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02/10/2018 | FRANCE | N°16/01704

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 02 octobre 2018, 16/01704


VC



N° RG 16/01704



N° Minute :



















































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







Me Jean-Marie X...



la SCP Y... & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COU

R D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 02 OCTOBRE 2018





Appel d'une décision (N° RG F15/00264)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 23 mars 2016

suivant déclaration d'appel du 29 Mars 2016



APPELANT :



Monsieur Rémi Z...

de nationalité Française

[...]



représenté par Me Jean-Marie X..., avocat au barreau de PAR...

VC

N° RG 16/01704

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Jean-Marie X...

la SCP Y... & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 02 OCTOBRE 2018

Appel d'une décision (N° RG F15/00264)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 23 mars 2016

suivant déclaration d'appel du 29 Mars 2016

APPELANT :

Monsieur Rémi Z...

de nationalité Française

[...]

représenté par Me Jean-Marie X..., avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société LPG SYSTEMS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Joseph Y... de la SCP Y... & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Madame Dominique DUBOIS, Présidente,

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseiller,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 Juin 2018,

Mme Valéry CHARBONNIER, a été entendue en son rapport, assistée de Melle Sophie ROCHARD, Greffier conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées.

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 02 Octobre 2018, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 02 Octobre 2018.

Exposé du litige:

M. Rémi Z... a été embauché par la société LPG SYSTEMS en contrat à durée déterminée de 6 mois le 1er juillet 2010 en qualité de webmarketeur, statut cadre.

Un contrat à durée indéterminée était signé entre les parties en date du 1er janvier 2011.

Par courrier du 5 décembre 2014, la société LPG SYSTEMS lui annonçait sa mutation sur le site de Sophia A....

Le 18 décembre 2014, M. Z... refusait cette mutation.

Le 26 décembre 2014, la société LPG SYSTEMS confirmait la mutation à son salarié lui rappelant qu'elle s'effectuait dans le cadre des dispositions de son contrat de travail et qu'il disposait de deux mois de réflexion. De nombreux mails étaient ensuite échangés entre les parties pour trouver une solution amiable sans succès.

Le 26 février 2015, M. Rémi Z... était convoqué à un entretien préalable de licenciement le 30 mars 2015 et ne s'y présentait pas.

M. Z... était licencié pour faute grave par courrier du 2 avril 2015.

M. Z... a saisi le conseil des prud'hommes de Valence le 10 avril 2015 aux fins de contester le bien fondé de son licenciement et obtenir indemnisation.

Par jugement en date du 23 mars 2016 , le conseil des prud'hommes deValence a:

- débouté M. Rémi Z... de l'intégralité de ses demandes

- condamné M. Rémi Z... à payer à la société LPG SYSTEMS la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance

La décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception le 29 mars 2016.

M. Rémi Z... représenté par son conseil, a interjeté appel de la décision en sa globalité par déclaration en date du 29 mars 2016.

Par conclusions récapitulatives en date du 12 février 2018, il demande à la Cour d'appel de:

réformer le jugement entrepris

condamner la société LPG SYSTEMS à lui verser les sommes suivantes :

' au titre du licenciement abusif, 45.000 €

' au titre du préavis, 10.500 €

' au titre des congés payés afférents, 1.050 €

' au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 1.200 €

dire qu'il a subi de la part de son employeur un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152 -1 du code du travail et condamner la société LPG SYSTEMS à lui verser la somme de 20.000 € de dommages-intérêts

condamner la société LPG SYSTEMS à lui verser les sommes suivantes :

' au titre des heures supplémentaires, 36.013,64 euros

' au titre des congés payés afférents, 3.601,34 euros

' au titre du repos compensateur, 10.173,87 euros

' au titre des congés payés afférents, 1.017 €

' au titre du travail dissimulé, 21.000 €

' au titre du non-respect de la durée maximale du travail, 8.000 €

' au titre de la prime d'objectifs 2014, 3.500 € majorée des congés payés afférents

condamner la société LPG SYSTEMS aux entiers dépens

Il soutient :

Sur le caractère abusif et infondé du licenciement :

' la société LPG SYSTEMS fonde son licenciement sur la clause de mobilité incluse dans le contrat travail et le fait que l'éloignement de l'équipe marketing Wellbox par rapport aux équipes marketing centrales constitue un frein à l'efficacité de la société et plus largement à une collaboration étroite et constructive. Toutefois au terme d'une jurisprudence constante, l'employeur, nonobstant l'existence de clauses de mobilité, ne peut mettre en 'uvre celle-ci dès lors que l'intérêt de l'entreprise n'est pas démontré et que la mesure envisagée porte gravement atteint au droit du salarié à une vie personnelle et familiale. Or, la société LPG SYSTEMS est depuis très longtemps éclatée en 7 sites dont Valence, Sophia-A..., D..., la Floride, E... et Saint Barthélémy et cet éclatement ancien n'a jamais été vécu comme un problème pour la société jusqu'à ce jour. La communication entre tous les intervenants se fait presque intégralement par messagerie électronique, fax et téléphone. En outre pour toute décision même de second ordre il est impératif de discuter et d'obtenir l'avis conforme de la présidente, de son mari et parfois de leur fils et de son frère. Tous les jours, et bien souvent la nuit et le week-end, les cadres de la société doivent aviser la présidente et son mari et attendre qu'ils valident chaque décision. La raison réelle de supprimer les postes de M. Rémi Z... et de Mme B... est de réaliser des économies et qu'ils ont cessé de plaire à la présidente. Pour ne pas avoir à mettre en place un plan social, l'employeur camoufle le licenciement projeté en licenciement pour faute. La société a déjà été condamnée par le conseil des prud'hommes de Grasse pour la même raison dans neuf autres dossiers, décisions qui ont été confirmées en appel. La société s'est servie dans sa stratégie de la certitude que les deux salariés n'accepteraient pas leur mutation du fait de leurs trop fortes contraintes personnelles. Pour un effectif de 240 personnes, l'employeur doit faire face à une trentaine de litiges prud'homaux sur fond de licenciement abusif, de harcèlement et de burn-out. L'employeur a déjà usé cinq directeurs des ressources humaines. En utre, M. Rémi Z... vit en couple il vient d'avoir son premier enfant. Sa compagne est contractuelle dans la fonction publique et ne peut demander de mutation sans perdre son emploi. Le couple est par ailleurs propriétaire de son domicile pour lequel un crédit a été souscrit.

Sur le harcèlement moral : depuis octobre 2014 et jusqu'au licenciement, M. Z... a dû faire face un véritable harcèlement moral de la part de sa nouvelle responsable, Madame Gaëlle C...: il recevait d'innombrables e-mails la nuit ainsi que le week-end, des demandes de travail le week-end pour le lundi matin, des demandes de travaux destinés à dévaloriser certains de ses concurrents et les pousser vers la sortie, la suppression discriminatoire et injustifiée de l'autorisation de travailler à domicile, la suppression de la gamme de produits sous sa responsabilité qui représentait 60% de son activité, la communication de son salaire à l'équipe...

Sur les heures supplémentaires: aucune condition n'est remplie par la société LPG SYSTEMS quant à la validité du «forfait-jours», cette convention ne doit pas aboutir à augmenter la durée du travail sans paiement des majorations pour heures supplémentaires, elle doit faite l'objet d'une convention écrite individuelle et d'un entretien spécifique. Le contrat de travail de M. Z... ne remplit pas l'exigence relative aux fonctions du salarié de la convention collective de la métallurgie du 28 juillet 1998 (autonomie)et M. Z... n'a jamais bénéficié d'un entretien annuel.

Sur le repos compensatoire obligatoire: le salarié qui dépasse un quota annuel d'heures supplémentaires a droit à un repos compensateur.

Sur le travail dissimulé:obligation de l'employeur de faire figurer sur les bulletins de salaires toutes les heures réalisées ainsi que leur majoration.

Sur le non respect de la législation sur la durée travail:l'employeur a manqué à de très nombreuses reprises à ses obligations relatives aux amplitudes maximales de travail.

Sur le non paiement de la prime d'objectif: prime prévue annuellement dans le contrat de travail non réglée en 2014.

Par conclusions en date du 11 juin 2018 la société LPG SYSTEMS en réponse demande à la Cour d'appel de:

confirmer le jugement entrepris

condamner M. Z... à lui verser la somme de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel

Elle fait valoir que:

Sur le bien-fondé du licenciement : le salarié ne peut contester avoir librement stipulée avec son employeur une clause de mobilité géographique. Or, la bonne foi contractuelle de l'employeur est présumée dans le cadre de la mise en 'uvre de l'obligation de mobilité et il appartient au salarié de démontrer que la dite mobilité a pu intervenir pour des raisons étrangères à l'intérêt de la société ou dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Cette décision s'imposait dans un souci d'efficacité et de rationalisation de son organisation compte tenu de l'éloignement de l'équipe marketing Wellbox sise à Paris et de l'équipe marketing sise à Sophia A.... Le comité d'entreprise, régulièrement informé de cette décision, n'a pas critiqué la cohérence et la pertinence de celle-ci. Un délai de prévenance du salarié suffisamment important a été respecté. L'employeur a ensuite tout mis en 'uvre afin de trouver une solution alternative pour éviter que le contrat travail de l'intéressé ne soit rompu et lui a proposé un poste qu'il a été refusé, stigmatisant ainsi un comportement fautif. M. Z... et Mme B... ont effectivement été remplacés sur le site de Sophia A... suite à leur licenciement

Sur le harcèlement moral : le salarié dispose de très peu d'éléments à faire valoir et ne démontre pas l'existence d'un harcèlement moral. Les rapports entre Madame C... et M. Z... étaient tout à fait normaux comme l'attestent les courriels versés par les deux parties.

Sur les heures supplémentaires : la licéité du dispositif de forfait en jours a été validé par la Cour de Cassation et le salarié se contente d'indiquer le nombre d'heures supplémentaires prétendument accomplies sans fonder sa demande.

Sur le rappel de salaire au titre de la prime d'objectif : la charge de la preuve incombe au salarié qui ne démontre pas remplir les conditions pour bénéficier de cette rémunération variable.

L'affaire a été fixée à plaider le 12 mars 2018 puis renvoyée à la demande des parties au 18 juin 2018.

Pour plus ample exposé des motifs, de la procédure et des prétentions des parties la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développée lors de l'audience des débats.

Le délibéré est fixé au 2 octobre 2018 par mise disposition au greffe.

SUR QUOI:

Sur le harcèlement moral:

Aux termes de l'article L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés

Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral; dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le harcèlement moral n'est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l'ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d'un salarié défaillant dans la mise en 'uvrede ses fonctions ;

En l'espèce, M. Z... invoque la pression subie de la part de sa nouvelle responsable, Mme C..., depuis son arrivée octobre 2014 caractérisée par:

l'envoi excessif et incessant de mails y compris la nuit et le week-end,

la demande de travaux le week-end pour le lundi matin,

la demande de travaux visant à dévaloriser ses conccurents

la suppression discriminatoire et injustifiée de l'autorisation de travailler à domicile

la suppression sans concertation d'une gamme de produits qu'il avait sous sa responsabilité et représentant 60% du nombre de ses références,

l'annonce de la venue de M. Z... durant une journée à Sophia A... juste avant l'arrivée de son enfant et avant sa mutation

sa stigmatisation par la divulgation de son salaire à toute l'équipe

l'annonce de ses objectifs pour l'année 2014 en octobre 2014 au lieu de janvier 2014

S'agissant des différents reproches du salarié :

Le listing des mails reçus par M. Z... de la part de Mme C... du 7 octobre 2014 au 4 décembre 2014 fait effectivement apparaître sur les 98 mails reçus sur une semaine, 34 lui ont été adressés le soir après 19:00 outre certains le week-end. Ce fait apparaît par conséquent établi.

M. Z... accuse Mme C... de lui demander des travaux urgents du vendredi pour le lundi mais le seul mail versé par le salarié aux débats du vendredi 24 octobre à 18:37, ne fait que fixer une réunion conférence téléphonique le lundi matin à 8:30 sans travail préparatoire. Ce fait n'est donc pas établi.

S'agissant des travaux destinés à dévaloriser ses concurrents, le mail fourni versé ne démontre pas les agissements allégués.

Il est établi que qu'il a été rappelé à M. Z... qu'il devait se rendre à l'adresse du bureau à Paris pour travailler.

Il n'est pas contesté que la vente en ligne cosmétiques LPG a été supprimée le 13 février 2015 compte tenu «des problèmes engendrés à l'export et le peu de retour sur investissement avec la précision que c'était sans lien avec l'équipe gérant les produits».

Le mail versé aux débats par M. Z... ne démontre pas son impossibilité de modifier la date de son déplacement à la journée à Sophia A... en cas de naissance imminente de son enfant.

Il est établi que le montant du salaire de M. layalle a été évoqué auprès des autres salariés.

Enfin, les objectifs transmis en octobre 2014 l'ont été à la prise de poste de sa responsable et M. Z... ne démontre pas qu'ils ont intentionnellement été fixés de manière inatteignables pour le mettre en défaut par rapport aux années précédentes et à ses résultats provisoires de l'année 2014. Ce fait n'est pas établi.

Il résulte par conséquent de l'examen des faits susvisés des éléments précis et concordants permettant de présumer que M. Z... a subi des agissements répétés de la part de son employeur pouvant caractériser un harcèlement moral.

Il apparaît néanmoins que l'employeur apporte une réponse circonstanciée à chacun des reproches du salarié.

Ainsi il résulte des éléments versés aux débats que le listing des mails reçus par M. Z... de la part de Mme C... du 7 octobre 2014 au 4 décembre 2014 ne fait apparaître que trois mails le dimanche 19 octobre de 21:42 à 22:00, tous les autres mails de ces trois mois (au nombre de 98) étant adressés la semaine, dont uniquement 34 le soir après 19:00 et M. Z... ne démontre pas qu'il lui était imposé de les consulter immédiatement et d'y répondre avant le lendemain surtout s'il travaillait de son bureau en région parisienne et non de chez lui comme il lui a été demandé.

Rien dans le contrat de travail de M. Z... ne l'autorise à travailler à son domicile, l'adresse de son bureau à Paris y étant même précisée et le seul rappel à Mme B... et M. Z... de leur obligation de présence au bureau par Mme C... ne constitue pas un agissement répété constitutif d'un harcèlement moral mais un simple recadrage qui au surplus ne concerne pas uniquement M. Z... mais également une autre collègue.

La décision de suppression de la vente en ligne cosmétiques LPG le 13 février 2015 relève du pouvoir de direction et d'organisation de l'employeur et M. Z... ne démontre pas que cette décision ait eu un impact sur sa rémunération et qu'elle était uniquement destinée à lui nuire.

Enfin, la seule mention du salaire des salariés compte tenu des enveloppes budgétaires à gérer ne constitue pas une divulgation fautive ni taboue d'autant que dans le mail du 24 octobre 2015 à 15:35, M. Z... ne s'offusque pas de la mention de sa rémunération mais au contraire s'étonne de celle élevée de sa collègue et sollicite avec humour («smileys») une augmentation.

L'employeur démontre ainsi que les faits matériellement établis par M. Z... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées par voie de confirmation.

Sur le bien fondé du licenciement:

Il est de principe que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible maintien dl'intéressé au sein del'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, à l'appui de le lettre de licenciement, la société LPG SYSTEMS reproche à M. Z... d'avoir refusé sa mutation définitive sur l'établissement sis à Sophia A... (06) conformément à la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail ainsi que la solution alternative proposée dans un second temps en rapport avec ses compétences et qualifications spécifiques.

Il est de jurisprudence constante que l'employeur peut en principe imposer une mutation au salarié dont le contrat de travail comporte une clause de mobilité à la condition que celle-ci définisse de façon précise sa zone géographique d'application, qu'elle soit appliquée de bonne foi et que sa mise en 'uvre soit dictée par l'intérêt de l'entreprise. Le juge doit également contrôler que son application ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale.

La bonne foi étant présumée, cet intérêt l'est aussi, et il incombe au salarié de démontrer que la décision de l'employeur a, en réalité, été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu'elle a été mise en 'uvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Le refus par le salarié d'une nouvelle affectation aux termes de la clause de mobilité sans motif légitime peut être qualifié de faute grave.

En l'espèce, aux termes du contrat à durée indéterminée de M. Z... en date du 1er janvier 2011, l'article 2 intitulé «lieu de travail» précise que «M. Z... est engagé pour travailler à Paris (75).... Cependant, il est entendu que pour des raisons relatives aux fonctions de M. Z... et aux nécessités de l'entreprise, la société peut être amenée à modifier le lieu de travail qui pourrait s'exercer indifféremment à Valence(26), à Sophia A...(06) sans que cela constitue une modification du contrat de travail, même si cela doit entraîner un changement de résidence. Par ailleurs, la nature des fonctions de Web marketeur pourra le conduire à effectuer ponctuellement des déplacements en France sur les autres sites LPG, notamment à Sophia A...(06) où se situe la direction Marketing et au siège à valence(26).»

Il n'est pas contesté que cet article constitue une clause de mobilité claire signée par les deux parties en connaissance de cause qui comporte une délimitation précise de la zone géographique visée par la mobilité éventuelle du salarié.

Les parties s'opposent s'agissant de l'intérêt de l'entreprise à faire jouer la clause de mobilité de M. Z....

Le seul fait que jusqu'alors les pôles marketing de la société étaient divisés en trois sites, Paris, Valence et Sophia A... ne démontre pas qu'il n'était pas dans l'intérêt de l'entreprise de les réduire désormais à deux pôles dans un souci d'effectivité qui relève essentiellement du pouvoir de direction de l'employeur. La seule présence du supérieur hiérarchique de M. Z... sur Valence constatée le 7 novembre 2016 ne caractérisant pas le caractère abusif de la mise en 'uvre de la clause de mobilité.

De la même façon, le fait que l'employeur s'interroge sur la manière dont mener la suppression du site de Paris, par proposition de promotion ou mise en 'uvre de la clause de mobilité, ne démontre pas non plus ce caractère abusif, les stratégies de l'entreprise pour préserver son efficacité et ses finances, si elles respectent les droits des salariés, lui appartenant.

M. Z... a signé en toute connaissance de cause une clause de mobilité et ne conteste pas avoir disposé d'un délai de prévenance suffisant (deux mois) ni que son employeur lui ait proposé un autre poste qu'il a aussi refusé, lui permettant de ne se rendre à Sophia A... que deux jours par semaine outre des déplacements déjà prévus par son contrat de travail, préservant ainsi sa vie personnelle. Le fait que M. Z... soit marié avec un jeune enfant à charge et que son épouse travaille, ne constitue pas une situation personnelle et familiale particulière mais au contraire tout à fait classique et il n'est pas démontré que la mise ne 'uvre de la clause de mobilité ait porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale.

Il convient de confirmer la licéité de la clause de mobilité ainsi que la régularité de ses conditions de mise en 'uvre et de débouter M. Z... à ce titre.

Le licenciement de M. Z... étant valablement fondé sur une faute grave.

Sur la convention de forfait et les heures supplémentaires:

Les parties s'opposent sur l'application d'une convention forfait jours et le paiement d'heures supplémentaires.

Une convention de forfait en jours doit répondre à plusieurs conditions cumulatives pour être valide: l'accord écrit du salarié pour sa conclusion, une convention collective doit déterminer le nombre de jours travaillés dans la limite de 218 jours et l'employeur doit tenir un entretien annuel portant sur la charge de travail du salarié l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre activité professionnelle et vie personnelle et familiale ainsi que sur sa rémunération.

En l'espèce l'article 4 du contrat de travail du 1er janvier 2011 mentionne application d'un forfait en jours en application de la convention collective de la métallurgie fixé à 218 jours par année civile complète compte tenu d'un droit intégral à congés payés y compris les éventuels congés d'ancienneté.

Toutefois, la société LPG SYSTEMS ne démontre pas avoir réalisé l'entretien annuel obligatoire prévu à l'article L.3121-46 du code du travail; par conséquent il sera confirmé que la convention en forfait jours n'est pas applicable en l'espèce et que les dispositions des articles L.3121-22 et L. 3171-4 du code du travail relatives aux heures supplémentaires s'appliquent.

Par application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ;

Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient aussi à ce dernier de fournir préalablement des éléments suffisamment précis de nature à étayer sa demande et à permettre également à l'employeur d'y répondre ;

En l'espèce, M. Z... verse aux débats au soutien de sa demande, des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé ses heures supplémentaires non vérifiables sans verser d'autres éléments les corroborant, sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n'était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause.

M. Z... ne fournit par conséquent pas les éléments suffisants pour étayer sa demande d'heures supplémentaires et il sera débouté de sa demande à ce titre ainsi que des demandes associées par voie de confirmation.

Sur la prime d'objectif:

Il ressort de l'article 4 du contrat de travail de M. Z... qu'il bénéficiera d'une rémunération fixe à laquelle s'ajoute «une prime d'objectifs dont le montant et les modalités d'attribution seront définies par la Direction».

Ainsi l'employeur avait la possibilité de modifier de manière unilatérale les conditions d'attribution de cette prime et M. Z... ne démontre pas en quoi il aurait pu bénéficier d'une prime supérieure à celle obtenue pour l'année 2014.Il sera également débouté par voie de confirmation de la demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

Il convient de condamner M. Z... aux entiers dépens dont distraction au profit des avocats de la cause et à la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME, le jugement déféré.

CONDAMNE M. Z... aux dépens.

CONDAMNE M. Z... à payer à la société LPG SYSTEMS la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Présidente, et par Madame Sophie ROCHARD, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 16/01704
Date de la décision : 02/10/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°16/01704 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-02;16.01704 ?
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