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29/01/2013 | FRANCE | N°11/05256

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 29 janvier 2013, 11/05256


RG N° 11/05256



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU MARDI 29 JANVIER 2013







Appel d'une décision (N° RG 10/00292)



rendue par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOURGOIN-JALLIEU

en date du 11 octobre 2011

suivant déclaration d'appel du 07 Novembre 2011



APPELANTE :



Madame [R] [YH]

[Adresse 4]

[Localité 2]



Comparante en personne, assistée de Me Patrick BLANC (avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU)





INTIMEE :



LA SA [CE] T.P. prise en la personne de son r...

RG N° 11/05256

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MARDI 29 JANVIER 2013

Appel d'une décision (N° RG 10/00292)

rendue par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOURGOIN-JALLIEU

en date du 11 octobre 2011

suivant déclaration d'appel du 07 Novembre 2011

APPELANTE :

Madame [R] [YH]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Comparante en personne, assistée de Me Patrick BLANC (avocat au barreau de BOURGOIN JALLIEU)

INTIMEE :

LA SA [CE] T.P. prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Agnès DERDERIAN (avocat au barreau de LYON)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Madame Hélène COMBES, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Astrid RAULY, Conseiller,

Monsieur Frédéric PARIS, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 12 Décembre 2012, M. PARIS, chargé(e) du rapport, et Mme COMBES, assisté(e)s de Mme Corinne FANTIN, Adjoint faisant fonction de Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoirie(s), conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 23 Janvier 2013, puis prorogé au 29 janvier 2013, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 29 Janvier 2013.

Mme [R] [YH] a été embauchée par la société [CE] TP par contrat de travail du 19 janvier 1998 en qualité de secrétaire, coefficient 450 position 3.

La convention collective applicable est celle des Travaux publics ETAM.

L'entreprise a un effectif de 200 salariés.

La société MODUS VALORIS filiale de la société [CE] TP a son siège au même lieu que la société MOULINS TP ; sur ce lieu, il existe deux plate-formes l'une appartenant à la société MOULINS TP et l'autre à la société MODUS VALORIS qui a pour activité le traitement de résidus d'incinération.

Avant son licenciement, Mme [YH] exerçait les fonctions de secrétaire niveau TAM C et percevait une rémunération brute de 1713,87 € pour 35 heures par semaine.

Elle travaillait d'une part au bureau d'études de la société [CE] TP et d'autre part au secrétariat de la plate-forme de la société MODUS VALORIS.

L'employeur l'a averti le 5 juin 2009 pour ne pas avoir respecté les ordres de son supérieur hiérarchique Mme [ZJ].

Mme [YH] a contesté cet avertissement par lettre du 6 juillet 2009 en invoquant une surcharge de travail et un harcèlement moral.

L'employeur a maintenu l'avertissement par lettre du 20 juillet 2009.

La salariée a renouvelé ses plaintes de harcèlement moral et de surcharge de travail auprès de l'employeur et a adressé copie de sa dernière lettre du 28 décembre 2009 à l'inspection du travail.

La société [CE] TP a adressé un nouvel avertissement à Mme [YH] le 8 février 2010 en lui reprochant d'avoir évoqué la vie privée de ses collègues, et d'avoir harcelé la direction par un dénigrement systématique de ses supérieurs hiérarchiques.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 juillet 2010, [R] [YH] était convoquée à un entretien préalable à un licenciement pour cause réelle et sérieuse fixé au 11 août 2010.

Elle était licenciée par lettre notifiée le 17 août 2010.

[R] [YH] a saisi le conseil des prud'hommes de Bourgoin Jallieu le 2 décembre 2010 à l'effet d'obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour harcèlement moral.

Par jugement du 11 octobre 2011, la formation de départage du conseil des prud'hommes a :

- débouté [R] [YH] de ses demandes au titre du licenciement et au titre du harcèlement moral,

- condamné la société [CE] TP à payer à [R] [YH] la somme de 1200 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'exécution du contrat de travail de bonne foi,

- débouté [R] [YH] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

[R] [YH] a interjeté appel.

Elle demande à la cour de :

- ordonner en tant que de besoin la production du registre du personnel,

- au principal :

* condamner la société [CE] TP à lui payer la somme de 38 052 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 25 368 € pour harcèlement moral ;

* condamner la société [CE] TP à lui payer la somme de 20 646,44 € brut à titre de rappel de salaire et la somme de 2064,64 € de congés payés y afférents,

* condamner la société [CE] TP à lui payer la somme de 10 000 € pour le défaut d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

- ordonner la remise du bulletin de paie afférent au rappel de salaire et congés payés, l'attestation pôle emploi rectifié, sous astreinte de 30 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt,

- condamner la société [CE] TP à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la société [CE] TP aux dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient que le courrier électronique de Mme [ZJ] qu'elle a transféré à la société V2 n'avait rien de confidentiel, il s'agissait du règlement d'une facture dans le cadre de relations entre la société V2 et la société MODUS filiale de la société [CE] TP.

Elle conteste la mésentente avec ses supérieurs hiérarchiques qui lui est imputée : elle n'a fait que faire état d'une surcharge de travail excessive à plusieurs reprises sans que son employeur tienne compte de ses objections.

Les motifs de licenciement ne sont donc pas réels et sérieux.

Si l'inspection du travail n'a pas retenu de harcèlement moral, elle n'a pas entendu tous les salariés et n'a conclu que sur le caractère pénal du harcèlement et non civil ; l'inspecteur du travail a attiré l'attention de l'employeur sur la vigilance qu'il devait avoir sur l'organisation du secteur administratif.

Plusieurs témoins ont attesté de sa surcharge de travail et du comportement de Mme [ZJ] à son égard.

L'audit a confirmé l'attitude agressive de Mme [ZJ] à l'égard du personnel.

L'ensemble des attestations, courriers et certificats médicaux qu'elle verse aux débats établissent des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Elle a subi un préjudice moral important du fait de ce harcèlement moral.

Elle a toujours effectué son travail avec sérieux et compétence et la société [CE] inverse les rôles en se présentant comme victime des agissements de sa salariée.

Le rappel de salaire demandé est justifié compte tenu que son salaire n'a jamais évolué alors qu'elle a assumé des fonctions à compter de 2006 ne correspondant pas à son emploi de secrétaire.

Enfin l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi.

La société [CE] TP demande à la cour de confirmer le jugement déféré et lui allouer une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le transfert d'un émail émanant de la supérieure hiérarchique de la salariée à la société V2 E enfreint l'obligation de discrétion et de confidentialité.

[R] [YH] a été déchargée des appels d'offres suite à sa plainte de surcharge de travail.

Elle a réorganisé l'entreprise : Mme [YH] a continué à assurer le secrétariat de MODUS VALORIS, et était juste en appoint pour le bureau d'études de prix de la société [CE] TP.

Malgré cette nouvelle organisation, Mme [YH] a maintenu ses plaintes de surcharge, et a fait preuve de mauvais esprit.

Un audit sollicité par la société [CE] a été réalisé en mars 2010, le rapport fait état du fait que Mme [YH] a du mal à être dirigée.

La salariée n'apporte aucun élément sur la charge de travail alléguée, les remplacements qu'elle effectuait étaient ponctuels.

En ce qui concerne le harcèlement moral, l'inspection du travail n'a pas conclu à l'existence du délit de harcèlement moral.

La classification de [R] [YH] mentionnée sur les bulletins de paie correspond à la réalité de son travail, et aux dispositions de la convention collective.

MOTIFS DE LA DECISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience sans modification ;

Il convient d'apprécier avant de juger de l'existence ou non d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, l'existence d'un harcèlement moral, lors de l'exécution du contrat de travail précédant la rupture du contrat de travail, les faits de harcèlement s'ils sont établis étant susceptibles d'expliquer les faits à l'origine du licenciement.

Sur le harcèlement moral

[R] [YH] invoque un comportement de harcèlement moral lors de l'exécution du contrat de travail, dont se serait rendue responsable ses responsables hiérarchiques, d'abord Mme [ZJ], puis M. [Z].

Elle affirme que plusieurs témoins ont attesté de faits de harcèlement de Mme [ZJ] qui adoptait à son égard des attitudes irrespectueuses, recherchait la moindre erreur dans son travail, lui imposait des changements d'horaires et des surcharges de travail, qu'elle a subi du fait de ce contexte plusieurs arrêts de travail, les médecins indiquant que ces arrêts étaient dus aux difficultés professionnelles, au stress, et à l'épuisement professionnel.

Il convient de rappeler que l'article L 1152-1 du code du travail dispose : 'Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.'.

L'employeur doit veiller à ce que ses salariés n'adoptent pas des agissements de harcèlement moral et prendre toutes dispositions pour prévenir ou faire cesser ce type de comportement.

En cas de litige, il appartient d'abord au salarié de rapporter la preuve de faits permettant de présumer de l'existence d'un harcèlement, l'employeur si ces faits sont établis devant ensuite prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étranger à tout harcèlement.

Il en résulte que le juge lorsque le salarié établit la matérialité des faits précis et concordants doit prendre en considération l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral, et dans l'affirmative apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause sont étrangères à tout harcèlement moral.

En l'espèce Mme [YH] produit aux débats des courriers adressés à son employeur ou à son supérieur hiérarchique, les réponses de son employeur, des attestations, des arrêts de travail motivés par un épuisement professionnel avec réactions dépressives et des certificats médicaux.

Il convient de rechercher au regard de l'ensemble des éléments produits aux débats si les faits qu'elle qualifie de harcèlement moral sont matériellement établis.

Dans une lettre adressée à Mme [ZJ] datée du 26 septembre 2009, Mme [YH] se plaint d'avoir été obligée de remplacer une collègue le 3 septembre, Mlle [A] à l'accueil.

Elle met aussi en cause la demande de M. [Z] de faire un courrier pour un appel d'offres qui relève normalement selon elle du travail de Mme [I].

Elle précise qu'elle n'intervient au niveau des appels d'offre dont était chargée Mme [I] qu'à titre de suppléante lorsqu'elle était absente ou débordée.

Elle expose que l'essentiel des fonctions qu'elle exerce concerne la société MODUS et non la société [CE] TP.

Elle estime la durée de son travail à 1528 heures par an pour la société MODUS ; elle précise qu'à ces tâches s'ajoute la suppléance de Mlle [A] à l'accueil lorsque celle-ci est absente, 'pour notamment gérer les appels téléphoniques, enregistrer les pesées au passage des camions sur la bascule, et taper les courriers de M. [OR] [CE] ou autres conducteurs de travaux.'.

Elle ajoute la lecture des annonces sur les journaux officiels sur la société [CE] (2 jours/semaine) et le secrétariat, et rappelle que le nombre d'heures maximal annuel est fixé dans l'entreprise à 1600 heures.

Elle conclut que 'je ne sais donc comment interpréter la volonté de me charger en supplément de correspondances ou de recherches d'artisans pour diverses réparations alors que matériellement, je n'en ai pas le temps. Il en est de même pour les décisions résultant de la réunion du 15 septembre 2009 de procéder aux appels d'offres conjointement avec Mme [SX] [I] et non plus simplement en suppléance, selon les indications même du compte-rendu de cette réunion.'.

Mme [YH] dans une lettre recommandée avec accusé de réception du 28 décembre 2009 adressée au directeur général de l'entreprise rappelle le harcèlement moral qu'elle avait dénoncé dans sa lettre du 6 juillet 2009, et expose qu'elle 'subi depuis lors, dans un emploi du temps particulièrement rempli, une surcharge excessive de travail tant de la part de Madame [ZJ] que de la part de Monsieur [Z] que je ne peux que rattacher au harcèlement dont je suis victime. Les faits dont je me plains caractérisent un harcèlement moral à travers les méthodes de gestion mises en oeuvre par mes supérieurs hiérarchiques qui se manifestent à mon égard par des agissements répétés ayant pour effet d'entraîner une dégradation de mes conditions de travail, de porter atteinte à mes droits et à ma dignité, et d'altérer ma santé physique et mentale.'.

Elle précise qu'elle a consulté son médecin qui a établi des arrêts de travail, et ajoute : 'je vous ai écrit de façon circonstanciée sur les raisons de la surcharge de travail dont je suis victime.' Je vous ai indiqué que Mme [ZJ] avait fait exprès de me confier la tâche d'appeler un artisan pour un placard dans son bureau...' alors qu'elle était déjà surchargée.

Elle affirme que de nombreux salariés sont victimes de harcèlement moral.

La copie de cette lettre est adressée à l'inspection du travail.

M. [PT] [CE], directeur général dans une lettre du 29 octobre 2009 adressée à sa salariée précise que 'comme vous n'avez certainement pas manqué de la constater, nous sommes en train de réorganiser le service auquel vous appartenez, et avons diffusé une note précisant les nouvelles responsabilités de Monsieur [RV] [Z], responsable des études. Nous avons pris connaissance de votre énumération des tâches que vous effectuez pour la société MODUS et du temps que vous estimez y consacrer annuellement, sans pour autant valider vos affirmations.'

Il conclut que 'dans l'attente d'un audit plus approfondi des différentes prestations réalisées pour la société MODUS, qui sont amenées à évoluer très prochainement, nous avons estimé opportun de vous libérer du temps. C'est pourquoi nous avons décidé de vous décharger des réunions d'appel d'offre du mardi.'.

Il résulte de ce courrier que l'employeur a tenu compte des plaintes de surcharge de Mme [YH] en la déchargeant dans l'immédiat des réunions d'appel d'offre du mardi, et en lui précisant qu'un audit interviendrait afin d'évaluer les prestations de la société MODUS.

L'employeur sans reconnaître la surcharge de travail de Mme [YH] a fait preuve de réactivité.

Il ressort ensuite des échanges de courriers électroniques entre Mme [YH] et Mme [ZJ] que celle-ci a demandé à Mme [YH] d'effectuer des remplacements de Mme [A] les 28 novembre 2008, 22 et 23 décembre 2008, 30 janvier 2009, 11, 12 et 13 mars 2009, 30 avril 2009, 19 juin 2009 soit 9 jours sur une période de 7 mois.

La période d'août 2009 correspond aux congés de Mme [A].

Il n'est pas anormal que l'employeur demande à un salarié de remplacer ponctuellement une collègue du même service à condition que cela n'entraîne pas une surcharge de travail telle que la salariée effectue des journées trop longues et trop fatigantes allant au delà des horaires normaux aggravant ainsi ses conditions de travail.

Sur ce point, Mme [YH] ne produit aucun élément établissant qu'au cours de ces périodes elle accomplissait des horaires dépassant les horaires normaux et que l'employeur lui demandait sur ces journées d'accomplir des tâches qu'elle ne pouvait effectuer normalement sur sa journée de travail.

Mme [ZJ] a seulement demandé à Mme [YH] dans un message en date du 19 novembre 2008 d'effectuer 2 heures supplémentaires le 28 novembre 2008.

Il convient de relever qu'il ne ressort pas des tableaux horaires produits aux débats que Mme [YH] accomplissait un temps de travail anormal.

Il est mentionné certaines heures supplémentaires à des périodes bien précises correspondant notamment au remplacement de Mme [A] assumant l'accueil.

Mme [YH] n'a pas revendiqué le paiement d'heures supplémentaires, et travaillait sur la base d'un horaire hebdomadaire de 35 heures.

Il n'est pas établi que Mme [YH] avait une surcharge de travail et qu'elle avait des tâches trop nombreuses à accomplir dans sa journée de travail.

A l'exception d'une demande supplémentaire ponctuelle, Mme [YH] n'établit aucun fait mettant en cause M. [Z] qui a été chargé du service du bureau d'étude à compter du 15 septembre 2009 et devait organiser le travail de deux salariées du bureau d'études dont [R] [YH].

Si M. [Z] a pu à une occasion se montrer excédé, c'est en raison de l'opposition systématique de Mme [YH] à réaliser des tâches dont il n'est pas démontré qu'elles entraînaient une surcharge de travail.

