel interjeté par Monsieur [U], infirmant partiellement l'ordonnance déférée, a condamné la Société Pacifica à régler, par provision, à Monsieur [U] :
-Une somme de 150.000 € sur la réparation de ses préjudices ;
-Une somme de 2.000 € à titre de provision ad litem ;
-Une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le rapport d'expertise a été déposé le 26 juillet 2017.
Les conclusions de l'expert étaient les suivantes :
-Déficit fonctionnel temporaire total : du 17/10/2011 au 17/02/2012,
-Déficit fonctionnel temporaire partiel de 70 % du 18/02/2012 jusqu'à la date de consolidation.
-Déficit fonctionnel permanent : 60%.
-Date de consolidation: 15/03/2016
-Souffrances endurées : 5/7
-Préjudice esthétique temporaire: il est celui d'un homme jeune en réanimation puis en centre de rééducation. Par la suite, il est constitué d'un aspect d'une personne un « peu perdue ».
-Préjudice esthétique définitif : 2/7.
-Aides techniques : décrites dans le rapport du sapiteur M. [J], sont justifiés en ce qui concerne les aides techniques d'aménagement de logement. Ceci étant, il est à noter que l'appartement actuellement occupé par la famille [U] n'est pas idéal compte tenu du handicap de Mr [U]. Si un projet de changement de logement existe, il est souhaitable qu'il tienne compte des préconisations. Aménagement de la voiture non retenu.
Aides humaines : Aide-ménagère : 4h/semaine, aides de supervision et de stimulation 3h/jour, 7/7 jours à compter du 17 février 2012, aide aux taches éducatives : 1h/jour par enfant jusqu'à l'âge de 12 ans, 7/7 jours à compter du jour de l'accident, 0,5h/jour par enfant de l'âge de 12 ans jusqu'à l'âge de 15 ans, 7/7 jours
-Préjudice professionnel : existant. Inadaptation de l'état de Mr [U] à tout emploi.
-Préjudice d'agrément : l'arrêt du karaté et du vélo, en revanche possibilité de poursuivre des activités de musculation adaptée à son déficit physique.
-Préjudice sexuel : existant sous la forme d'une perte d'initiative
Par ordonnance du 24 janvier 2018, le juge des référés de Grenoble a condamné la SA Pacifica à régler, par provision, à Monsieur [X] [U], une somme complémentaire de 800.000 €
Par jugement en date du 14 novembre 2019, le Tribunal de Grande Instance de Grenoble, a :
-donné acte à la SA Pacifica de ce qu'elle ne conteste pas la responsabilité de son assuré dans la survenance le 17 octobre 2011 de l'accident ayant généré des blessures sur la personne de M. [X] [U] ;
-réservé le poste de préjudice frais de logement adapté (FLA) ;
-dit qu'aucune somme ne peut être due au titre des frais de véhicule adapté (FVA) ;
-rappelé que la créance au titre de la pension d'invalidité s'impute sur les pertes de gains professionnels futurs / incidence professionnelle et subsidiairement sur le déficit fonctionnel permanent ;
-fixé comme suit l'indemnisation des préjudices de M. [X] [U] résultant de l'accident du 17 octobre 2011, après imputation des créances de la CPAM :
Déficit fonctionnel temporaire : 29.140 euros
Perte de gains professionnels futurs : 60.512,64 euros
Incidence professionnelle : 15.000 euros
Assistance par tierce personne : 788.315,80 euros
Frais divers : 1.639,04 euros
Dépenses de santé futures : 1.469,35 euros
Déficit fonctionnel permanent : 255.000 euros
Préjudice d'agrément : 3.000 euros
Préjudice esthétique permanent : 3.000 euros
Préjudice sexuel : 3.000 euros
Préjudice esthétique temporaire : 1.000 euros
Souffrances endurées : 30.000 euros
-condamné en conséquence la SA Pacifica à payer à M. [X] [U], après imputation des créances de la CPAM de l'ISÈRE, la somme totale de 1.191.076,83 euros en réparation de ses préjudices ;
-dit que les provisions déjà versées viendront en déduction de cette somme ;
-dit que cette somme portera intérêts au taux légal à la date du prononcé du jugement ;
-ordonné la capitalisation des intérêts ;
-condamné la SA Pacifica à payer à M. [X] [U] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-condamné la SA Pacifica aux dépens avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
-déclaré le présent jugement opposable à la CPAM de l'Isère ;
-ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration en date du 4 décembre 2019, M.[U] a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :
-réservé le poste de préjudice frais de logement adapté (FLA) ;
-dit qu'aucune somme ne peut être due au titre des frais de véhicule adapté (FVA) ;
-rappelé que la créance au titre de la pension d'invalidité s'impute sur les pertes de gains professionnels futurs / incidence professionnelle et subsidiairement sur le déficit fonctionnel permanent ;
-fixé comme suit l'indemnisation des préjudices de M. [X] [U] résultant de l'accident du 17 octobre 2011, après imputation des créances de la CPAM :
Déficit fonctionnel temporaire : 29.140 euros
Perte de gains professionnels futurs : 60.512,64 euros
Incidence professionnelle : 15.000 euros
Assistance par tierce personne : 788.315,80 euros
Frais divers : 1.639,04 euros
Dépenses de santé futures : 1.469,35 euros
Déficit fonctionnel permanent : 255.000 euros
Préjudice d'agrément : 3.000 euros
Préjudice esthétique permanent : 3.000 euros 5
Préjudice sexuel : 3.000 euros
Préjudice esthétique temporaire : 1.000 euros
Souffrances endurées : 30.000 euros
-condamné en conséquence la SA Pacifica à payer à M. [X] [U], après imputation des créances de la CPAM de l'ISÈRE, la somme totale de 1.191.076,83 euros en réparation de ses préjudices ;
-dit que les provisions déjà versées viendront en déduction de cette somme ;
-dit que cette somme portera intérêts au taux légal à la date du prononcé du jugement.
Dans ses conclusions notifiées le 12 mars 2020 et signifiées à la CPAM le 3 mars 2020, M.[U] demande à la cour de :
Réformer le jugement déféré, en ce qu'il a statué de la manière suivante:
« Dit qu'aucune somme ne peut être due au titre des frais de véhicule adapté (FVA) ;
Fixe comme suit l'indemnisation des préjudices de M. [X] [U] résultant de l'accident du 17 octobre 2011, après imputation des créances de la CPAM :
-Perte de gains professionnels futurs : 60.512,64 euros
-Incidence professionnelle : 15.000 euros
-Assistance par tierce personne : 788.315,80 euros
-Frais divers : 1.639,04 euros
-Préjudice d'agrément : 3.000 euros
Condamne en conséquence la SA Pacifica à payer à M. [X] [U], après imputation des créances de la CPAM de l'ISÈRE, la somme totale de 1.191.076,83 euros en réparation de ses préjudices ;
Dit que les provisions déjà versées viendront en déduction de cette somme ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à la date du prononcé du jugement ; »
Statuant dans cette limite par l'effet dévolutif de l'appel,
Dire et juger que Monsieur [X] [U] a droit à réparation au titre des frais de véhicule adapté fixés par l'avis sapiteur en ergothérapie de Monsieur [J], dans l'hypothèse où la Cour rejetterait la demande formée au titre de la tierce personne de substitution s'agissant de la conduite automobile ;
Réserver la réparation à lui revenir de ce chef ;
Fixer comme suit l'indemnisation des préjudices de Monsieur [X] [U] résultant de l'accident du 17 octobre 2011, après imputation des créances de la CPAM :
-Déficit fonctionnel temporaire.......................................................29.140,00 €
-Pertes de gains professionnels futurs et incidence professionnelle................................................................................508301,96 €
-Assistance par tierce personne .................................................. 2315887,00 €
-Frais divers........................................................................................3639,04 €
-Dépenses de santé futures................................................................1.469,35 €
-Déficit fonctionnel permanent......................................................255.000,00 €
-Préjudice d'agrément.....................................................................50.000,00 €
-Préjudice esthétique permanent .......................................................3.000,00 €
-Préjudice sexuel ..............................................................................3.000,00 €
-Préjudice esthétique temporaire ......................................................1.000,00 €
-Souffrances endurées.....................................................................30.000,00 €
Condamner en conséquence la SA Pacifica à payer à Monsieur [X] [U], après imputation des créances de la CPAM de l'Isère, la somme totale de... 3.200.437,35 €
en réparation de ses préjudices ;
Dire et juger que la condamnation à intervenir produira intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2011 ;
Ordonner la capitalisation des intérêts par année entière ;
Condamner la SA Pacifica aux dépens de première instance et d'appel, incluant les frais d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de l'avocat constitué sur son affirmation de droit, outre en la somme complémentaire de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Déclarer l'arrêt à intervenir opposable à la CPAM de l'ISÈRE ;
M.[U] expose tout d'abord, s'agissant du recours à la tierce personne, que le taux horaire retenu est inférieur au tarif médian, qu'en outre le tribunal a retenu l'avis de l'expert dans un domaine où ce dernier s'était lui-même reconnu incompétent et avait sollicité l'avis d'un sapiteur. Il rappelle notamment qu'il n'est plus en capacité de conduire. Il souligne qu'une aide humaine est également nécessaire au titre du soutien à la parentalité.
Au titre de la perte de gains professionnels futurs, il indique qu'il aurait nécessairement connu une évolution salariale jusqu'à la retraite, qu'il pouvait donc prétendre au salaire moyen tel que retenu par l'INSEE.
Il considère que son préjudice d'agrément est sous-évalué au vu des activités sportives qu'il pratiquait, en particulier le karaté à haut niveau.
En ce qui concerne les frais de véhicule adapté, il rappelle qu'à défaut de l'aide d'une tierce personne, il est dans l'obligation de faire procéder à un aménagement de son véhicule.
Il estime qu'au regard de l'ancienneté de l'accident et du caractère manifestement frustratoire de l'offre indemnitaire de la Société Pacifica, il convient de fixer au 17 octobre 2011 le point de départ des intérêts au taux légal et d'en ordonner la capitalisation par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil.
Dans ses conclusions notifiées le 1er septembre 2020, la compagnie Pacifica demande à la cour de :
-dire et juger recevable mais infondé l'appel de M. [U],
En conséquence,
-confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,
Et corrélativement,
-débouter M. [U] de toutes ses prétentions et ce compris l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.
-condamner M. [U] aux dépens.
La compagnie Pacifica fait valoir que les contestations de M.[U] portent moins sur le jugement déféré que sur les conclusions du rapport d'expertise qui a réduit, par rapport aux propositions du sapiteur, le nombre d'heures réellement nécessaires, étant observé qu'il n'a pas formulé de demande de contre-expertise et rappelle que le choix du barème de capitalisation relève de l'appréciation souveraine du juge du fond, qu'en l'espèce, la compagnie propose de retenir un autre barème BCRIV2018, qui est le plus adapté selon elle à la situation de la victime au vu de son âge.
Au titre des frais divers, elle estime que les demandes de M.[U] sont disproportionnées.
S'agissant de l'incidence professionnelle et de la perte de gains professionnels futurs, elle souligne que M.[U] n'a pas communiqué ses bulletins de salaire de 2011 et indique que la capitalisation, puisque le choix a été fait de liquider à titre viager son préjudice professionnel, doit s'opérer sur une annuité nette de prise en charge par un tiers payeur.
S'agissant du préjudice d'agrément, elle énonce que M.[U], s'il pratiquait le karaté depuis de nombreuses années, ne démontrait qu'il pratiquait toujours ce sport de manière régulière les mois précédant son accident.
Elle s'oppose aux frais d'aménagement d'un véhicule au motif qu'en tout état de cause, il est dangereux que M.[U] reprenne la conduite automobile.
Elle s'oppose de même au point de départ des taux d'intérêts sollicité par M.[U], ce dernier n'ayant été consolidé qu'en 2016 et elle-même ayant respecté ses obligations.
La CPAM citée à personne par remise de l'acte à une conseillère, personne habilitée, n'a pas constitué avocat mais a fait parvenir ses débours définitifs, à hauteur de 529 178,19 euros. L'arrêt sera réputé contradictoire.
La clôture a été prononcée le 2 septembre 2020.
MOTIFS
Sur l'assistance tierce personne
L'aide-ménagère à hauteur de 4 heures/semaine n'est pas contestée.
Sur l'aide humaine active et l'aide humaine de supervision
L'expert a motivé sa proposition de ne retenir que 3 heures par jour au titre des aides apportées directement à M.[U], dès lors qu'il existe selon lui dans la description des différentes tâches de l'assistant un recouvrement de celles-ci, une partie de l'aide de supervision et de stimulation pouvant être accomplie en même temps que l'aide humaine active, a fortiori compte tenu de la superficie de 40 m2 de l'appartement.
Toutefois, l'ergothérapeute a procédé à une description très précise de toutes les activités pour lesquelles M.[U] a besoin d'une aide extérieure. Sur un grand nombre de tâches (faire sa toilette, prendre soin de son apparence, se vêtir, préparer et prendre un repas), il a au minimum besoin de l'intervention d'un tiers pour appeler son attention sur le fait que certaines tâches ne sont pas réalisées ou le sont incomplètement. Ainsi, l'ergothérapeute a relevé les multiples difficultés auxquelles M.[U] était confronté pour élaborer un repas simple, alors que selon les dires de son épouse, il aimait cuisiner, tant dans le choix des ingrédients que dans leur préparation (placards laissées ouverts, ustensiles laissés au sol). Il souligne qu'il a besoin d'aide pour des rendez-vous extérieurs.
La gestion de la routine quotidienne semble à peu près acquise, mais avec un gros manque d'initiative et un problème d'inhibition assez marqué.
De même, M.[U] ne parvient plus à poser un cadre à ses fils avec une perte d'autorité liée à des réponses fluctuantes sur une même question.
Il ressort de ce qui précède que les besoins de M.[U] s'agissant de l'aide d'une tierce personne, dès lors que ce dernier, tout au long des tâches quotidiennes de la journée, a besoin d'une aide de supervision, justifient qu'un quantum de quatre heures par jour soit retenu.
De même, en ce qui concerne la conduite automobile, l'ergothérapeute note que le médecin a autorisé la reprise de celle-ci à condition de ne pas conduire plus d'une heure du fait de fatigabilité de M.[U] et de ne pas conduire de nuit, à cause de problèmes d'éblouissement.
Compte tenu des restrictions posées par la conduite, des problèmes de comportement de M.[U] tels que rappelés ci-dessus, une aide humaine à hauteur de 4 heures par jour, incluant le temps de déplacement, sera retenue.
S'agissant du montant horaire : le listing produit par M.[U] permet surtout de démontrer la variété et le peu de transparence des prix pratiqués puisqu'il faut de manière presque systématique contacter l'organisme pour obtenir cette information. Compte tenu de la nature des aides nécessaires à M.[U], qui doit réapprendre certaines tâches de la vie quotidienne, des qualifications éventuellement requises pour ce faire, des pièces communiquées par les parties, le taux horaire sera fixé à 20 euros.
La barème de capitalisation 2018 sera retenu.
Décompte
Il sera rappelé que la détermination du nombre d'heures nécessaires débute à compter du retour à domicile, et non à compter de la date de consolidation.
Aide ménagère
Arrérages échus : du 17 février 2012 au 17 février 2020
52 semaines x 8 ansx4 hx20 €=33 280 €
Arrérages à échoir (homme de 44 ans en février 2020)
52 semainesx4hx20x32,191=133 914,56 €
Total aide-ménagère: 167 194,56 €
Aide active (4 h/jour)
Arrérages échus : du 17 février 2012 au 17 février 2020
365 joursx8 ansx4hx20=233 600 €
Arrérages à échoir (homme de 44 ans en février 2020)
365 jours x4x20x32,191=939 977,20 €
Total aide active : 1 173 577, 20 €
Aide éducative
Pour [E], né le [Date naissance 3] 2010
Du 17 février 2012 au 27 juin 2022
(365x10+125) joursx1hx20=75 500 €
Du 27 juin 2022 au 27 juin 2025
3x365 joursx0,5hx20=10 950 €
Pour [P], né le [Date naissance 2] 2008
Du 17 février 2012 au 1er mai 2020
(365x8+71)jours x 1hx20=59 820 €
Du 1er mai 2020 au 1er mai 2023
3x365jours x 0,5hx20=10 950 €
Total aide éducative : 157 220 €
Total général : 1 497 991,76 €
Sur les frais de véhicule adapté
Compte tenu de la dangerosité de la conduite pour M.[U], qui ne le nie pas puisqu'il avait sollicité une aide humaine à ce titre, il n'y a pas lieu de prévoir des dépenses à ce titre. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la perte de gains professionnels futurs
M.[U] se fonde sur le salaire moyen en France pour estimer cette perte, toutefois, et ainsi que le premier juge l'a justement relevé, il ne s'agit que d'une moyenne, qui ne correspond pas à la réalité de sa situation. L'intéressé était rémunéré à hauteur de 1581, 13 euros brut, soit après déduction des cotisations et charges, une rémunération nette de 1265 euros, étant observé que M.[U], malgré des demandes en ce sens, n'a pas produit ses bulletins de salaire antérieurs à l'accident.
