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05/12/2019 | FRANCE | N°17/04156

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 05 décembre 2019, 17/04156


FB



N° RG 17/04156



N° Portalis DBVM-V-B7B-JF63



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :









Me Yann BOISADAM



la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES





AU NOM DU PEUPLE FR

ANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 05 DECEMBRE 2019





Appel d'une décision (N° RG F15/00067)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 09 juin 2016

suivant déclaration d'appel du 22 juin 2016 sous le N° RG 16/3321

radiation le 27 février 2017

et réinscription le 21 août 2017





APPE...

FB

N° RG 17/04156

N° Portalis DBVM-V-B7B-JF63

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Yann BOISADAM

la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 05 DECEMBRE 2019

Appel d'une décision (N° RG F15/00067)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 09 juin 2016

suivant déclaration d'appel du 22 juin 2016 sous le N° RG 16/3321

radiation le 27 février 2017

et réinscription le 21 août 2017

APPELANTE :

Société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

non comparante, représentée par Me Yann BOISADAM, avocat au barreau de LYON substitué par Me Maxime SENETERRE, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur [Z] [O]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

non comparant, représenté par Me Adrien RENAUD de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

Madame [Y] [R]

née le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

non comparant, représentée par Me Adrien RENAUD de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/10585 du 01/12/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Blandine FRESSARD, Présidente,

Monsieur Frédéric BLANC, Conseiller,

Monsieur Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Octobre 2019, Monsieur BLANC, Conseiller est entendu en son rapport.

Les représentants des parties ont été entendus en leurs observations et plaidoiries.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE :

Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] ont régularisé le 4 Septembre 2012 avec la société DISTRIBUTION CASINO France un contrat de cogérance non salariée en vue d'assurer la gestion et l'exploitation d'un magasin sous l'enseigne PETIT CASINO à [Localité 6].

Il est stipulé une rémunération des cogérants sous forme d'une commission fixe sur le chiffre d'affaires réalisé par le magasin, prévue dans son montant dans l'annexe du contrat, à savoir 6,20 % sur l'ensemble des ventes réalisées.

Monsieur [O] et Madame [R] ont relevé du statut de gérant non salarié, statut dont le principe et les modalités sont fixés par le Code du travail aux articles L.7222-1 et suivants, et par un accord collectif national du 18 Juillet 1963.

Ils ont ensuite régularisé un nouveau contrat de cogérance non salariée avec la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE en date du 5 août 2013 leur confiant la gérance d'un magasin SPAR situé à [Localité 4].

Le 31 Mars 2014, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a effectué un inventaire dans le magasin qui a fait ressortir des manquants de marchandises et/ou d'espèces d'un montant de 32.000 €, outre un manquant d'emballages de 5300 €.

Le 30 juin 2014, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a effectué un nouvel inventaire faisant ressortir un déficit de 31747 euros de marchandises et de 5299 euros d'emballages.

Par courrier en date du 25 août 2014, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a convoqué Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] à un entretien préalable à une éventuelle résiliation du contrat de gérance fixé au 3 septembre 2014.

Par courrier en date du 22 septembre 2014, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a notifié à Monsieur [Z] [O] et à Madame [Y] [R] la résiliation de leur contrat de gérance au motif allégué du solde débiteur du compte général de dépôt de 34527,67 euros à la date du 1er juillet 2014.

Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] ont saisi de manière séparée le Conseil de Prud'hommes de BOURGOIN JALLIEU le 16 mars 2015.

Par jugement en date du 9 juin 2016, le Conseil de Prud'hommes de BOURGOIN-JALLIEU a :

- ordonné la jonction des affaires n°15/00066 et n°15/00067 sous ce dernier numéro

- requalifié les contrats de co-gérance non salariée de Madame [Y] [R] et de Monsieur [Z] [O] en contrat de travail à durée indéterminée

- dit que la rupture des relations contractuelles s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- dit que la rupture du contrat de co-gérance en l'espèce est abusive sur le déficit de gestion qui n'est pas démontré

- condamné la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer les sommes suivantes :

Pour Madame [Y] [R] et Monsieur [Z] [O] :

- la somme de 20000 euros soit 10000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier

- la retenue de rémunération abusive des commissions faite par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE sur le mois d'avril 2014 de Monsieur [Z] [O], soit 1968,37 euros et de 193,63 euros de congés payés afférents à ce rappel

il n'est pas démontré que Madame [Y] [R] ait subi une retenue abusive sur le mois d'avril 2014

les sommes allouées porteront intérêts à la date du présent jugement

Pour Monsieur [Z] [O] :

- 14190 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4730 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, deux mois de salaire catégorie 2 (soit 2365 X 2)

- 473 euros au titre des rappels de congés payés

- 946 euros au titre de l'indemnité légale de rupture

- 17567,73 euros à titre de rappel de rémunération et congés payés afférents pour les années de 2012 à 2014

- 1756,73 euros au titre des congés payés afférents de 2012 à 2014

- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

dit que les sommes porteront intérêts à la date du présent jugement

Pour Madame [Y] [R] :

- 14190 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 4730 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, deux mois de salaire catégorie 2 (soit 2365 X 2)

- 473 euros au titre des rappels de congés payés

- 946 euros au titre de l'indemnité légale de rupture

- 32426,80 euros à titre de rappel de rémunération et congés payés afférents pour les années de 2012 à 2014

- 3242,68 euros au titre des congés payés afférents de 2012 à 2014

- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

dit que les sommes porteront intérêts à la date du présent jugement

- débouté Madame [Y] [R] et Monsieur [Z] [O] de leur demande de 52124,56 euros chacun à titre de rappels d'heures supplémentaires et congés payés afférents, les documents remis à l'audience démontre l'absence de justification d'heures supplémentaires

- ordonné à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de délivrer à Madame [Y] [R] et Monsieur [Z] [O] les documents de fin de contrat conformément à la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, un mois après la notification de la décision

- débouté la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de sa demande reconventionnelle

- mis les entiers dépens à la charge de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a interjeté appel le 22 juin 2016.

L'affaire a fait l'objet d'une radiation le 27 février 2017.

L'affaire a été réinscrite le 21 août 2017 lors de la notification par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de ses conclusions d'appelante.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE s'en est remise à des conclusions transmises au greffe le 1er octobre 2019 et entend voir :

- débouter les consorts [O] et [R] de l'intégralité de leurs demandes

- condamner chacun à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

Elle fait valoir que :

- contractuellement, Monsieur [O] et Madame [R] s'étaient vu confier la gestion d'un magasin et ils étaient gérants mandataires non salariés, à savoir qu'ils avaient pour mandat de la société CASINO DISTRIBUTION FRANCE de vendre les marchandises fournies par elle à l'égard de laquelle ils étaient par ailleurs dépositaires de la marchandise et des espèces provenant de la vente. Ils ne sont ni salariés ni commerçants.

