A.R
RG N° 12/00002
N° Minute :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU JEUDI 20 DECEMBRE 2012
Appel d'une décision (N° RG 10/1355) rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE en date du 25 novembre 2011 suivant déclaration d'appel du 02 Décembre 2011
APPELANTE :
SAS FONDERIE GIROUD INDUSTRIE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Sandrine PONCET (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIME :
Monsieur [G] [W]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Comparant en personne, assisté de Me Jean-Michel DETROYAT (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Hélène COMBES, Conseiller faisant fonction de Président,
Madame Astrid RAULY, Conseiller,
Monsieur Frédéric PARIS, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame Agnès JAY, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 21 Novembre 2012,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 19 Décembre 2012, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour. Le délibéré a été prorogé au 20 décembre 2012.
L'arrêt a été rendu le 20 Décembre 2012.
RG N° 12/02 AR
[G] [W] a été embauché par la SAS Fonderie Giroud Industrie le 17 mai 1976 en qualité d'opérateur fusion. Il a occupé le poste d'opérateur fabrication V - Process et opérateur de finition de 2005 à 2010.
La société a procédé à un premier plan de licenciement au troisième trimestre 2009.
Elle a procédé à un deuxième plan de licenciement en mai 2010. 25 postes ont été concernées dont celui de [G] [W], qui a été licencié le 27 mai 2010.
Par jugement du 25 novembre 2011, le conseil des prud'hommes de Grenoble a dit que les critères d'ordre ont été respectés mais que la société Fonderie Giroud Industrie n'a pas respecté la procédure concernant les dispositions de l'article 33 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 et que le licenciement de [G] [W] est sans cause réelle et sérieuse et a condamné la SAS Fonderie Giroud Industrie a lui verser 33 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile . Il a débouté [G] [W] de ses demandes pour préjudice distinct et pour non-respect des critères d'ordre.
Appel de cette décision a été interjeté par la SAS fonderie Giroud le 2 décembre 2011.
L'appelante sollicite l'infirmation de jugement entrepris en ce qu'il a considéré le licenciement abusif en raison de la violation par l'employeur des dispositions de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 et demande à la cour de débouter [G] [W] de l'ensemble de ses demandes.
Elle fait valoir qu'elle a été créée en 2005, suite au rachat de l'activité de la Fonderie Giroud qui a fait l'objet d'une liquidation judiciaire et qu'elle a repris le contrat de travail de [G] [W] ; que dès la fin 2008 elle a connu de graves difficultés économiques et a pris des mesures drastiques ; que fin de 2009 elle a dû procéder à 9 licenciements économiques ; que la crise économique perdurant, l'activité ne reprenant pas, une nouvelle procédure de licenciement collectif a été mise en oeuvre avec consultation des délégués du personnel qui ont émis un avis favorable et application des critères d'ordre, soumis aux délégués du personnel, ce qui a conduit à ce que [G] [W] fasse partie des personnes licenciées.
Sur les critères d'ordre, elle souligne que la convention collective ne prévoit aucune disposition spécifique et que les mêmes critères ont été retenus pour les deux vagues de licenciements ; que [G] [W] était le moins polyvalent des salariés de la même qualification ; qu'en cas d'égalité de points, il a été convenu que les salariés seraient départagés sur la polyvalence et la compétence et non sur l'ancienneté ; que le chantier sur lequel était affecté le salarié allait fermer ; que l'ensemble des postes de ce chantier a été supprimé, sauf 2 postes ; que le salarié n'avait pas 6 enfants mais seulement 2 enfants à charge ;
Sur le reclassement interne, elle soutient qu'aucun reclassement n'était possible dans la mesure où aucun poste n'était disponible et qu'elle n'appartient à aucun groupe ; que [G] [W] n'a jamais réellement souhaité poursuivre son activité puisqu'il n'a pas fait valoir sa priorité de réembauchage.
Sur le reclassement externe, elle souligne que le conseil des prud'hommes a interpellé la société sur son obligation de respecter les dispositions de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 2 juin 1987 et que l'employeur n'a pu répondre que laconiquement par note en délibéré ;
qu'en vertu des dispositions de l'accord national sur l'emploi du 12 juin 87, l'employeur doit saisir la commission territoriale de l'emploi qui s'efforcera de reclasser le salarié mais que l'absence de saisine de cette commission ne rend pas le licenciement abusif ;
qu'en l'espèce, la saisine de cette commission était respectée puisque la liste des salariés licenciés a bien été communiquée à la commission paritaire territoriale de l'emploi avec les documents suivants :
- note information soumise aux représentants du personnel,
- projet de licenciement et mesures sociales d'accompagnement indiquant le profil des postes concernées par la mesure de licenciement ;
qu'une fois que L'UDIMEC a reçu le courrier de la société fonderie Giroud, elle a transmis les profils des salariés aux entreprises de la métallurgie et a proposé aux salariés de l'entreprise de s'inscrire directement pour rechercher un emploi et apposer leur curriculum vitae ; que l'employeur est simplement soumis à rapporter la preuve de la saisine de l'Udimec.
Sur l'obligation de formation, elle fait valoir que le salarié a bénéficié d'une formation de conduite du pont roulant ; qu'elle assure à l' ensemble de ses salariés un socle de formation et d'adaptation leur permettant de rester compétents dans leur domaine ; qu'elle a proposé à ses salariés en interne, une formation pour obtenir un CAP de mouleur noyauteur en formation continue ; qu'elle a organisé une formation QCPM de mouleur noyauteur ; qu'elle organise régulièrement des formations de sauveteur secouriste mais que [G] [W] ne s'est jamais porté candidat pour aucun de ces formations.
[G] [W] sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour de dire que la fonderie Giroud industrie n'a pas respecté l'ordre des licenciements et son obligation de reclassement et d'adaptation et qu'elle a saisi trop tardivement la commission paritaire territoriale. Il demande à la cour de la condamnée à lui payer :
- 71 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 3000 € dommages-intérêts pour non-respec de l'ordre des licenciements
- 6000 € de dommages-intérêts pour préjudice distinct
- 1500 € sur l'article 700 du code de procédure civile et de lui enjoindre de lui remettre les documents sociaux rectifiés sous astreinte de 50 € par jour de retard.
Il fait valoir qu'il avait 34 ans et deux mois d'ancienneté lors de son licenciement et qu'il était l'un des salariés les plus anciens de l'entreprise et le seul des anciens à avoir été licenciés ; qu'il est marié et a deux enfants encore mineurs et quatre enfants majeurs à charge soit six enfants au total ; qu'il est intervenu sur différents postes et est habilité en interne à la conduite du pont roulant avec commande au sol ; qu'il lui a été remis la médaille d'honneur du travail ; qu'il est âgé de 50 ans.
Il souligne qu'il n'a pas fait l'objet d'une recherche de reclassement et que l'employeur ne lui a pas notifié par écrit les raisons qui s'opposaient au reclassement ; que cette recherche à s'apprécier à l'intérieur du groupe ; que la fonderie n'a pas respecté les dispositions de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie en temps utile ; la saisine de cette commission a été faite le 29 avril 2010, veille du pont du 1er mai alors qu'il été convoqué le 17 mai à un entretien préalable.
Il fait valoir qu'il subi un préjudice distinct compte tenu des circonstances du licenciement et de son âge et du fait qu'il est toujours au chomâge.
DISCUSSION
Attendu que [G] [W] ne conteste pas le motif économique de son licenciement mais fait valoir que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciement et son obligation de reclassement ;
Attendu que il n'est pas soutenu que la SAS Fonderie Giroud Industrie fait partie d'un groupe ;
qu'il n'est pas contesté qu'elle venait de licencier 9 salariés six mois auparavant et n'avait aucun poste disponible à proposer à [G] [W]
Attendu qu'il est soutenu que la saisine de la commission territoriale de l'emploi, juste avant le pont du 1er mai, est trop tardive et que la lettre de licenciement a été expédiée alors que la réunion de la commission paritaire n'avait pu se tenir ;
Attendu que l'article 28 de l'accord national du 12 juin 1987 prévoit que « lorsqu'une entreprise sera conduite à réduire ou à cesser son activité, elle recherchera, en liaison étroite avec le comité d'entreprise, les délégués syndicaux et les organismes habilités, toutes les solutions permettant d'assurer le reclassement du personnel . Elle favorisera les adaptations nécessaires, notamment dans le domaine des ressources, de la formation et du reclassement des travailleurs.
(') Si toutefois elle est amenée à envisager un licenciement collectif d'ordre économique, elle doit (') rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi » ;
Attendu qu'en l'espèce, l'employeur justifie avoir saisi la commission territoriale de l'emploi par courrier du 29 avril 2010 auquel était joint copie des notes d'informations soumises aux représentants du personnel, le projet de licenciements et les mesures sociales d'accompagnement indiquant le profil des postes concernés par la mesure de licenciement économique ; qu'elle a demandé à la commission territoriale de l'emploi de la tenir informée dans les meilleurs délais eu égard à l'urgence de la procédure ;
Attendu que l'UDIMEC a répondu le 5 mai 2010 ; qu'elle a assuré que les profils feront l'objet d'une diffusion au sein des entreprises de la métallurgie ; qu'elle a proposé que les salariés consultent les postes disponibles accessibles sur un site internet ; qu'elle a rappelé que les salariés pouvaient inscrire directement leur CV sur le site internet national de la métallurgie ;
Mais attendu qu'une première convocation a un entretien préalable fixé au 6 mai a été adressée au salarié par lettre du 28 avril 2010, préalable à la saisine de la commission territoriale de l'emploi ; que ce n'est qu'en raison d'un dysfonctionnement de la poste dans la remise de la précédente convocation, que le salarié a fait l'objet d'une nouvelle convocation par courrier du 6 mai pour un entretien préalable fixé au 17 mai 2010 ;
Attendu que la lettre de licenciement du 27 mai 2010 ne porte aucune mention des informations transmises par l'UDIMEC ;
qu'au demeurant, l'employeur ne prétend pas avoir informé le salarié de la possibilité de consulter les postes disponibles et d'inscrire son CV sur le site internet national de la métallurgie ;
Attendu que de surcroît et ainsi que l'a justement relevé le conseil des prud'hommes, l'employeur ne justifie pas avoir respecté les dispositions de l'article 33 de l'accord national du 12 juin 1987, s'agissant de l'information du salarié et du comité d'entreprise sur les possibilité de reclassement de formation ou de reconversion pouvant être mises en 'uvre avec le concours des chambres syndicales territoriales et de l'UIMM ;
que c'est à juste titre que le conseil des prud'hommes a considéré que la SAS FONDERIE GIROUD n'avait pas mis en 'uvre toutes les mesures utiles s'agissant de son obligation de reclassement eu égard aux dispositions conventionnelles ;
Attendu que dans ces conditions le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'en a justement décidé le conseil de prud'hommes ;
Attendu qu'au moment de son licenciement, le salarié était âgé de plus de 50 ans et avait plus de 34 ans d'ancienneté dans l'entreprise ; qu'il n'avait jamais eu d'autre employeur ;
Attendu que les premiers juges ont justement évalué son préjudice ;
Attendu que l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne se cumule pas avec les dommages intérêts pour inobservation des critères d'ordre ;
que l'examen des conditions de mise en oeuvre des critères d'ordre ne se justifie donc pas ;
Attendu que le salarié qui ne justifie d'aucun préjudice distinct, sera débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;
Attendu que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés par [G] [W] en cause d'appel .
PAR CES MOTIFS,
La Cour après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SAS FONDERIE GIROUD à payer à [G] [W] la somme de 1,500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,
CONDAMNE la SAS FONDERIE GIROUD aux dépens d'appel.
Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Madame COMBES Président et par Madame KALAI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT