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21/06/2018 | FRANCE | N°16/01232

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 21 juin 2018, 16/01232


DD



RG N° 16/01232



N° Minute :



















































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







Me Cédric X...



Me Fabienne Y...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL

DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 21 JUIN 2018







Appel d'une décision (N° RG F 14/00590)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 16 février 2016

suivant déclaration d'appel du 09 Mars 2016



APPELANT :



Monsieur Félix Z...

[...]



comparant en personne, assisté de Me Cédric X..., avocat au barreau de DIJON,



INTIMEE ...

DD

RG N° 16/01232

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Cédric X...

Me Fabienne Y...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 21 JUIN 2018

Appel d'une décision (N° RG F 14/00590)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 16 février 2016

suivant déclaration d'appel du 09 Mars 2016

APPELANT :

Monsieur Félix Z...

[...]

comparant en personne, assisté de Me Cédric X..., avocat au barreau de DIJON,

INTIMEE :

SEM VFD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Fabienne Y..., avocat au barreau de GRENOBLE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Madame Dominique DUBOIS, Président,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

Madame Laurence B..., Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Mars 2018,

Madame Laurence B..., a été entendue en son rapport, assistée de Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 24 Mai 2018, prorogé au 7 juin 2018, puis au 21 juin 2018.

L'arrêt a été rendu le 21 juin 2018.

M. Félix Z... a été engagé en qualité de conducteur receveur par la société d'économie mixte VFD (SEM VFD), à compter du 6 décembre 2011 sous contrat à durée déterminée saisonnier à temps complet.

Puis, neuf contrats à durée déterminée à temps complet ont été signés sur la période allant du 3mai au 30 septembre 2012, le motif de recours au contrat à durée déterminée étant le remplacement de salariés absents.

Du 1er octobre au 4 novembre 2012, trois contrats à durée déterminée à temps partiel, ont été conclus.

Le 5 novembre 2012, M. Z... et la SEM VFD ont conclu un contrat à durée indéterminée à temps partiel.

Par courrier du 27 septembre 2013, M. Z... a sollicité le passage d'un contrat à temps partiel à un contrat à temps complet.

Le 30 septembre 2013, un avenant a été signé, prévoyant une revalorisation de la rémunération minimale de base du salarié à compter du 1er juillet 2012.

Le 15 octobre 2013, la société a informé M. Z... de son accord pour la requalification du contrat à temps partiel en contrat à complet, à compter du 1er novembre 2013. Un projet de contrat a été proposé à M. Z.... Le contrat n'a pas été signé.

Le 9 mai 2014, M. Z... a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble, sollicitant notamment la requalification de son contrat de travail à temps partiel en temps plein.

Le 18 septembre 2015, M. Z... a été licencié pour faute grave, son employeur lui reprochant notamment d'avoir conservé des recettes du transport, de n'avoir pas respecté les procédures relatives à la restitution des disques chronotachygraphes, ainsi que de s'être abstenu de vendre un titre de transport à un usager le 17 août 2015.

Par jugement du 16 février 2016, le Conseil de prud'hommes de Grenoble a :

- dit que le licenciement de M. Z... pour faute grave était justifié,

- requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps plein à compter du 12 octobre 2012 jusqu'à la date du licenciement,

- condamné la SEM VFD à verser à M. Z... les sommes suivantes :

- 11 188,23 € brut à titre de rappel de salaire,

- 1 118,82 € brut au titre des congés payés afférents,

lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 15 mai 2014,

- 1 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ladite somme avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement,

- rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l'exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution en application de l'article R 1454-28 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire,

- condamné la SEM VFD à modifier la date d'ancienneté de M. Z... au 7 décembre 2011 sur l'ensemble de ses fiches de paie,

- débouté M. Z... du surplus de ses demandes,

- débouté la SEM VFD de sa demande reconventionnelle,

- condamné la SEM VFD aux dépens.

M. Z... a interjeté appel de cette décision par déclaration du 9 mars 2016.

A l'issue des débats et de ses conclusions du 12 février 2018, soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. Z... demande à la cour de :

- juger recevable et bien fondé son appel,

En conséquence :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble du 16 février 2016, sauf en ce qu'il a requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps plein à compter du 1er octobre 2012 jusqu'à la date de licenciement et a modifié la date d'ancienneté au 7 décembre 2011 sur l'ensemble de ses fiches de paie,

Le réformer partiellement :

- prononcer la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,

- condamner la société VFD à lui verser une somme de 1 681,42 € nets au titre de l'indemnité de requalification,

- prononcer la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps plein à compter du 1er octobre 2012 jusqu'au prononcé du jugement,

En conséquence :

- condamner la société VFD à lui verser une somme de 11 138,23 € bruts à titre de rappel de salaire, outre 1 113,82 € bruts au titre des congés payés afférents,

- juger que son licenciement du 18 septembre 2015 est nul,

En conséquence :

- le réintégrer,

A titre subsidiaire :

- juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société VFD à lui verser la somme de 30 000 € net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société VFD à lui verser la somme de 3 362,76 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre 336,28 € bruts au titre des congés payés afférents,

- condamner la société VFD à lui verser une somme de 1 120,92 € nets au titre de l'indemnité légale de licenciement,

En tout état de cause :

- condamner la société VFD à modifier la date d'ancienneté au 7 décembre 2011 sur l'ensemble de ses fiches de paie,

- condamner la société VFD à verser une somme de 6 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de l'exécution de mauvaise foi de son contrat de travail,

- fixer la base du salaire mensuel brut à compter du 1er juillet 2012 jusqu'au 31 mars 2015 à 1615,84€, puis à compter du 1er avril 2015, à 1 681,38 €,

-condamner la société VFD à lui remettre, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de la décision, les bulletins de paie des mois de juillet et août 2015,

-se réserver le droit de liquider l'astreinte,

- juger que les sommes ayant une nature salariale ou assimilée produisent des intérêts à compter de la notification par le conseil de prud'hommes à l'employeur des demandes du salarié et en préciser la date,

- condamner la société VFD à lui remettre les documents légaux rectifiés correspondant aux condamnations prononcées,

- débouter la société VFD de l'intégralité de ses demandes,

- condamner la société VFD à lui verser la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. Z... sollicite la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, à compter du 3 mai 2012. Il soutient que les contrats de remplacement conclus ne contiennent pas la qualification des salariés remplacés. Il rappelle que le défaut de cette mention obligatoire impose la requalification du contrat.

M. Z... sollicite également la requalification des contrats à durée déterminée à temps partiel en contrats à temps plein, à compter d'octobre 2012.

Il prétend que le contrat de travail à temps complet envoyé par la société VFD démontre la volonté de l'employeur de conclure un contrat à durée indéterminée à temps complet.

Le salarié fait valoir que son temps de travail a atteint la durée légale de travail pendant plusieurs semaines. D'autre part, il relève que le contrat du 5 novembre 2012 n'indique pas la répartition des horaires entre les jours de la semaine et les semaines du mois. Il prétend donc que le contrat est présumé conclu à temps complet et précise qu'il se trouvait dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et restait à disposition de son employeur. Il indique que les feuilles de route étaient sans cesse modifiées. M. Z... sollicite en conséquence un rappel de salaire à compter d'octobre 2012 jusqu'au licenciement.

Par ailleurs, M. Z... fait valoir qu'en vertu du document contractuel signé par les parties le 30 septembre 2013, il bénéficiait d'un taux horaire fixé, à compter du 1er juillet 2012, à 1615,84€. Il expose qu'à compter du mois d'avril 2015, son taux horaire est passé à 11,0858 €, ce qui correspond à un salaire mensuel de 1 681,38 €.

Sur l'ancienneté, M. Z... fait valoir qu'il est entré dans l'entreprise le 7 décembre 2011. Il prétend que l'ancienneté acquise au titre du premier contrat à durée déterminée doit être prise en compte. Il sollicite en conséquence la rectification de ses bulletins de paye.

S'agissant du licenciement pour faute grave, M. Z... conteste la matérialité des griefs invoqués par l'employeur dans la lettre de notification.

Il prétend en outre avoir été victime d'une mesure de représaille en raison de l'introduction de sa demande en justice. Il soulève la nullité du licenciement.

S'agissant du grief tiré de l'absence de versement des recettes, le salarié soulève la prescription et indique avoir déjà été sanctionné par une mise à pied disciplinaire, pour les mêmes faits. Il prétend en outre que la société VFD ne rapporte pas la preuve qu'il était en possession d'une somme de 2 433,70€.

S'agissant de la procédure de retour des disques, M. Z... soutient qu'il transmettait chaque jour son disque chronotachygraphe.

Par ailleurs, la SEM VFD lui reproche de ne pas avoir vendu un ticket à un passager le 17 août 2015. M. Z... prétend qu'il n'avait pas sa caisse sur ce trajet et a demandé à un collègue de travail effectuant la correspondance de facturer le ticket à ce passager. Il affirme donc que le ticket a bien été vendu.

Le salarié soulève en outre l'exécution déloyale du contrat de travail. Il prétend que la société, qui avait connaissance des heures effectuées grâce aux disques chronotachygraphes, ne rémunérait pas la totalité des heures de travail réalisées.

A l'issue des débats et de ses conclusions du 1er mars 2018, soutenues oralement à l'audience et auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SEM VFD demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Grenoble en date du 16 février 2016 en ce qu'il a dit que le licenciement de M. Z... était justifié par une faute grave,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble en date du 16 février 2016 en ce qu'il requalifié le contrat à temps partiel en contrat à temps plein à compter du 12 octobre 2012 jusqu'à son licenciement,

- infirmer la condamnation au paiement de la somme de 11 188,23 € à titre de rappel de salaire, outre la somme de 1 118,82 € à titre de congés payés afférents,

-infirmer la condamnation consistant à modifier la date d'ancienneté de M. Z... au 7décembre 2011 sur l'ensemble de ses fiches de paie,

- débouter M. Z... de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner M. Z... au paiement d'une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. Z... aux entiers dépens.

La société VFD soutient que M. Z... était engagé selon contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 5 novembre 2012. Elle prétend que M. Z... a sollicité le passage à un contrat à temps complet et indique avoir fait droit à sa demande, rétroactivement à compter du 1er novembre 2013.

S'agissant du taux horaire, elle affirme en outre avoir fait droit à la demande du salarié de reprise d'ancienneté acquise auprès de son précédent employeur pour le calcul de la rémunération et indiqué à ce dernier que son salaire de base ferait l'objet d'une régularisation rétroactive, depuis le 1er juillet 2012. Cependant, elle précise que dans la mesure où M. Z... travaillait à temps partiel, le montant du salaire nouvellement fixé à 1 615,84 €, doit être proratisé en fonction du temps de travail du salarié. Elle indique donc avoir régularisé la situation par le versement de la somme de 1 129,26€, figurant sur le bulletin de salaire du mois d'octobre 2013. Elle fait valoir que M. Z... a été rempli de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail.

S'agissant de la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la SEM VFD fait valoir que les contrats de remplacement comportaient la mention de la qualification des salariés remplacés, dès lors que l'ensemble des conducteurs receveurs disposent de la même classification au sein de l'entreprise et en vertu des dispositions conventionnelles.

Sur la demande de requalification des contrats à temps partiel en contrats à temps plein, elle expose avoir établi un contrat à temps plein, suite à la demande de M.Z... en date du 27 septembre 2013. Elle précise que M. Z... a refusé de signer ce contrat, c'est pourquoi il est demeuré à temps partiel.

La SEM VFD ajoute que M. Z..., qui travaillait à temps partiel, n'était pas à sa disposition permanente. Elle indique que M. Z... n'a jamais contesté les rapports d'activité, qui lui ont été remis mensuellement, et fait valoir que le salarié était informé à l'avance de ses périodes de travail.

Concernant les mois où le salarié a atteint une durée de travail équivalente à un temps plein, la SEM VFD expose que durant ces périodes, M. Z... disposait d'un contrat de travail à temps plein.

Elle prétend en outre, s'agissant des mentions sur les bulletins de paye d'une durée du travail supérieure ou égale à la durée légale, qu'il s'agit d'une erreur matérielle concernant l'horaire de référence, laquelle n'est pas créatrice de droit. Elle précise que M. Z... a été rémunéré sur la base d'un temps complet alors qu'il ne travaillait qu'à temps partiel. Elle indique par exemple que la salarié n'a en réalité travaillé que 69,15 heures au cours du mois d'avril 2013 et non 158,51 heures comme il le prétend.

Sur l'ancienneté de M. Z..., la SEM VFD soutient que le premier contrat à durée déterminée ne doit pas à être pris en compte. Elle fait valoir qu'il y a eu interruption entre le contrat se terminant le 27 avril 2012 et le contrat commençant le 3 mai 2012.

Sur le licenciement pour faute grave, la SEM VFD soutient que celui-ci est justifié. Elle conteste tout lien entre cette mesure et la demande en justice formée par le salarié, ajoutant, pour s'opposer à la demande de réintégration, que la nullité n'est pas encourue, à défaut de texte la prévoyant.

S'agissant de l'absence de versement des recettes, elle expose que M. Z... s'est vu notifier une sanction disciplinaire, le 18 novembre 2010, car il avait conservé des recettes. Elle prétend que M.Z... a réitéré son comportement fautif en gardant de nouvelles recettes. Elle fait valoir que la persistance du comportement fautif du salarié peut être invoqué à l'appui du licenciement.

Elle soutient en outre que M. Z... ne respectait pas les procédures relatives à la restitution de ses disques chronotachygraphes et s'est abstenu, de manière régulière, de vendre des titres de transport aux usagers, ce qui lui a causé un préjudice commercial important.

Pour s'opposer à la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, la société VFD souligne que M. Z..., qui prétend que l'intégralité des heures effectuées ne lui était pas rémunérée, n'a jamais formulé de demande précise à ce titre.

Sur ce :

Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée

Lorsqu'un contrat à durée déterminée est conclu pour remplacer un salarié absent ou dont le contrat est suspendu, il doit, en application de l'article L. 1242-12 du code du travail, comporter le nom et la qualification du salarié remplacé. En l'absence notamment de cette dernière mention, le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée, l'employeur ne pouvant écarter la présomption légale ainsi instituée en apportant des éléments extrinsèques au contrat relatifs à la qualification du salarié remplacé.

En l'espèce, les contrats en cause précisent que M. Z..., conducteur receveur « sera positionné dans le groupe 9 de la grille de salaire correspondant à la catégorie professionnelle ouvrier de la convention collective nationale des transports routiers au coefficient 140 V.» S'agissant du salarié remplacé, il est précisé que celui-ci est «lui-même conducteur receveur».

M. Z... fait valoir que les contrats à durée déterminée ne mentionnent pas la qualification du salarié remplacé, c'est à dire sa classification, sa catégorie, son groupe et son indice.

Cependant, la lecture de la grille de classification des emplois de la convention collective nationale des transports routiers, expressément visée par le contrat, révèle que l'emploi de conducteur receveur correspond exclusivement à la catégorie ouvrier, au groupe 9 et au coefficient 140 V.

De sorte que, la mention dans le contrat de la fonction de conducteur receveur renvoit à une qualification professionnelle précise et unique.

Il en résulte que les contrats répondent aux exigences légales relatives à l'indication, dans le contrat de travail à durée déterminée de remplacement, de la qualification du salariéremplacé.

Par ailleurs, la société VFD justifie de la réalité du remplacement, par M. Z..., des salariés dont les noms sont mentionnés dans les contrats. Elle produit en effet les rapports d'activités des salariés remplacés, mentionnant leurs absences, dont les dates correspondent aux contrats de remplacement conclus.

M. Z... sera donc débouté de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée conclus à compter du 3 mai 2012, ainsi que de l'ensemble des demandes subséquentes, par voie de confirmation.

Sur la date de début d'ancienneté

En cas de succession de contrats sans interruption, l'ancienneté acquise à l'issue du contrat à durée déterminée est reprise dans la cadre du contrat à durée indéterminée. En revanche, lorsque les contrats successifs sont séparés par des périodes d'interruption et que la relation contractuelle n'est pas requalifée par le juge dans son ensemble en contrat à durée indéterminée, la durée des contrats antérieurs n'est pas prise en compte.

L'ancienneté de M. Z... a été décomptée à partir du 3 mai 2012, date du second contrat à durée déterminée.

M. Z... sollicite que celle-ci soit décomptée à partir du premier contrat à durée déterminée, soit le 6 décembre 2011, exposant qu'il n'y a pas eu d'interruption entre les deux contrats, ceux-ci étant uniquement séparés par la fin de semaine du 1er mai.

En l'espèce, le premier contrat a pris fin le vendredi 27 avril 2012.

Le second contrat à durée déterminée a débuté le 3 mai 2012. Du samedi 28 avril au mercredi 2 mai 2012 inclus, se sont écoulés plusieurs jours ouvrés, qui caractérisent l'interruption entre les deux contrats.

En conséquence, les deux contrats n'étant pas successifs mais séparés par une période interruption, et au vu de l'absence de requalification de la relation contractuelle dans son ensemble, il n'y a pas lieu de prendre en compte l'ancienneté acquise au titre du premier contrat, ni de condamner la SEM VFD à effectuer une reprise d'ancienneté.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de requalification des contrats à temps partiel en contrats à temps complet

En vertu des dispositions de l'article L. 3123-17 du code du travail, les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement.

Lorsque le recours à des heures complémentaires a pour effet de porter la durée du travail d'un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale ou conventionnelle, le contrat de travail à temps partiel doit, à compter de la première irrégularité, être requalifié en contrat de travail à temps plein.

En l'espèce, la durée du travail hebdomadaire prévue dans les contrats conclus pour les périodes allant du 1er octobre 2012 au 7 octobre 2012, du 8 au 14 octobre 2012, puis du 15 octobre au 4 novembre 2012, était fixée à 24 heures. A compter du 5 novembre 2012, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée à temps partiel, la durée du travail hebdomadaire étant alors fixée à 25 heures.

Le bulletin de salaire du mois d'octobre 2012 révèle que M. Z... a effectué 155,39 heures au mois d'octobre. En outre, la mention « Majoration heures supplémentaires 125 % » indique que des heures ont été effectuées au delà de la durée légale hebdomadaire. De même, le bulletin de salaire du mois de novembre 2012, comporte la mention d'un nombre mensuel d'heures réalisées s'élevant à 156,62 et de la réalisation d'heures supplémentaires.

La SEM VFD fait valoir qu'il s'agit d'une erreur matérielle. Elle produit les rapports d'activité qui mentionnent que le salarié a effectué un nombre d'heures inférieur à celui noté sur les bulletins de salaire.

Cependant, ces pièces, non signées par le salarié, éditées en 2015, ne correspondent pas aux bulletins de salaire établis, ni à la rémunération qui a été versée au salarié. Elles sont donc insuffisantes pour combattre la preuve apportée par le salarié, qu'il a travaillé à temps complet. En effet, M. Z... justifie avoir perçu au cours des mois d'octobre et novembre 2012, un niveau de rémunération équivalent à celui perçu lors des périodes où il était embauché à temps complet, déduction faite des rémunérations exceptionnelles perçues au cours des mois concernés.

De surcroît, l'étude des correspondances entre l'employeur et le salarié révèle que la société VFD n'ignorait pas les dépassements réguliers par le salarié de la durée légale hebdomadaire du travail. Ainsi, M. Z... indique, par courrier en date du 27 septembre 2013, « j'ai un contrat de travail de 25 heures semaine, dont 108 h mensuel et j'effectue régulièrement par semaines 35 heures, voire 42 heures. Je demande à la société de me régulariser ma situation en m'octroyant un temps complet », ce à quoi la société VFD a répondu, par courrier du 15 octobre 2013, « Je reviens vers vous suite à notre entretien du 4 octobre 2013 au cours duquel nous avons évoqué notamment votre demande de passage à temps complet en suite de votre courrier du 27 septembre 2013. Par la présente et au vu des éléments étudiés en ce sens, nous vous informons que nous accédons à votre demande et requalifions votre contrat de travail ». Dans ce courrier, la société VFD ne conteste pas la réalité des dépassements multiples de la durée légale du travail invoqués par le salarié.

La société VFD soutient que les éléments variables de la rémunération sont payés avec un mois de décalage, afin de permettre au service paie d'avoir toutes les informations. Toutefois, elle ne fournit aucun calcul précis qui permette d'établir la correspondance entre la rémunération versée au salarié et les heures effectuées, étant précisé que la neutralisation des sommes correspondant aux éléments variables, ne permet pas d'aboutir au montant correspondant à un travail à temps partiel.

Il résulte en outre du rapport d'activité produit par la SEM VFD, que durant la semaine allant du 3 au 9 décembre 2012, M. Z... a travaillé 35,20 heures, dépassant la durée légale hebdomadaire du travail, ce qui entraîne automatiquement la requalification.

Au vu de ces éléments, M. Z... établit que la durée du travail a été portée au delà de la durée légale, à de nombreuses reprises, durant chacun des contrats à durée déterminée conclus en octobre et novembre, puis durant le contrat à durée indéterminée conclu à compter du 5 novembre 2012.

La circonstance que le salarié ait refusé de signer le contrat à temps complet proposé par la société ultérieurement est indifférente et ne prive pas ce dernier de la possibilité de solliciter la requalification des contrats irréguliers.

Le jugement sera donc confirmé, s'agissant du principe de la requalification des contrats.

Il sera fait droit à la demande de M. Z... à titre de rappel de salaire à ce titre, ainsi qu'aux congés payés afférents, par voie de confirmation, étant précisé que la société VFD, qui conteste le principe de la requalication, ne fait pas valoir de contestation spécifique s'agissant des modalités de calcul du rappel de salaire sollicité.

S'agissant en revanche de la date de la requalification, il est à noter que les premiers juges ont mentionné, dans leur dispositif, la date du 12 octobre 2012.

Il est de principe cette date doit correspondre à la date de la première irrégularité constatée ou la date à laquelle la durée légale du travail a été dépassé.

Le salarié établit que le dépassement de la durée contractuelle prévue, portant la durée du travail au delà de la durée légale, est intervenu durant les mois d'octobre, novembre et décembre 2012, il convient en conséquence de requalifier chacun des contrats à durée déterminée successifs conclus à cette période, ainsi que le contrat à durée indéterminée conclu à compter du 5novembre 2012, en contrats à temps plein, à compter du 1er octobre, par voie d'infirmation, étant précisé cependant que cette modification n'a pas d'influence sur le calcul des rappels de salaire précités.

Les créances salariales portant intérêt à dater de la réception de la convocation par la partie défenderesse devant le bureau de conciliation, les premiers juges ont justement condamné la SEM VFD à verser à M. Z... les intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2014. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'évolution du taux horaire

M. Z... produit un document en date du 30 septembre 2013, signé par les deux parties, aux termes duquel la SEM VFD indique que :

« les dispositions de votre contrat de travail initial relatives à votre rémunération minimale de base seront désormais rédigées ainsi :

le salaire mensuel brut de base de Monsieur Z... Félix sera de 1 615,84 € à compter du 1er juillet 2012.»

La SEM VFD soutient que le montant de la revalorisation salariale doit être pris en compte au prorata du temps de travail effectué par le salarié, exposant que ce dernier ne travaillait qu'à temps partiel.

Il est patent que la rémunération fixée à 1 615,84 € correspond au salaire mensuel brut de base, pour un travail à temps complet.

Les contrats de M. Z... sont requalifiés en contrats à temps complets à compter du 1er octobre 2012. A compter de cette date, le salarié peut donc à bon droit revendiquer l'entier bénéfice de la revalorisation de salaire.

S'agissant de la période antérieure, M. Z... était engagé selon contrats à durée déterminée, à temps complet.

Les contrats conclus pour les périodes allant du 1er au 5 juillet 2012, du 6 au 31 juillet 2012, du 1er au 31 août 2012, du 1er au 12 septembre 2012, du 13 au 27 septembre 2012, du 28 au 30 septembre 2012, comporte en effet tous la mention : « à temps complet.»

Il est constant que l'employeur doit fournir au salarié le volume de travail prévu au contrat. En outre, le contrat de travail à temps partiel nécessite un écrit et comporte des mentions obligatoires.

La société VFD ne peut donc pas faire valoir que le salarié travaillait à temps partiel à cette période pour écarter le plein bénéfice de la revalorisation de salaire.

La SEM VFD n'apporte pas la preuve que les parties étaient convenues d'une durée du travail différente de la durée contractuelle. En outre, le salarié a perçu une rémunération correspondant à un travail à temps complet et les bulletins de salaires font état d'un temps de travail mensuel supérieur ou égal à un temps complet, en juillet, août et septembre 2012. Les rapports d'activités versés aux débats par la SEM VFD confirment qu'à cette période, le temps de travail prévu au contrat était un temps complet.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'opérer un prorata en fonction des heures travaillées, tant au titre de la période antérieure à la requalification des contrats en contrats à temps complets, qu'au titre de la période postérieure.

La société VFD invoque le courrier du 9 décembre 2013 adressé par l'inspecteur du travail à M.Z..., aux termes il est indiqué, concernant le montant de 1 615,84 € : « il paraît difficilement contestable que cette indication corresponde à un temps plein et qu'il y a eu donc erreur de l'employeur dès lors que vous avez une horaire de travail à temps partiel».

Cependant, les contrats ayant été requalifiés à temps complet à compter du 1er octobre 2012 et les contrats précédents étant conclus à temps complets, ce moyen sera rejeté.

Il est à noter en outre que l'inspecteur du travail a indiqué à M. Z..., en seconde partie de ce courrier, qu'à défaut de répartition contractuelle du temps de travail, son contrat de travail devait être requalifié en contrat de travail conclu pour un temps plein. La société VFD ne peut donc se prévaloir du courrier de l'inspecteur du travail pour prétendre effectuer un prorata.

Par ailleurs, s'agissant de la revalorisation du taux horaire revendiquée par le salarié à compter d'avril 2015, l'étude des bulletins de salaire des mois d'avril et mai 2015, montre que ce taux a été porté à la somme de 11,0858 €. Le contrat étant requalifié à temps complet, la rémunération mensuelle de base de M. Z... s'élève à 1 681,38 €, soit 11, 0858 € X 151,67 heures.

Il sera donc fait droit à la demande du salarié de voir fixer son salaire mensuel brut de base à 1615,84€, du 1er juillet 2012 au 31 mars 2015, par voie d'infirmation. A compter du 1er avril 2015, celle-ci sera fixée à 1 681,38 €.

Sur le licenciement

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de la faute grave du salarié, invoquée dans un licenciement, incombe à l'employeur.

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Selon les termes de la lettre de licenciement qui fixent les limites du litige, la SEM VFD reproche à M.Z... d'avoir conservé des recettes, de n'avoir pas respecté les procédures relatives à la restitution de ses disques chronotachygraphes et de s'être abstenu de vendre des titres de transport aux usagers au cours de l'exécution de son contrat de travail.

1) S'agissant du grief tiré de l'absence de versement des recettes

M. Z... soulève la prescription des faits fautifs invoqués, exposant que la société VFD avait connaissance du grief dès le mois de septembre 2014. Il indique en outre avoir été doublement sanctionné pour les mêmes faits, dont il conteste au demeurant la matérialité.

La société VFD soutient quant à elle que le salarié a conservé des recettes qu'il avait l'obligation de restituer, pour un montant s'élevant à 2 433,70 € au 19 août 2015. Elle précise que, si le salarié avait déjà été sanctionné pour avoir conservé des recettes, les faits fautifs sont néanmoins distincts, dès lors que de nouvelles recettes ont été conservées en 2015.

L'article 1332-4 du code du travail prévoit qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Il incombe à l'employeur d'apporter la preuve de la date des faits fautifs invoqués ou de celle à laquelle il a eu connaissance de ces faits. Il est constant en outre qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à une double sanction.

Dans la lettre de licenciement, la société VFD indique « nous avons dernièrement été une nouvelle fois amenés à constater un défaut de versement de vos recettes » et « à la date du 19 août 2015, vous aviez en votre possession la somme de 2433,70 € ». Elle précise que « le versement [des recettes] doit être réalisé au minimum une fois par semaine.»

La société VFD produit un relevé des recettes encaissées par M. Z... pour la période allant du 1er juin au 20 juillet 2014. Ce document révèle que le montant non reversé s'élevait à 2208,60€ au 20 juillet 2014. Cependant, elle ne produit aucun relevé pour la période postérieure. Par conséquent, aucun élément ne prouve que le salarié a conservé des recettes après cette date.

La SEM VFD produit en outre une unique attestation, établie par Mme A..., responsable d'exploitation, en date du 19 juin 2015, qui indique que M. Z... « ne respectait pas les consignes relatives à la restitution des recettes ». Cette attestation est générale et imprécise, l'absence de respect des consignes pouvant renvoyer à de simples retards de versements, par exemple. Cette attestation ne contient aucune indication relative à la période à laquelle les consignes n'ont pas respectées, ni à un montant conservé, de sorte qu'il est impossible de déterminer si Mme A... fait référence aux faits déjà sanctionnés le 18 novembre 2014 ou à la période postérieure. Par ailleurs, si la lettre de licenciement vise un montant dû au 19août 2015, la SEM VFD n'apporte aucune indication concernant la date à laquelle elle aurait pris connaissance de l'absence de remise de fonds par le salarié, étant précisé que l'obligation de restituer les recettes est hebdomadaire.

Par conséquent, la SEM VFD n'établit pas la réalité de la dette alléguée, ni son quantum et ne justifie pas que le grief n'est pas prescrit. Elle ne peut donc se prévaloir de la conservation de recettes en 2015 par M. Z... pour justifier la mesure de licenciement.

2) Sur le non respect de la procédure de retour des disques

La société VFD verse aux débats un modèle d'attestation que les salariés doivent remplir et prétend que M. Z... ne remplissait pas le document. Elle produit en outre l'attestation de Mme A..., qui révèle que M. Z... « ne respectait pas les consignes [...] relatives à la restitution des données chronotachygraphes (rendu des disques hors délais et incomplet) ». Cette attestation qui n'est corroborée par aucun autre élément, est insuffisante pour établir le grief allégué, étant précisé que la société calculait les temps de travail sur la base de ces données et produit les rapports d'activité du salarié.

Le manquement du salarié n'est donc pas prouvé.

3) Sur l'absence de vente de tickets d'un ticket à un passager le 17 août 2015

La responsable d'exploitation indique : « concernant la journée du 17 août 2015, j'atteste que M. Z... n'a pas vendu de titre de transport à au moins un client puisque le conducteur prenant la relève de la ligne m'a contactée pour signaler le problème.»

L'absence de vente par M. Z... d'un billet à un passager n'est, au demeurant, pas contestée. Le salarié explique qu'il n'avait pas de caisse et prétend avoir demandé à un autre chauffeur d'encaisser le trajet, la société n'ayant donc subi aucun préjudice.

Cependant, il appartient au conducteur receveur de s'assurer qu'il est en possession de la caisse pour effectuer lui-même les ventes de tickets pendant le transport.

En conséquence, ce grief est établi.

Au vu de ce qui précède, un seul des trois griefs invoqués dans la lettre de licenciement est établi. Or, l'absence de vente d'un seul ticket à un passager, ne caractérise pas un manquement grave imposant la rupture immédiate du contrat et n'est pas de nature à justifier le choix, sur l'échelle des sanctions disciplinaires, d'une mesure de licenciement.

Le licenciement de M. Z... est donc sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

M. Z..., dont l'ancienneté est supérieure a deux ans, et qui exerçait dans une entreprise dont il n'est pas contesté qu'elle employait habituellement plus de onze salariés, a droit, a une indemnité minimale correspondant aux salaires perçus au cours des six derniers mois.

Compte tenu de l'ancienneté du salarié de 3 ans et 4 mois, de son niveau de rémunération, du préjudice subi par ce dernier à la suite de la perte injustifiée de son emploi, la SEM VFD sera condamnée à lui verser la somme de 13 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société VFD sera en outre condamnée à lui verser les sommes de 1 120,92 € nets au titre de l'indemnité légale de licenciement, de 3 362,76 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre 336,28€ bruts au titre des congés payés afférents, par voie d'infirmation.

Sur la nullité du licenciement

M. Z... prétend avoir été victime d'une mesure de représaille, en raison de l'introduction de sa demande de requalification du contrat devant le conseil de prud'hommes. Il soulève la nullité du licenciement et sollicite sa réintégration.

Le droit d'ester en justice est une liberté fondamentale. Le salarié licencié en raison de l'introduction d'une action en justice à l'encontre de son employeur doit être réintégré dans l'entreprise. Il appartient à l'employeur d'établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice, par les salariés, de leur droit d'agir en justice.

En l'espèce, les griefs invoqués dans la lettre de licenciement sont étrangers à toute volonté de sanctionner le salarié en raison de l'introduction de sa demande en justice. Aucun élément versé aux débats n'indique que le licenciement aurait une cause autre que celle mentionnée dans la lettre.

En outre, il est à noter que la mesure de licenciement, certes postérieure à l'introduction par M.Z... d'une demande en justice à l'encontre de son employeur, ne fait pas immédiatement suite à la saisine du conseil de prud'hommes, en date du 9 mai 2014. Le salarié a de fait été licencié le 18 septembre 2015, soit plus d'un an après la saisine. Les attestations d'anciens collègues de travail de M. Z..., ne font pas mention d'un traitement différencié de ce dernier par rapport aux autres salariés, en raison de l'action en justice engagée.

La SEM VFD démontre, en produisant deux courriers de licenciement, en date des 13 mai et 19 juin 2015, que des faits reprochés du même type que ceux à l'origine du licenciement de M. Z..., ont donné lieu, à la même période, à des réponses disciplinaires strictement identiques, à savoir le licenciement pour faute grave des intéressés.

En conséquence, M. Z... sera débouté de ses demandes au titre de la nullité du licenciement, ainsi que de sa demande de réintégration.

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

L'article L. 1222-1 du code du travail pose le principe selon lequel le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

M. Z..., qui soulève l'exécution déloyale du contrat, fait grief à la société VFD de ne pas lui avoir versé de compensation financière à la suite de la fermeture du tunnel de Chambon, celle-ci contraignant le salarié à effectuer de longs trajets à compter d'avril 2015. Il lui fait également grief de n'avoir pas mis à sa disposition un logement de fonction, alors que ce type de logement a pu être mis à sa disposition en septembre et octobre 2014. Il expose également avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées et dont il a dû solliciter le paiement à plusieurs reprises. Il indique que la société ne mettait plus à disposition les feuilles de route, afin qu'il ne puisse plus vérifier si l'intégralité des heures lui était rémunérée et soutient ne s'être pas vu remettre les bulletins de salaire des mois de juillet et août 2015, malgré ses demandes.

M. Z... n'apporte aucun élément de nature à étayer l'hypothèse de la réalisation d'heures supplémentaires non rémunérées et ne formule pas de demande de rappel de salaire à ce titre.

L'allongement de la durée du trajet du salarié depuis son domicile vers son lieu de travail, n'est pas imputable à l'employeur et ne saurait donner lieu à une contrepartie financière. L'avantage en nature logement n'étant pas contractuellement prévu, le salarié ne peut faire grief à son employeur de n'avoir pas mis à sa disposition un logement de fonction.

Par ailleurs, M. Z... n'apporte aucune preuve de la dissimulation par la société des feuilles de route en vue d'éviter de rémunérer les heures de travail effectuées.

S'agissant des bulletins de salaire des mois de juillet et août 2015, la société VFD produit ces documents en sa pièce 32. Il n'y a donc pas lieu de condamner la société VFD à lui remettre ces documents, sous astreinte. D'autre part, M. Z... n'explicite pas en quoi il a subi un dommage en raison de l'absence de remise de ces bulletins de salaire.

M. Z... n'apporte aucun élément permettant de caractériser une attitude abusive, vexatoire, ni déloyale de la part de la société VFD pendant l'exécution du contrat. Le salarié sera donc débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat.

Sur la remise des documents rectifiés

La société VFD sera condamnée à remettre à M Z... les documents légaux rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SEM VFD sera condamnée à verser à M. Z... la somme de 1 200 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Les parties seront déboutées de toutes leurs autres demandes ;

La SEM VFD sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au Greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE l'appel recevable,

CONFIRME le jugement déféré sur le principe de la requalification des contrats à temps plein, en ce qu'il a condamné la SEM VFD à verser à M. Z... les sommes de 11 188,23 € bruts à titre de rappel de salaire, outre 1 118,82 € brut au titre des congés payés afférents, lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 15 mai 2014, en ce qu'il a débouté M. Z... de ses demandes au titre de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de l'indemnité afférente, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

REQUALIFIE tous les contrats conclus entre M. Z... et la SEM VFD en contrats à temps complet, à compter du 1er octobre 2012,

FIXE la base du salaire mensuel brut de M. Z... à 1 615,84 € à compter du 1er juillet 2012, puis à 1 681,38 € à compter du 1er avril 2015,

CONDAMNE la SEM VFD à verser à M. Z... les sommes de :

- 13 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 120,92 € nets au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 3 362,76 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, outre 336,28 € bruts au titre des congés payés afférents,

CONDAMNE la SEM VFD à remettre à M. Z... les documents de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt,

CONDAMNE la SEM VFD à verser à M. Z... la somme de 1 200 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

REJETTE toute autre demande,

CONDAMNE la SEM VFD aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 16/01232
Date de la décision : 21/06/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 13, arrêt n°16/01232 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-21;16.01232 ?
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