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07/11/2013 | FRANCE | N°12/02425

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 07 novembre 2013, 12/02425


RG N° 12/02425



N° Minute :





































































































Notifié le :



Grosse délivrée le :



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



C

HAMBRE SOCIALE



ARRET DU JEUDI 7 NOVEMBRE 2013







Appel d'une décision (N° RG F11/00604)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 21 mai 2012

suivant déclaration d'appel du 05 Juin 2012



APPELANT :



Monsieur [N] [M]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représenté par Me Wilfried SAMBA-SAMBELIGUE, avocat au barreau de GRENOBLE







INTIMEE :



ASSOCIATION DES PELERIN...

RG N° 12/02425

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU JEUDI 7 NOVEMBRE 2013

Appel d'une décision (N° RG F11/00604)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 21 mai 2012

suivant déclaration d'appel du 05 Juin 2012

APPELANT :

Monsieur [N] [M]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Wilfried SAMBA-SAMBELIGUE, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

ASSOCIATION DES PELERINS DE [1] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

38970 CORPS [1]

Représentée par Me David BALLY, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Madame Gilberte PONY, Président,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Monsieur Frédéric PARIS, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 19 Septembre 2013,

Madame Gilberte PONY, Président, chargée du rapport, et Madame Véronique LAMOINE, Conseiller, assistées de Monsieur Hichem MAHBOUBI, Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoirie(s), conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 31 Octobre 2013, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour. Le délibéré a été prorogé au 7 novembre 2013

L'arrêt a été rendu le 7 novembre 2013.

RG 12/2425GP

L'association LES PELERINS DE [1] a pour activité notamment la gestion d'un établissement de tourisme religieux et est soumise à la convention collective des hôtels, cafés, restaurants ; elle employait 24 salariés permanents et 11 saisonniers à durée déterminée.

L'association LES PELERINS DE [1] a embauché le 10 janvier 2002 [N] [M] en qualité de réceptionnaire. Son salaire mensuel s'élevait à 1 864,36 euros.

A partir de 2007, suite à une baisse d'activité, les comptes de l'association ont présenté des déficits :

- 233 983 euros en 2007

+ 148 472,10 euros en 2008

- 334 800 euros en 2009

- 111 835 euros en 2010.

L'association LES PELERINS DE [1] a alors envisagé la modification de 12 contrats de travail par :

* diminution du taux horaire des heures normales réalisées dans le cadre de la modulation alors en place, soit 35 heures hebdomadaires payées,

* majoration de 10 % des 4 heures hebdomadaires supplémentaires,

* lissage de la rémunération sur la base de 39 heures hebdomadaires sur l'année civile complète.

Cette modification entraînait une diminution de 1,25 % de la rémunération brute des salariés concernés.

Le 16 juillet 2010, l'association LES PELERINS DE [1] proposait cette modification aux salariés des 12 postes concernés ; 2 ont refusé dont [N] [M].

Le 24 août 2010, l'association LES PELERINS DE [1] a pris acte de ce refus et le 21 septembre 2010, elle a convoqué les délégués du personnel à une réunion d'information et de consultation qui a eu lieu les 22 et 27 septembre 2010 et au cours de laquelle ont été évoqués :

* la situation économique de l'association et le projet de réorganisation,

* le projet de licenciement collectif pour motif économique,

* les critères de l'ordre des licenciements envisagés.

Le 28 septembre 2010, [N] [M] a été convoqué à un entretien préalable de licenciement qui a eu lieu le 6 octobre 2010 et au cours duquel il lui a été remis la documentation relative à la convention de reclassement personnalisé.

Par lettre du 15 octobre 2010, l'association a notifié à [N] [M] son licenciement pour motif économique sous réserve de son acceptation de la CRP ; celle-ci a été acceptée le 26 octobre 2010.

Le 10 février 2011, l'association LES PELERINS DE [1] a proposé deux postes de réceptionniste au titre de la priorité de réembauche à [N] [M] qui n'a pas répondu.

Le 14 mars 2011, [N] [M] a contesté son licenciement devant le conseil de prud'hommes et réclamé 20 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif.

* * *

Par jugement du 21 mai 2012, le conseil des prud'hommes de Grenoble a :

- débouté [N] [M] de ses demandes ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la Cour le 5 juin 2012, [N] [M] a interjeté appel de cette décision.

* * *

[N] [M] conclut à l'infirmation du jugement déféré.

Il conteste la cause économique invoquée pour justifier son licenciement. Il fait valoir que l'association exploite le seul établissement hôtelier proche du sanctuaire de Notre Dame de [1] et ne se trouve pas en situation concurrentielle. Il affirme que d'ailleurs, le résultat d'exploitation restait positif, ce qui prouve que la réorganisation qu'elle a entreprise en modifiant les contrats de travail de ses salariés n'avait pour but que de faire des économies.

[N] [M] fait aussi grief à l'association LES PELERINS DE [1] de ne pas avoir respecté son obligation de reclassement ; il indique qu'aucune proposition d'emploi ne lui a été faite alors que :

- au moment de son licenciement, un poste de secrétaire pastoral était disponible ;

- le 10 février 201, l'association recrutait pour un poste de réceptionniste ;

- le 2 mars 2011, elle recrutait pour deux postes de réceptionnistes saisonniers.

Il demande donc à la Cour de considérer que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner l'association LES PELERINS DE [1] à lui payer la somme de 20 000 euros pour licenciement abusif et la somme de 1 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

* * *

L'association LES PELERINS DE [1] sollicite la confirmation du jugement entrepris.

Elle prétend que le déficit des résultats d'exploitation depuis 2007 démontre la réalité des difficultés économiques auxquelles l'entreprise était confrontée.

Elle fait valoir que seuls 2 salariés ayant refusé la modification de leur contrat de travail, le licenciement est soumis aux dispositions des articles L 1233-8 du code du travail ; elle rappelle que l'obligation de reclassement n'est qu'une obligation de moyens et qu'il n'existait pas de poste de reclassement disponible au moment du licenciement. En revanche, elle précise que [N] [M] a refusé deux postes de réceptionnistes qui lui ont été proposés peu après son licenciement.

Par ailleurs, elle indique qu'en acceptant d'adhérer à la convention de reclassement personnalisé qui lui a été présentée lors de son entretien préalable, le contrat a été rompu à cette date dans le cadre d'une rupture amiable, ce qui rend la contestation du licenciement pour motif économique, inopérante.

A titre subsidiaire, elle conclut à la réduction du montant des dommages-intérêts réclamés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et demande paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

* * *

MOTIFS DE LA DECISION.

La lettre de licenciement du 15 octobre 2010 qui a été notifiée à [N] [M] précise que les difficultés économiques auxquelles est confrontée l'association LES PELERINS DE [1] et qui se sont encore traduites en 2009 par une perte de 343 800 euros nécessitaient une modification de son contrat de travail ; elle ajoute que suite au refus du salarié d'accepter cette modification, plusieurs solutions de reclassement ont été étudiées, qu'aucune n'a pu être trouvée et qu'elle le licenciait en conséquence pour motif économique.

Même si [N] [M] a accepté le 26 octobre 2010, la convention de reclassement personnalisé qui lui a été remise lors de son entretien préalable et que la rupture du contrat de travail est dès lors, réputée intervenir d'un commun accord,

cette acceptation ne le prive pas pour autant de la possibilité de contester le motif économique de son licenciement.

Les bilans de l'association LES PELERINS DE [1] révèlent une perte de :

- 233 983 euros en 2007

- 334 800 euros en 2009

- 111 835 euros en 2010.

Bien que l'entreprise ait eu un résultat positif de 148 472,10 euros en 2008, les résultats ont à nouveau étaient négatifs en 2009 et 2010 ; la persistance de résultats déficitaires sur 3 ans nécessitait une réaction de l'association afin de rééquilibrer ses comptes et assurer sa survie ; l'entreprise ne se trouvant pas en situation concurrentielle, le rééquilibrage des comptes ne passait pas par la recherche de nouveaux clients mais bien par la diminution de ses charges et notamment de sa charge salariale ;

Ces difficultés étaient donc de nature à justifier la proposition de modification du contrat de travail adressée le 16 juillet 2010 à 12 salariés.

Cependant, le licenciement pour motif économique des salariés ayant refusé cette proposition ne pouvait intervenir que lorsque tous les efforts d'adaptation ont été réalisés et que leur reclassement ne pouvait être opéré dans l'entreprise. L'article L 1233-4 du code du travail précise qu'à défaut de reclassement du salarié sur un emploi équivalent, celui-ci s'effectue sur un emploi de catégorie inférieure.

Le refus opposé par [N] [M] le 16 août 2010 à la proposition de modification de son contrat de travail ne dispensait pas l'employeur de son obligation de reclassement et ce dernier était tenu de lui proposer, comme reclassement, avant de le licencier, le poste au salaire inférieur qu'il avait précédemment refusé.

L'association LES PELERINS DE [1] ne justifie pas d'une telle proposition de reclassement ; l'inexécution de l'obligation de reclassement prive le licenciement de [N] [M] de cause réelle et sérieuse.

Les propositions d'embauche faites par l'association après le licenciement ne sauraient avoir pour effet de régulariser a posteriori le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L 1235-3 du code du travail, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois.

[N] [M] ayant travaillé pour le compte de l'association pendant 8 ans et 10 mois, il lui sera alloué une indemnité de 20 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Conformément à l'article 1235-4 du code du travail, l'association LES PELERINS DE [1] devra rembourser à POLE EMPLOI les indemnités de chômage versées à [N] [M] dans la limite de 6 mois à compter du licenciement du salarié au jour de la présente décision.

L'association LES PELERINS DE [1] qui succombe, sera condamnée aux dépens ; elle devra en outre, payer à [N] [M], la somme de 1 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

DECISION

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau ;

Dit que le licenciement de [N] [M] est intervenu sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne l'association LES PELERINS DE [1] à payer à [N] [M] une indemnité de 20 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Dit que conformément à l'article 1235-4 du code du travail, l'association LES PELERINS DE [1] devra rembourser à POLE EMPLOI les indemnités de chômage versées à [N] [M] dans la limite de 6 mois à compter du licenciement du salarié au jour de la présente décision.

Condamne l'association LES PELERINS DE [1] à payer à [N] [M] la somme de 1 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne la transmission du copie d ela présnete décision à POLE EMPLOI ;

Condamne l'association LES PELERINS DE [1] aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame PONY, Président, et par Monsieur MAHBOUBI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02425
Date de la décision : 07/11/2013

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°12/02425 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-07;12.02425 ?
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