La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2020 | FRANCE | N°18/04616

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 30 juin 2020, 18/04616


PS



N° RG 18/04616 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JYCB



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE



la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
r>

COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 30 JUIN 2020



Appel d'une décision (N° RG 17/00560)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 09 octobre 2018

suivant déclaration d'appel du 09 Novembre 2018



APPELANTE :



SAS CATERPILLAR FRANCE, prise en la personne de son représentant légal en e...

PS

N° RG 18/04616 - N° Portalis DBVM-V-B7C-JYCB

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE

la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 30 JUIN 2020

Appel d'une décision (N° RG 17/00560)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 09 octobre 2018

suivant déclaration d'appel du 09 Novembre 2018

APPELANTE :

SAS CATERPILLAR FRANCE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Delphine DUMOULIN de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Laure ALVINERIE de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMES :

Monsieur [K] [G]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE

Syndicat CFTC DE LA METALLURGIE ISERE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Philippe SILVAN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseiller,

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 17 Décembre 2019,

Valéry CHARBONNIER, chargée du rapport, assistée de Valérie DREVON, greffière, en présence de Victor BAILLY, juriste assistant, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 25 Février 2020, prorogé au 05 Mai 2020 puis au 30 Juin 2020 en raison de l'état d'urgence sanitaire, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 30 Juin 2020.

Exposé du litige :

M. [K] [G] exerce les fonctions de coordonnateur au sein de la SAS Caterpillar France depuis le 1er novembre 2011.

Par arrêt du 25 novembre 2014, rendu entre la SAS Caterpillar France et la SARL Caterpillar Commercial Services, d'une part, et le Syndicat SYMETAL 38 d'autre part, la cour d'appel de Grenoble a notamment :

' Condamné les sociétés Caterpillar France et Caterpillar Commercial Services à régler à leurs salariés non-cadres respectifs la « récompense du travail d'équipe » due aux membres de leur groupe respectif de direction de grade 19, sous les conditions et selon modalités définies par le STIP 2008, pour les années 2008, 2009 et 2010 ;

' Déclaré irrecevable la demande des sociétés Caterpillar France et Caterpillar Commercial Services tendant à la compensation entre les sommes versées au personnel au titre de l'intéressement 2008 et les primes litigieuses ;

' Condamné les sociétés Caterpillar France et Caterpillar Commercial Services à payer au syndicat Symétal 38 une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamné les sociétés Caterpillar France et Caterpillar Commercial Services aux dépens de première instance.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble le 22 janvier 2015 aux fins de solliciter la condamnation de son employeur à lui verser diverses indemnités.

L'affaire a été renvoyée devant le conseil de prud'hommes de Valence à la suite d'une requête en suspicion légitime déposée par la société Caterpillar France et enrôlée à la date du 17 octobre 2017.

Le syndicat CFTC métallurgie de l'Isère intervient volontairement dans le cadre de cette procédure.

Par jugement en date du 9 octobre 2018, le conseil de prud'hommes de Valence a :

' Dit et jugé que M. [G] est victime d'une rupture d'égalité de traitement au titre de la prime STIP ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) à payer à M. [G] les sommes suivantes :

' 3 211,24 euros au titre de rappel de prime STIP pour les années 2014 et 2015 ;

' 321,12 euros au titre des congés payés afférents ;

' 1 500,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) à payer au syndicat CFTC de la métallurgie de l'Isère la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi compte tenu de l'atteinte portée aux intérêts collectifs de la profession représentée par ce syndicat ;

' Dit qu'il n'y a pas lieu de prononcer l'exécution provisoire hors des cas où elle est de droit ;

' Débouté M. [G] du surplus de ses demandes ;

' Débouté la société Caterpillar France (SAS) de ses demandes ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) aux dépens de l'instance.

La SAS Caterpillar France a interjeté appel de la décision en sa globalité par déclaration en date du 9 novembre 2018.

