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07/02/2013 | FRANCE | N°12/03379

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 07 février 2013, 12/03379


RG N° 12/03379



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU JEUDI 07 FEVRIER 2013







Appel d'une décision (N° RG 20101071)



rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 02 mars 2012

suivant déclaration d'appel du 04 Avril 2012



APPELANTE :



LA CPAM DE L'ISERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux Général

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Mme [H], munie d'un pouvoir sp...

RG N° 12/03379

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU JEUDI 07 FEVRIER 2013

Appel d'une décision (N° RG 20101071)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE

en date du 02 mars 2012

suivant déclaration d'appel du 04 Avril 2012

APPELANTE :

LA CPAM DE L'ISERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux Général

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [H], munie d'un pouvoir spécial

INTIMEE :

La Société CASINO DISTRIBUTION FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me RUIMY (avocat au barreau de LYON)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Madame Astrid RAULY, Conseiller faisant fonction de Président,

Monsieur Frédéric PARIS, Conseiller,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 10 Janvier 2013, M. PARIS, chargé(e) du rapport, et Mme RAULY, assisté(e)s de Mme Corinne FANTIN, Adjoint faisant fonction de Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoirie(s), conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 07 Février 2013, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 07 Février 2013.

Mme [L] est salariée en qualité d'employée commerciale de la société CASINO FRANCE et a exercé son travail au centre commercial de [Localité 4] au rayon Fromagerie.

Elle a été arrêtée pour maladie à compter du 2 février 2007.

Elle a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère une déclaration de maladie professionnelle datée du 28 octobre 2007 en raison d'une tendinopathie de l'épaule droite avec rupture coiffe rotateur, en joignant un certificat médical daté du 10 août 2007.

Après enquête et avis du service médical, la caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge la pathologie au titre de la législation professionnelle par décision du 21 février 2008 (maladie inscrite au tableau 57 A des maladies professionnelles).

La SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté sa contestation par décision du 4 octobre 2010.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale par jugement du 2 mars 2012 a :

- constaté que le délai imparti à la société CASINO DISTRIBUTION France pour la consultation du dossier est insuffisant,

- en conséquence, dit que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère ayant reconnu l'origine professionnelle de la maladie de Mme [D] [L] ainsi que l'ensemble des conséquences financières qui en découlent sont inopposables à l'employeur, la société CASINO DISTRIBUTION France.

Par déclaration du 4 avril 2012 la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a interjeté appel.

Elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement

- déclarer la prise en charge de la maladie professionnelle opposable à la SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

Elle soutient que :

1°) concernant le respect du principe du contradictoire, l'employeur à compter de la réception de l'avis de clôture de l'instruction du dossier avait un délai de six jours ouvrables, ce qui a déjà été jugé suffisant par la cour de cassation dans un arrêt du 20 septembre 2012, d'autant qu'en l'espèce le siège social de l'employeur se trouve à 4 km de la caisse,

2°) sur le délai de pris en charge et l'opposabilité,

- la date de première constatation médicale correspond à la date où l'affection est médicalement constatée de façon certaine, et le délai de prise en charge de 90 jours pour une épaule enraidie court à compter de la date de cette première constatation médicale qui peut être antérieure à la date du certificat joint à la déclaration de maladie professionnelle,

- Mme [L] a été exposée au risque jusqu'au 2 février 2007, date de son arrêt de travail, le service médical a considéré que la date à retenir était le 1er février 2007, date à laquelle une radiographie a été pratiquée.

La SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE demande à la cour de :

- à titre principal,

. constater que le délai de 6 jours pour consulter le dossier était insuffisant,

. dire et juger que le principe du contradictoire n'a pas été respecté et que la décision de prise en charge lui est inopposable,

- à titre subsidiaire,

. constater que la condition tenant au délai de prise en charge mentionné au tableau 57 A des maladies professionnelles n'a pas été respecté,

. dire et juger que la décision de prise en charge lui est inopposable.

Elle expose que :

- seul le certificat médical du 10 août 2007 est versé au dossier de la caisse,

- elle a reçu la lettre d'information relative à la date de clôture de l'instruction du dossier le 12 février 2008, la décision devant intervenir le 21 février 2008 ;

Elle fait valoir que :

1°) sur le non respect du principe du contradictoire :

- le délai de 6 jours ouvrables déduction faite du samedi et du dimanche est insuffisant et ne respecte pas les droits de l'employeur qui ne peut consulter le dossier dans un délai aussi court,

- la cour de cassation a déjà estimé qu'un délai de 10 jours devait être laissé à l'employeur ;

2°) sur le non respect des conditions de prise en charge :

- la caisse ne peut pas prendre en charge la pathologie au titre des maladies professionnelles si les conditions prescrites par l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale ne sont pas réunies,

- si l'une des conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition du risque ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie peut être reconnue d'origine professionnelle quand il est établi qu'elle est directement causé par le travail de la victime, dans ce cas la caisse doit saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) ;

- en l'espèce, le délai de prise en charge est de 7 jours s'agissant d'une tendinopathie de l'épaule,

- il appartient à la caisse de prouver que la première constatation médicale est intervenue avant l'expiration du délai de prise en charge,

- la caisse ne peut se fonder sur des éléments médicaux ne figurant pas au dossier pour fixer la date de première constatation médicale, sans violer le principe du contradictoire,

- l'avis du médecin conseil de la caisse qui ne se base sur aucun élément du dossier ne s'impose pas à l'employeur.

MOTIFS DE LA DECISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience sans modification ;

Sur le délai laissé à la société CASINO pour prendre connaissance du dossier après notification de la date de clôture de l'instruction :

L'article R 441-11 dans sa rédaction antérieure au 29 juillet 2009 prévoit que 'hors le cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droits et de l'employeur, préalablement à sa décision , sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief'.

Il ressort de ces dispositions et de la jurisprudence constante de la cour de cassation que la caisse primaire doit avant de se prononcer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle la caisse rendra sa décision.

L'employeur doit disposer d'un délai utile et suffisant pour consulter le dossier et présenter toutes les observations qu'il estime devoir faire sur le caractère professionnel ou non professionnel de l'accident ou de la maladie.

En l'espèce, il n'est pas discuté que la société CASINO a disposé d'un délai de six jours utiles entre la date de réception du courrier de clôture de l'instruction le 12 février 2008 et la date à laquelle la décision a été prise, le 21 février 2008, déduction faite du samedi et du dimanche.

La société CASINO dès réception de la lettre de la caisse était en situation de s'organiser pour consulter le dossier dans un délai de six jours ouvrables, soit en sollicitant la communication des pièces par tous moyens de transmission soit en se rendant dans les locaux de la caisse distant de seulement quelques kilomètres du siège de la société, et de formuler ensuite les observations qu'elle estimait devoir faire.

Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le délai de six jours était insuffisant.

Sur les conditions de la prise en charge :

Les conditions de prise en charge d'une maladie professionnelle sont définies par l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale qui dispose que :

'Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles 'la date à laquelle la victime est informée par un certificat du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées dans ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition au risque, ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle.'

L'article 461-2 alinéa 5 du code de la sécurité sociale prévoit que 'à partir de la date à laquelle un travailleur a cessé d'être exposé à l'action des agents nocifs inscrits aux tableaux susmentionnés, la caisse primaire et la caisse régionale ne prennent en charge en vertu de dispositions du deuxième alinéa de l'article L 461-1, les maladies correspondant à ces travaux que si la 1ère constatation médicale intervient pendant le délai fixé à chaque tableau.'.

Il ressort des pièces médicales et des courriers de la caisse primaire d'assurance maladie que la maladie professionnelle de la salariée a fait l'objet d'une déclaration le 28 octobre 2007, la maladie déclarée étant 'tendinopathie de l'épaule droite avec rupture coiffe rotateur.', que la caisse a pris en charge cette affection au titre du tableau 57 A 'épaule douloureuse' (courrier du 23 février 2008).

Le tableau 57 A en vigueur à la date de la déclaration prévoyait deux délais pour des travaux comportant habituellement des mouvements répétés ou forcés de l'épaule :

- 7 jours pour une épaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs),

- 90 jours pour une épaule enraidie succédant à une épaule douloureuse simple rebelle.

La caisse ne produit aucune pièce médicale permettant de considérer qu'il s'agit d'une épaule enraidie ainsi qu'elle le soutient.

Il convient de retenir un délai de prise en charge de 7 jours courant entre la date à laquelle le salarié a cessé d'être exposé aux risques d'atteinte à la santé résultant des travaux comportant habituellement des mouvements répétés ou forcés de l'épaule, et la date de première constatation médicale de la pathologie.

Il appartient à la caisse en cas de contestation de l'employeur de rapporter la preuve de cette date de première constatation médicale.

Si la caisse n'est pas tenue de verser au dossier les résultats d'analyse médicale ou bilan radiologique, et si la première constatation médicale peut être antérieure à la déclaration de la maladie professionnelle, encore faut-il que la date de première constatation médicale soit établie par des éléments médicaux à même d'éclairer l'employeur sur le lien entre la maladie et l'activité professionnelle, et cas de contestation le juge.

Le certificat médical du 10 août 2007 sur lequel la caisse s'est fondée pour instruire le dossier, et le certificat médical final du 1er octobre 2008 sont postérieurs à l'expiration du délai de prise en charge.

La caisse en plus de ces deux pièces médicales, ne produit que l'avis du médecin conseil de la caisse en date du 23 janvier 2008 à l'exclusion de toute autre pièce médicale.

Cet avis reproduit sous la forme d'une fiche de liaison médico-administrative ne porte mention que de la 'reconnaissance d'une maladie professionnelle inscrite dans un tableau', et de la 'date de 1ère constatation médicale = 01-02-2007", sans aucune autre indication.

Aucune mention dans cet avis ne permet de savoir sur quel constat ou élément médical s'est basé le médecin conseil pour fixer la date de première constatation médicale au 1er février 2007.

Dans ces conditions, la caisse ne fournissant pas de pièce médicale permettant d'établir que la première constatation médicale est intervenue dans le délai de sept jours courant à compter du 1er février 2007, ne prouve pas que l'affection dont souffre la salariée a été constatée médicalement dans le délai de prise en charge.

Elle n'a pas permis en outre à l'employeur de connaître la raison médicale motivant la fixation de cette date et d'en discuter contradictoirement.

La décision de la caisse de prendre en charge la maladie au titre de la législation professionnelle est dès lors inopposable à l'employeur, faute pour la caisse d'avoir procédé en cas de dépassement du délai de prise en charge à l'instruction du dossier selon les prescriptions de l'article du L 461-1 alinéa 3 et 4 du code de la sécurité sociale imposant la saisine d'un CRRMP.

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré par substitution de motifs.

Par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme RAULY, président, et par Madame FANTIN, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/03379
Date de la décision : 07/02/2013

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°12/03379 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-07;12.03379 ?
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