N° RG 17/04801 - N° Portalis DBVM-V-B7B-JH2W
N° Minute :
V.L
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELARL GERBI
la SELARL BSV
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2EME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 19 FEVRIER 2019
Appel d'un Jugement (N° R.G. 16/02896)
rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE
en date du 07 septembre 2017
suivant déclaration d'appel du 12 Octobre 2017
APPELANTE :
Madame K... C...
née le [...] à Moirans
de nationalité Française,
demeurant [...]
Représentée par Me Hervé GERBI de la SELARL GERBI, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me Isabelle BURON, avocat au barreau de GRENOBLE,
INTIMÉES :
SOCIETE D'ASSURANCE MAIF
inscrite au RCS de Niort sous le numéro B 341 672 681, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, [...]
Représentée par Me Laure BELLIN de la SELARL BSV, avocat au barreau de GRENOBLE,
CPAM DE L'ISERE
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,
Service Contentieux Général - [...]
Non représentée,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Véronique LAMOINE, Conseiller faisant fonction de Président,
Monsieur Laurent GRAVA, Conseiller,
Monsieur Frédéric BLANC, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Morgane MATHERON, Greffier,
DÉBATS :
A l'audience publique du 17 Décembre 2018,
Madame Véronique LAMOINE, Conseiller faisant fonction de Président, a été entendue en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour.
Rappel des faits et de la procédure
Le 4 mai 2012, Madame K... C..., alors âgée de 57 ans pour être née le [...] et sans emploi après un licenciement économique, a été victime d'un accident de la circulation, sur la commune de VOIRON (38), dans les circonstances suivantes : alors qu'elle marchait sur un trottoir, elle a été heurtée par un véhicule sortant d'un parking, piloté par Monsieur P... A... assuré auprès de la société MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE (la société MAIF), ce qui l'a fait chuter.
Après avoir regagné son domicile, et consulté un kinésithérapeute chez qui elle était déjà en soin, Madame K... C... a fait constater les lésions suivantes générant un arrêt de travail d'1 mois selon certificat établi par le Docteur Q... le 9 mai 2011 :
* contusion des deux genoux,
* douleurs rachis cervical et des trapèzes,
* douleurs rachis lombaire,
* douleurs et contusion des deux poignets par réception sur ceux-ci.
Les radiographies initiales du 9 mai 2012 n'ont révélé aucune fracture.
De nouvelles radiographies cervicales du 10 octobre 2012 n'ont révélé aucun changement avec les radiographies précédentes. Le 29 novembre 2012, une IRM du rachis cervical a été réalisée, montrant de petites protusions discales sans canal cervical droit, sans hernie discale, sans contrainte radiculaire.
Une expertise amiable a été confiée au Docteur U..., mandaté par la société MAIF, qui a établi un rapport le 11 juillet 2013.
Par ordonnance du 28 mai 2014, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a ordonné une expertise médicale de Madame K... C... confiée au Docteur T..., ensuite remplacé par le Docteur I... qui a déposé un rapport définitif le 6 août 2015.
Après avoir rappelé les lésions initiales constatées, le Docteur I... a souligné que le bilan radiologique initial montrait au niveau lombaire et au niveau cervical seulement de banales lésions arthrosiques et que le kyste synovial du poignet gauche non-constaté initialement ne pouvait être rattaché à l'accident du 4 mai 2012 de manière directe et certaine.
Il a précisé que Madame K... C... présentait des antécédents médicaux, à savoir :
* polyalgies articulaires dont des phénomènes douloureux touchant le rachis, les épaules et les genoux,
* état dépressif et troubles psychologiques,
* céphalées,
* douleurs de l'axe vertébral,
* maladie de Crohn.
Après avoir examiné la victime, le Docteur I... a retenu les seules séquelles suivantes directement liées à l'accident du 4 mai 2012 :
'accentuation de troubles psychologiques qui sont intriqués avec l'amplification des phénomènes douloureux', en soulignant que l'ampleur et la multiplicité des douleurs dont se plaint la victime (poignets, pieds et genoux, outre une polyalgie du rachis sans support en dehors de banales lésions arthrosiques) étaient en discordance avec le caractère bénin des lésions initiales.
