BF
N° RG 18/02063
N° Portalis DBVM-V-B7C-JQQM
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE
Me Valérie PALLANCA
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 26 NOVEMBRE 2020
Appel d'une décision (N° RG F16/00124)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE
en date du 16 avril 2018
suivant déclaration d'appel du 04 Mai 2018
APPELANTE :
SAS SAMAT RHONE ALPES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE,
INTIME :
Monsieur [Y] [W]
né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Valérie PALLANCA, avocat au barreau de VIENNE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Blandine FRESSARD, Présidente,
M. Frédéric BLANC, Conseiller,
M. Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,
DÉBATS :
A l'audience publique du 24 Septembre 2020,
Madame Blandine FRESSARD, chargée du rapport, assistée de Madame Sarah DJABLI, Greffier placée, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 26 Novembre 2020, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 26 Novembre 2020.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [Y] [W] a été embauché par la société SAMAT RHONE-ALPES en qualité de conducteur routier dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à effet au 11 décembre 1989.
Le 29 novembre 2012, Monsieur [W] a été victime d'un accident du travail.
Le 7 mars 2013, la CPAM de [Localité 3] a notifié à la Société SAMAT RHONE-ALPES la décision de prise en charge de l'accident du travail de Monsieur [W] au titre de la législation professionnelle.
Le 17 février 2015, Monsieur [W] a été reçu par le médecin du travail dans le cadre d'une visite de pré-reprise à sa demande.
Le médecin a conclu à la reprise du travail sous réserve de la nécessité de prévoir une inaptitude au poste de conducteur Poids lourd, au port de charge lourde de plus de 2 kg et à toute manutention.
Le 20 mai 2015, dans le cadre de la seconde visite médicale de reprise, le médecin du travail a déclaré Monsieur [W] inapte totalement et définitivement au poste de conducteur Poids-lourd et au port de charge lourde (2kg) et à toute manutention.
Par courrier du 27 juillet 2015, la société SAMAT RHONE ALPES a proposé à Monsieur [W] trois postes en vue de son reclassement que par courrier en date du 30 juillet 2015, Monsieur [W] a refusés.
Le 17 septembre 2015, Monsieur [W] a été licencié pour inaptitude définitive à son poste de travail et impossibilité de reclassement.
Le 05 avril 2015, Monsieur [W], contestant son licenciement, a saisi le conseil de prud'hommes de Vienne à l'encontre de son employeur la société SAMAT RHONE-ALPES.
Par jugement du 16 avril 2018, rectifié le 16 juillet 2018, le conseil de prud'hommes de Vienne a :
- jugé le licenciement de Monsieur [Y] [W] pour inaptitude professionnelle.
En conséquence,
- condamné la Société SAMAT RHONE-ALPES prise en la personne de son représentant légal a verser à Monsieur [Y] [W] les sommes suivantes :
'48 625,86€ au titre de l'indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle ;
'100,00€ au titre de l'indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel ;
'2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- statué sur l'exécution provisoire ;
- débouté la société SAMAT RHONE-ALPES de sa demande reconventionnelle,
- condamné la société SAMAT RHONE-ALPES, partie qui succombe à l'instance, aux entiers dépens.
Ledit jugement a été notifié aux parties le 17 avril 2018.
Par acte du 04 mai 2018, la SAS SAMAT RHONE-ALPES a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.
La société SAMAT RHONE-ALPES, par conclusions transmises par voie électronique le 29 janvier 2019, demande à la cour de :
'déclarer l'appel formé par la société SAMAT RHONE-ALPES recevable et bien-fondé.
À titre principal,
'prononcer la nullité du jugement rendu 16 avril 2018 par le Conseil de prud'hommes de Vienne.
Jugeant à nouveau,
'dire et juger que l'inaptitude de Monsieur [W] a une origine non-professionnelle ;
En conséquence,
'débouter Monsieur [W] de sa demande au titre d'une indemnité spéciale de licenciement ;
'débouter Monsieur [W] au titre d'une indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel.
À titre subsidiaire,
'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
dit et jugé l'inaptitude de Monsieur [W] comme ayant une origine professionnelle ;
condamné la société SAMAT RHONE ALPES au paiement de la somme de 48 625,86 € au titre d'une indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle ;
condamné la société SAMAT RHONE ALPES au paiement de la somme de 100,00 € au titre d'une indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel ;
condamné la société SAMAT RHONE ALPES au paiement de la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance ;
débouté la société SAMAT RHONE ALPES de sa demande tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [W] au paiement de la somme de 2 500,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens d'instance ;
ordonné l'exécution provisoire de plein droit.
Jugeant à nouveau,
'juger que l'inaptitude de Monsieur [W] a une origine non-professionnelle.
En conséquence,
'débouter Monsieur [W] de sa demande au titre d'une indemnité spéciale de licenciement ;
'débouter Monsieur [W] au titre d'une indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel.
À titre plus subsidiaire,
'juger que le salaire de référence de Monsieur [W] doit être fixée à 2 514,33 € ;
'juger que Monsieur [W] ne peut prétendre qu'au paiement d'une somme de 18 397,00 € au titre d'une indemnité spéciale de licenciement.
'constater que les délégués du personnel ont été dûment informés et consultés.
En conséquence,
'débouter Monsieur [W] de sa demande au titre d'une indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel ;
'limiter à hauteur de 18 397,00 € l'indemnité spéciale de licenciement susceptible de lui être allouée ;
À titre infiniment subsidiaire
'juger que Monsieur [W] ne justifie d'aucun préjudice ;
'réduire à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts susceptibles de lui être alloués.
En tout état de cause
'débouter Monsieur [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, y compris en ses éventuels appels incidents ;
'débouter Monsieur [W] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
'condamner Monsieur [W] à verser à la société SAMAT RHONE-ALPES la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.
La SAS SAMAT fait valoir que :
Sur la nullité du jugement du 16 avril 2018, la SAS SAMAT RHONE-ALPES fait valoir :
'compte tenu des articles 454 et 458 du code de procédure, le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Vienne le 16 avril 2018 est entaché de nullité,
'Madame [J] [I], salariée du Groupe SAMAT, est identifiée en qualité d'assesseur employeur, alors que tel n'a pas été le cas. Madame [I] s'était spontanément déportée et avait été remplacée par un autre membre du collège employeur.
'Bien que le jugement ait été rectifié concernant son dispositif et ses modalités d'exécution provisoire par jugement du 16 juillet 2018, la requête en rectification matérielle n'a jamais été adressée à la société SAMAT RHONE ALPES, en violation du contradictoire et du principe dévolutif de l'appel.
Sur l'inaptitude de Monsieur [W] :
'du 27 juin 2014 au 4 mai 2015, Monsieur [W] a bénéficié d'arrêts de travail de droit commun, sans lien avec l'accident du travail déclaré le 06 décembre 2012,
'compte tenu des avis médicaux délivrés par le médecin du travail, il apparaît que ce dernier a précisé que la visite médicale se déroulait dans le cadre du retour après maladie et non dans le cadre de visites consécutives à un accident du travail,
'Il n'est donc pas établi que l'inaptitude prononcée par le médecin du travail a une origine professionnelle, par suite le licenciement pour inaptitude n'a pas une origine professionnelle.
Sur l'indemnité spéciale de licenciement :
'que l'inaptitude n'étant pas d'origine professionnelle, l'indemnité spéciale n'était pas due dès lors que la nature de la procédure de licenciement s'apprécie au jour du licenciement.
'la circonstance de la mention du code 92 dans l'attestation Pôle emploi délivrée (code 92 correspondant à une inaptitude d'origine professionnelle) est une simple erreur matérielle de l'employeur,
'la volonté d'allouer une indemnité compensatrice de préavis de l'employeur, de façon bienveillante à l'égard de Monsieur [W], ne saurait être interprétée comme une reconnaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude de Monsieur [W] ;
'Subsidiairement, les calculs de Monsieur [W] sont erronés puisque son salaire de référence est de 2 514.33€ et non 2 836.45 € (le calcul de salaire de référence devant retenir la période antérieure à ses arrêts de travail)
Sur les manquements à l'obligation de consulter les délégués du personnel, la société fait valoir :
'que les délégués du personnel ont été consultés sur les postes disponibles dans le cadre de la recherche de reclassement (pièces 13 et 14).
Monsieur [W], par conclusions transmises par voie électronique le 25 juin 2020, demande à la cour de :
'juger que le jugement du conseil de prud'hommes de Vienne du 16 avril 2018 n'est pas entaché de nullité ;
'ordonner la rectification de l'erreur matérielle concernant le remplacement de Madame [J] [I] par un autre conseiller prud'homal en qualité d'assesseur ;
'confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu que son inaptitude est d'origine professionnelle,
'confirmer le jugement quant à la condamnation de la société SAMAT RHONE ALPES au paiement de la somme de 48 625,86 € au titre du solde de l'indemnité spéciale de licenciement,
'réformer le jugement en ce qu'il a considéré que les délégués du personnel avaient été convoqués ;
'condamner la société SAMAT RHONE ALPES à la somme de 34 037,4 € au titre de l'indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel et à 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
'condamner la même aux entiers dépens de l'instance.
[Y] [W] soutient à l'appui de ses prétentions que :
Sur le jugement de prud'hommes, Monsieur [W] :
'compte tenu de l'article 457 du code de procédure civile, et de ce que Madame [I] a bien été remplacée par un autre conseiller prudhommal, la mention de Madame [I] en qualité d'assesseur est une simple erreur matérielle.
Sur l'origine de son inaptitude, et la procédure applicable :
'son arrêt de travail est continu depuis son accident de travail,
'qu'il a été déclaré consolidé par la sécurité sociale le 1er juillet et ne pouvait donc plus se voir verser des indemnités au titre de l'accident de travail de ce fait,
'le changement de nature des indemnités n'a aucune incidence sur la nature de l'arrêt ;
'l'employeur avait pleine connaissance de ce que l'arrêt de travail de son salarié résultait de l'accident de travail, du fait même qu'il n'y avait pas eu reprise de travail depuis l'accident de travail,
'pour ces raisons, l'employeur a précisé l'origine professionnelle de l'inaptitude sur l'attestation Pôle emploi (motif 92), et a indiqué dans son bulletin de paie du 01/09/2015 le versement d'une indemnité compensatrice de préavis inaptitude suite à accident de travail/maladie professionnelle.
'Il en découle que la procédure applicable en l'espèce devait être la procédure pour inaptitude professionnelle.
'l'employeur ne justifie pas de la prétendue convocation en la forme (LRAR) des délégués du personnel, et devra être condamné au versement de la somme de 34 037,4€ au titre de l'indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel.
'L'employeur ne l'a pas non plus convoqué à la prétendue réunion extraordinaire le concernant dont il n'est fait aucune preuve du déroulement effectif.
Sur le calcul des indemnités résultant de l'inaptitude d'origine professionnelle :
'qu'il convient de prendre en compte la moyenne des salaires des 12 derniers mois précédents l'arrêt soit le salaire moyen de 2836,45€,
'la société SAMA ne peut déduire les indemnités de déplacement du salaire brut de référence, ses dernières constituant un complément de rémunération assujettie aux charges sociales.
'par application de ce salaire moyen, lui reste à ce jour due la somme de 48 529,86 € au titre des indemnités légales de licenciement et de l'article 1226-14.
Par ordonnance, la clôture des débats a été fixée au 03 septembre 2020.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité du jugement :
L'article 454 du Code de procédure civile dispose que le jugement est rendu au nom du peuple français. Il contient notamment l'indication du nom des juges qui en ont délibéré, l'article 458 précisant que cette prescription doit être observée à peine de nullité.
L'article 459 du même code dispose cependant que l'omission ou l'inexactitude d'une mention destinée à établir la régularité du jugement ne peut entraîner la nullité de celui-ci s'il est établi par les pièces de la procédure, par le registre d'audience ou par tout autre moyen que les prescriptions légales ont été, en fait, observées tandis que l'article 561 du Code de procédure civile dispose que l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel. Il est statué à nouveau en fait et en droit dans les conditions et limites déterminées aux livres premier et deuxième du présent code.
En l'espèce, il résulte de la note d'audience du bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Vienne, daté et signé du 16 février 2016, que composaient la formation de jugement à cette audience : Mme [K] [C], M.[U] [N], M.[D] [A] et M.[H] [B] en qualité de conseillers, assistés lors des débats de Mme [S] [M], en qualité de greffier placé.
Dès lors la mention, portée sur le jugement, de Mme [J] [I] en qualité d'assesseure, alors que la note d'audience l'identifie plus exactement comme étant responsable relations sociales de la SAMAT RHONE-ALPES, apparaît comme une erreur matérielle qu'il appartient à la cour, par l'effet dévolutif de l'appel, de rectifier.
Sur l'origine de l'inaptitude de [Y] [W] :
Les articles L. 1226-6 à L. 1226-22 du code du travail contiennent les règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
En cas de contestation sur l'applicabilité de ces dispositions, les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
L'application de l'article L. 1226-10 du code du travail n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude.
En l'espèce il est établi par les pièces versées aux débats que Monsieur [W] a été victime d'un accident du travail en date du 29 novembre 2012, la déclaration effectuée à cette occasion faisant mention d'une douleur à l'épaule droite consécutive à une man'uvre de rattrapage du conducteur à l'échelle de la citerne alors qu'il montait pour la recharger.
Le salarié a ensuite bénéficié du 6 décembre 2012 au 27 juin 2014 d'arrêts de travail en lien avec l'accident déclaré le 6 décembre 2012 ;
Il a été déclaré consolidé par la sécurité sociale le 1er juillet 2014.
A partir du 27 juin 2014, Monsieur [W] a alors bénéficié de prolongations successives d'arrêts de travail de droit commun.
A sa demande le salarié a été examiné par le médecin du travail dans le cadre d'une visite de pré-reprise le 17 février 2015, la fiche établie, faisant mention d'une « visite retour maladie », concluait en ces termes :
« A la reprise du travail (date non encore prévue) :
prévoir une inaptitude au poste de conducteur PL, au port de charge lourde ($gt;= 2kg) et à
toute manutention ».
Le 4 mai 2015, une étude du poste de travail de Monsieur [W] a été réalisée par le médecin du travail.
Monsieur [W] a été examiné par le médecin du travail dans le cadre de deux visites médicales de reprise qui se sont déroulées les 5 et 20 mai 2015, aux termes desquelles le médecin a rendu un avis d'inaptitude définitif et total libellé dans les termes suivants
« Suite à la visite de pré-reprise du travail le 17 02 15
Suite à la visite de reprise du 5 05 15 et à la visite du 20 05 15
Suite à l'étude de poste faite le 4 05 15
Inapte totalement et définitivement au poste de conducteur PL et au port de charge lourde
($gt;= 2kg) et à toute manutention ».
Ces documents médicaux mettent en évidence que l'arrêt de travail de M.[W] depuis l'accident du travail du 29 novembre 2012, jusqu'à la déclaration d'inaptitude, n'a jamais connu d'interruption, ses arrêts de travail ayant été régulièrement prolongés depuis cette date, alors même que le salarié a changé de régime d'indemnités journalières à partir de la consolidation de son état telle que déclarée par la CPAM.
Les visites de reprise ont dès lors été organisées à la fois pour l'arrêt au titre de l'accident du travail et pour sa prolongation sous le régime des arrêts de travail de droit commun.
Par ailleurs alors que la société SAMAT argue d'erreurs matérielles non créatrices de droit, la cour relève cependant qu'elle a rémunéré le préavis de Monsieur [W] en se fondant sur le fait qu'il s'agissait d'un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle, comme elle a inscrit sur l'attestation Pole Emploi : « licenciement pour inaptitude physique origine professionnelle », le bulletin de paie du 01/09/2015 au 17/09/2015 portant la mention « Indemité comp. de préavis inaptitude suite AT/MP ».
Il ressort de ces éléments, le licenciement étant intervenu sans que le salarié ait à un moment quelconque repris son activité après l'accident dont il a été victime et dont la nature d'accident du travail n'a pas été contestée, que d'une part l'inaptitude du salarié médicalement constatée à exercer son métier de conducteur PL (emploi à l'occasion duquel l'accident s'est produit), alors que l'intéressé se trouvait en arrêt de travail pour maladie, a, au moins partiellement pour origine cet accident et que d'autre part que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
La décision entreprise est confirmée de ce chef.
Au bénéfice de ces énonciations, et par applications des dispositions de l'article L 1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail de M.[W] pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement, ouvre droit au versement d'une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L 1234-9 du même code.
L'article L.1226-16 du Code du travail précise que : « Les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle. Pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu. »
Sur la base des bulletins versés aux débats et après analyse des calculs proposés par chacune des parties, les premiers juges ont exactement retenu que le salaire moyen de M.[W] des 12 derniers mois précédents son arrêt de travail, sans déduction des frais de déplacement forfaitairement versés au salarié, doit être fixé à la somme de 2836,45 €, justifiant le versement d'une indemnité spéciale de licenciement à hauteur de 67 026,86 €.
En conséquence, la décision est confirmée en ce qu'elle a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 48 629,86 € en complément de l'indemnité légale de licenciement déjà versée à M.[W].
Sur la consultation des délégués du personnel :
Aux termes de l'article L1226-10 du code du travail applicable au litige : 'Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail' .
L'avis des délégués du personnel doit être recueilli après le constat de l'inaptitude du salarié et avant l'engagement de la procédure de licenciement :
La société SAMAT RHONE-ALPES verse au débat les éléments suivants :
- Les courriers recommandés de convocation des délégués du personnel à une réunion
extraordinaire fixée au 20 juillet 2015, sans aucun accusé de réception ;
- Un compte-rendu de cette réunion, à laquelle M.[W] n'était pas présent, qui résume l'avis émis par les délégués du personnel à la suite de cette réunion extraordinaire, qui ne porte la signature ni de la Direction, ni des délégués du personnel.
La cour relève cependant que ces pièces très incomplètes n'ont pas une force probante suffisante pour établir la consultation effective des délégués du personnel sur les postes disponibles et susceptibles d'être proposés à Monsieur [W].
Par application des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail, en leur version applicable à l'espèce, en cas de licenciement prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues à l'article L. 1226-10 et en cas de refus de réintégration par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité ne peut être inférieure à douze mois de salaires. Elle se cumule avec l'indemnité compensatrice et, le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement prévues à l'article L. 1226-14.
En conséquence, le salarié est bien fondé à solliciter le versement par l'employeur d'une indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel à hauteur de 34 037,40 €.
La décision entreprise est infirmée en ce sens.
Sur les demandes accessoires :
L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure accordée en première instance et de condamner la société SAMAT RHONE ALPES à payer une indemnité complémentaire en cause d'appel de 2000 euros à [Y] [W].
Le surplus des prétentions des parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.
Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, le jugement dont appel est confirmé en ce qu'il a condamné la société SAMAT RHONE ALPES, succombant à l'instance, aux dépens de première instance et elle doit également être tenue des dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Rectifie l'erreur matérielle entachant le jugement déféré en ce que la composition du Bureau de jugement doit être modifiée comme suit :
la mention « Madame « [J] [I] assesseur (E) »
doit être remplacée par celle « Monsieur [H] [B] (E) »
Confirme la décision entreprise sauf en celle de ses dispositions ayant statué sur la consultation des délégués du personnel,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Condamne la société SAMAT RHONE ALPES à payer à monsieur [Y] [W] la somme de 34 037,40 € à titre d'indemnité pour défaut de consultation des délégués du personnel ;
Y ajoutant,
Condamne la société SAMAT RHONE ALPES à payer une indemnité complémentaire en cause d'appel de 2000 euros à monsieur [Y] [W] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société SAMAT RHONE ALPES aux dépens de l'instance.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE