PS
N° RG 16/00906
N° Portalis DBVM-V-B7A-ILU4
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Pierre X...
Me Wilfried P...
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 15 JANVIER 2019
Appel d'une décision (N° RG F14/01416)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE
en date du 25 janvier 2016
suivant déclaration d'appel du 18 Février 2016
APPELANTES :
Y... BEVIERE prise en la personne de M. Dominique Z...
Président de l'Association Arbres de Vie, sise [...] et gestionnaire de l'Y... BEVIERE en exercice domicilié [...]
représentée par Me Pierre X..., avocat au barreau de LYON
Y... O... prise en la personne de M. Dominique Z...
Président de l'Association Arbres de Vie, sise [...] et gestionnaire de l'Y... O... en exercice domicilié [...]
représentée par Me Pierre X..., avocat au barreau de LYON
INTIME :
Monsieur Angelo A... Q... 14/0107 A...
113 B B... Jean Jaurès
[...]
représenté par Me Wilfried P..., avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ:
Monsieur Philippe SILVAN, Conseiller faisant fonction de Président,
Madame Valéry CHARBONNIER, Conseiller,
Monsieur Frédéric BLANC, Conseiller,
DÉBATS :
A l'audience publique du 22 Octobre 2018,
Monsieur Philippe SILVAN, chargé du rapport, et Madame Valéry CHARBONNIER, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de Mme Valérie DREVON, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 15 Janvier 2019, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 15 Janvier 2019.
Exposé du litige :
Selon contrat à durée indéterminée du 19 avril 2001, M.A... a été recruté en qualité d'homme d'entretien par l'association «Mieux Vivre son Age» aux droits de laquelle vient l'association "Arbres de Vie".
De cette association relèvent trois Y... situés sur la commune de Grenoble : l'Y... Reyniès, l'Y... Bévière et l'Y... Abbaye.
Initialement embauché dans le cadre d'un contrat à temps partiel, M.A... a vu son horaire de travail augmenter pour intervenir sur l'Y... Reyniès au moyen d'un avenant en date du 4juin 2001.
Le 4 octobre 2013, la direction de l'Y... Reyniès a notifié à M.A... une mise à pied disciplinaire pour non-respect des consignes de sécurité et pour s'être présenté sur son lieu de travail le 9 août 2014, alors qu'il était en congés, accompagné d'un peintre à qui il a fait exécuter, sans autorisation ni information préalable, des travaux de peinture que le cadre technique de l'établissement lui avait demandé de réaliser.
Le 8 octobre 2013, la direction de l'Y... Bévière a notifié à M.A... une mise en garde pour non-respect des consignes relatives à l'intimité des résidents.
Le 10 juin 2014, la direction de l'association "Arbres de Vie" a convoqué M.A... à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave fixé au 24 juin 2014 avec notification d'une mise à pied conservatoire.
Le 4 juillet 2014, l'inspection du travail a interpellé l'Y... Bévière sur la procédure de licenciement engagée à l'encontre de M.A... sollicitant des explications notamment quant à la portée de la mise à pied conservatoire qui lui a été notifiée; en réponse, la direction de l'Y... a fait savoir à l'administration du travail que la procédure engagée à l'encontre du salarié concernait l'ensemble des établissements gérés par l'association "Arbres de Vie".
Le 8 juillet 2014, M.A... s'est vu notifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d'exécution du préavis.
Le 11 décembre 2014, M.A... a attrait les Y... Bévière et Reyniès devant le conseil de prud'hommes de Grenoble selon deux procédures distinctes sollicitant la condamnation des deux établissements à lui verser diverses sommes pour licenciement abusif ; il a sollicité, en outre, la condamnation de l'Y... Reyniès à lui verser des dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement.
Suivant jugement en date du 25 janvier 2016, le conseil de prud'hommes de Grenoble a :
- ordonné la jonction sous des procédures,
- jugé que le licenciement prononcé à l'encontre de M.A... par les Y... Bévière et Reyniès, gérés par l'association "Arbres de Vie" est dénué de cause réelle et sérieuse,
- condamné l'Y... Bévière à verser à M.A... les sommes suivantes majorées des intérêts de droit à compter du jugement :
4.900 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné l'Y... Reyniès à verser à M.A... les sommes suivantes majorées des intérêts de droit à compter du jugement :
800 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure,
4.900 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
1.000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M.A... du surplus de ses demandes,
- débouté l'Y... Reyniès et l'Y... Bévière de leur demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de l'Y... Reyniès et l'Y... Bévière.
Le jugement ainsi rendu a été notifié aux parties le 26 janvier 2016 ; l'association "Arbres de Vie" en a relevé appel le 18 février 2016.
Aux termes de ses conclusions enregistrées par le greffe le 23 novembre 2016, développées oralement à l'audience, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des motifs, l'association "Arbres de Vie" sollicite de la cour de :
- la déclarer recevable et fondée en son appel,
Y faisant droit :
- infirmer la décision entreprise,
Statuant à nouveau :
- constater que M.A... était titulaire d'un unique contrat de travail,
- constater que le licenciement dont M.A... a fait l'objet était pourvu d'une cause réelle et sérieuse,
- débouter M.A... de l'ensemble de ses prétentions,
- condamner M.A... à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M.A... aux entiers dépens.
A l'appui de ses demandes, l'association "Arbres de Vie" fait valoir :
- qu'elle gère les deux Y... Bévière et Reyniès dont les numéros de SIRET démontrent qu'ils relèvent de la même entité juridique ; que M.A... été embauché au sein des deux établissements pour occuper le même poste d'ouvrier d'entretien ; que pour des raisons de gestion propre à chacun des établissements, il a signé un second contrat avec l'Y... Reyniès un mois et demi après son embauche au sein de l'Y... Bévière sans qu'aucune période d'essai n'ait été prévue ; que chaque contrat comportait une clause de mobilité qui visait l'autre établissement ; que ses horaires de travail au sein des deux établissements étaient organisés de manière complémentaire ; qu'en raison de l'unicité des contrats de travail de M.A..., il n'y avait pas lieu d'engager deux procédures distinctes de licenciement à son encontre,
- qu'au mois de mai 2014, Mme C..., aide soignante au sein de l'unité Chêne de l'Y... Bevière, a alerté sa direction de faits de harcèlement moral et de diffamation dont elle se disait victime de la part de M.A... ; que plusieurs salariés ont confirmé les faits dénoncés ; qu'il lui appartenait de licencier ce dernier compte de l'obligation qui lui est faite de mettre un terme à toute situation qui pourrait être qualifiée ; que pour tenir compte de l'ancienneté de M.A..., elle a décidé de licencier ce dernier pour cause réelle et sérieuse au lien de rompre son contrat de travail pour faute grave.
Aux termes de ses conclusions en réplique, notifiées par voie électronique le 3 août 2017, développées oralement à l'audience, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des motifs M.A... sollicite de la cour de :
- déclarer les Y... Reyniès et Bévière recevables mais mal fondés en leur appel,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- constaté qu'il était titulaire de deux contrats de travail distincts,
- jugé que ses licenciements étaient dénués de cause réelle et sérieuse,
Statuant de nouveau :
- condamner l'Y... Bévière à lui payer les sommes suivantes :
15.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
5.000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
- condamner l'Y... Reyniès à lui payer les sommes suivantes :
900 € pour non-respect de la procédure,
15.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
5.000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,
- condamner les Y... Bévière et Reyniès à lui verser chacun la somme de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- assortir ces condamnations des intérêts légaux de droit à compter de la notification de la décision à intervenir,
- condamner les Y... Bévière et Reyniès aux entiers dépens.
Il fait valoir en substance :
- qu'il était destinataire de deux bulletins de salaire ; qu'après avoir été licencié par l'Y... Bévière, deux attestations Pôle Emploi lui ont été remises par chacun des établissements ; que l'Y... Reyniès ne pouvait rompre son contrat de travail sans respecter la procédure de licenciement en se fondant les motifs évoqués par l'Y... Bevière ni se prévaloir de la mise à pied conservatoire notifiée par ce dernier établissement dans la lettre de convocation à l'entretien préalable à son licenciement ; que l'Y... Bévière ne pouvait pas évoquer dans la lettre de licenciement la mise à pied du 4octobre2013 qui lui a été notifié par l'Y... Reyniès,
- que la mise en garde du 8 octobre 2013 n'a été suivie d'aucune sanction et qu'il n'avait jamais été interpellé jusqu'à cette date par l'employeur pour des faits similaires ; que ce dernier avait été alerté le 19 mai 2014, d'un certain nombre de difficultés rencontrées avec une salariée de l'unité Chêne et qu'il lui était devenu impossible d'agir en son sein sans se voir adresser des reproches ; que les faits qui lui sont reprochés dans la lettre de rupture son imprécis, non circonstanciés ; que les faits de harcèlements ou de propos déplacés envers les collègues de travail ont été évoqués pour la première fois dans le cadre de la procédure de licenciement.
- qu'il a été particulièrement touché par la brutalité de la mesure de licenciement engagée par l'Y... Bévière et la nature des faits qui lui ont été reprochés ; qu'il a été licencié par l'Y...Reyniès sans avoir pu bénéficier de l'entretien préalable assisté d'un conseiller et qu'aucune lettre de rupture motivée ne lui a été remise ; qu'ayant perdu brutalement les deux emplois qu'il occupait depuis plus de 13 ans, il a subi un préjudice moral distinct que chaque établissement doit réparer.
SUR CE :
Sur l'unicité du contrat de travail :
L'association "Arbres de Vie" assure la gestion de trois Y... situés sur la commune de Grenoble : l'Y... Reyniès, l'Y... Bévière et l'Y... Abbaye. Ces Y... ne constituent que de simples établissements de l'association "Arbres de Vie", laquelle est seule titulaire de la personnalité juridique et que ne constitue en conséquence que l'unique employeur de M.A....
Dès lors, la circonstance que M.A... se soit vu remettre deux certificats de travail distincts au terme de la relation de travail et qu'il recevait chaque mois deux bulletins de salaire ne suffit pas à établir un lien de subordination à l'égard de deux employeurs différents, à plus forte raison qu'en l'espèce les établissements ' fussent-ils autonomes dans leur fonctionnement ' relèvent d'une seule et même entité.
M.A..., qui n'exerçait son activité au profit que d'un seul employeur dans le cadre d'un seul contrat de travail, ne peut utilement soutenir que la rupture de la relation de travail supposait une procédure de licenciement pour chaque établissement au sein duquel il intervenait.
Il s'ensuit que les motifs invoqués dans la lettre de rupture du 8 juillet 2014, bien que rédigée sous le timbre du seul Y... Bévière, concernaient indistinctement l'ensemble des établissements relevant de l'association "Arbres de Vie".
Le jugement déféré sera, dès lors, infirmé sur ce point.
Sur le bien-fondé du licenciement :
En application des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, il appartient au juge, en cas de litige sur les motifs du licenciement d'un salarié, d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
L'administration de la preuve, en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables, qu'il doit reprendre dans la lettre de rupture laquelle circonscrit le champ du litige et lie juge.
Dans la lettre de licenciement du 8 juillet 2014, l'employeur formule les griefs au salarié en ces termes:
«Nous avons appris très récemment que, depuis longtemps, vous avez développé au sein des deux établissements dans lesquels vous intervenez, un comportement et une attitude totalement inadmissible, à savoir :
un comportement vis à vis de vos collègues familier, non respectueux ;
des propos déplacés et insultants, dénigrant, voire diffamant visant vos collègues ;
une attitude équivoque à connotation sexuelle envers vos collègues féminines ;
des agissements qui pourraient être qualifiés de «harcèlement moral et sexuel» vis-à-vis de collègue;
des attitudes non respectueuses de l'intimité des résidents».
L'employeur poursuit en rappelant au salarié les sanctions qui lui ont été appliquées les 4 et 8 octobre 2014, et conclut en indiquant que les faits qui lui sont reprochés «mettent en cause la bonne marche du service» et justifient qu'ils soit dispensé de l'exécution de son préavis.
Pour justifier des manquements invoqués dans la lettre de rupture, l'association "Arbres de Vie" produit les témoignages de plusieurs salariés des établissements Bévière et Reyniès.
Il verse tout d'abord le témoignage de Mme C..., principale intéressée par les faits de harcèlement moral et sexuel allégués. Cette dernière se dit être «victime depuis des mois de harcèlement et de diffamation dans le cadre de (son) travail et de (sa) vie privée». Elle déclare que «M.A... Angelo (lui) fait part, lorsque (elle) est seule avec lui de critiques de toutes (ses) collègues à (son) encontre, qui, d'après lui, ne veulent plus travailler avec elle». Elle indique «qu'il a également ouvert le courrier de (son) bulletin de salaire». Elle précise enfin avoir reçu des menaces par téléphone pour ne pas avoir cédé aux avances de M.A....
Mme D..., aide-soignante au sein de l'unité Chêne de l'Y... Bévière relève des «comportements proches avec (sa) collègue C... Christine» ; précise que M.A... «la (Mme C...) suit partout, regarde ses fesses avec beaucoup d'insistance et de plaisir» ; et indique qu'il «se permet de se mettre derrière elle (Mme C...) faisant des gestes blessants et déplacés vis-à-vis de (sa) collègue C... Christine».
Mme E..., aide-soignante au sein de l'Y... Reyniès, évoque un échange avec M.A... au cours duquel «il lui a parlé d'une collègue travaillant depuis longtemps dans la maison» qui «l'avait accusé de harcèlement». Elle déplore «sa façon de mettre sa main sur (son) épaule ou sur (son) bras quand il (lui) faisait la bise» laquelle «(la) mettait très mal à l'aise». Mme E... indique avoir «fini par juger son comportement déplacé au moment de l'arrivée de nouvelles stagiaires ou remplaçantes dans (son) secteur». Elle précise avoir «vu Angelo A... faire des allers-retours sur les lieux tout au long de la matinée sans qu'il n'y ait de travail à faire», qu'«il est également venu discuter avec une stagiaire alors qu'elle donnait le petit-déjeuner à une résidente». Elle relève également «les fois où il se permettait de rentrer dans une chambre au moment de la toilette des résidentes». Enfin Mme E... relate la situation de «cette remplaçante» qui lui «a dit qu'Angelo se servait de son numéro pour lui envoyer des messages».
M. F..., cadre entretien, déclare que «plusieurs de (ses) collègues se sont plaintes auprès de (lui) de M.A... Angelo. Elles lui reprochent ses attitudes ''pot de colle''» ; il précise tout à la fois «qu'il n'a jamais pu constater ces faits».
Mme G..., aide-soignante, déplore le «comportement très intrusif de M.A...» à son égard, ce dernier posant sa « main sur l'épaule quand il faisait la bise, qu'on ne voulait pas vraiment lui faire» ou «sur la hanche dans le même cas», lui posant des «questions trop personnelles et intimes avec une insistance particulière (T'habites où ' Tu veux que je te ramène ' Tu fais quoi ce soir '). Elle indique également qu'«il est arrivé qu'il rentre dans les chambres pendant que nous faisions des soins intimes à des personnes âgées. Et nous étions obligés de le mettre dehors fermement'.
Mme H..., aide-soignante au sein de l'unité Cassis de l'Y... Bévière, dénonce des propos déplacés, relevant que M.A... «est allé beaucoup trop loin dans ses paroles». Elle déclare au sujet de Mme C..., que M.A... «l'a insulté à nombreuses reprises», «qu'il est allé jusqu'à (lui) raconter des choses de l'ordre du privé concernant Christine». Elle affirme également que M.A... «rabaissait fréquemment d'autres collègues».
Enfin, Mme I..., aide-soignante au sein de l'Y... Reynier, indique «rejoindre (ses) collègues sur le fait qu'Angelo A... était très présent», «qu'il était collant dans le sens où il se rendait souvent dans l'unité où (elle) travaille pour discuter avec (elle). Quand (elle) dit collant, c'est aussi faire la bise avec la main sur (ses) hanches». Elle déplore également «des questions indiscrètes : tu habites où ' Tu as quoi comme voiture '».
Pour contester les manquements invoqués dans la lettre de rupture, M.A... verse les attestations, émanant de proches de résidents des Y... Reyniès et Bévière et d'anciens collègues de travail.
Mme J..., fille d'une résidente, se dit ainsi surprise au même titre que sa mère du licenciement de M.A... dont elle loue le «grand professionnalisme», la «capacité d'écoute des personnes âgées», et dont elle relève la caractère «poli et courtois avec tout le monde».
Mme K..., auxiliaire de vie, indique «avoir côtoyé un mois» M.A... qu'elle qualifie de «poli, aimable, respectueux» et se dit également surprise de son licenciement.
Mme L..., auxiliaire de vie, déclare avoir rencontré «aucun problème avec lui (M.A...)». Elle décrit ce dernier comme «très poli», «courtois avec les résidents et leur famille». Elle précise n'avoir «jamais constaté de faits et gestes déplacés envers son entourage» de la part de M.A... lequel «respectait toujours l'intimité des résidents (frapper aux portes avant d'entrer, etc.)».
M. M..., atteste «être journellement présent pour aider son épouse» et évoque un contact «cordial et avenant» avec M.A....
Enfin, M. N... dit croiser M.A... depuis six ans et déclare n'avoir jamais constaté de gestes ou de paroles déplacés à l'égard de son entourage professionnel.
Si les attestations nombreuses et concordantes de l'employeur font état d'une attitude et de propos déplacés à l'égard de M. C..., elle n'apparaissent pas suffisamment précises et circonstanciées pour établir la matérialité d'agissements qui pourraient qualifiés de harcèlement moral ou sexuel. Il s'infère toutefois de ces témoignages que M.A... s'autorisait des gestes, sinon tendancieux, à toute le moins inadaptés dans un contexte professionnel ; l'examen de ces pièces révèle que ses gestes rejaillissaient sur le quotidien au travail des aides-soignantes.
Cette seule circonstance suffit à justifier le licenciement de M.A... pour cause réelle et sérieuse.
En effet, l'employeur étant tenu d'une obligation de résultat en matière de protection de la sécurité et de la santé de ses salariés, il doit faire en sorte que ces derniers aient une attitude respectueuse entre eux. A cet égard, M.A... ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il a attiré l'attention de sa hiérarchie sur les reproches incessants de Mme C..., dont il allègue avoir été l'objet, pour contester les manquements invoqués à l'appui de son licenciement.
En effet, les salariées de l'association dénoncent en nombre les gestes inadapté de M.A... ; en outre, le comportement inadapté de ce dernier se constate également envers les résidents de l'Y... et lui a valu, du reste, une observation écrite de la part de l'employeur.
Les témoignages que ce dernier verse,en ce qu'ils émanent d'anciens salariés ou de personnes présentes de manière ponctuelle au sein des établissements, qui en tout état de cause, ne peuvent connaître du quotidien de M.A... au travail, suffisent pas à combattre ceux produits par l'employeur.
Il s'ensuit que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a dit que les licenciements prononcés à l'encontre de M.A... sont dénués de cause réelle et sérieuse. Corrélativement, M.A... sera débouté de l'ensemble des demandes de ce chef.
Sur les demandes accessoires :
Le jugement déféré sera infirmé dans ses dispositions relatives à l'application 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Enfin, M.A..., partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra payer à l'association "Arbres de Vie" la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi:
- DECLARE l'association "Arbres de Vie" recevable en son appel,
- INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonné la jonction sous le numéro de RG 14/01416 de l'instance référencée sous le numéro de RG14/01417 et débouté les Y... Reyniès et Bévière de leur demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :
- DIT que M.A... était lié aux Y... Reyniès et Bévière par un seul contrat de travail,
- DIT que le licenciement de M.A... est justifié par une cause réelle et sérieuse,
- DEBOUTE M.A... de l'ensemble de ses prétentions,
- CONDAMNE M.A... à payer à l'association "Arbres de Vie"la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- REJETTE toute autre demande,
- CONDAMNE M.A... aux entiers dépens d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Philippe SYLVAN, Président, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT