RG N° 15/04261
AL/AA
N° Minute :
Grosse délivrée le :
à :
Me Jehanne NEJARRI
Me Thierry DUMOULIN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES
ARRET DU MERCREDI 04 OCTOBRE 2017
DECLARATION DE SAISINE DU 13 Octobre 2015 sur un arrêt de cassation du 07 octobre 2015, enregistrée sous le n° de pourvoi 1087 F-P+B
arrêt au fond, origine cour d'appel de Lyon, décision attaquée en date du 18 mars 2014, enregistrée sous le n° 13/01527 ;
jugement au fond, origine tribunal de grande instance de Lyon, décision attaquée en date du 18 octobre 2012, enregistrée sous le n° 09/03923
SAISISSANTS :
Madame [G] [S] épouse [X] es qualité d'héritière de M. [C] [S] et venant aux droits de leur mère, [E] [J] épouse [S], épouse décédée du défunt
née le [Date naissance 12] 1947 à [Localité 23] (ALLEMAGNE)
[Adresse 20]
[Localité 18]
représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Jehanne NEJJARI, avocat au barreau de PARIS
Madame [Y] [S] es qualité d'héritière de M. [C] [S] et venant aux droits de leur mère, [E] [J] épouse [S], épouse décédée du défunt
née le [Date naissance 15] 1949 à [Localité 27]
de nationalité Française
[Adresse 16]
[Localité 19]
représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Jehanne NEJJARI, avocat au barreau de PARIS
Madame [F] [S] es qualité d'héritière de M. [C] [S] et venant aux droits de leur mère, [E] [J] épouse [S], épouse décédée du défunt
née le [Date naissance 11] 1952 à [Localité 26]
de nationalité Française
[Adresse 7] - CANADA
représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Jehanne NEJJARI, avocat au barreau de PARIS
SAISIS :
Madame [Z] [S]
née le [Date naissance 9] 1982 à [Localité 25] (NIGERIA)
de nationalité Française
[Adresse 14]
[Localité 5] SUISSE
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON
Madame [B] [S]
née le [Date naissance 6] 1979 à [Localité 24] (NIGERIA)
de nationalité Française
[Adresse 28]
[Localité 4] ALLEMAGNE
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON
Monsieur [N] [S]
né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 24] (NIGERIA)
[Adresse 21]
[Localité 22]
représenté par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON
EN PRESENCE DE :
Madame [W] [I]
née le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 25] (NIGERIA)
[Adresse 8]
[Localité 17]
non représentée
SCI JOCYVECAR prise en la personne de son représentant légal en exercice,
domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 10]
[Localité 17]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Monsieur Alain Lacour, conseiller faisant fonction de président,
Madame Françoise Barrier, conseiller,
Madame Agnès Denjoy, conseiller.
Assistés lors des débats de Madame MC Ollierou, greffier.
DEBATS :
A l'audience de renvoi de cassation tenue publiquement le 12 AVRIL 2017,les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré, après prorogation du délibéré, pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
Exposé du litige :
Vu le jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal de grande instance de Lyon ;
Vu l'arrêt rendu le 18 mars 2014 par la cour d'appel de Lyon ;
Vu l'arrêt rendu le 7 octobre 2015 par la Cour de cassation, qui a statué comme suit : « CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le prix issu de la vente par la SCI Jocyvecar, de l'appartement et de ses dépendances situés [Adresse 10], lots n° 5, 11 et 24 de l'immeuble constitué en copropriété, soit la somme de 75 000 euros [en réalité : 750 000 euros], est un actif de la communauté ayant existé entre [E] [J] et [C] [S] qui ont été divertis et recelés par ce dernier, et en ce qu'il condamne Mme [B] [S], Mme [Z] [S] et M. [N] [S], détenteurs de ces fonds, à les rapporter à Mme [G] [S], Mme [Y] [S] et Mme [F] [S] en leur qualité d'ayant cause et d'ayant droit de leur mère, [E] [J], l'arrêt rendu le 18 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble [...] » ;
Mmes [G] [S] Vve [X], [Y] [S] et [F] [S] ont saisi la présente cour le 13 octobre 2015.
Vu les conclusions notifiées par Mmes [G] [S] Vve [X], [Y] [S] et [F] [S] le 17 janvier 2017 ;
Vu les conclusions notifiées par Mme [Z] [S], Mme Mme [B] [S] et M. [N] [S] le 2 novembre 2016 ;
Assignée le 14 avril 2016 en l'étude de l'huissier instrumentaire, Mme [W] [I] n'a pas constitué avocat.
Assignée selon les modalités prévues par l'article 659 du code de procédure civile, la société civile immobilière Jocyvecar n'a pas constitué avocat.
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.
Sur ce :
En la forme :
Vu l'article 474 du code de procédure civile ;
Attendu que devant la cour d'appel de Lyon, Mme [W] [I] et la société civile immobilière Jocyvecar étaient représentées ; qu'il sera statué par arrêt contradictoire ;
Au fond :
Vu les articles 631 du code de procédure civile, 1477 et 1491 du code civil ;
Attendu que la cassation, partielle, n'atteint pas les chefs de l'arrêt du 18 mars 2014 qui ont appliqué à Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S] les sanctions du recel de communauté ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer à nouveau sur l'existence de ce recel, cette question ayant déjà été définitivement tranchée et le litige ne portant désormais plus que sur les biens qui en ont fait l'objet ;
Attendu que selon acte du 16 mars 1993 reçu par Me [A], notaire à [Localité 26], une société civile immobilière Jocyvecar a été constituée entre Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S], enfants nés hors mariage des relations de [C] [S] et de Mme [W] [I], alors âgés respectivement de 14, 11 et 10 ans, représentés par leurs père et mère, dont l'objet social était « l'achat, la construction, la gestion et l'administration de tous biens et droits immobiliers à usage commercial, industriel ou d'habitation, et plus particulièrement l'acquisition d'un appartement avec cave et box de stationnement, en copropriété à [Adresse 10], immeuble " le César " (lots n° 24, 5 et 11), et généralement, toutes opérations mobilières ou immobilières quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social », au capital social de 5 400 000 francs financé, selon l'acte constitutif, grâce aux apports faits par les associés à hauteur de 1 800 000 francs chacun (en contrepartie de quoi chacun d'eux a reçu 1 800 parts sociales) et dont le gérant, non associé, était [C] [S] ; que ce même 16 mars 1993, la société civile immobilière Jocyvecar a acquis la pleine propriété des lots n° 5, 11 et 24 dans l'immeuble « le César » sis [Adresse 10], comprenant notamment un appartement de 205,92 m² en duplex, pour le prix de 5 400 000 francs ;
Attendu qu'il est constant que la somme de 5 400 000 francs, ayant constitué le capital social, a été financée par [C] [S], au moyen d'un chèque tiré par lui sur un compte ouvert à son nom dans les livres de la Société de banque suisse (devenue UBS) d'un montant de 5 647 000 francs (pièce n° 40 des saisissantes) ;
Attendu que ces fonds sont présumés communs entre [C] [S] et [E] [J] ; que la preuve contraire à cette présomption n'est pas rapportée ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que les fonds ayant servi à la libération du capital de la société civile immobilière Jocyvecar étaient des actifs communs ;
Attendu en conséquence que Mmes [G] [S] Vve [X], [Y] [S] et [F] [S] sont par conséquent bien fondées à voir juger qu'en raison de recel commis par [C] [S], les actifs détournés par celui-ci sont devenus la propriété exclusive de [E] [J] à compter du décès de [C] [S] ; que de même, Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S] doivent être privés de leur portion dans les dits effets, en raison du recel communautaire commis par leur auteur, peu important que [C] [S] ait consenti des donations à ses enfants légitimes, cette circonstance étant parfaitement indifférente s'agissant d'un recel communauté ; que Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S] doivent en outre être condamnés à rapporter à la communauté la valeur des parts sociales de la société civile immobilière Jocyvecar au jour de l'aliénation de l'immeuble dont s'agit, avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2007, capitalisés conformément à l'article 1154 du code civil ;
Attendu qu'à l'effet de déterminer cette valeur, il échet d'ordonner une expertise avec mission telle que précisées au dispositif ;
Attendu qu'en considération de l'expertise ordonnée, il convient de réserver les dépens ainsi que le surplus des demandes ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme le jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal de grande instance de Lyon en ce qu'il a ordonné le rapport à la succession du prix de vente de l'immeuble sis [Adresse 10] ;
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Dit que la somme de 5 647 000 francs, soit 860 879,60 euros, ayant servi à libérer le capital social de la société civile immobilière Jocyvecar, est devenue la propriété exclusive de [E] [J] à compter du 6 janvier 2007 ;
Dit que Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S] doivent rapporter, in solidum, à la communauté formée par [C] [S] et [E] [J], la valeur des parts sociales de la société civile immobilière Jocyvecar au jour de l'aliénation de l'immeuble sis [Adresse 10], avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2007, capitalisés conformément à l'article 1154 du code civil ;
Dit que Mme [B] [S], M. [N] [S] et Mme [Z] [S] sont privés de leur portion dans les dits effets ;
Avant dire droit, ordonne une expertise et commet pour y procéder Mme [U] [H], demeurant [Adresse 13], tel : [XXXXXXXX01] avec mission de :
convoquer les parties et se faire remettre tous documents utiles à l'exécution de sa mission ;
proposer une estimation de la valeur des parts sociales de la société civile immobilière Jocyvecar au jour de l'aliénation par celle-ci des droits de propriété qu'elle détenait dans un immeuble sis [Adresse 10] ;
dit qu'en cas de difficultés, il en sera référé au conseiller de la mise en état ;
dresser un pré-rapport de ses opérations, en adresser un exemplaire à chaque partie ;
répondre aux dires des parties ;
Dit que l'expert devra remettre son rapport à la cour au plus tard le 15 mars 2018 ;
Fixe à3 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être versée entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de cette cour par Mmes [G] [S] Vve [X], [Y] [S] et [F] [S], au plus tard le 30 novembre 2017 ;
Dit qu'à défaut de consignation dans le délai imparti, la désignation de l'expert sera caduque ;
Renvoie l'affaire devant le conseiller de la mise en état ;
Réserve le surplus des demandes et les dépens.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile .
SIGNÉ par Madame Françoise Barrier, conseiller en remplacement de Monsieur Alain Lacour, conseiller faisant fonction de président empêché, et par Madame M.C. Ollierou, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE CONSEILLER