- s'agissant de la demande de requalification du contrat de gérances non salariées en contrats de travail, les demandeurs ne prouvent pas qu'ils auraient été sous la subordination juridique et économique de la société CASINO FRANCE et que le statut des gérants non salariés des succursales de commerce de détail alimentaire n'aurait pas été respecté en ce que :

- ils ont bien été rémunérés selon des commissions proportionnelles à la marchandise vendue selon un taux de 6,20 % supérieur à celui prévu par l'accord collectif national du 18 juillet 1963 et qu'ils ont fait le choix d'une répartition égalitaire entre eux. Le minimum conventionnel garanti prévu pour une succursale de 2ième catégorie n'a pas à être versé à chaque co-gérant en cas de co-gérance. Ils ne peuvent prétendre chacun à une rémunération équivalente au SMIC sans discuter au préalable de la durée de leur temps de travail.

- ils avaient toute latitude pour embaucher des salariés et se faire remplacer et il ne saurait être ajouté une condition d'effectivité contrariée par une rémunération présentée comme insuffisante. Ils ont au demeurant fait appel aux services d'une stagiaire.

- ils étaient libres de fixer leurs propres conditions de travail. Un lien de subordination ne saurait être tiré des seules obligations commerciales à son égard (prix et fournitures exclusives des marchandises par CASINO, règles de commandes et de livraisons des marchandises, obligation de participer à la politique commerciale, réalisation d'inventaires périodiques, communications de documents et protocoles) dès lors que celles-ci se justifient par le fait qu'elle assume le risque de gestion et que le mandat nécessite un certain nombre de règles d'organisation.

- il n'y a aucun contrôle de sa part des horaires d'ouverture, des ventes et encaissements par le biais des caisses enregistreuses. La société CASINO ne peut s'immiscer dans la gestion du gérant via le logiciel « caisses »- la vérification de l'application de la politique commerciale et l'assistance commerciale et administrative aux gérants ne peuvent être assimilées à un contrôle et à des directives.

- aucune pièce produite par les demandeurs n'établit qu'elle aurait pu leur imposer des horaires d'ouverture - elle n'a pas imposé aux demandeurs leurs périodes de congés mais propose un service facultatif de remplacement par des gérants mandataires intérimaires des gérants mandataires pendant leurs congés.

- s'agissant des prétentions au titre des heures supplémentaires, elles ne sont pas fondées en ce que :

- les demandeurs ne prouvent pas qu'elle leur a imposé à titre individuel une durée du travail alors qu'ils ont été libres de fixer les horaires d'ouverture/fermeture du magasin.

- à supposer applicables les dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail, les éléments fournis par les demandeurs ne sont pas suffisants puisqu'ils sont dressés à partir des horaires d'ouverture/fermeture du magasin, sans précision quand au travail effectif de chacun, qu'ils sont établis mensuellement et non de manière hebdomadaire et qu'ils sont réalisés de manière générale selon une moyenne et non en fonction du travail effectif.

- elle n'a pas procédé à des prélèvements de commissions d'office mais à une répétition d'indu de commission sur des marchandises manquantes suite à l'inventaire du 1er avril 2014. A supposer les contrats requalifiés en contrats de travail, il ne s'agit pas d'une sanction pécuniaire prohibée mais de la répétition de sommes indument perçues.

- la résiliation du contrat de co-gérance à son initiative est justifiée au visa de l'article 6-2 du contrat de gérance et de l'accord national du 18 juillet 1963 en ce qu'ils n'ont pas comblé sans délai le déficit de marchandises constaté lors de l'inventaire ou fourni des explications. Les demandeurs à l'instance inversent la charge de la preuve en ce qu'il leur appartient en leur qualité de mandataires et de gérants de justifier de l'existence de la marchandise qui leur a été confiée et des recettes provenant des ventes et le cas échéant, d'une cause étrangère permettant de déterminer l'origine du manquant constaté. Les consorts [O]/[R] ont signé l'attestation d'inventaire du 30 juin 2014 et ont fait des remboursements partiels. Ils n'ont pas fait d'observations à la situation d'inventaire dans les 15 jours de sa notification. Il ne lui appartient pas et elle est dans l'impossibilité de fournir la liste en nature des marchandises manquantes puisqu'il peut s'agir également d'espèces provenant des ventes et que seuls les co-gérants ont en réalité les éléments.

Le déficit ne peut s'expliquer ni par les changements de prix opérés par la société CASINO DISTRIBUTION FRANCE puisqu'il appartient aux co-gérants d'effectuer les démarches nécessaires en magasin ni par des dysfonctionnements du logiciel GOLD, qui ont été solutionnés.

- elle n'a pas mis à pied disciplinairement les consorts [O]/[R] en l'absence de contrat de travail mais suivi la procédure contractuelle de résiliation du contrat de gérance non salariée.

Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] s'en sont remis à des conclusions transmises au greffe le 17 septembre 2019 et entendent voir :

Vu l'article 1134 du Code civil,

Vu les articles L. 1226-2 ; L. 1226-10 ; L.1235-3 ; L.3171-4 et L.7322-1 et suivants du Code du travail,

Vu l'accord collectif national du 18 Juillet 1963 ;

Vu la jurisprudence ;

Confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de BOURGOIN JALLIEU en date du 9 Juin 2016 en ce qu'il a :

' Requalifié le contrat de cogérance non salariée de Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] en contrats de travail salarié à durée indéterminée ;

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 10.000 € chacun en réparation de leur préjudice financier du fait de l'exécution déloyale du contrat ;

' Jugé la rupture du contrat de Monsieur [O] et Madame [R] notifiée le 22 Septembre 2014 sans cause réelle et sérieuse ;

' Condamné en conséquence la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 14.190 € chacun à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à porter cette somme à un montant de 18.000 € chacun ;

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 4730 € chacun au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 473 € chacun au titre des congés payés afférents ;

Subsidiairement CONDAMNER la société DCF à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 2890,76 € chacun, outre la somme de 289 € chacun au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 946 € chacun au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

Subsidiairement, CONDAMNER la société DCF à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 578,15 € chacun, outre la somme de 57,81 € chacun au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamné à régler à Monsieur [O] la somme de 1968,37 € au titre des retenues abusives de rémunération effectuées de 2012 à 2014, outre le somme de 193,63 € au titre des congés payés afférents ;

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] la somme de 17.567,73€ au titre des rappels de rémunération de 2012 à 2014, outre 1756,73 € au titre des congés payés afférents ;

Subsidiairement CONDAMNER la société DCF à régler à Monsieur [O] la somme de 1860,04 € bruts au titre des rappels de salaires calculés sur la base du SMIC, outre la somme de 186 € au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Madame [R] la somme de 32.426,80 € au titre des rappels de rémunération de 2012 à 2014, outre 3242,68 € au titre des congés payés afférents ;

Subsidiairement CONDAMNER la société DCF à régler à Madame [R] la somme de 9381,82 € bruts au titre des rappels de salaires calculés sur la base du SMIC, outre la somme de 938,18 € au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamné la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 2000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens.

' Ordonné à la société DISTRIBUTION CASINO France de délivrer à Madame [Y] [R] et à Monsieur [Z] [O] les documents de fin de contrat rectifiés conformes à leur statut de salarié, sous astreinte de 100 € par jour de retard, un mois après la notification de la décision.

Réformer le jugement pour le reste et y ajoutant :

' Prononcer l'annulation de la mise à pied disciplinaire de Monsieur [O] et de Madame [R] pour la période du 1er Aout 2014 au 23 Septembre 2014 ;

' Condamner en conséquence la société DISTRIBUTION CASINO France à verser à Monsieur [O] et Madame [R] les rémunérations dont ils ont été injustement privés du 1er Aout au 23 Septembre 2014, soit pour chacun d'eux la somme de 4178 €, outre 417 € chacun au titre des congés payés afférents.

' Condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Monsieur [O] la somme de 52.124,56 € au titre des heures supplémentaires effectuées de 2012 à 2014, outre la somme de 5212,45 € au titre des congés payés afférents ;

Subsidiairement, condamner la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] la somme totale de 32.009,49 € à titre de rappel de salaire en règlement des heures supplémentaires effectuées de Septembre 2012 à Septembre 2014, outre la somme de 3200,94 € au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à verser à Madame [R] la somme de 52.124,56 € au titre des heures supplémentaires effectuées de 2012 à 2014, outre la somme de 5212,45 € au titre des congés payés afférents ;

Subsidiairement, condamner la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] la somme totale de 32.009,49 € à titre de rappel de salaire en règlement des heures supplémentaires effectuées de Septembre 2012 à Septembre 2014, outre la somme de 3200,94 € au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts de droits à compter de la demande.

' Condamner la société DISTRIBUTION CASINO France à régler à Monsieur [O] et Madame [R] la somme de 2000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

' Condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE aux entiers dépens d'appel.

Ils font valoir que :

- les gérants non salariés doivent se voir appliquer l'ensemble de la législation sociale qui s'applique aux salariés

- leur contrat de gérant non salarié doit être requalifié en contrat de travail en ce que :

- ils n'étaient pas indépendants et la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE leur fixait leurs conditions de travail. Un certain nombre de stipulations du contrat de gérance non salarié est incompatible avec le statut de gérant non salarié : clause relative à la fixation des horaires d'ouverture du magasin par rapport aux coutumes locales, celle relative à l'impossibilité de modifier la nature, la qualité ou la présentation des marchandises, celles relatives à la responsabilité des quantités livrées et des avaries pouvant survenir aux marchandises et matériel en magasin, celle relative à la participation à la politique commerciale de CASINO, celle relative à l'obligation de signer les inventaires, celle relative à la non-contestation dans les 8 jours des bordereaux d'envoi de commissions valant approbation. Ils ont signé un contrat d'adhésion. Il y a déjà eu des requalifications pour ce même type de contrats.

- ils ont signé en commun un contrat de co-gérance et non un contrat individuel de gérance ; ce qui est contraire à l'article L 7322-3 du code du travail et à l'accord collectif du 18 juillet 1963 ;

- le contrat signé les a soumis au contrôle de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ;

- ils n'ont eu aucune liberté dans la fixation des horaires d'ouverture du magasin, les managers commerciaux de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE exerçant un contrôle à ce titre et il leur a été demandé de changer un horaire ;

- ils se sont vus imposer l'obligation d'assurer la réception des colis CDISCOUNT, société du groupe CASINO ;

- ils avaient l'obligation de passer les commandes aux dates et selon les volumes décidés par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE et non en fonction des besoins du magasin, avec des seuils minimaux ;

- les managers commerciaux de CASINO exerçaient à leur égard un contrôle exclusif de toute indépendance ;

- les manageurs commerciaux de CASINO procédaient de manière régulière à leur évaluation ;

- ils se sont vus imposer la participation à des opérations commerciales et notamment dans le cadre d'accord de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE avec d'autres entreprises (LOGIC IMMO, L'OREAL)

- ils se sont vus imposer leurs dates de congés (formulaire, date limite) ;

- la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE contrôle les ventes et les encaissements via des logiciels «caisse » (GOLD, Virtual Leader) ;

- les gérants se voient demander de transmettre leur chiffre d'affaires réalisé à des heures et des dates précises ;

- ils sont tenus de commander du matériel auprès de l'économat de CASINO ;

- ils étaient en définitive sous l'autorité hiérarchique de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, les plaçant dans un rapport de salariat ;

- ils étaient dans l'impossibilité matérielle d'embaucher du personnel et de se faire remplacer. Leur rémunération perçue était trop faible pour ce faire ;

- la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a exécuté le contrat de travail de manière déloyale

- que le contrat de gérance soit ou non requalifié en contrat de travail, dès lors que le droit du travail trouve à s'appliquer, la rupture doit être jugée sans cause réelle et sérieuse en ce que :

- la mise à pied disciplinaire doit être annulée. Lors de leur retour de congé, le manager commercial les a mis verbalement à pied et les a fait remplacer par des gérants intérimaires. Ils se sont vus notifier la mise à pied par huissier le 28 juillet 2015. La procédure légale disciplinaire du code du travail n'a pas été respectée puisqu'ils n'ont pas été convoqués à un entretien préalable et la durée de la mise à pied disciplinaire n'a pas été spécifiée, outre le fait qu'elle a été excessive (1 mois et demi)

- aucune faute ne leur est imputable. Le déficit de gestion ne peut à lui seul motiver la résiliation du contrat, qui plus est sans préavis ni indemnités. Il appartient à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de prouver une faute à leur encontre ; ce qu'elle ne fait pas.

- quoique la preuve ne leur incombe pas, il conteste tout déficit de gestion. Ils ont contesté les comptes et fait des observations mais ont été mis dans l'impossibilité de contrôler les chiffres invoqués par la partie adverse. Ils n'ont pas été destinataires des justificatifs des livraisons litigieuses ainsi que des bordereaux de livraison des marchandises alléguées comme manquantes. L'inventaire est effectué par un collaborateur de DISTRIBUTION CASINO FRANCE. Les documents fournis par la partie adverse ne répondent pas aux conditions probatoires fixées par la Cour de cassation, chambre commerciale, dans les litiges avec les gérants non salariés (procédure en cours devant le Tribunal de Commerce de VIENNE). Ils ont été confrontés à des dysfonctionnements du logiciel de gestion de prix (GOLD) mis en place par CASINO. Des erreurs de prix faussent en effet les inventaires

- à raison de la rupture abusive du contrat qu'il soit requalifié ou non en contrat de travail, ils ont droit à une indemnité compensatrice de préavis

- ils peuvent également obtenir une indemnité de licenciement.

- ils ont subi un préjudice moral à raison des conditions de la rupture ainsi que financiers, ayant trois enfants à charge et n'ayant pas à ce jour retrouvé d'emploi

- ils sont fondés en leur rappel de rémunération calculée sur la base du minimum conventionnel et subsidiairement du SMIC dès lors qu'ils avaient la gérance normale d'une succursale de deuxième catégorie et que les minima doivent être calculés individuellement pour chaque gérant, la partie adverse détournant la législation et l'accord national en faisant signer des co-gérances à des couples

- la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a opéré des retenues irrégulières sur les bulletins de commissions pour compenser un déficit allégué mais sans titre exécutoire

- ils sont fondés en leurs prétentions au titre des heures supplémentaires pour lesquelles s'appliquent les mêmes règles que les salariés. Les horaires d'ouverture et de fermeture du magasin leur étaient imposés par le contrat de gérance, soit des horaires hebdomadaires de l'ordre de 65 à 70 heures auxquels doivent s'ajouter d'autres tâches indispensables accroissant leur temps de travail de l'ordre de 25%. La distinction opérée par la partie adverse entre horaires d'ouverture et temps de travail effectif n'est pas opérante puisque s'agissant d'une succursale catégorie 2, deux personnes étaient nécessaires.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées auxquelles elles s'en sont remises oralement.