Par conclusions en réponse en date du 2 août 2019, la SAS Caterpillar France demande de :

A titre principal,

' Débouter la CFTC et M.[G] de leur appel incident ;

' Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Valence le 9 octobre 2018 en ce qu'il a :

' Dit que M.[G] est victime d'une rupture d'égalité de traitement au titre de la prime STIP ;

' Dit que M.[G] doit bénéficier du versement de la prime STIP pour les années 2014 et 2015 au taux de 9 % ;

' Condamné la société Caterpillar France SAS à payer à M.[G] les sommes suivantes :

' 3 211,24 euros à titre de rappel de la prime STIP pour les années 2014 et 2015 ;

' 321,12 euros au titre des congés payés afférents ;

' 150 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile ;

' Condamné la société Caterpillar France SAS à payer au syndicat CFTC Métallurgie de l'Isère la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi compte tenu de l'atteinte porté aux intérêts collectifs de la profession représentée par ce syndicat ;

' Déboute la société Caterpillar France SAS de ses demandes ;

' Condamne la société Caterpillar France SAS aux dépens de l'instance ;

Et statuant à nouveau,

' Dire et juger mal fondées les prétentions de M.[G] au sujet du STIP, l'atteinte à l'égalité de traitement n'étant pas démontrée ;

' Débouter M.[G] de ses prétentions à caractère salarial et indemnitaire ;

' Dire et juger que la CFTC ne justifie pas d'un préjudice direct ou indirect porté à l'intérêt collectif de la profession ;

' Débouter la CFTC de ses demandes ;

' Condamner M.[G] et la CFTC in solidum au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives en date du 7 mai 2019, M. [G] demande de :

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

' Dit et jugé que M.[G] est victime d'une rupture d'égalité de traitement au titre de la prime STIP ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) à payer à M.[G] les sommes suivantes :

' 3 211,24 euros au titre de rappel de prime STIP pour les années 2014 et 2015 ;

' 321,12 euros au titre des congés payés afférents ;

' 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) aux dépens de l'instance ;

' L'infirmer pour le surplus, et, statuant à nouveau,

' Condamner la société Caterpillar France à verser à M.[G] la somme de 5 000 euros nets de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi ensuite du défaut de paiement du STIP ;

' Condamner la société Caterpillar France à verser à M.[G] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

Par conclusions récapitulatives en date du 7 mai 2019, le Syndicat départemental CFTC de la Métallurgie Isère demande de :

' Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

' Dit et jugé que M. [G] est victime d'une rupture d'égalité de traitement au titre de la prime STIP ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) à payer à M. [G] les sommes suivantes :

' 3 211,24 euros au titre de rappel de prime STIP pour les années 2014 et 2015 ;

' 321,12 euros au titre des congés payés afférents ;

' 1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

' Condamné la société Caterpillar France (SAS) aux dépens de l'instance ;

' L'infirmer pour le surplus, et, statuant à nouveau,

' Condamner la société Caterpillar France à verser au syndicat CFTC de la métallurgie de l'Isère la somme de 5 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi compte tenu de l'atteinte portée aux intérêts collectifs de la profession représentée par ce syndicat ;

' Condamner la société Caterpillar France à verser au syndicat CFTC de la métallurgie de l'Isère la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 décembre 2019 et l'affaire a été fixée à plaider le 17 décembre 2019.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI

Sur le paiement du STIP

Le droit applicable

Il est de principe que la seule catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Moyens des parties

La SAS Caterpillar France fait valoir que :

' C'est à tort que le CPH de Valence l'a condamnée au paiement de rappels de salaires pour les années 2014 et 2015 sur le fondement de l'arrêt rendu le 25 novembre 2014 par la cour d'appel de Grenoble ;

' Dans un arrêt du 5 juillet 2017, la cour de cassation a rappelé que les salariés qui n'ont pas été parties à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 25 novembre 2014 ne pouvaient se prévaloir de l'autorité de la chose jugée à leur profit ;

' La chambre sociale de la cour d'appel de Grenoble s'est prononcée à plusieurs reprises sur l'absence d'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 25 novembre 2014 ;

' La Cour de cassation a réitéré cette position dans un arrêt du 14 novembre 2018 ;

' La cour d'appel de Lyon a également statué en ce sens dans un arrêt du 8 décembre 2017 ;

' Le salarié doit établir l'existence d'une prétendue inégalité de traitement qui lui porterait préjudice, sans pouvoir invoqué l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 25 novembre 2014, dès lors qu'il n'était pas partie à la procédure (effet relatif de la chose jugée) et qu'il est de jurisprudence constante que la référence à une décision rendue dans un litige différent de celui soumis à une juridiction ne saurait servir de fondement à la décision de cette dernière ;

' Le principe « à travail égal, salaire égal » n'impose pas une uniformité absolue des rémunérations ou des conditions d'emploi ; l'employeur est seulement tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés placés dans une situation identique ;

' Le STIP est une part variable de salaire, ce qui ressort de plusieurs communications internes à la société antérieures au litige, ne s'appliquant qu'aux cadres, les non-cadres ayant rejeté l'idée d'une variabilité de leurs salaires jusqu'en 2011 ;

' Les différences d'ordre juridique entre les cadres et les non-cadres constituent des raisons objectives justifiant la mise en place de deux systèmes de rémunération pour les cadres et les non-cadres jusqu'en 2011, année au cours de laquelle les non-cadres ont décidé de participer au système de rémunération variable STIP ;

' La participation des non-cadres à ce système de rémunération à partir de 2011 pour une partie de leur salaire moindre que celle des cadres (3 % pour les non-cadres en lieu et place de 9 % pour les cadres), n'entraîne toutefois aucune inégalité salariale entre ces deux catégories professionnelles ;

' Le travail des cadres et celui des non-cadres ne peuvent être considérés comme ayant une valeur égale au sens du principe « à travail égal, salaire égal » ;

' Le STIP tient compte des spécificités propres aux populations de cadres et de non-cadres, en ce que les non-cadres n'acceptent pas une variabilité salariale de grande amplitude (pas plus de 5 % du salaire) ;

' En 2011, les salariés non-cadres ont fait le choix d'un STIP de 3 %, porté aujourd'hui à 4 % ; cette différence voulue par les salariés suffit à justifier la différence de traitement ;

' Tous les salariés sont payés au niveau de leur rémunération de référence, soit de manière entièrement fixe (non-cadres), soit par une combinaison d'une partie fixe et d'une partie variable (cadres), ce qui n'entraîne aucune inégalité ;

' Ce n'est parce qu'un élément de rémunération est calculé sur la base d'une performance collective qu'il doit nécessairement bénéficier à l'ensemble des salariés, sauf à confondre les critères d'éligibilité à une rémunération avec les critères de calcul de l'élément de rémunération variable ;

' Le salarié ne démontre pas que les taux de 3 % pour 2014 et 3,6 % pour 2015, unilatéralement reconduit par l'employeur, ne sont pas fondés sur des raisons objectives, dès lors que le nouvel accord collectif triennal conclu en 2016 a fixé un pourcentage identique ;

' L'accord triennal de 2011-2013 a continué à produire ses effets en 2014 et 2015 en application des dispositions de l'article L. 2222-4 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur avant 2016, qui prévoyait que la convention ou l'accord à durée déterminée arrivant à expiration continue à produire ses effets comme une convention ou un accord à durée indéterminée ;

' Subsidiairement,

' Le calcul du STIP pour le salarié devra suivre la situation des cadres, qui ont bénéficient d'une rémunération de référence de 91 % de salaire fixe et de 9 % de part variable ;

' Il convient d'ordonner au salarié le remboursement d'un indu de 411,60 euros, qui lui a été versé fin décembre 2015 et le 8 avril 2016 au titre du STIP, sans aucune reconnaissance de la part de l'employeur, afin d'éviter la paiement d'astreintes prononcées par le JEX ;

' Dans l'hypothèse d'une condamnation sur le STIP, il y aura lieu de condamner le salarié au remboursement des sommes qu'il a indûment perçues au titre de l'intéressement pour l'année 2008 ;

M.[G] fait valoir que :

' Dans un arrêt du 25 novembre 2014, la cour d'appel de Grenoble a reconnu l'existence d'une rupture d'égalité de traitement au détriment des salariés non-cadres de la société Caterpillar au regard du STIP ;

' Elle a également jugé que la cessation de la situation illicite supposait que la prime de résultat soit versées aux salariés qui en ont été privés de 2008 à 2010 et que modalités d'attribution de cette prime devaient être alignées sur celles des cadres ;

' Dans un arrêt du 22 octobre 2015, la cour d'appel de Grenoble a considéré que l'arrêt du 25 novembre 2014 s'imposait aux juridictions civiles ;

' La société Caterpillar a formé un pourvoi en cassation, mais s'est par la suite désisté de son pouvoi ;

' Elle n'est donc plus en mesure de refuser de régulariser la situation de ses salariés non-cadres au regard du STIP ;

' Si l'arrêt du 25 novembre 2014 n'a pas autorité de la chose jugée entre la société Caterpillar et les salariés, il a autorité de la chose jugée entre l'employeur et le syndicat Symétal 38 :

' La société Caterpillar a procédé à un ajustement de la rémunération des catégories ouvrier et administratif-technicien conformément à un arrêt rendu par la cour d'appel de Grenoble le 21 janvier 2016 au bénéfice de M. [C], dans lequel il est alloué à ce salarié une somme correspondant à 2,02 % de sa rémunération 2010 au titre du STIP 2010 ;

' Ce faisant, l'employeur a reconnu implicitement qu'il existait bien une rupture d'égalité de traitement et qu'il était contraint d'exécuter l'arrêt du 25 novembre 2014 ;

' La prime STIP (anciennement ICP) a été mise en place au sein de la société Caterpillar à la fin des années 1980 de manière « clandestine » et illégale ;

' La mise en place de cette prime n'a fait l'objet d'aucune consultation du CE et n'a fait l'objet d'aucune négociation ;

' Ce n'est que de manière incidente que les RP ont appris en avril 1989 l'existence de cette prime exceptionnelle versée aux seuls cadres de l'entreprise ; lors de cette réunion extraordinaire du CE, les membres du CE sont uniquement informés de cette prime, mais ne sont pas consultés ;

' Contrairement à ce que soutient l'employeur, il n'a jamais été décidé par les partenaires sociaux en 1995 que la prime ICP puis STIP serait exclusivement réservée aux cadres ;

'Il n'est pas démontré que les demandeurs ont précisément refusé la mise en place du STIP pour les salariés non-cadres ;

' Il n'est pas démontré que le STIP a été proposé individuellement à chaque salarié demandeur ;

' Lors d'un référendum, les salariés ont refusé le principe d'un gel de leur rémunération que l'employeur souhaitait assortir à l'extension du STIP, mais pas le principe du STIP ;

' L'employeur ne justifie d'aucune élément objectif permettant de fonder cette disparité de traitement entre les cadres et les non-cadres ;

' Il est établi que le STIP ne dépend pas de la situation individuelle des salariés mais des résultats de leur unité d'appartenance, toutes catégories professionnelles confondues ;

' Rien ne justifie que les salariés non-cadres aient été exclus du STIP pour la période antérieure à 2011 et qu'ils aient bénéficié d'un STIP basé sur un pourcentage injustement minoré en 2014 et en 2015 ;

' La demande du salarié calculé sur le pourcentage de 9 % applicable aux salariés cadres de grade 19 est parfaitement fondée ;

' Il est erroné, et dans tous les cas pas établi, que les salariés cadres percevraient une part variable de leur salaire sous la forme du STIP ;

' Les éléments versés aux débats démontrent que le STIP est une prime exceptionnelle ; elle ne peut donc pas constituer une part variable de la rémunération des cadres ;

' Le salaire des cadres augmentent chaque année individuellement en fonction de leurs mérites, dans le cadre d'un budget fixé chaque année ;

' Le salaire des non-cadres augmentent chaque année pour partie par des augmentations générales, pour le reste, par une augmentation individuelle au mérite, le tout dans le cadre d'un budget négocié chaque année ;

' L'accord de 2011 qui a étendu le STIP aux salariés non cadres indique précisément que le STIP est une prime exceptionnelle de résultat dont les modalités de calcul et d'octroi sont susceptibles de changer à tout moment en fonction des décisions unilatérales du groupe Caterpillar ;

' Il est précisément indiqué que le STIP a la nature juridique d'une prime ;

' Le salaire de référence des salariés permettant de calculer les indemnités de congés payés ne prend pas en compte le STIP ;

' L'inspection du travail a interrogé à plusieurs reprises l'employeur sur ce point, sans obtenir aucune réponse ;

' Pour qu'une prime ait un caractère discrétionnaire et aléatoire et que l'employeur puisse unilatéralement la supprimer, elle doit s'ajouter à la rémunération annuelle et en aucun cas constituer l'une de ses composantes, sauf à violer un principe général du droit ;

' Les contrats de travail des cadres confirme cette analyse du STIP ;

' Les salaires des non-cadres n'ont pas été diminués de 3 % à compter de 2011 lors de l'entrée en vigueur de l'accord sur le STIP ;

' L'employeur ne démontre pas avoir diminué le salaires des non-cadres lors de la mise en place du STIP à la fin des années 1980 ;

' L'employeur soutient à tort que la décision rendue par la cour d'appel le 21 janvier 2016 au bénéfice de M. [C] lui impose seulement un paiement proche de 2 % de la rémunération 2010 pour les catégories ouvrier et administratif-technicien, dès lors que le STIP constitue une rémunération variable des cadres à hauteur de 9 % (les cadres ayant perçu une rémunération variable de 11,02 % en 2010, les non-cadres seraient seulement fondés à prétendre à un STIP équivalent à la différence entre ces deux pourcentages, soit 2,02%), dès lors que la cour d'appel n'a pas eu à se prononcer sur ce point, celui-ci n'étant pas contesté par le salarié ;

' L'employeur ne verse aucun élément justifiant qu'allouer aux non-cadres un STIP basé sur 9 % de leur rémunération annuelle reviendrait à les payer au-delà de leur rémunération de référence et à créer ainsi une rupture d'égalité de traitement par rapport aux cadre de grade 19 ;

' L'unique pièce versée par l'employeur a été rédigée en mai 2016 pour les besoins de la cause ; il résulte dans tous les cas de cette pièce que les cadres sont majoritairement payés au-dessus du marché s'agissant de leur salaire de base, alors que les non-cadres sont payés en-deçà du marché ;

Sur ce,

Aux termes d'un accord catégoriel du 6 juillet 2011, signé avec les organisations syndicales représentatives de l'entreprise, la société Caterpillar a mis en place un STIP au bénéfice du personnel qui n'en bénéficiait pas à ce jour d'un taux de 3 % à compter du 1er janvier 2011 pour une durée de trois ans jusqu'au 31 décembre 2013.

La société Caterpillar a décidé de reconduire unilatéralement la prime STIP d'un taux de 3 % pour l'ensemble du personnel non-cadre pour l'année 2014 et a mis unilatéralement en place la prime STIP d'un taux de 3,6 % pour l'année 2015.

M.[G] soutient que la différence de taux prévu par l'employeur pour le calcul de la prime STIP constitue un manquement au principe de l'égalité de traitement, dès lors que les salariés cadres et les salariés non-cadres sont placés dans une situation identique au regard de ladite prime, celle-ci ayant exclusivement pour objet de rétribuer le travail d'équipe, la SAS Caterpillar France n'apportant aucun élément objectif permettant de justifier la différence de traitement.

La SAS Caterpillar France soutient que le STIP constitue une part variable du salaire des cadres, ce qui justifierait la différence de traitement, dès lors que les salariés cadres, à l'inverse des salariés non-cadres, ne perçoivent pas l'intégralité de leur salaire de base de référence.

Sur l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 25 novembre 2014

M.[G] n'étant pas partie à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 25 novembre 2014, il ne peut invoquer le bénéfice de l'autorité de la chose jugée s'attachant à cette décision pour soutenir que la SAS Caterpillar France serait tenue de lui verser un rappel de salaires au titre du STIP pour les années 2014 et 2015 au titre de l'exécution de cette décision.

S'agissant du STIP au titre des années 2014 et 2015

Aux termes d'un accord catégoriel du 6 juillet 2011, signé avec les organisations syndicales représentatives de l'entreprise, la société Caterpillar a mis en place un STIP au bénéfice du personnel qui n'en bénéficiait pas à ce jour d'un taux de 3 % à compter du 1er janvier 2011 pour une durée de trois ans jusqu'au 31 décembre 2013.

La société Caterpillar a décidé de reconduire unilatéralement la prime STIP d'un taux de 3 % pour l'ensemble du personnel non-cadre pour l'année 2014 et a mis unilatéralement en place la prime STIP d'un taux de 3,6 % pour l'année 2015.

M.[G] soutient que la différence de taux prévu par l'employeur pour le calcul de la prime STIP constitue un manquement au principe de l'égalité de traitement, dès lors que les salariés cadres et les salariés non-cadres sont placés dans une situation identique au regard de ladite prime, celle-ci ayant exclusivement pour objet de rétribuer le travail d'équipe.

S'agissant de la nature du STIP, à l'examen des pièces versés aux débats par les parties et des moyens débattus, il y a lieu de retenir que le STIP constitue une prime variable à destination des salariés cadres résultant manifestement d'un usage d'entreprise, dont le montant, variable d'une année à l'autre, est calculé en fonction de critères de performance de l'entreprise et de l'unité de laquelle relève le cadre préalablement définis chaque année par la direction et d'un taux qui varie en fonction de la classification desdits cadres.

En effet, l'employeur échoue à démontrer que le STIP constituerait, comme il le soutient dans ses écritures, une part variable du salaire des cadres, dès lors qu'il ne ressort pas de manière claire et précise des documents qu'il produit concernant le calcul du STIP que le versement de cette prime serait contractualisée et constituerait ainsi un élément de la structure de rémunération des cadres, et qu'il ne verse aux débats aux débats ni contrats de travail ni bulletins de salaires de salariés cadres permettant d'étayer ses allégations.

S'agissant de l'objet du STIP, il y a lieu de constater que dans le document versé aux débats par la SAS Caterpillar France, intitulé « STIP 2008 Short Term Incentive Plan », à destination des salariés cadres concernant l'objet et le calcul du STIP, le STIP est désigné par l'expression « récompense du travail d'équipe » (« Team Award » en anglais) », et il est également précisé que « l'objectif du STIP (Short Term Incentive Plan) est de donner la possibilité aux membres du Groupe de Direction d'avoir accès à une rémunération variable sous forme de prime exceptionnelle liée aux résultats de Caterpillar Inc. (et de) l'unité à laquelle ils appartiennent », et que « ce plan doit être considéré comme un encouragement de la société envers les efforts continus réalisés en vue d'améliorer la performance globale de l'unité et de Caterpillar Inc. d'une part, et la performance individuelle d'autre part. Il vise également à promouvoir l'esprit d'équipe, par la détermination d'objectifs communs à réaliser ».

Cependant, il ne résulte pas de l'emploi de ces expressions ni d'aucun autre élément versé aux débats par les parties que le terme « équipe » employé dans le document précité renvoie sans ambiguïté à un groupe constitué de salariés cadres et de salariés non-cadres et non pas seulement un groupe constitué exclusivement de salariés cadres.

En outre, il y a lieu de relever que le mode de calcul de la prime STIP tient compte du travail accompli à titre individuel par chacun salarié cadre puisqu'il est indiqué dans ce même document que « les managers dont les résultats sont jugés « insuffisants » ne sont pas éligibles au STIP (notation « R5 ») (et que) les managers dont le travail a été jugé « nécessitant des améliorations » sont éligibles à hauteur de 50 % de la prime (notation « R4 ») », ce dont il résulte que le STIP n'a pas vocation à récompenser exclusivement un travail d'équipe, mais vise également à récompenser la performance individuelle dans le travail.

Enfin, il ne ressort pas de ce même document que le STIP aurait un objet autre que celui de rétribuer le travail accompli par les salariés cadres.

Par conséquent, il convient de retenir que le STIP constitue une prime variable n'ayant pas d'objet spécifique étranger au travail accompli ou destiné à compenser une sujétion particulière, et qu'ainsi il participe à la rémunération annuelle des salariés cadres au même titre que le salaire de base, en contrepartie du travail à l'égard duquel les salariés cadres et non cadres ne sont pas placés dans une situation identique, eu égard notamment aux responsabilités qui leur incombent s'agissant des résultats à atteindre fixés par leur propre hiérarchie.

Ainsi, il y a lieu de retenir que l'employeur n'a pas manqué au principe de l'égalité de traitement en prévoyant pour les salariés non cadres un STIP d'un taux inférieur à celui des salariés cadres au titre de l'année 2014 et de l'année 2015.

M.[G] est débouté de ses demandes formulées à ce titre, y compris de sa demande de réparation du préjudice moral qu'il prétend avoir subi en conséquence de la violation alléguée par son employeur du principe de l'égalité de traitement, par infirmation du jugement entrepris.

Sur les demandes formulées par le syndicat CFTC de la Métallurgie Isère

Le droit applicable

Aux termes des dispositions de l'article L.2132-3 du code du travail, les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice et peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

Moyens des parties

La SAS Caterpillar France soutient que :

' Un syndicat ne peut formuler une demande indemnitaire sur le fondement des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail, que si les faits invoqués par les demandeurs portent un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ;

' La présente instance concerne exclusivement M. [G] et ne concerne pas l'intérêt collectif de la profession ;

' La CFTC ne justifie d'aucun préjudice direct ou indirect ; elle ne justifie pas du quantum de sa demande indemnitaire ;

Le syndicat CFTC Métallurgie Isère soutient que :

' Le critère d'intervention réside dans le préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ;

' La rupture d'égalité illégale subie par les salariés porte atteinte aux intérêts collectifs des salariés représentés par la CFTC ;

' Le syndicat a depuis plusieurs années accompagné un certain nombre de salarié en vue de la régularisation de leur situation ;

' Certains des salariés concernés par la rupture d'égalité de traitement sont membres du syndicat, dont M. [G].

Sur ce,

Dès lors que le salarié a été débouté de l'ensemble de ses demandes formulées au titre du manquement à l'égalité de traitement, il y a lieu de considérer que le syndicat CFTC Métallurgie Isère ne peut se prévaloir d'aucun préjudice direct ou indirect porté à l'intérêt de la profession qu'il représente.

Par conséquent, le syndicat CFTC Métallurgie Isère est débouté de sa demande de réparation, par infirmation du jugement entrepris.

Sur les demandes accessoires

Il convient d'infirmer le jugement déféré dans ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens. Au titre de la première instance, il y a lieu d'écarter l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner M.[G] aux dépens.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la situation respective des parties, l'équité commande d'écarter l'application de l'article 700 du Code de procédure civile devant la cour.

M.[G] qui succombe à hauteur de cour est condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Valence en date du 9 octobre 2018 dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE M. [K] [G] du surplus de ses demandes ;

DEBOUTE le Syndicat départemental CFTC de la métallurgie Isère du surplus de ses demandes ;

DEBOUTE la SAS Caterpillar France du surplus de ses demandes ;

CONDAMNE M. [K] [G] aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur SILVAN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame ROCHARD, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 18/04616
Date de la décision : 30/06/2020

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°18/04616 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-30;18.04616 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award