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22/05/2018 | FRANCE | N°16/01586

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 22 mai 2018, 16/01586


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RG N° 16/01586



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Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







Me Isabelle X...



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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 22 MAI 2018





Appel d'une décision (N° RG F15/00353)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 25 mars 2016

suivant déclaration d'appel du 01 Avril 2016



APPELANTE :



Madame Maryline Z...

née le [...] à GIEN

de nationalité Française

La Comédia [...]



comparante en personne,...

VC

RG N° 16/01586

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Isabelle X...

Me Eric Y...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 22 MAI 2018

Appel d'une décision (N° RG F15/00353)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE

en date du 25 mars 2016

suivant déclaration d'appel du 01 Avril 2016

APPELANTE :

Madame Maryline Z...

née le [...] à GIEN

de nationalité Française

La Comédia [...]

comparante en personne, assistée de Me Isabelle X..., avocat au barreau de VALENCE

INTIME :

M. Olivier A...

Notaire

de nationalité Française

[...]

comparant en personne, assisté de Me Eric Y..., avocat au barreau de VALENCE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Monsieur Philippe SILVAN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseiller,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 Mars 2018,

Mme Valéry CHARBONNIER, a été entendue en son rapport, assistée de Melle Sophie ROCHARD, Greffier

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 22 Mai 2018, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 22 Mai 2018.

RG 16/1586

VC

Exposé du litige:

Mme Z... a été embauchée au sein de l'étude de maître Jacques B..., prédécesseur de maître Olivier A..., notaire à Livron, le 15 septembre 2002 pour exercer la fonction de clerc aux actes courants technicien niveau 2, puis technicien niveau 3 au mois de décembre 2013.

Le 3 mars 2015 Mme Z... a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement économique.

Lors de cet entretien, elle s'est vue remettre une note d'information sur le motif économique du licenciement envisagé et lui a été proposé le contrat de sécurisation professionnelle qu'elle a accepté le 2 avril 2015.

Mme Z..., contestant le motif économique de son licenciement, a saisi le conseil des prud'hommes de Valence le 1er juin 2015 aux fins de contestation du bien fondé de son licenciement, de la procédure et l'obtention des indemnités afférentes.

Par jugement en date du 25 mars 2016 , le conseil des prud'hommes deValence a:

- dit que le licenciement pour motif économique de Mme Z... est bien fondé

- dit que les critères d'ordre du licenciement ont été établis selon les règles édictées par la loi

- constaté le non-respect de l'obligation de formation par M. A... et le condamner à verser à Mme Z... la somme de 5.890 €

- constaté le non-respect de l'obligation de l'entretien annuel par M. A... et le condamner à verser à Mme Z... la somme de 5.890 €

- condamné M. A... à verser à Mme Z... la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté Mme Z... du surplus de ses demandes

- condamné M. A... aux entiers dépens de l'instance.

La décision a été notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception le 31 mars 2016.

Mme Z... représentée par son conseil, a interjeté appel de la décision en sa globalité par déclaration en date du 1er avril 2016.

Par conclusions récapitulatives en date du 7 mars 2018, elle demande à la Cour d'appel de:

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a condamné Maître Olivier A... à payer :

' des dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de formation continue : 5.890 € nets de CSG et CRDS,

' des dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de l'entretien annuel : 5.890 € nets de CSG et CRDS,

REFORMER le jugement de première instance

Requalifier le licenciement pour motif économique en rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse,

en conséquence condamner Monsieur A... à payer :

' Indemnité de préavis : 8.835 € et 883,50 euros de congés payés,

' Dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 44.175 € nets de CSG et CRDS,

A titre subsidiaire:

Dire et juger que les critères d'ordre du licenciement n'ont pas été attribués sur des éléments objectifs, en conséquence condamner Monsieur A... à payer :

' Dommages-intérêts pour perte injustifiée d'emploi : 44.175 € nets de CSG et CRDS,

CONDAMNER Monsieur A... à payer 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Fixer a moyenne des trois derniers mois de salaire est égale à 2.945 € (article R.1454-28 du Code du Travail).

Elle soutient que :

Sur le licenciement économique :

Les documents produits ne constituent pas la preuve de difficultés économiques : le chiffre d'affaires de l'étude a augmenté entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2014 ; par contre le bénéfice a diminué passant de 144.781 € au 31 décembre 2013 à une somme de 100.799 € au 31 décembre 2014, constituant par conséquent un choix de trésorerie ; l'employeur n'a pas licencié pour augmenter sa compétitivité mais pour augmenter sa rentabilité. Depuis 4 ans le chiffre d'affaires est constant. L'employeur n'hésite pas à procéder aux dépenses suivantes : voyages et déplacements, parking et autoroutes, réceptions, emploi de son épouse en début d'année à temps plein. La lettre d'alerte sur les difficultés de trésorerie du conseil général des notaires illustrant une mauvaise gestion, les prélèvements de l'employeur étant supérieurs aux encaissements. L'employeur procède à une répartition des revenus néfastes pour son étude. Le chômage partiel ne justifie pas les difficultés économiques ni un manque de travail, avec l'embauche de 3 salariés en 2014. Si le 28 février 2015 Madame A... a réduit son temps de travail de 20 heures à 8 heures par semaine c'est à sa seule demande et non pour des difficultés économiques.

Sur le non-respect de l'obligation de formation continue:

L'article L.1233 -4 du code du travail stipule que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptations ont été réalisées. L'article L. 6321-1 du code du travail stipule que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail, veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences.

Mme Z... n'a bénéficié d'aucune formation continue. Les seules formations suivies étaient celles organisées par la chambre des notaires : un jour par an. Le manquement de l'employeur à son obligation a causé à la salariée un préjudice dans la mesure où il l'a privé de la possibilité d'élargir son champ de compétence de qualification.

Sur le non-respect de l'obligation d'entretien annuel :

L'article 7 de la convention collective nationale du notariat du 8 juin 2001 impose un entretien annuel d'évaluation chaque année ayant pour objet d'instaurer un échange entre le salarié et l'employeur sur son activité professionnelle, ses résultats et ses objectifs. La salariée n'a pas bénéficié d'entretien annuel ne lui permettant pas d'évoquer la possibilité d'affecter une partie de son temps de travail à l'activité de négociation immobilière dont l'importance a nécessité l'embauche dans salarié en CDI en 2014, pour l'accueil et plus de rédaction d'actes dont l'importance a nécessité l'embauche d'un salarié en CDI en 2014.

À titre subsidiaire, sur les critères d'ordre des licenciements:

Ils ont été appliqués aux 3 clercs et à la notaire associée mais il n'a pas été tenu compte de M. C... chargé de l'accueil également de la rédaction des actes, cousin du notaire. L'appréciation portée sur les qualités professionnelles de Mme Z... procède d'une erreur manifeste. Le choix de l'employeur est constitutif de détournement de pouvoir. La définition de la convention collective du poste de technicien niveau 3 est en contradiction avec la note attribuée la salariée.

Par conclusions en date du 27 février 2018, M. A... en réponse demande à la Cour d'appel de:

Confirmer le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de Valence du 25 mars 2016 en ce qu'il a considéré le licenciement pour motif économique de Mme Z... comme étant fondé,

Infirmer le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de Valence du 25 mars 2016 en ce qu'il a condamné Maître Olivier A... à verser à Mme Z... les sommes suivantes :

' 5.890 € au titre du non-respect de l'obligation de formation ;

' 5.890 € au titre du non-respect de l'obligation de réaliser des entretiens annuels ;

A titre principal,

'Débouter MmeZ... de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire,

'Ramener les demandes indemnitaires de Mme Z... à de plus justes proportions.

Il fait valoir que:

Sur le bien-fondé du motif économique :

La suppression de l'emploi de Mme Z... est motivée par la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise et cette sauvegarde justifiée par une dégradation importante et continue du résultat d'exploitation. L'étude connaît depuis l'exercice 2013/2014 un ralentissement significatif de son activité en particulier dans le secteur de la rédaction d'actes (100 immobilière et succession). La motivation de la lettre de convocation pour le licenciement est dépourvue de toute ambiguïté sur ce point et les résultats de l'étude ne se sont malheureusement pas améliorés.

Sur le respect de l'obligation de formation continue :

Mme Z... en sa qualité de clerc de notaires a toujours bénéficié de formations depuis le début de ses relations contractuelles organisées par la chambre des notaires et par les prestataires de logiciels spécifiques et la profession. Si elle souhaitait effectuer des formations complémentaires, il lui appartenait d'en faire la demande auprès de son employeur.

Sur le respect de l'obligation d'entretien annuel :

L'ensemble du personnel bénéficie régulièrement d'entretiens informels avec Maître A... afin de faire le point sur les missions confiées de recueillir les observations de chacun.

Sur les critères d'ordre :

Les critères d'ordre de licenciement ont été appliqués aux fonctions de clerc de notaire et de rédacteur d'acte (ensemble du personnel appartenant à une même catégorie professionnelle), c'est-à-dire Mme Z..., Mme D..., Mme E... et Mme A.... M. C... exerce en qualité de secrétaire et n'est pas concerné par la mesure de licenciement. Il ne dispose d'aucune formation ni de compétences juridiques. Si l'ancienneté de Mme Z... est réelle, elle n'est pas pour autant synonyme de bonnes qualités professionnelles.

L'affaire a été fixée à plaider le 12 mars 2018.

Pour un plus ample exposé des motifs, de la procédure et des prétentions des parties la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

Le délibéré est fixé au 22 mai 2018 par mise disposition au greffe.

SUR QUOI:

Sur le bien fondé du licenciement:

Sur la réalité des difficultés économiques :

Conformément à l'article L. 1233-3 du code du travail applicable aux faits de l'espèce, constitue un licenciement économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à de mutations technologiques ;

S'ajoutent aux causes ci dessus énumérées, la réorganisation de l'entreprise ou du secteur d'activité pour sauvegarder sa compétitivité, et la cessation d'activité.

Les difficultés rencontrées par l'entreprise doivent être réelles et sérieuses pour justifier un licenciement économique.

En l'espèce, la lettre de licenciement de Mme Z... fait mention d'un ralentissement de l'activité de rédaction d'actes compte tenu du contexte économique général et le fait que malgré la décision de créer une activité de négociation immobilière pour tenter de maintenir cette activité, le nombre de ventes réalisées ne permet pas de compenser la baisse d'activité du service rédactions d'actes (ventes immobilières et successions).

Mme Z... conteste les difficultés économiques de l'étude et accuse M. A... de mauvaise gestion.

Il ressort d'un courrier de la chambre des notaires en date du 13 février 2014 que l'étude de Maître A... subit des difficultés de trésorerie préoccupantesen 2014 comme en 2013 et que M. A... a contracté un prêt personnel de 70.000 € le 31 décembre 2014 pour y faire face.

Toutefois, les comptes annuels de l'exercice 2013 et 2014 font apparaître une augmentation du chiffre d'affaires entre le 31 décembre 2013 et le 31 décembre 2014 de 621.325 € à 647.207 € même si le résultat net a diminué de 144.781 € à 100.799 €. Le chiffre d'affaires est constant depuis 4 ans. La baisse de l'excédent brut d'exploitation correspond aux embauches de salariés avec une augmentation nette consécutive des salaires mais également des frais de parking, de voyages, de déplacements et de documentation.

La seule insuffisance de trésorerie et un résultat net en baisse ne démontrent pas l'existence de difficultés économiques justifiant le licenciement pour motif économique de Mme Z....

Il convient par voie de réformation de la décision déférée de dire que le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Il convient en conséquence d'allouer à Mme Z... les sommes suivantes:

- 33.600 € titre de dommages et intérêts (12 mois de salaires)

- 8.835 € d'indemnité de préavis outre 883,50 € de congés payés afférents

Mme Z... justifie être restée sans emploi pendant plus de deux ans d'avril 2015 août 2017 et

il convient de lui allouer des dommages et intérêts pour rupture abusive à hauteur de 8.400 €.

Sur le non respect de l'obligation de formation continue:

L'article L. 6321-1 du code du travail stipule que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail, veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences.

Il n'est pas contesté que Mme Z... n'a bénéficié que des formations organisées par la chambre des notaires un jour par an soit 6 journées sur 12 années ce qui est manifestement largement insuffisant.

Il lui sera alloué à ce titre la somme de 5.890 € par voie de confirmation.

Sur le non respect de l'entretien annuel:

Il résulte des dispositions de l'article L. 6315-1 du code du travail que l'employeur doit faire bénéficier le salarié tous les deux ans d'un entretien professionnel distinct de l'entretien d'évaluation prévu aux articles L. 1222-2 et suivants du code du travail, consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle notamment en termes de qualification et d'emploi.

L'article 16 de la convention collective nationale du notariat du 8 juin 2001 prévoit quant à lui, un entretien individuel d'évaluation chaque année ayant pour objet d'instaurer un échange entre le salarié et l'employeur sur son activité professionnelle, ses résultats et ses objectifs.

Il n'est pas contesté que Mme Z... n'a pas bénéficié d'entretiens annuels formels avec M. A... mais que dans le cadre d'une petite structure comme celle de l'étude A..., les échanges entre l'employeur et la salariée ont pu se réaliser régulièrement de manière informelle.

Au surplus Mme Z... ne démontre pas l'existence d'un préjudice à ce titre et sera par voie de réformation déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires:

Il convient de condamner M. A... aux entiers dépens et à la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement déféré.

STATUANT à nouveau sur les dispositions infirmées,

DIT que le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE M. A... à régler à Mme Z... les sommes suivantes:

- 33.600 € titre de dommages et intérêts

- 8.835 € d'indemnité de préavis

outre 883,50 € de congés payés afférents

- 8.400 € pour rupture abusive

- 5.890 € pour non respect de la formation continue

DEBOUTE Mme Z... de sa demande au titre de l'absence d'entretien annuel.

CONDAMNE M. A... à régler à Mme Z... la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE M. A... aux entiers dépens de première instance et d'appel

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur SILVAN, Président, et par Madame ROCHARD, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 16/01586
Date de la décision : 22/05/2018

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°16/01586 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-22;16.01586 ?
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