EXPOSE DES MOTIFS :

Sur la demande de requalification du contrat de cogérants mandataires non salariés en contrats de travail:

L'article L 7322-2 du code du travail prévoit que :

Est gérant non salarié toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des commerces de détail alimentaire ou des coopératives de consommation lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d'embaucher des salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité.

La clause de fourniture exclusive avec vente à prix imposé est une modalité commerciale qui ne modifie pas la nature du contrat.

Les juridictions du fond ne sont pas tenues par la qualification prévue par le contrat et doivent rechercher si d'après les conditions effectives d'exploitation du magasin par les gérants non salariés ceux-ci n'étaient pas en réalité placés dans un lien de subordination juridique caractérisé emportant application du droit commun du contrat de travail à durée indéterminée.

A cette fin, il convient d'opérer une distinction entre les contraintes inhérentes à la politique commerciale de la société qui s'imposent aux gérants au titre de leur mandat et les contraintes touchant à l'exercice de l'activité de gérants non salariés à l'intérieur de leur succursale (horaires de travail à l'intérieur des ouvertures-fermetures, relation avec leur personnel et la clientèle), lesquelles peuvent justifier une requalification en contrat de travail.

Le lien de subordination inhérent à tout contrat de travail est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En l'espèce, il convient d'analyser successivement les moyens développés par les consorts [O]/[R] caractérisant selon eux une violation de leur statut de co-gérants non salariés et corrélativement une subordination à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

D'une première part, si l'article 1.1 fait effectivement mention d'horaires d'ouverture du magasin par référence aux coutumes locales des commerçants, il y a lieu de relever que ces horaires sont fixés non par le mandant mais par les mandataires et que la référence aux usages locaux des autres commerçants est légitime au regard du fait qu'à l'égard des tiers et en particulier de la clientèle, les mandataires gérants non salariés doivent avoir l'apparence de l'exercice d'une activité commerçante, sans pour autant en avoir effectivement le statut et à en assumer les risques incombant au mandant. Dans ces perspective, il n'est pas contraire au statut de gérant non salarié que le mandant, par l'intermédiaire de ses managers commerciaux, procède à une analyse des horaires et des jours d'ouverture en fonction de la zone de chalandise.

En revanche, dans les faits, cette référence ne doit pas servir à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE pour imposer, le cas échéant par l'entremise de ses managers commerciaux, les horaires d'ouverture et de fermeture du magasin.

Or, au cas d'espèce, force est de constater que les consorts [O]/[R] ne démontrent pas que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ait pu leur imposer des horaires de fermeture et d'ouverture du magasin puisque celle-ci produit en pièce n°1.8, un courrier que les gérants lui ont adressé le 3 juillet 2013 informant le mandant des horaires d'ouverture et de fermeture du magasin, que leur pièce n°21 est une carte de visite d'un directeur commercial PETIT CASINO avec une mention manuscrite interrogative sur une absence d'ouverture à 15H sans que l'auteur de ce commentaire et le destinataire ne soient connus, que le courrier produit en pièce n°22 concerne un autre gérant non salarié et que l'attestation de Monsieur [X], gérant non salarié, évoque certes une pression sur les gérants pour les inciter à ouvrir davantage le commerce sans que les consorts [O]/[R] ne produisent d'élément concret mettant en évidence qu'ils ont pu être confrontés à ce type de pressions.

D'une seconde part, le fait que les cogérants non salariés se voient interdire la possibilité de modifier la nature, la qualité ou la présentation des marchandises résulte directement de leur qualité de mandataires et de dépositaires de produits dont ils ne sont pas propriétaires et ne saurait traduire un lien de subordination à l'égard de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

D'une troisième part, si les gérants non salariés sont effectivement responsables de l'exactitude des marchandises livrées, c'est toutefois à la condition nécessaire qu'ils n'aient pas dans les 48 heures de la livraison signaler toute erreur éventuelle si bien qu'il s'agit uniquement de la traduction concrète du contrat à la fois de dépôt et de mandat de vente de marchandises qui ne leur appartiennent pas et non de la caractérisation d'un lien de subordination.

D'une quatrième part, la réalisation d'inventaires réguliers ne caractérise pas en soi un lien de subordination mais résulte directement de la qualité de mandataire des cogérants, qui doivent rendre compte de leur gestion à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

En outre, les consorts [O]/[R] font une interprétation erronée de l'article 5.2 du contrat liant les parties puisque les frais de constat sont mis à la charge de l'une ou l'autre des parties refusant de signer l'inventaire auquel les deux parties doivent participer et ne concerne donc pas que le seul gérant non salarié.

D'une cinquième part, le seul fait que les gérants non salariés soient tenus de participer à la politique commerciale de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE et le cas échéant que cette dernière en vérifie la mise en oeuvre découle directement de leur qualité de mandataires de vente de marchandises ne leur appartenant pas de sorte que cela ne caractérise pas en soi l'existence d'un lien de subordination, sauf à établir que les vérifications opérées par le mandant se seraient dans les faits traduites par des contrôles non seulement réguliers mais avec des injonctions très précises et généralisées sous la menace de sanctions en cas de non-respect des consignes données, dans des conditions traduisant une immixtion du mandant dans la gestion au quotidien de la succursale privant le gérant de toute autonomie d'exploitation.

Au cas d'espèce, l'attestation de Monsieur [X] évoque certes des pratiques alléguées de commandes imposées par le mandant qui si elles sont avérées et concernent un volume important de commandes, excédant les seuls besoins d'actions ponctuelles commerciales, permettraient de caractériser un lien de subordination résultant d'une immixtion du mandant dans la gestion de ses mandataires.

Toutefois, les consorts [O]/[R] ne produisent aucun élément mettant en évidence qu'ils se sont effectivement vu imposer de manière systématique des commandes, l'attestation de Madame [V], qui a été stagiaire au sein du magasin, n'évoquant que des pressions pour effectuer une commande spécifique de sapins de Noël mais fait également mention du refus des gérants, sans qu'il ne soit établi si cette commande a in fine été passée d'autorité par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

De plus, le seul fait que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE impose par commande un minimum de produits à commander par catégorie ainsi qu'il résulte de la pièce n°25 produite par les intimés, ne traduit pas en soi une directive mais est légitime au regard des contraintes inhérentes aux livraisons de marchandises (conditionnement en lots, type d'emballages mis en oeuvre par les fournisseurs, nombre limité de livraisons le cas échéant par catégorie de produits...).

S'agissant des actions commerciales, les consorts [O]/[R] produisent un certain nombre de pièces mettant en évidence que les mandataires gérants se voient demander à ce titre par leur mandant de collaborer avec des partenaires de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE (LOGIC IMMO TOP) et à avoir en magasin certains produits dans le cadre d'actions promotionnelles ; ce qui revient indirectement mais nécessairement à imposer certaines commandes, le référentiel des managers commerciaux de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE présentant d'ailleurs des occurrences de vérification à ce titre.

Ces actions commerciales ponctuelles, impliquant nécessairement la présence pour une période donnée en magasin des produits concernés et partant, la nécessité pour les gérants non salariés de procéder le cas échéant à des commandes à l'initiative de leur mandant, ne doivent effectivement pas être détournées de leur finalité dans des proportions telles que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, sous couvert de participation à sa politique commerciale, en viendrait dans les faits à contrôler de manière essentielle ou significative la nature et le volume des commandes passées par ses mandataires.

Les consorts [O]/[R] ne produisent cependant aucune pièce les concernant établissant qu'ils auraient été dépossédés de leur prérogative générale de pouvoir passer ou non des commandes, en dehors de celles, à l'initiative de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, devant restées accessoires et strictement nécessaires à la mise en oeuvre de sa politique commerciale.

S'agissant des partenariats, ils peuvent parfaitement être rattachés à la politique commerciale à laquelle les gérants non salariés doivent collaborer, sous réserve qu'ils ne se voient effectivement pas imposer de vendre contre leur gré des produits et/ou des services de ces entreprises partenaires alors que leur contrat de gérance non salarié n'a pour objet de leur conférer un statut de déposant et de mandataire de vente que des produits de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

Les consorts [O] et [R] n'établissent pas qu'ils ont pu, contre leur gré, se voir en particulier imposer d'assurer le service de réception/livraison de colis de l'entreprise C DISCOUNT.

Enfin, tant le référentiel des managers commerciaux produits aux débats que la fiche d'évaluation annuelle des gérants non salariés font référence pour l'essentiel soit à des missions de conseils et d'assistance, soit à des occurrences très générales non susceptibles de caractériser un lien de subordination, si ce n'est effectivement des points plus précis sur le contrôle du respect de la politique commerciale (« réaliser des prises de commandes promotionnelles basées sur des objectifs chiffrées, réaliser des prises de commandes hebdomadaires pour les lots managers, implanter les nouveaux produits, respect des assortiments préconisés et présence en rayons »), qui ne sont susceptibles de caractériser des consignes dans le cadre d'un véritable lien de subordination, non pas in abstracto, mais uniquement ainsi qu'il a été vu supra, si le mandant en vient par des pratiques abusives à s'immiscer dans la gestion quotidienne de ses mandants.

Aucune pièce produite par les consorts [O]/[R] ne met en évidence dans les faits une tel dévoiement à leur détriment de leur participation légitime à la politique commerciale de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

D'une sixième part, la pièce n°38 des consorts [O]/[R] ne caractérise pas l'imposition qui leur aurait été faite par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de leurs congés puisqu'il est évoqué trois choix possibles et le fait que ces dates sont données à titre indicatif.

D'une septième part, les pièces n°26 et 27 des consorts [O]/[R] sont illisibles et de ce fait inexploitables. Leur pièce n°39 correspondant à une série de codes de logiciels de gestion ne constitue pas la preuve suffisante que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE contrôle à distance les commandes et les ventes réalisées en magasin via les logiciels GOLD et VISUAL LEADER alors que l'appelante produit aux débats des constats d'huissier mettant en évidence que l'accès au logiciel GOLD par les gérants est protégé par un mot de passe qu'ils créent eux-mêmes, que Monsieur [K], ingénieur maîtrise d'ouvrage pour la branche proximité de CASINO atteste que « la prise en main à distance par le service SVP ne permet pas de s'immiscer dans la gestion d'un magasin car une caisse n'a pas les logiciels et programmes nécessaires à la gestion d'un magasin (notamment l'outil GOLD). En prenant la main sur une caisse le service SVP ne peut pas s'immiscer dans la gestion d'un gérant » et que Monsieur [N], directeur maîtrise d'ouvrage informatique décrit le fonctionnement de ce système d'un point de vu technique sans révéler de contrôle systématique opéré par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, étant relevé qu'aucune divergence précise de nature technique n'est élevée par les intimés.

D'une huitième part, si les gérants doivent accomplir leur mandat en se conformant sous leur responsabilité aux lois, réglementations et règlements de ville et de police applicables au commerce de proximité dont la gestion autonome leur a été confiée et que les documents de « bonnes pratiques » en matière d'hygiène et de sécurité produits aux débats constituent certes des règles précises, elle peuvent cependant parfaitement être rattachées à la mission de support/assistance à laquelle la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE s'est engagée, sauf à établir une immixtion précise de cette dernière dans la gestion des co-gérants ; ce qui ne ressort d'aucun élément produit.

D'une neuvième part, les consorts [O]/[R] ne justifient pas que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ait pu s'immiscer tant dans leur décision de recruter ou non du personnel que dans un quelconque processus de recrutement, le seul fait allégué qu'ils ne tirent pas de leur activité de cogérance des revenus suffisants pour assurer le recrutement de personnel n'étant pas de nature à en déduire l'existence d'un lien de subordination de nature, non économique, mais essentiellement juridique, caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

D'une dixième part, l'obligation alléguée de se fournir en toners d'encre et ramettes de papier destinés à l'imprimante du magasin auprès de l'économat de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne s'analyse pas comme une contrainte exclusive de toute liberté de gestion mais s'inscrit dans le cadre de l'obligation faite à la mandante de fournir un magasin prêt à la vente, avec une obligation notamment de maintenance, étant noté que des indemnités sont versées par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE d'après le contrat de co-gérance non salariée pour faire face aux frais d'équipement et d'entretien du magasin de sorte que l'alourdissement allégué des charges d'exploitation n'est pas établi.

D'une onzième part, la conclusion d'un seul mandat de co-gérance n'est pas contraire au statut de gérants non salariés dès lors que sous réserve du respect par le mandant des dispositions du code du travail applicables aux gérants non salariés, cette modalité est prévue par l'accord du 18 juillet 1963 et que les contrats individuels visés par la loi et l'accord collectif règlent la situation spécifique de chaque gérance de succursale, qui peut être assumée le cas échéant par plusieurs co-gérants.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] de leur demande de requalification de leur contrat de cogérance non salariée en contrat de travail de droit commun ainsi que de leurs prétentions indemnitaires pour violation du statut légal et conventionnel de gérants non salariés.

Ils doivent également être déboutés de leur demande tendant à voir condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à leur remettre des documents de rupture conformes à leur statut salarié.

Sur les prétentions au titre des retenues sur les commissions :

Les dispositions du code du travail relatives aux retenues sur salaire sont applicables aux gérants mandataires non salariés.

L'article L 3251-1 du code du travail prévoit que :

L'employeur ne peut opérer une retenue de salaire pour compenser des sommes qui lui seraient dues par un salarié pour fournitures diverses, quelle qu'en soit la nature.

La répétition par l'employeur de sommes indument perçues par un salarié ne constitue pas une sanction pécuniaire prohibée.

Plus précisément, les gérants non salariés de succursales de magasins d'alimentation doivent sauf clause contraire de leur contrat assumer la charge de tout déficit d'inventaire. Ne constitue pas une sanction pécuniaire illicite une retenue sur les commissions versées à un gérant non salarié, dépositaire des marchandises et devant à ce titre assumer la charge d'un déficit de gestion, dont il ne justifie pas de l'origine et y compris par exception, si le montant mensuel de sa rémunération s'en trouve inférieure au SMIC.

En l'espèce, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE était fondée à opérer sur la rémunération d'avril 2014 de Monsieur [O] une retenue au titre d'un déficit de gestion ensuite de manquants de marchandise constatés à la suite d'un inventaire.

Le jugement dont appel doit dès lors être infirmé et il convient de débouter Monsieur [O] de sa demande à ce titre à hauteur de 1968,37 euros bruts, outre 196,83 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les rappels de rémunération sur minima conventionnels et subsidiairement sur le SMIC :

Premièrement, au visa des articles 4, 5, 7 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 concernant les gérants non salariés des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés «gérants mandataires » du 18 juillet 1963, étendu par arrêté du 25 avril 1985, le montant de la rémunération garantie s'entend de la rémunération garantie non à chacun des cogérants mais à l'ensemble des cogérants.

Deuxièmement, il résulte des articles L. 7322-1, L. 7322-3, L. 2143-17, L. 3232-1, L. 3232-3, D. 3231-5 et D. 3231-6 du code du travail que si les accords collectifs peuvent déterminer la rémunération minimum garantie des gérants non salariés des succursales de commerce de détail alimentaire compte tenu de l'importance de la succursale et des modalités d'exploitation de celle-ci, il demeure qu'en application de l'article L. 7322-3 du code du travail, la rémunération convenue ne peut jamais être inférieure au SMIC.

En cas de co-gérance non salariée, la mesure de la rémunération minimale par référence au SMIC ne doit pas être effectuée pour l'ensemble de la cogestion mais à titre personnel pour chaque co-gérant.

Troisièmement s'agissant de la durée hebdomadaire de travail de chaque cogérant, il résulte de l'article L. 7322-1 du code du travail, que les dispositions de ce code bénéficiant aux salariés s'appliquent en principe aux gérants non salariés de succursales de commerce de détail alimentaire. Selon ce même texte, l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier de la troisième partie relatives à la durée du travail, aux repos et congés payés et à la sécurité du travail lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement ont été fixées par elle et soumises à son accord. Il en résulte que lorsque, les conditions d'application en sont réunies, les gérants non salariés peuvent revendiquer l'application des dispositions de l'article L 3121-10 du code du travail fixant la durée hebdomadaire de travail effectif des salariés à 35 heures.

En l'espèce, d'une première part, Monsieur [O] et Madame [R] revendiquent à tort dans le cadre de leur co-gérance le versement de l'indemnité minimale conventionnelle à titre individuel alors que celle-ci concerne la totalité de la co-gérance.

D'une seconde part, leurs prétentions au titre d'une rémunération minimale sur la base du SMIC ne sont pas irrecevables au sens des articles 564 et 565 du code de procédure civile dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que les prétentions initiales présentées sur le fondement du minimum conventionnel et qu'il s'agit uniquement d'un changement de fondement juridique de leur demande de rappel de salaire.

D'une troisième part, s'agissant du moyen subsidiaire visant la référence au SMIC au soutien des demandes de rappel de rémunération, contrairement à ce que soutient la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, les consorts [O]/[R] débattent bien préalablement de la durée de leur temps de travail individuel puisqu'ils revendiquent travailler chacun chaque semaine non seulement 35 heures mais encore devoir systématiquement effectuer des heures supplémentaires, dont ils sollicitent le paiement par ailleurs.

S'agissant de la détermination de la durée hebdomadaire de travail, si la société Casino n'a pas imposé les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l'existence d'un contrat de travail n'est pas reconnu, ses demandes adressées aux gérants non salariés, concernant les horaires d'ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales ainsi que la diffusion par ses soins des horaires d'ouverture du commerce sur le site internet, permettent de caractériser une vérification du respect de l'amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu'elle dirige de sorte qu'il apparait que le respect de l'amplitude horaire était soumis à son accord.

Il s'ensuit que les conditions d'application de l'article L. 7322-1 du code du travail sont réunies et que les dispositions du livre Ier de la troisième partie relatives à la durée du travail, aux repos et congés payés et à la sécurité du travail et plus particulièrement l'article L 3121-10 du code du travail relative à la durée légale hebdomadaire de travail effectif de 35 heures sont applicables.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE n'est pas fondée à opposer aux co-gérants non salariés le fait allégué mais absolument pas établi que l'exploitation de la succursale ne nécessite pas dans le cadre des horaires d'ouverture et de fermeture la présence systématique, et de manière corrélative le travail effectif, des deux co-gérants.

Plus précisément, elle fait par ailleurs application en l'espèce de l'article 4 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés des gérants mandataires non salariés.

Or, cette stipulation classe les gérances en deux catégories.

Il est constant que les magasins exploités successivement par les consorts [O]/[R] appartiennent à la deuxième catégorie qui prévoit l'activité effective de plus d'une personne, soit dit autrement d'au moins deux personnes, avec la précision que « la gérance normale assurée par deux gérants mandataires non salariés au minimum fait l'objet d'un contrat de cogérance » et que « le classement des gérances dans les deux catégories sera effectué après négociations en fonction de critères définis au sein de chaque entreprise (chiffre d'affaires, modalités d'exploitation des magasins...) ».

Si le contrat fait effectivement référence à une possible activité incomplète d'un des deux cogérants au titre de la répartition de la commission mensuelle versée globalement aux co-gérants, il ne s'agit aucunement d'une certitude.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, qui doit justifier de la durée de travail effective des gérants non salariés dès lors que s'appliquent les dispositions précitées du titre I de la troisième partie du code du travail n'apporte pas d'éléments suffisants permettant de considérer que dans le cas précis de chacune des succursales de seconde catégorie données en gérance, l'un et/ou l'autre des co-gérants n'étaient pas tenus de travailler à plein temps et ce d'autant, que les consorts [O]/[R] détaillent de manière précise l'ensemble des tâches auxquelles ils étaient astreints de manière conjointe pendant les heures d'ouverture et de fermeture du magasin mais encore en dehors de ces plages horaires, notamment pour la réception des livraisons et que trois témoins, Madame [V], stagiaire, et deux clients, attestent avoir toujours vu les deux gérants de manière concomitante dans le magasin.

Plus précisément, les témoignages de co-gérants produits aux débats par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE concernent d'autres succursales et ne peuvent pas être transposés aux magasins litigieux.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE opère en réalité une confusion entre le fait qu'elle ne doit pas effectivement imposer des horaires précis de travail à chacun des co-gérants, sauf à remettre en cause leur autonomie de gestion avec le fait que soumettant à son accord les horaires de fermeture et d'ouverture du magasin par une référence aux coutumes locales dont elle assure la vérification par l'intermédiaire de ses managers commerciaux, elle opère une vérification de l'amplitude horaire des co-gérants, étant relevé que rien ne lui interdisait de faire préciser de manière non pas hypothétique mais certaine une activité partielle de l'un et/ou l'autre des deux co-gérants, dans des proportions déterminables et vérifiables ; ce qu'elle s'est abstenue de faire.

Dans ces conditions, il est considéré que Monsieur [O] et Madame [R] exerçaient l'un et l'autre une activité à temps plein de sorte qu'ils peuvent revendiquer une rémunération minimale au moins égale au SMIC pour un temps plein de 35 heures hebdomadaires.

Le jugement entrepris qui a fait application du minimum conventionnel pour chacun des cogérants est réformé et il convient de condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer :

- à Monsieur [O] la somme de 1860,04 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur SMIC de 2012 à 2014, outre 186 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

- à Madame [R] la somme de 9381,82 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur SMIC de 2012 à 2014, outre 938,18 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

Le surplus des prétentions de ce chef est rejeté.

Sur les prétentions au titre des rappels de rémunérations sur heures supplémentaires :

Il résulte de l'article L. 7322-1 du code du travail, que les dispositions de ce code bénéficiant aux salariés s'appliquent en principe aux gérants non salariés de succursales de commerce de détail alimentaire. Selon ce même texte, l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable au profit des gérants non salariés des dispositions du livre Ier de la troisième partie relatives à la durée du travail, aux repos et congés payés et à la sécurité du travail lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement ont été fixées par elles et soumises à son accord. Il en résulte que lorsque, les conditions d'application en sont réunies, les gérants non salariés peuvent revendiquer le paiement d'heures supplémentaires et l'application des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail.

En l'espèce, si la société Casino n'a pas imposé pas les conditions de travail, de sorte que le lien de subordination juridique caractérisant l'existence d'un contrat de travail n'était pas caractérisé, ses demandes adressées aux gérants non salariés, concernant les horaires d'ouverture et de fermeture des succursales, de se conformer aux habitudes de la clientèle et aux coutumes locales ainsi que la diffusion par ses soins des horaires d'ouverture du commerce sur le site internet, permettent de caractériser une vérification du respect de l'amplitude horaire dans le cadre du service organisé de succursales qu'elle dirige de sorte qu'il apparait que le respect de l'amplitude horaire était soumis à son accord.

Il s'ensuit que les conditions d'application de l'article L. 7322-1 du code du travail sont réunies et que les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail s'appliquent.

L'article L. 3171-4 du Code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ou assimilé en l'occurrence.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié ou la personne assimilée à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Ces dispositions doivent être interprétées de manière conforme à la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil et à la directive 89/391 CE tel que interprétées par la CJCE dans un arrêt du 14 mai 2019 (CJCE 14 mai 2019 C 55-18) qui a indiqué que « les articles 3, 5 et 6 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, lus à la lumière de l'article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que de l'article 4, paragraphe 1, de l'article 11, paragraphe 3, et de l'article 16, paragraphe 3, de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en 'uvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation d'un État membre qui, selon l'interprétation qui en est donnée par la jurisprudence nationale, n'impose pas aux employeurs l'obligation d'établir un système permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur. »

En conséquence, le juge doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ou la personne assimilée et que l'employeur est tenu de lui fournir.

Le salarié ou la personne assimilée doit pour autant fournir au préalable au juge des éléments de nature à étayer sa demande de rappel d'heures supplémentaires et ce sur l'ensemble de la période concernée, étant précisé qu'un récapitulatif d'horaires dressé par le salarié ou la personne assimilée est jugé suffisant.

L'employeur peut ensuite contredire les éléments avancés par le salarié ou la personne assimilée et en particulier en justifiant des horaires effectivement réalisés par ce dernier dont il doit assurer le décompte et/ou justifier.

Une fois constatée l'existence d'heures supplémentaires, le juge est souverain pour évaluer l'importance des heures effectuées et fixer le montant du rappel de salaire (rémunération) qui en résulte sans qu'il soit nécessaire de préciser le détail du calcul appliqué.

En l'espèce, les consorts [R]/[O] se sont prévalus d'un décompte précis de leur temps de travail correspondant pour chacun aux horaires d'ouverture et de fermeture des succursales.

Ils ont également produit aux débats les attestations d'une stagiaire et de deux clients indiquant qu'ils étaient en permanence présents de manière concomitante dans le magasin.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE ne fournit aucun élément utile, si ce n'est des attestations très générales dans leur contenu de co-gérants de succursales différentes et donc avec des contraintes nécessairement distinctes, permettant de déterminer de manière précise le temps de travail effectif de chacun des co-gérants non salariés, étant précisé qu'elle opère une confusion entre le fait qu'elle ne doit effectivement pas imposer des horaires précis à chacun d'eux mais qu'il lui était parfaitement loisible d'apporter dans le contrat de co-gérance des précisions quant à l'amplitude horaire des co-gérants et à une éventuelle activité partielle de l'un et/ou l'autre dès lors qu'il a été vu précédemment qu'elle soumettait à son accord les horaires d'ouverture et de fermeture du magasin par la référence aux coutumes locales et dont elle s'assurait de la vérification.

Il s'ensuit que, infirmant le jugement dont appel qui a fait application du minimum conventionnel pour chacun des co-gérants alors qu'il y a lieu de calculer individuellement les heures supplémentaires au regard du SMIC, il convient de condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à :

- à Monsieur [O] la somme de 32009,49 euros bruts à titre de rappel de rémunérations au titre des heures supplémentaires de 2012 à 2014, outre 3200,94 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

- à Madame [R] la somme de 32009,49 euros bruts à titre de rappel de rémunérations au titre des heures supplémentaires de 2012 à 2014, outre 3200,94 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

Le surplus des prétentions de ce chef est rejeté.

Sur la rupture du contrat de co-gérants non salariés à l'initiative de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE :

Si le gérant non salarié d'une succursale peut-être rendu contractuellement responsable de l'existence d'un déficit d'inventaire en fin de contrat et tenu d'en rembourser le montant, il doit, aux termes de l'article L. 7322-1 du code du travail, bénéficier de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale. Il en résulte qu'il ne peut être privé, dès l'origine, par une clause du contrat, du bénéfice des règles protectrices relatives à la rupture des relations contractuelles et que constitue un licenciement toute rupture du contrat de gérance à l'initiative de l'entreprise propriétaire de la succursale.

Plus particulièrement, les dispositions du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail s'appliquent à la rupture du contrat de gérance non salariées et notamment les articles L 1231-1 et suivants et L 1232-1 et suivants du code du travail, notamment celles relatives au licenciement de nature disciplinaire.

En l'espèce, dans son courrier du 22 septembre 2014, la société CASINO DISTRIBUTION FRANCE a motivé la résiliation sans préavis ni indemnité du contrat de co-gérance non salariée de Monsieur [O] et de Madame [R], après une période de suspension provisoire du contrat de gérance portée à leur connaissance par notification faite par huissier le 4 août 2014, par référence à l'article 8.1 du contrat, en leur reprochant de ne pas avoir couvert immédiatement le déficit de gestion qualifié d'important ressortant de l'inventaire du 30 juin 2014 avec un fine un solde débiteur du compte de dépôt de 34527,67 euros ainsi que le leur imposait l'article 6.2 du contrat de gérance non salariée.

Les consorts [O]/[R] contestent que le déficit de gestion puisse leur être imputable.