Si Mme [P] ancienne salariée de l'entreprise atteste du comportement difficile de Mme [ZJ] à l'égard des salariés travaillant sous ses ordres, et d'une attitude peu respectueuse à l'endroit de Mme [YH], il convient de relever que Mme [P] a adressé à Mme [ZJ] des messages électroniques amicaux démontrant l'existence de relations professionnelles cordiales et normales entre elles deux ( l'un en date du 30 octobre 2008 envoyée à Mme [ZJ] et copie à deux collègues de travail : 'j'espère que de votre côté tout se passe bien, que ma remplaçante est performante, enfin pas trop quand même,... Non je plaisante et que le bilan se déroule sans trop de stress si cela est dans le domaine du possible, bon courage et bonne continuation', l'autre daté du 5 janvier 2009 adressé à Mme [ZJ] et à plusieurs salariés dont Mme [YH], au terme duquel le témoin présente ses meilleurs voeux 'que ce soit sur le plan personnel ou professionnel', avec en pièce jointe 'une photo de mon bambin le jour de noël').

De plus Mme [P] est partie définitivement de l'entreprise le 16 avril 2009 après avoir été absente pour congés maladie et congé maternité du 29 septembre 2008 au 18 février 2009 soit à période antérieure au début des plaintes de Mme [YH] pour harcèlement moral et surcharge de travail en juillet 2009.

Il ressort de l'attestation de Mme [S] [C] que celle-ci met en cause le comportement hiérarchique de Mme [ZJ] à l'égard de Mme [YH] qu'elle qualifie de harcèlement moral.

Si elle met en cause Mme [ZJ] par 'sa façon de parler' à Mme [YH], elle ne cite pas de propos précis, et évoque seulement que Mme [ZJ] donnait des ordres sans tenir compte du travail de Mme [YH] ; en relatant que Mme [ZJ] recherchait la moindre erreur de Mme [YH], elle ne donne pas non plus d'exemples précis.

De plus ce témoin a quitté la société en août 2008 soit plusieurs mois avant le premier avertissement délivré à Mme [YH] et les doléances de celle-ci.

L'attestation de Mme [D] [V] relate l'incident qui s'est produit le 27 mars 2009 lorsque Mme [ZJ] a demandé à Mme [YH] de téléphoner à une entreprise pour venir réparer un placard et qui a donné lieu au premier avertissement délivré par l'employeur.

Le témoin précisant qu'elle a 'croisé [R] en colère, dans les escaliers qui dit 'ça commence à faire chier', je m'installe à mon bureau et [MM] s'adresse à [U] en disant 'je l'ai fait exprès', [U] répond je suis témoin.'.

Sur cet incident, Mme [U] [W] présente lors de l'incident atteste que lorsque Mme [ZJ] a demandé à Mme [YH] de téléphoner à l'entreprise, celle-ci a répondu 'qu'elle n'avait pas le temps car elle travaillait pour MODUS, ce à quoi [MM] a répondu 'Tu n'est pas obligée de le faire tout de suite', elle est encore sortie encore plus excitée en prononçant des mots très grossiers à l'encontre de [MM].'.

Il ressort de ces deux attestations que Mme [YH] s'est inutilement emportée alors que la demande d'appel téléphonique à une entreprise n'était qu'une tâche courte et ponctuelle.

Elle porte dès lors la responsabilité de l'incident la demande ponctuelle de Mme [ZJ] ne constituant pas un fait laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Si trois autres attestations mettent en cause Mme [ZJ], celles de Mme [G] [T], et Mme [JG] [T] évoquent des faits les concernant remontant à l'année 2006, celle de Mme [VB] relate des faits la concernant datant de 2007 soit plus de deux années avant les faits dont se plaint Mme [YH].

Il n'est produit à l'appui de ces attestations aucun autre document de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral de Mme [ZJ] à l'égard de ces personnes.

M. [TZ] qui a travaillé au bureau d'études avec Mme [YH] expose dans son attestation que Mme [YH] a réagi à une réorganisation du personnel administratif sous l'autorité de Mme [ZJ] qui lui demandait d'assurer l'activité MODUS, la part d'activité AO et le remplacement en cas de besoin de la titulaire du standard et en conclut 'à ce moment je me suis demandé si tous ces changements d'attitudes à son égard n'avaient pas pour objectif de la déstabiliser...' ; M. [TZ] n'évoque pas dans cette attestation des faits de harcèlement moral, il émet juste une hypothèse de déstabilisation, en interprétant de façon subjective l'attitude de Mme [ZJ].

En revanche, l'employeur produit des attestions de salariés ayant travaillé avec Mme [ZJ], celle de Mme [J] ne travaillant plus dans l'entreprise lorsqu'elle a établi l'attestation qui expose n'avoir jamais subi de pressions de sa supérieure hiérarchique Mme [ZJ] et qu'elle bénéficiait même de conditions de travail 'agréables, constructives et efficaces'.

Ce même témoin relate qu'en ce qui concerne Mme [YH], celle-ci avait 'tendance à me prendre pour sa secrétaire, et qui me donnait du travail supplémentaire (à titre d'exemple, impression de documents nécessaires à la réunion de service du mardi matin, à laquelle elle assistait, tâche qui ne relevait pas de ma fonction)'.

Un autre témoin n'étant plus non plus au service de l'employeur depuis août 2008, Mme [H] [K]-[B] atteste avoir eu l'occasion de travailler avec Mme [ZJ], qui 'est une personne stricte qui donne les directives dues à son poste' ; elle précise qu'elle lui a toujours demandé les éléments comptables dont elle avait besoin de manière claire et polie, et se montrait disponible pour expliquer les demandes, qu'elle n'a pas constaté des comportements différents lorsque Mme [ZJ] s'adressait à la secrétaire ou à des intérimaires ; enfin elle ajoute qu'elle n'a jamais perçu des indices de harcèlement envers différentes personnes qui ont partagé son bureau, notamment [DG] [M] [VB] et [S] [C], deux témoins qui imputent à Mme [ZJ] un harcèlement moral ainsi qu'il est exposé ci-avant, ce qui rend les témoignages de ces deux personnes d'autant plus fragiles.

Mme [NO] [O] secrétaire aide comptable relate n'avoir jamais été harcelée depuis son entrée dans la société en octobre 2008.

Au regard de tous ces éléments, les attestations fournies par Mme [YH] ne sont pas suffisamment probantes pour caractériser des faits laissant présumer un harcèlement moral.

Surtout l'inspection du travail et l'audit réalisé par un organisme indépendant n'ont pas relevé de faits constitutifs de harcèlement moral.

Ainsi l'inspection du travail suite au courrier reçu en copie adressé par Mme [YH] à l'employeur le 28 décembre 2009 a diligenté une enquête et a entendu dans ce cadre les responsables de l'entreprise et plusieurs salariés.

L'inspectrice qui a réalisé cette enquête conclut que l'enquête n'a pas permis de relever 'des constats constitutifs du délit de harcèlement moral évoqué par Mme [YH]'.

Même si le terme délit peut prêter à confusion en ce qu'il peut laisser entendre que le harcèlement est pris en compte dans le cadre du droit pénal, l'inspectrice du travail en menant son enquête s'est fondée sur les plaintes de la salariée au visa des articles 1152-1 et suivants du code du travail, qu'elle cite expressément dans la lettre du 22 mars 2010 adressée à Mme [YH].

Mme [YH] n'est donc pas fondée à soutenir que l'inspecteur a conclu son enquête sur l'existence ou non du délit pénal de harcèlement moral, et non sur la notion de harcèlement moral tel que défini par les articles du code du travail.

L'inspection du travail n'a donc pas retenu le harcèlement moral dénoncé par Mme [YH].

Elle a seulement indiqué que l'employeur devait être vigilant sur l'organisation du travail de ses salariés.

L'employeur sur ce point a fait preuve de réactivité en organisant un audit.

Le rapport d'audit mentionne que la quasi totalité des personnes entendues ont souligné 'la bonne qualité de l'ambiance de travail et des relations internes'.

Il est souligné la qualité de l'écoute et la prise en compte des collaborateurs qui favorise le travail d'équipe.

Il est noté que Mme [YH] exprime un manque de considération pour son travail, et reconnaît qu'elle a du mal à être dirigée, et qu'elle voudrait arrêter le conflit si 'elle est dans les bungalows machefer.'.

Des membres de la direction de l'entreprise ont relevé 'les habitudes d'indépendance' de Mme [YH] tout en notant pour certains l'attitude difficile de Mme [ZJ], l'audit notant toutefois sur ce point que les discours négatifs ne reposaient pas sur des faits et semblaient 'du registre de l'interprétation personnelle et du jugement de valeur ; d'autres responsables ont souligné la compétence de Mme [ZJ] et ses exigences qualifiées de normales.

L'audit relève que l'origine des difficultés prend sa source dans des incompréhensions mutuelles, un manque de rigueur et un manque d'information préalable.

Il ne ressort pas de cet audit mené à la demande de l'entreprise l'existence d'un harcèlement moral ou d'un climat laissant présumer l'existence d'un contexte de harcèlement moral pesant sur les salariés, notamment sur Mme [YH].

Il résulte de l'ensemble des pièces produites par les parties, que Mme [YH] qui ne s'était plainte d'aucun fait de harcèlement moral depuis qu'elle était embauchée, et bénéficiait d'une ancienneté importante dans l'entreprise [CE] a mal vécu l'arrivée de Mme [ZJ] sur le site de [Localité 3] en 2008 et la réorganisation hiérarchique que cette dernière a mis en place lors de la réunion du 9 décembre 2008, qu'elle a adopté rapidement à l'égard de sa supérieure hiérarchique directe une attitude déplaisante en refusant systématiquement toute tâche supplémentaire ponctuelle, alors qu'elle n'était pas surchargée contrairement à ce qu'elle affirme.

Compte tenu de cette attitude, Mme [ZJ] était fondée à rappeler à Mme [YH] qu'elle devait respecter ses consignes et ses demandes ; l'employeur en cas de non respect était tout aussi fondé à avertir Mme [YH] pour ses manquements, étant rappelé que l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur, et de son pouvoir disciplinaire ne constituent pas des faits de harcèlement moral.

Enfin, les arrêts de travail de Mme [YH] sur lesquels sont notés 'épuisement professionnel, stress professionnel, réaction dépressives' et les certificats médicaux faisant état de stress et de difficultés psychologiques ne peuvent être considérés comme décrivant les conséquences d'un harcèlement moral qui n'est pas établi.

Au regard de tous ces éléments, la preuve de l'existence de faits laissant présumer un harcèlement moral n'est pas rapportée.