Ses conclusions médico-légales sont les suivantes :
Date de consolidation :
29 novembre 2012
DFTT :
aucun
DFTP dans toutes les activités personnelles :
* à 25 % du 4 mai 2012 au 12 mai 2012
* à 10 % du 13 mai 2012 au 28 novembre 2012
DFP :
4 %
Souffrances endurées :
2/7
Préjudice esthétique temporaire :
0/7
Préjudice d'agrément :
pas de contre-indication médicale à la reprise des activités
Préjudice esthétique permanent :
0/7
Incidence professionnelle:
non imputable à l'accident du 4 mai 2012
Par actes des 25 et 30 mai 2016, Madame K... C... a assigné la société MAIF et la CPAM de l'Isère devant le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE pour voir indemniser ses préjudices.
Par jugement du 7 septembre 2017, réputé contradictoire en l'absence de comparution de la CPAM, le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE a :
* fixé comme suit le préjudice corporel de Madame K... C..., avant déduction de la créance de la CPAM DE L'ISERE :
# Préjudices patrimoniaux :
* frais divers : 600 €
* perte de chance de retrouver un emploiavant consolidation : débouté
* incidence professionnelle (après consolidation) : 4000 €
# Préjudices extra-patrimoniaux :
* DFT : 506 €
* souffrances endurées : 3000€
* DFP (4 %) : 4000 €
* préjudice d'agrément : débouté,
* sursis à statuer sur le montant de la somme due par la société MAIF à Madame K... C... en indemnisation de son entier préjudice,
* ordonné la réouverture des débats et invité :
- Madame K... C... à justifier du montant de sa pension d'invalidité de catégorie 1 qu'elle percevait jusqu'en octobre 2013,
- les parties à présenter leurs observations sur l'imputation de cette pension d'invalidité sur l'incidence professionnelle puis, le cas échéant, sur le déficit fonctionnel permanent,
* renvoyé l'affaire à une audience de plaidoiries,
* débouté Madame K... C... de sa demande de doublement des intérêts au taux légal,
* sursis à statuer sur la demande fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile, sur la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière et sur l'exécution provisoire,
* réservé les dépens,
* déclaré le jugement commun à la CPAM DE L'ISERE.
Le Tribunal a notamment retenu :
* que si le Docteur I... avait conclu qu'en raison du terrain antérieur, il semblait difficile d'imputer à l'accident, qu'il qualifie de bénin, une quelconque incidence professionnelle, il a néanmoins retenu que l'accident avait eu un 'rôle majorant (les) phénomènes douloureux qui préexistaient", ce qui a d'ailleurs conduit la CPAM à revisiter la pension d'invalidité de Madame K... C... de catégorie 1 à catégorie 2, que dès lors l'existence d'un préjudice professionnel directement et certainement causé par les suites dommageables de l'accident était établie,
* sans ignorer les différents témoignages produits par Madame K... C... indiquant qu'elle ne pratiquait plus d'activités sportives et de loisirs, l'existence d'un préjudice d'agrément n'a pas été médicalement établie par l'expert qui a considéré qu'il n'y avait aucune contre-indication à la reprise de ces activités et même ajouté que cette reprise serait souhaitable.
Par déclaration au Greffe en date du 12 octobre 2017, signifiée le 1er décembre 2017 à la CPAM, Madame K... C... a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses conclusions récapitulatives et responsives n°1 notifiées le 12 avril 2018, elle demande à la Cour de :
* déclarer son appel immédiat recevable et fondé,
* confirmer le jugement déféré en ce qu'il lui a alloué les sommes suivantes :
- 3 000 € au titre des souffrances endurées,
- 4000€ au titre du déficit fonctionnel permanent,
- 600€ au titre des frais divers,
* réformer le jugement déféré pour le surplus,
Statuant à nouveau par l'effet dévolutif de l'appel,
* condamner la société MAIF à indemniser ses préjudices comme suit :
I Préjudices patrimoniaux permanents
- incidence professionnelle, perte de gains professionnels et préjudice de retraite
166 911,75 €
II- Préjudices extra patrimoniaux
II-I Temporaires
1- déficit fonctionnel temporaire
616 €
II-II Permanents
1- préjudice d'agrément
8 000 €
Vu les articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des Assurances,
* prononcer le doublement du taux de l'intérêt légal pour la période courant du 10 décembre 2013 au 28 septembre 2015,
* condamner la société MAIF à en régler le montant capitalisé par année entière,
Vu les articles 1231-7 et 1342-2 du Code Civil,
* dire et juger que les condamnations à intervenir produiront intérêt au taux légal à compter du 4 mai 2012,
* condamner la société MAIF à en régler le montant capitalisé par année entière,
* condamner la société MAIF à lui régler une somme de 2500€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, incluant la rémunération taxée de l'expert judiciaire, dont distraction au profit de l'avocat constitué sur son affirmation de droit,
* déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM de l'Isère.