Or, indépendamment des règles régissant le contrat de dépôt et le mandat ayant existé entre les parties et susceptibles de donner lieu selon des règles de preuve qui leur sont propres à une action en paiement par le mandant à l'égard des co-mandataires du déficit de gestion devant la juridiction commerciale, force est de constater que dans le cadre du présent litige, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, qui se prévaut en définitive d'une faute grave des consorts [O]/[R] ne pouvant résulter du seul fait de l'existence d'un déficit de gestion, y compris significatif, ne produit aucun élément établissant que ce déficit de gestion puisse en tout ou partie être imputé à des manquements fautifs de la part des co-gérants non salariés.

Il est certes produit en pièce n°3.5 par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE l'attestation d'inventaire signée des deux parties mais sans la bande qui devrait être jointe, récapitulant dans l'ordre chronologique, les marchandises et emballages inventoriés.

Si des mentions dactylographiées dans ce document signé des co-gérants non salariés précisent que ceux-ci certifient que l'inventaire a été effectué contradictoirement, en leur présence et sous leur contrôle, qu'ils n'ont décelé aucune anomalie dans les opérations d'inventaire et que les marchandises répertoriées sur la bande supposée annexée mais non produite constituent le stock existant dans la superette, il n'y aucune mention de reconnaissance par eux que le déficit de gestion observé par rapport à un stock de 80437,09 et des emballages de 535,54 en comparaison au précédent inventaire puisse résulter d'une faute de leur part, alors qu'ils avancent d'autres explications possibles à ce déficit et fournissent des éléments sérieux relatifs à des modifications intempestives de prix par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, faussant le stock et que des difficultés à ce titre ont été à plusieurs reprises évoquées lors des réunions des représentants du comité des gérants non salariés.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé abusive la rupture du contrat de co-gérance non salariée, assimilable à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les suspensions provisoires sont par voie de conséquence également annulées.

Sur les prétentions financières au titre de la rupture abusive du contrat de cogérance non salariée :

D'une première part, les suspensions provisoires étant annulées, les consorts [O]/[R] sont fondés en leurs prétentions de rappels de rémunération de ce chef, sauf à les calculer non pas à partir du minimum conventionnel mais du SMIC de sorte que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE est condamnée à payer à Monsieur [O] et Madame [R], à chacun les sommes de 2890,76 euros bruts de rappel de rémunérations sur suspension provisoire annulée et 289 euros bruts au titre des congés payés afférents.

D'une seconde part, les consorts [O]/[R] ont droit à une indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 2 mois par application de l'article 18 de l'accord national sur les gérants non salariés, qui ne doit toutefois pas être calculée comme ils le font par référence au minimum conventionnel garanti à titre individuel mais, par référence au SMIC.

Il s'ensuit que le jugement dont appel doit être infirmé et que la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE doit être condamnée à payer à Monsieur [O] et Madame [R], à chacun les sommes de 2890,76 euros bruts de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et 289 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015).

D'une troisième part, les consorts [O] et [R], qui ne revendiquent pas l'indemnité conventionnelle de résiliation, sont fondés en leur demande au titre de l'indemnité légale de licenciement, qui doit être calculée non pas d'après le minimum conventionnel de rémunération apprécié globalement pour la cogérance mais d'après le SMIC envisagé individuellement.

Le jugement dont appel est dès lors infirmé et la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE condamnée à payer à chacun une indemnité de licenciement de 578,15 euros, le surplus des prétentions à ce titre étant rejeté, l'indemnité légale de licenciement n'ouvrant pas droit à des congés payés afférents.

D'une quatrième part, la rupture abusive du contrat de co-gérance assimilable à un licenciement sans cause réelle et sérieuse a créé pour les co-gérants non salariés un préjudice significatif puisque parents de trois enfants, ils justifient l'un et l'autre de leur inscription durant une longue période à POLE EMPLOI et de la perception d'indemnité à ce titre de décembre 2014 à décembre 2016.

Les premiers juges ont fait une juste appréciation de leur préjudice en leur allouant à chacun des dommages et intérêts à hauteur de 14190 euros, de sorte que le jugement dont appel est confirmé sur ce point et les consorts [O]/[R] déboutés du surplus de leurs prétentions élevées dans le cadre de leur appel incident.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure allouée en première instance à chacun des demandeurs à l'instance et de condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à leur payer à chacun une indemnité complémentaire de 1000 euros en cause d'appel.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS ;

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire après en avoir délibéré

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

- ordonné la jonction des affaires n°15/00066 et n°15/00067 sous ce dernier numéro

- dit que la rupture du contrat de co-gérance en l'espèce est abusive sur le déficit de gestion qui n'est pas démontré, sauf à ajouter qu'elle est assimilée à un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamné la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer les sommes suivantes :

Pour Monsieur [Z] [O] :

- 14190 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

dit que les sommes porteront intérêts à la date du présent jugement

Pour Madame [Y] [R] :

- 14190 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

dit que les sommes porteront intérêts à la date du présent jugement

- débouté la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de sa demande reconventionnelle

- mis les entiers dépens à la charge de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE

L'INFIRME pour le surplus,

statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] de leur demande de requalification de leur contrat de cogérance non salariée en contrat de travail de droit commun ainsi que de leurs prétentions indemnitaires pour violation du statut légal et conventionnel de gérants non salariés ;

DEBOUTE Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R] de leur demande tendant à voir condamner la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à leur remettre des documents de rupture conformes à leur statut salarié ;

DEBOUTE Monsieur [Z] [O] de sa demande à hauteur de 1968,37 euros bruts, outre 196,83 euros au titre des congés payés afférents, au titre des retenues sur commissions pour déficit de gestion ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer :

- à Monsieur [Z] [O] la somme de 1860,04 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur le SMIC de 2012 à 2014, outre 186 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

- à Madame [Y] [R] la somme de 9381,82 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur le SMIC de 2012 à 2014, outre 938,18 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015) ;

REJETTE le surplus des prétentions au titre de rappels de rémunérations par référence au SMIC et au titre des congés payés afférents ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à :

- à Monsieur [Z] [O] la somme de 32009,49 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur heures supplémentaires de 2012 à 2014, outre 3200,94 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015)

- à Madame [Y] [R] la somme de 32009,49 euros bruts à titre de rappel de rémunérations sur heures supplémentaires de 2012 à 2014, outre 3200,94 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015) ;

REJETTE le surplus des prétentions au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R], à chacun les sommes de 2890,76 euros bruts de rappel de rémunérations sur suspension provisoire annulée et 289 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

REJETTE le surplus des prétentions de rappels de rémunérations sur suspension provisoire et congés payés afférents ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R], à chacun les sommes de 2890,76 euros bruts de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et 289 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice (date de saisine du Conseil de Prud'hommes au 16 mars 2015) ;

REJETTE le surplus des prétentions au titre des indemnités compensatrices de préavis et des congés payés afférents ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R], à chacun une indemnité de licenciement de 578,15 euros ;

REJETTE le surplus des prétentions au titre de l'indemnité légale de licenciement et au titre des congés payés afférents ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE à payer à Monsieur [Z] [O] et Madame [Y] [R], à chacun une indemnité complémentaire de procédure de 1000 euros ;

REJETTE le surplus des prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE aux dépens d'appel ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame FRESSARD, Présidente, et par Madame DREVON, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 17/04156
Date de la décision : 05/12/2019

Références :

Cour d'appel de Grenoble 13, arrêt n°17/04156 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-05;17.04156 ?
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