La demande de dommages et intérêts de ce chef sera dès lors rejetée et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le licenciement

L'employeur au terme de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, et dont le contenu a été reproduit intégralement dans les conclusions de la société [CE] TP reproche à Mme [YH] deux séries de faits, ceux du 14 juin 2010 et ceux relatifs à la mésentente avec les supérieurs hiérarchiques.

Il convient d'examiner ces griefs :

- les faits du 14 juin 2010

La lettre de licenciement expose que 'le lundi 14 juin 2010 vous avez transféré à [LK] [WD] gérant de la société V2 E un courriel que venait de vous envoyer votre supérieure [MM] [ZJ], relatif à des questions strictement internes à la société [CE] TP, en indiquant 'POUR VOUS TENIR INFORME'.

[LK] [WD] vous a répondu par courrier le 25 juin suivant que votre courriel avait été reçu par tout le personnel de sa société, et qu'il ne le concernait en rien, et nous a informés de cette situation...'

Il ressort du message électronique du 14 juin 2010 produit aux débats reprenant le message de Mme [ZJ] adressée à Mme [YH] que Mme [ZJ] exposait : 'Il y a quelque temps, je t'ai demandé par mail de l'aide pour les relances clients de Modus. Je n'ai pas eu de réponse à ce mail, je n'ai pas non plus bénéficié de l'aide que je demandais, mais tu m'as fait savoir que les relances clients ne faisaient pas partie de tes attributions. Je n'ai pas réitéré cette demande.

Aussi le fait que tu me demandes si CCIAG avait payé ses factures d'avril 'parce qu'on t'avait dit que cela avait été payé le 6 juin' et que tu voulais t'en assurer me surprends.

As tu relancé CCIAG ' Si oui à la demande de qui ' Et comment savais tu que les factures n'étaient pas payées ' Je me suis aussi demandé qui était 'on' et aussi pourquoi tu souhaitais savoir si CCIAG avait payé. [Y] étant à l'étranger, ce n'est pas lui qui avait pu te charger de me le demander comme pour le client en redressement il y a un mois.

D'autre part, tu m'as aussi questionné sur les horaires des salariés et intérimaires de Modus, puis tu as informé [NO] [O] que tu ne signerais pas les feuilles d'heures parce que les personnes en question faisaient des heures supplémentaires, que tu n'étais pas au courant et que tu ne voulais pas en prendre la responsabilité. Ce que je comprends parfaitement. Pour ma part je t'ai informée lors de ta demande téléphonique que j'avais vu ces horaires avec [L] [CE].

Cependant concernant ces signatures, tu es salariée de [CE] TP et déléguée à certaines tâches de secrétariat et administratives qui concernent principalement la société Modus, mais d'une part, tu n'es pas la hiérarchique des salariés et/ou intérimaires de Modus, et d'autre part, tu ne peux vérifier leurs horaires puisque tu arrives après eux et que tu repars avant.

J'ai bien vu il y a un certain temps que tu signais les rapports, mais je n'ai pas cherché à savoir qui te l'avait demandé et pourquoi. Ce que je sais, c'est que je n'ai jamais fait cette demande, et que compte tenu des éléments ci-dessus, ta signature n'est pas valable. Cela au moins te rassureras sur ta responsabilité éventuelle à ce sujet.

Pour finir, je t'ai demandé également à plusieurs reprises, de me faire un tuto de tes tâches, document qui n'est toujours pas en ma possession à ce jour...'.

Ce message fait état de désaccords entre la responsable hiérarchique et la salariée Mme [YH] et porte sur les relations et l'organisation interne de la société [CE] TP.

Un salarié dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail est tenu à une obligation de discrétion et ne doit pas communiquer à des tiers des informations concernant le fonctionnement interne de l'entreprise.

En communiquant ce message en copie au responsable de la société V2E et aux salariés de cette société quel que soit leur nombre, et en mentionnant en tête du message en majuscule 'POUR VOUS TENIR INFORME', Mme [YH] a donné volontairement à des tiers des informations internes à la société [CE] TP.

Ce mail adressé à une entreprise extérieure et à tous ses salariés, prend à témoin des personnes extérieures à l'entreprise sur les difficultés de relation entre Mme [YH] et Mme [ZJ] et les conflits internes existant au sein de la société TP [CE].

Il importe peu que la société V2 E soit une entreprise partenaire de la société MODUS dans le cadre de l'activité de celle-ci, il s'agit d'une société qui n'a aucun lien de dépendance avec la société TP [CE].

Si la société V2 E était concernée par la facture de la société CCIAG, elle n'était en rien concernée par les dissensions internes existant dans la société [CE] TP et la société MODUS.

Cette communication est d'autant plus grave, que Mme [YH] mettait en cause depuis plusieurs mois le comportement de Mme [ZJ] qu'elle qualifiait de harcèlement moral.

En réalité Mme [YH] en transmettant ce message prenait à témoin des personnes extérieures de l'entreprise [CE].

C'est dès lors avec raison que l'employeur a estimé qu'il s'agissait d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, la communication de telles informations violant les obligations de discrétion et de confidentialité dont était tenue Mme [YH].

- le grief tenant à la mésentente avec les responsables hiérarchiques

La lettre de licenciement fait état qu'après avoir confié la charge du bureau d'études depuis le 15 septembre 2009 à M. [Z], celui-ci organise le travail de Mme [YH], de Mme [I] secrétaire et de M. [TZ] technicien d'études de prix.

Elle expose que 'Vous aviez évoqué une surcharge de travail, aussi [RV] [Z] a décidé de s'occuper lui-même de la recherche des appels d'offres, tâches qui vous était auparavant confiée.

Or nous constatons que vous mettez une mauvaise volonté évidente à exécuter les tâches du bureau d'études de prix, créant par votre attitude un climat de tension permanent qui nuit au bon fonctionnement du service.

Lorsque [RV] [Z] vous demande d'exécuter un travail, systématiquement votre première réaction est d'argumenter que vous êtes débordée, et vous rechigner à le faire.

Il vous avait été demandé d'aider [X] [TZ] dans son travail pour la mise à jour des références travaux, travail qui demande de la patience et de la persévérance et qui s'inscrit dans le temps. Or, à chacune de ses demandes, vous lui objectiez des arguments pour ne pas l'aider, lassé par votre attitude dont il s'est plaint, il s'est résolu à faire cette tâche fastidieuse seul, ce qui l'a retardé dans l'exécution du reste de son travail.

Ainsi c'est [SX] [I] qui est sollicitée à votre place, ce qui accroît sa charge de travail, alors que celle-ci doit être répartie entre tous les membres du bureau d'études, chacun devant être solidaire de ses collègues...

Votre comportement crée un climat conflictuel qui perdure depuis plusieurs mois qui porte préjudice au bon déroulement de l'entreprise.

Nous vous avons déjà adressé deux avertissements les 5 juin 2009 et 8 février 2010 qui concernait déjà :

- vos problèmes relationnels avec vos supérieurs hiérarchiques ou collègues de travail,

- un prétendu harcèlement moral dont vous vous disiez victime de la part d'un de vos supérieurs, sans pour autant faire référence à un quelconque fait précis qui aurait permis d'accréditer votre thèse,

- votre ingérence dans la vie privée de vos collègues et leur état de santé alors qu'il s'agit de questions strictement confidentielles qui vous ne regardent en rien,

- votre colportage de fausses informations,

- votre discrédit de la direction de l'entreprise.

L'employeur ajoute après avoir rappelé les conclusions de l'inspection du travail sur le harcèlement moral, et après la réalisation d'un audit, aucun élément n'a permis de mettre en évidence un quelconque harcèlement moral et que la charge de travail n'était pas excessive.

Il conclut que 'nous pensions et espérions que vous aviez compris qu'il était indispensable que vous changiez de comportement, mais à l'évidence cela n'a pas été le cas.

Aujourd'hui votre mésentente avec vos supérieurs mais également avec vos collègues de travail, par sa persistance est à l'origine d'un désaccord généralisé avec le personnel qui perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise.'. ....

Concernant la persistance du comportement de Mme [YH] déjà sanctionné par les avertissements en date des 6 juillet 2009 et 8 février 2010 il n'est produit aucune pièce relative à des colportages de fausses informations, de discrédit de la direction, à l'ingérence dans la vie privée de collègues et leur état de santé, et à un maintien par Mme [YH] d'accusation d'harcèlement moral en dépit des résultats de l'enquête de l'inspection du travail et de l'audit.

La persistance de ces comportements n'est donc pas établi par les pièces produites par les parties et ne peuvent dès lors constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

En revanche, il ressort de l'attestation de M. [Z] responsable du bureau études que Mme [YH] a continué à s'opposer à sa hiérarchie, en refusant d'effectuer des tâches que lui demandait M. [Z] sans que celle-ci fournisse d'éléments établissant qu'il s'agissait de tâches la surchargeant au regard de ses activités à la société MODUS et à la société [CE] TP dont le bureau d'études dépend. M. [Z] précise que cette attitude le conduit à solliciter la secrétaire du bureau d'études, ce qui a entraîné un climat conflictuel au sein du bureau d'études.

Si M. [Z] a pu à une occasion se montrer excéder, c'est en fonction de ce contexte conflictuel auquel Mme [YH] a largement participé.

Par cette attestation, l'employeur établi que quel que soit le responsable hiérarchique de Mme [YH], celle-ci a manifesté une attitude d'opposition déplaisante, et n'a eu de cesse de contester les consignes de ses responsables hiérarchiques, en se plaignant d'une surcharge de travail, dont la réalité n'est pas établie par les pièces produites aux débats.

Ce grief est dès lors réel et sérieux compte tenu que Mme [YH] avait déjà été avertie pour ne pas avoir respecté les demandes de sa hiérarchie.

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [YH] de sa demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le rappel de salaire

Mme [YH] revendique une classification au niveau E de la convention collective alors qu'elle était employée en qualité de secrétaire classé C au vu du contrat de travail produit aux débats.

Elle soutient qu'elle était chargée de la responsabilité administrative de la plate-forme de la société MODUS à compter du 1er septembre 2005, qu'ainsi elle réalisait des travaux d'exécution, de contrôle et d'organisation de la plate-forme, elle exerçait un commandement sur les salariés MODUS par la fourniture de l'exécution des lots à traiter, ou à acheminer sur les chantiers, elle prenait des initiatives et échangeait des informations avec des interlocuteurs externes, elle organisait le transport de machefers, ferrailles, elle négociait des prix sur les devis.

Elle précise qu'elle avait une expérience acquise au niveau D.

Il appartient à Mme [YH] d'établir qu'elle exécutait des tâches relevant de la classification E.

Au préalable, il convient de relever que si la mention TAM C sur les bulletins de paie peut prêter à interprétation, il convient de relever que l'employeur a toujours considéré que sa salarié relevait de la classification C de la convention collective des ETAM et l'a rémunéré en conséquence sur cette base depuis l'embauche.

Il ne peut donc être tiré des seuls bulletins de salaire que Mme [YH] relevait de la catégorie E ainsi qu'elle le prétend.

La convention collective pour la catégorie E prévoit que le salarié réalise des travaux d'exécution, de contrôle et d'étude, exerce un commandement sur les salariés placés sous son autorité, résout les problèmes à partir de méthodes et technique préétablies, agit dans le cadre d'instructions permanentes et/ou de délégations dans un domaine d'activité strictement défini.

Le salarié peut en outre être amené à prendre une part d'initiative, de responsabilité et d'animation, il échange des informations avec les interlocuteurs externes occasionnels, il connaît les principaux aspects techniques et savoirs faire de sa spécialité professionnelle, a une bonne technicité dans sa spécialité, se tient à jour dans sa spécialité, et veille à faire respecter les règles de sécurité.

Le salarié doit enfin avoir une expérience en niveau D ou en niveau IV de la classification ouvrier bâtiment niveau III ou niveau III ou IV de la classification ouvrier TP, ou bénéficier d'une formation générale technologique et professionnelle ou un diplôme de l'enseignement général, technologie ou professionnel de niveau BTS, Dut, ou DEUG.

Il convient de rechercher si les fonctions et les tâches de Mme [YH] correspondent à ces critères.

Rien dans les pièces produites aux débats par Mme [YH] n'illustre qu'elle effectuait des tâches relevant de la catégorie E qu'elle revendique.

En effet elle n'établit pas qu'elle disposait d'une compétence technique et d'un savoir faire dans le domaine professionnel de retraitement des déchets industriels.

Elle n'agissait pas dans le cadre d'instructions permanentes, ou d'une délégation puisqu'elle était placée sous l'autorité directe de Mme [ZJ] ainsi qu'il ressort du compte rendu de réunion du 8 décembre 2008 au terme duquel Mme [ZJ] précise 'qu'afin d'éviter les erreurs et les ordres-contreordres, les personnes présentes à cette réunion ainsi que [E] [N] sont désormais sous ma responsabilité directe. Pour celles qui ont deux responsables, par exemple [E] qui doit également tenir compte des besoins de [PT] [CE], ou [R] de ceux de [Y] [CE], ou [F] de ceux de [OR] [CE], les demandes diverses doivent m'être communiquées, et je dois faire le lien entre les différents responsables puis rendre réponse.'.

Elle n'avait aucune autonomie dans l'organisation de son emploi du temps fixé par Mme [ZJ] puis par M. [Z] pour le bureau études.

Elle ne fixait pas le prix des produits ou des devis.

Si quelques attestations indiquent qu'elle devait donner des instructions à des ouvriers et prenait des décisions concernant l'organisation, les transports de mâchefers, aluminium, ferrailles, les témoins ne précisent pas en quoi consistaient ces instructions, et ces décisions.

Si M. [TZ] chargé d'études à la société TP [CE] expose que M. [Y] [CE] était secondé par Mme [YH], il n'explique pas les fonctions de Mme [YH] dans le cadre de la plate-forme de MODUS, en outre il travaillait au Bureau d'études de la société [CE] TP et non à MODUS, il ne décrit d'ailleurs pas les fonctions de Mme [YH] à MODUS.

En revanche, il résulte de la note d'information signée de M. [Y] [CE], gérant la société MODUS VALORIS qu'à compter du 1er septembre 2005, l'employeur émettait une note d'information au terme de laquelle il exposait que 'la personne responsable de la plate-forme concernant les analyses, le suivi et l'organisation des lots de mâchefers (entrées et sorties) de la société MODUS VALORIS est [R] [YH].'.

Cette note ne signifie pas que Mme [YH] était responsable de la plate-forme de la société MODUS VALORIS, elle indique seulement que la salariée est responsable des analyses et des entrées et sorties des machefers.

L'ensemble des pièces produites établissent que Mme [YH] depuis le 1er septembre 2005 gérait les arrivés et les sorties de machefer de la société MODUS VALORIS, et procédait à des analyses de produits, selon des instructions précises données par sa hiérarchie.

Enfin aucune pièce fournie ne démontre que la salariée assumait un rôle dans la transmission de connaissance, qu'elle avait un rôle d'animation et qu'elle avait acquise un niveau d'expérience de niveau D.

Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré ayant rejeté la demande de rappel de salaire, de congés payés y afférents, et de remise des bulletins de paie rectifiés.

Sur la violation par l'employeur de son obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail

La société [CE] TP n'a pas effectué au cours de la relation de travail d'entretiens d'évaluation bi-annuel qui aurait permis l'instauration d'un dialogue entre l'employeur et la salariée sur les motivations de celle-ci, les difficultés rencontrée dans l'organisation du travail, son évolution au sein de l'entreprise alors que son ancienneté était importante, et de ses besoins de formation.

C'est dès lors par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont jugé que l'employeur avait manqué à ses obligations, et indemnisé Mme [YH] à hauteur de 1200 €.

Le jugement sera confirmé.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile formulée par la société [CE] TP

Cette demande sera rejetée en raison de la situation économique de Mme [YH].

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré.

REJETTE la demande de la société [CE] TP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE Mme [YH] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Madame COMBES, Président, et par Madame KALAI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/05256
Date de la décision : 29/01/2013

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°11/05256 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-29;11.05256 ?
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