Elle fait valoir :
# sur la recevabilité de certains chefs de demande :
* que la demande complémentaire afférente à la réparation, pour la première fois en cause d'appel, d'un chef de préjudice découlant du même fait générateur tend aux mêmes fins indemnitaires et ne constitue donc pas une demande nouvelle au sens de l'article 565 du Code de Procédure Civile,
* que n'est pas nouvelle la demande que forme un justiciable en majorant en cause d'appel le montant de la somme qu'il avait réclamée devant les premiers juges à titre d'indemnité ; en effet, elle ne diffère que par son montant de la demande originaire, procède directement de celle-ci et tend aux mêmes fins,
# sur le fond :
* qu'embauchée dans une entreprise depuis 2006, elle avait fait l'objet d'un licenciement économique le 30 mars 2010 sans préjudice de son admission au bénéfice de l'invalidité 1re catégorie strictement circonscrite à la seule maladie de Crohn à compter de l'année 2006,
* que l'accident a produit un effet de seuil faisant d'une victime antérieurement apte à l'exercice d'une activité professionnelle, une victime incapable de travailler et placée de ce fait en invalidité 2e catégorie,
* qu'elle percevait durant ses dernières années d'exercice professionnel une rémunération annuelle moyenne de 18229€,
* que l'allocation journalière réparant le déficit fonctionnel temporaire est indépendante de l'évolution du SMIC dans la mesure où il répare la perte des joies usuelles de la vie courante, et que cette allocation doit inclure le préjudice d'agrément temporaire,
* qu'elle pratiquait le sport en salle, la relaxation, la gymnastique, le ski, le vélo, la natation et la danse, activités auxquelles elle a dû renoncer durant l'évolution post-traumatique, et que l'expert n'a pas répondu sur la question de la gêne à la pratique de ces activités,
# sur les intérêts :
* que la société MAIF n'a fait aucune proposition d'indemnisation définitive initiale, ni de proposition de provision complémentaire sachant qu'elle contestait les conclusions du rapport d'expertise,
* qu'une offre indemnitaire définitive ne lui a été adressée que le 28 septembre 2015.
La société MAIF, dans ses conclusions récapitulatives d'intimée notifiées le 18 avril 2018, demande à la Cour de :
* confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Au surplus,
* dire et juger que Madame K... C... formule pour la première fois en cause d'appel des demandes nouvelles au titre de la perte de gains professionnels et du préjudice de retraite subséquent,
* constater qu'elle détourne insidieusement sa demande au titre de l'incidence professionnelle chiffrée à 10000€ en première instance et transformée à 166911,75€ en cause d'appel,
* dire et juger ces demandes irrecevables,
A défaut,
* débouter Madame K... C... de ces demandes hypothétiques,
En tout état de cause,
* condamner Madame K... C... aux entiers dépens qui comprendront les frais d'expertise,
* dire et juger que la provision de 8000€ déjà allouée à Madame K... C... sera déduite de toute condamnation à intervenir à son encontre,
* dire et juger que le différentiel capitalisé de la pension d'invalidité devra être déduit de l'incidence professionnelle puis du DFP,
* rejeter le surplus des demandes formulées par Madame K... C....
Elle fait valoir :
* que Madame K... C... sollicite la réformation des sommes allouées au titre du déficit fonctionnel temporaire alors que le Tribunal avait fait droit à sa demande et qu'elle formule une demande nouvelle par la prise en compte d'un préjudice d'agrément temporaire,
* que Madame K... C... présentait un état antérieur constitué notamment par un syndrome polyalgique et que l'accident du 4 mai 2012 était bénin,
* qu'elle a rassemblé artificiellement, dans sa demande en appel, les postes relatifs à l'incidence professionnelle, perte de gains professionnels et préjudice de retraite subséquent en les chiffrant à hauteur de 166 911,75€ alors que, en première instance elle ne sollicitait que le versement d'une indemnisation de 10000€ au seul titre de l'incidence professionnelle, ce qui constitue une demande nouvelle au titre de l'article 564 du Code de Procédure Civile,
* que Madame K... C... fonde ses demandes sur des revenus qu'elle ne percevait pas au jour de l'accident si bien qu'il ne peut y avoir de perte de gains futurs et d'incidence sur sa retraite mais seulement des revenus hypothétiques,
* que les différentes expertises médicales de Madame K... C... ont conclu à l'absence d'incidence professionnelle, que le passage de la victime en invalidité catégorie 2 n'est pas consécutif à l'accident du 4 mai 2012 mais a pour origine la maladie de Crohn et les dorsalgies,
* qu'elle a fait une offre à la victime dans le délai de l'article L. 211-9 du Code des Assurances.
La CPAM DE L'ISERE, qui n'a pas constitué avocat, a été régulièrement assignée le 1er décembre 2017 par acte remis à une personne habilitée. Le présent arrêt sera réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du Code de Procédure Civile.
L'instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 23 octobre 2018.
Motifs de la décision
Sur les points non contestés
Les parties s'accordent sur l'indemnisation intégrale des préjudices de Madame C... par la MAIF, ainsi que sur les indemnités fixées par le Tribunal aux titres :
- des frais divers pour 600 €,
- des souffrances endurées pour 3 000 €,
- du déficit fonctionnel permanent pour 4 000 €.
Sur la fixation des autres postes de préjudices
I- préjudices patrimoniaux permanents
Madame K... C... réclame à ce titre l'allocation d'une somme totale de 166'911,72€ se décomposant comme suit :
perte totale de gains professionnels futurs de 33 % de ses revenus moyens durant ses dernières années d'exercice professionnel donc avant son licenciement : 18 229 € annuels capitalisés à titre viager outre les arrérages échus = 171 221,17 €,
somme arrondie à 180 000 € pour tenir compte de l'incidence professionnelle (dévalorisation sur le marché de l'emploi), ce qui correspond à une demande de 8 771,83 € au titre de la seule incidence professionnelle,
sous déduction du différentiel annuel de la pension d'invalidité capitalisé à hauteur de 13088,28€.
C'est en vain que la MAIF prétend cette demande irrecevable en cause d'appel au visa de l'article 564 du Code de Procédure Civile, dès lors que Madame C..., qui avait sollicité devant les premiers juges la somme de 10 000 € au titre de l'incidence professionnelle et ne s'est vu allouer qu'une somme de 4 000 € à ce titre, est recevable à réclamer l'augmentation de la somme qui lui a été allouée, même si, en ce faisant, elle excède sa réclamation initiale.
Par ailleurs, l'inclusion dans cette demande d'une réclamation correspondant à une perte de gains professionnels après consolidation qui n'avait pas été formée en première instance, est néanmoins recevable comme ayant le même fondement et poursuivant la même fin d'indemnisation que celles formées devant le tribunal, et constituant, par-là même, un complément à ces dernières en application de l'article 566 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret du 6 mai 2017.
Au vu des éléments du dossier, en particulier des éléments d'analyse contenus dans le rapport d'expertise médicale, aux termes desquelles "l'accident a eu un rôle majorant les phénomènes douloureux qui préexistaient" et fixant un taux de DFP de 4 % au titre de "l'accentuation des troubles psychologiques qui sont intriqués avec l'amplification des phénomènes douloureux" nonobstant les conclusions de ce rapport sur l'absence d'incidence professionnelle certaine, c'est par des motifs pertinents que le Tribunal a retenu que l'accident avait causé à la victime un préjudice professionnel illustré par son placement par la CPAM en invalidité de catégorie 2.
Compte-tenu de l'âge de la victime soit 57 ans à la date de l'accident, du fait qu'elle était licenciée économique depuis 2 ans, et qu'elle était alors en invalidité catégorie 1 ce qui réduisait déjà sa capacité de travail, il sera considéré que l'accident lui a faire perdre une chance de retrouver un emploi dans la proportion de 33 % qu'elle invoque à ce titre.
Cela conduit à indemniser ce préjudice de la façon suivante :
13 671,50 € (moyenne des gains des 4 dernières années avant l'accident au vu de sa pièce n° 90 - relevé de carrière de l'assurance retraite en date du 10/12/2015 -) x 33 % = 4 511,60 € annuels.
* Perte déjà subie à la date du présent arrêt : 4 511,60 € x 6,80 années = 30 678,88 €.
* Capitalisation de la perte à compter du présent arrêt : 4 511,60 € x 19,915 (prix de l'euro de rente viagère pour une femme de 64 ans selon le barème de la Gazette du Palais 2016) = 89 849,52 €.
Soit un total de 120 527,39 €.
Outre cette somme, peut être ajoutée une indemnité de 4 000 € au titre de l'incidence professionnelle tenant compte de la dévalorisation consécutive à cette perte de chance, le jugement étant donc confirmé sur ce point.
Sur ces indemnités doit s'imputer le différentiel entre la pension d'invalidité perçue avant l'accident, et celle perçue à partir d'octobre 2013 après le passage de la victime en catégorie 2 suite à l'accident, selon le principe énoncé par le Tribunal dans ses motifs et admis par les deux parties.
Le Tribunal a réservé les demandes à ce titre en invitant la victime à justifier du montant de la pension perçue avant l'accident, et les parties à s'expliquer sur cette imputation.
En cause d'appel, les parties ont fourni les éléments requis et concluent à la liquidation définitive du préjudice au vu de ces éléments, de sorte qu'il y a lieu, faisant application de l'article 568 du Code de Procédure Civile et considérant qu'il est de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive, d'évoquer les points non jugés.
Les parties s'accordent sur un différentiel annuel de 2 809,85 € à prendre en compte entre les deux montants de pension au vu des pièces justificatives produites.
Les sommes à imputer doivent donc être calculées ainsi qu'il suit :
- arrérages échus à la date du présent arrêt soit à compter du 1er décembre 2013 (cf notification de pension d'invalidité après révision du 7/10/2013 notifiant le changement de catégorie à compter du 01/12) = 2 809,85 € x 5 ans et 2 mois = 14 517,56 €,
- arrérages à échoir capitalisés selon le même euro de rente que celui retenu pour la capitalisation des pertes ci-dessus soit 19,915 x 2 809,85 € = 55958,16€,
d'où un solde à revenir à la victime de 50 051,67 € au titre des pertes de gains professionnels futurs.
II- préjudices extra patrimoniaux
II-I préjudices extra patrimoniaux temporaires : déficit fonctionnel temporaire
Devant le Tribunal de Grande Instance, Madame K... C... sollicitait l'allocation à ce titre d'une somme de 506 € qu'elle s'est vue intégralement allouer par le jugement déféré.
Dès lors elle est dépourvue d'intérêt à demander la réformation du jugement concernant ce chef de préjudice, alors-même qu'elle n'invoque ni erreur dans le calcul de la somme initialement réclamée, ni aggravation de ce chef de préjudice depuis le jugement frappé d'appel.
Sa demande de réformation et d'augmentation de la somme allouée de ce chef sera donc déclarée irrecevable.
II-II préjudices extra patrimoniaux permanents : préjudice d'agrément
Au vu des nombreuses attestations produites, Madame K... C... justifie qu'elle a cessé, depuis l'accident, plusieurs activités de sports et de loisirs qu'elle pratiquait régulièrement auparavant (gymnastique en salle, danse). Nonobstant les conclusions du médecin expert sur ce point, et vu l'analyse contenue dans son rapport qui l'a conduite à écrire que "l'accident a eu un rôle majorant les phénomènes douloureux qui préexistaient" et à fixer un taux de DFP de 4 % au titre de "l'accentuation des troubles psychologiques qui sont intriqués avec l'amplification des phénomènes douloureux", il peut être retenu que les séquelles de l'accident causent à la victime une gêne dans la pratique de ces activités, mais sans contre-indication formelle ainsi que l'a retenu l'expert.
Le préjudice en résultant sera, dans ces conditions, réparé par l'allocation d'une somme de 2000€.
Sur les sommes à revenir à après imputation des débours des organismes sociaux
Les indemnités devant être allouées à la victime après imputation de la pension d'invalidité s'élèvent par conséquent aux sommes suivantes :
- frais divers
600 €
- perte de gains professionnels futurs
50051,67 €
- incidence professionnelle
4 000 €
- déficit fonctionnel temporaire
506 €
- souffrances endurées
3 000 €
- déficit fonctionnel permanent
4 000 €
- préjudice d'agrément
2 000 €
TOTAL :
64157,67 €
De cette somme doivent être déduites les provisions déjà versées par la MAIF.
Sur les demandes au titre des intérêts
# sur le doublement du taux d'intérêt au titre des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances
En application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur a l'obligation d'adresser une offre d'indemnisation à la victime dans les huit mois suivant l'accident, cette offre pouvant avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de la victime. Dans ce cas, l'offre d'indemnisation définitive doit être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.
En l'espèce, si la consolidation avait été fixée au 4 mai 2013 par l'expert U... mandaté par la MAIF dans son rapport du 11 juillet 2013, le Tribunal a justement relevé que Madame C... avait contesté les éléments de ce rapport par lettre du 26 août 2013 adressée à l'assureur qui lui avait proposé, à sa demande, de mettre en oeuvre une seconde expertise amiable avec un médecin arbitre, ce à quoi la victime n'avait pas donné suite, ce qui avait conduit à la mise en oeuvre, en référé, d'une expertise judiciaire confiée au Docteur I... qui a déposé un rapport définitif le 6 août 2015, en fixant la consolidation de l'état de la victime à une autre date que le Docteur U....
C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré, dans ces conditions, que le délai de cinq mois de l'article L. 211-9 in fine n'avait commencé à courir que du jour où l'assureur avait eu connaissance du rapport du Docteur I....
Dès lors, l'offre définitive d'indemnisation adressée par la MAIF le 28 septembre 2015 l'a été dans ce délai, et elle n'était pas manifestement insuffisante ou dérisoire en l'état des éléments que possédait alors l'assureur, en particulier le rapport d'expertise judiciaire dans lequel l'expert concluait notamment à une incidence professionnelle non établie, ou à défaut minime.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande au titre du doublement du taux d'intérêt.
# sur le point de départ des intérêts
Aucun des éléments du dossier ne conduit à fixer le point de départ des intérêts à une date antérieure au jugement par lequel chacune des indemnités allouées a été déterminée, conformément à l'article 1231-7 du Code Civil.
# sur la capitalisation des intérêts
La demande de capitalisation des intérêts, dès lors qu'elle est formée pour les intérêts dus au moins pour une année entière conformément à l'article 1343-2 nouveau du Code Civil, s'impose au juge et il y a donc lieu d'y faire droit.
Sur les demandes accessoires
Il n'est pas équitable de laisser à la charge de Madame K... C... la totalité des frais irrépétibles engendrés par la présente procédure ; il y a donc lieu de lui, allouer, sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, une indemnité de 2 500 €.
Par ces Motifs
La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au Greffe, par arrêt réputé contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,
DÉCLARE Madame K... C... recevable en son appel, mais irrecevable à contester, devant cette Cour, le poste de préjudice de déficit fonctionnel temporaire pour lesquels elle a entièrement obtenu gain de cause en première instance
CONFIRME le jugement déféré :
1/ en ce qu'il a fixé ainsi qu'il suit les préjudices corporels de Madame K... C... :
- 600 € au titre des frais divers,
- 506 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,
- 4 000 € au titre de l'incidence professionnelle de l'accident,
- 4 000 € au titre du déficit fonctionnel permanent,
- 3 000 € au titre des souffrances endurées,
2/ en ce qu'il a débouté Madame K... C... de ses demandes :
* au titre de la perte de chance de retrouver un emploi avant consolidation,
* au titre du doublement des intérêts au taux légal.
L'INFIRME pour le surplus, et, statuant à nouveau, y ajoutantet évoquant les points non jugés en application des dispositions de l'article 568 du Code de Procédure Civile :
DIT que les sommes dont le montant est confirmé produisent intérêts de plein droit à compter du jugement.
FIXE ainsi qu'il suit les autres postes de préjudices résultant pour Madame K... C... de l'accident survenu le 4 mai 2012, après imputation de la pension d'invaliditéservie par la CPAM de l'Isère, et avec intérêts au taux légal à compter duprésent arrêt :
- perte de gains professionnels futurs
50 051,67 €
- préjudice d'agrément
2 000 €
CONDAMNE par conséquent la Société MAIF à payer à Madame K... C... :
* la somme totale de 64 157,67 € en réparation de ses préjudices y compris ceux dont le montant a été confirmé, sous déduction, le cas échéant, des provisions déjà versées,
* la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 nouveau du Code civil.
DÉCLARE le présent arrêt commun à la CPAM de l'Isère.
REJETTE toutes les autres demandes.
CONDAMNE la Société MAIF aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SELARL GERBI, avocat, en application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Véronique LAMOINE, conseiller faisant fonction de Président et par le Greffier Morgane MATHERON, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,