La perte mensuelle de salaire est de 1 265 euros, soit jusqu'au jour de la décision, une somme globale de 1 265x56 mois=70 840 euros, dont il faut déduire la créance de la CPAM à hauteur de 25 952, 72 euros au titre des arrérages échus, outre la somme qu'elle a versée jusqu'au 1er novembre 2020 et qui s'élève à 1 106,15x8=8 849,20 euros
Le préjudice net s'élève à 36 038,08 euros.
Après décision, ce préjudice s'élève à 1 265x12x32,191 (prix de l'euro de rente) = 488 659,38 euros.
La CPAM a capitalisé la rente à compter du 1er mars 2018, pour un montant de 376 725,13 euros (dont il faut déduire la somme précitée de 8 849, 20 euros), soit un total de : 367 875,93 euros.
Le préjudice net s'élève à 120 783,45 euros.
Le montant total du préjudice au titre de la perte de gains professionnels futurs s'élève à 156 821,53 euros.
Sur l'incidence professionnelle
L'incidence professionnelle a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité, mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à l' obligation de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage au profit d'une autre qu'elle a dû choisir en raison de la survenance de son handicap.
En l'espèce, M.[U] justifie d'un préjudice du fait de son incapacité à occuper désormais un poste, la formation à l'UEROS qu'il suivait ayant été interrompue pour ce motif, et ce alors qu'il bénéficiait d'un contrat à durée déterminée dans un domaine où les besoins sont réels. Il justifie donc d'un préjudice distinct de celui à la seule perte des revenus d'activités, compte tenu de cette dévalorisation sur le marché du travail, reconnue au demeurant par la fixation d'un taux d'incapacité permanente qui est désormais de 77%, depuis le 16 mars 2016.
Le premier juge a justement apprécié cette incidence et le jugement sera confirmé.
Sur le préjudice d'agrément
Si M.[U] justifie avoir pratiqué le karaté de manière assidue alors qu'il se trouvait au Maroc, ainsi qu'en attestent les documents qu'il verse aux débats et qui datent de 1998 à 2001, il ne communique autre pièce plus récente relative à sa pratique en France alors qu'il y réside depuis 2007. De même, il communique une attestation précisant qu'il est inscrit dans une salle de sports, mais sans mention ou témoignages de tiers relatifs à son assiduité.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé.
Sur le point de départ des intérêts
Aux termes de l'article 1231-7 du code civil, en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.
En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.
En prenant en compte les éventuelles incidences fiscales pour les sociétés d'assurances, M.[U] rajoute au texte une condition que celui-ci ne prévoit pas.
Pour le surplus, l'état de M.[U] n'a été consolidé qu'au 15 mars 2016 et aucun motif ne justifie de reporter le point de départ des intérêts à une date antérieure.
La capitalisation des intérêts sera ordonnée.
Le jugement sera confirmé sur ce point
Sur les autres demandes
M.[U] justifie de l'utilité des frais de 1 639, 04 € réglés à Mme [B], en revanche, la somme de 1200 euros est disproportionnée et le recours à un neuropsychologue alors qu'une expertise judiciaire complète a été diligentée n'apparaissait pas obligatoire.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
M.[U] ayant dû exposer des frais pour faire valoir ses droits, il est équitable de lui allouer la somme de 2000 euros application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA Pacifica sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé le montant dû au titre de l'assistance à tierce personne à la somme de 788 315 , 80 euros, le montant de la perte des gains professionnels futurs à la somme de 60.512,64 euros et par conséquent en ce qu'il a condamné la SA Pacifica à payer à M.[U] après imputation des créances de la CPAM de l'Isère, la somme de 1 191 076, 83 euros,
et statuant à nouveau
Fixe le montant de la somme due au titre de l'assistance par tierce personne à la somme de :
-167 194,56 € au titre de l'aide ménagère
-1 173 577, 20 € au titre de l'aide active
-157 220 € au titre de l'aide à la parentalité
-156 821,53 € au titre de la perte de gains professionnels futurs,
Condamne en conséquence la SA Pacifica à payer à M.[U], après imputation des créances de la CPAM, la somme globale de 1 654 813,29 euros,
Dit que les provisions déjà versées viendront en déduction de cette somme,
Confirme le jugement déféré pour le surplus,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SA Pacifica à payer à M.[U] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SA Pacifica aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,