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31/10/2012 | FRANCE | N°11/05313

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 31 octobre 2012, 11/05313


RG N° 11/05313



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU MERCREDI 31 OCTOBRE 2012







Appel d'une décision (N° RG F10/00

282)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 29 septembre 2011

suivant déclaration d'appel du 08 Novembre 2011



APPELANTE :



LA SA VASSEL, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 2]



Comparante en la personne de son Président Monsieur [P] et assist...

RG N° 11/05313

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MERCREDI 31 OCTOBRE 2012

Appel d'une décision (N° RG F10/00282)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 29 septembre 2011

suivant déclaration d'appel du 08 Novembre 2011

APPELANTE :

LA SA VASSEL, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 2]

Comparante en la personne de son Président Monsieur [P] et assistée de Me Yollande MAISONNIAL (avocat au barreau de LYON)

INTIMEE :

Madame [G] [F]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Comparante et assistée de Me Sandra CARTIER-MILLION substituant Me Michel DE GAUDEMARIS (avocats au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Madame Hélène COMBES, Conseiller, faisant fonction de Président

Madame Astrid RAULY, Conseiller,

Monsieur Frédéric PARIS, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 03 Octobre 2012,

Madame Hélène COMBES, Conseiller, chargée du rapport, et Madame Astrid RAULY, Conseiller, assistées de Monsieur Laurent LABUDA, Greffier, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 31 Octobre 2012, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 31 Octobre 2012.

RG : 11/5313HC

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat à durée indéterminée du 1er janvier 1977, [G] [H] épouse [F] a été embauchée en qualité de technico commerciale par son père [C] [H] qui avait fondé en 1945 une entreprise d'imprimerie exploitée sous le nom 'Imprimerie [C] [H]'.

En 1984, la Sarl [H] a été créée après le décès de [C] [H], sa veuve en étant le premier gérant.

Le 7 janvier 2002, le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu a ouvert le redressement judiciaire de la Sarl Imprimerie [C][H] et par jugement du 7 février 2003, il a autorisé la cession au profit de la société UGS au sein de laquelle [G] [F] est devenue directeur de clientèle.

Après liquidation judiciaire de la société UGS au mois de février 2004, le contrat de travail de [G] [F] a été transféré à la société Vassel.

Au dernier état de la relation contractuelle, [G] [F] occupait un emploi de cadre commercial.

Courant 2009, la société Vassel a engagé une procédure de licenciements économiques concernant 9 salariés et [G] [F] a été licenciée par courrier du 7 août 2009.

Elle a contesté son licenciement devant le conseil de prud'hommes de Grenoble, qui par jugement du 29 septembre 2011, a dit que l'ancienneté à prendre en compte est de 32 ans et 8 mois, que l'ordre des licenciements n'a pas été respecté, que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, et a condamné la société Vassel à lui payer :

- 53.358,29 euros au titre du complément de l'indemnité de licenciement,

- 3.765,06 euros à titre de rappel sur l'indemnité de préavis et 376,51 euros au titre des congés payés afférents,

- 25.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect des critères d'ordre des licenciements

- 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

La société Vassel qui a relevé appel le 8 novembre 2011, demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter [G] [F] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle sollicite subsidiairement la limitation à 6 mois de salaire des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en l'absence d'éléments sur le préjudice subi.

1) Sur l'ancienneté, elle conteste l'ancienneté de plus de 32 ans revendiquée par [G] [F] qui n'avait selon elle qu'une ancienneté de 6,4 ans.

Si elle admet qu'un contrat de travail de travail l'a bien liée à la société UGS à compter du mois de février 2003 et à elle-même à compter du mois de février 2004, elle conteste l'existence d'un contrat de travail avec la Sarl [H], dont [G] [F] était gérante égalitaire jusqu'au 7 février 2003, de sorte qu'elle ne se trouvait pas en lien de subordination avec l'entreprise.

Elle observe que [G] [F] ne produit aucun contrat de travail écrit et que c'est pourtant à elle, qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail, d'en rapporter la preuve, c'est à dire d'établir qu'elle a exercé au sein de la Sarl [H] et sous un lien de subordination, des fonctions techniques distinctes de tout mandat social.

Elle fait valoir que [G] [F] ne rapporte pas la preuve qu'elle avait un contrat de travail avec la société [H] et que ce contrat de travail a été transféré.

Elle soutient que les premiers juges se sont prononcés sans justificatif sur l'ancienneté en se fondant sur les seuls bulletins de salaire alors :

- que la seule remise du bulletin de salaire ne suffit pas à caractériser l'existence d'un contrat de travail,

- qu'il est impossible de savoir qui a établi les bulletins de salaire de 1978 à 1989,

- que sur les bulletins de salaire établis de 1989 à 2003, [G] [F] n'a jamais cotisé à l'assurance chômage,

- que les gérants égalitaires ne peuvent cumuler un contrat de travail avec un mandat social,

- que le fait de cotiser au régime général de la sécurité sociale en vertu de l'article L 311-3 11° du code de la sécurité sociale, ne permet pas d'affirmer qu'elle était salariée.

Elle soutient encore que la mention de l'animation et de la promotion commerciale des clients sur le contrat conclu avec la société UGS, ne démontre en rien l'existence de fonctions techniques exercées dans le cadre d'un lien de subordination du temps de la société [H].

Elle observe que les derniers bulletins de salaire délivrés par la société UGS mentionnent une ancienneté au 7 février 2003 et dit ignorer les raisons pour lesquelles les 7 premiers bulletins de salaire délivrés pas la société UGS mentionnent une ancienneté de 26 ans, ce qui procède d'une simple erreur.

Elle ajoute qu'il est clairement indiqué sur le contrat de travail signé le 7 février 2003 entre la société UGS et [G] [F] que la salariée est 'engagée' et non que le contrat de travail est transféré  à la différence des contrats de travail des deux salariés de la société [H] qui ont été transférés et dont l'ancienneté a été prise en compte.

Elle indique que c'est par erreur qu'elle a établi les bulletins de salaire de [G] [F] d'avril 2005 à juin 2007 et conteste la force probante des attestations qu'elle produit.

2) Sur le licenciement, elle expose qu'elle a commencé de rencontrer de sérieuses difficultés en 2008 et qu'elle a été contrainte d'envisager la réduction de ses effectifs.

Elle invoque la réalité de ses difficultés économiques, au demeurant non contestées par la salariée.

Elle conteste avoir manqué à son obligation de reclassement en l'absence de possibilités de reclassement et soutient qu'elle n'appartient à aucun groupe et notamment pas au groupe Firopa.

Sur les critères d'ordre, elle explique les critères retenus et leur pondération et précise que 7 salariés entraient dans la catégorie professionnelle des cadres avec des anciennetés et des situations de famille diverses et fait valoir qu'elle a tenu compte de l'ensemble des critères.

[G] [F] conclut à la confirmation du jugement sur l'indemnité de préavis, l'indemnité de licenciement et sur les frais irrépétibles. Sollicitant son infirmation pour le surplus, elle réclame :

- 220,41 euros à titre de rappel de salaire sur le 13ème mois

- 98.687,28 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

1) Sur l'ancienneté, elle revendique une ancienneté de 32 ans et 11 mois, comme l'a justement retenu le conseil de Prud'hommes.

Après avoir rappelé les différentes fonctions qu'elle a exercées depuis 1977, (technico-commerciale, photograveur, directrice de production, directrice de clientèle), elle réplique que la preuve de la relation salariale est établie par les bulletins de salaire produits en original et établis de façon ininterrompue depuis 1977.

Elle relève que l'existence d'un contrat de travail apparent résulte de la délivrance de bulletins de salaire et soutient qu'une fois le contrat né, il ne peut être rompu que pour les motifs énoncés à l'article L 1231-1 du code du travail.

Elle ajoute que lorsqu'un salarié ne peut cumuler un contrat de travail avec un mandat social, le contrat de travail se trouve suspendu pendant le temps de l'exercice du mandat.

Elle indique que pendant les quelques mois où elle a assuré la gérance de la société [H], en remplacement de sa soeur malade (du mois de juin 2001 au mois de février 2003), elle a continué d'exercer ses fonctions techniques d'infographiste et directeur de clientèle et a donc cumulé contrat de travail et mandat social.

Elle soutient que le contrat n'est jamais présumé rompu, et que c'est à l'employeur qui conteste le maintien du contrat de travail d'établir qu'à compter de la désignation d'un salarié comme mandataire social, ses activités n'ont été que celles d'un mandataire social.

Elle fait valoir que les conditions du cumul étaient parfaitement remplies et conteste toute incidence de son court mandat social sur son ancienneté.

S'il devait être considéré que les conditions du cumul n'étaient pas remplies, elle soutient que le contrat de travail était simplement suspendu, la période de suspension devant être prise en compte dans son ancienneté ainsi que le prévoit la convention collective des imprimeries de labeur, selon laquelle l'ancienneté s'entend depuis le jour de l'entrée dans l'entreprise, peu important les périodes de suspension du contrat de travail.

Elle soutient que c'est avec une particulière mauvaise foi, que la société Vassel a modifié l'ancienneté figurant sur ses bulletins de salaire à compter du mois de juillet 2007 en effaçant l'ancienneté qu'elle avait acquise au sein de la société [H].

Elle soutient que l'on ne peut tenir aucun compte de la preuve que la société Vassel s'est constituée à elle-même en modifiant son ancienneté.

Elle relève que la transmission des contrats de travail est établie par les courriers qui lui ont été adressés à son domicile personnel en qualité de salariée.

Elle observe que les modifications successives concernant son ancienneté ne sauraient être attribuées à des fautes de frappe ou des maladresses, les logiciels de paie ne permettant pas de modifier involontairement une ancienneté.

Sur les cotisations aux Assedic, elle indique qu'elle ignore les raisons pour lesquelles l'expert-comptable ne l'a plus fait cotiser à compter de 1987, mais réplique qu'une telle erreur ne saurait remettre en cause sa qualité de salariée.

2) Sur le licenciement, elle invoque successivement l'absence de motif économique caractérisée par l'absence de tout élément sur la situation du groupe Firopa auquel la société Vassel dit appartenir.

Elle conteste également la réalité de la suppression de son poste en l'état de l'embauche en 2010 d'un salarié ayant une fiche de poste identique.

Elle invoque encore le non respect de l'obligation de reclassement faute de recherches de reclassement au sein du groupe Firopa.

Elle invoque enfin le non respect des critères d'ordre des licenciements au regard notamment de son ancienneté.

Sur son préjudice, elle expose qu'elle a perdu un emploi auquel elle avait consacré sa vie professionnelle, qu'elle ne connaît pas d'autre métier, qu'elle a été placée en invalidité depuis son licenciement et qu'elle a trois enfants à charge.

DISCUSSION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

1 - Sur l'ancienneté

Attendu que la société Vassel considère que l'ancienneté de [G] [F] remonte au mois de février 2003, date à laquelle elle a été embauchée en qualité de directeur de clientèle par la société UGS ;

qu'elle conteste toute acquisition d'ancienneté de 1977 à 2003 au sein de l'entreprise en nom personnel 'Imprimerie [C] [H]', puis au sein de la Sarl [H] immatriculée le 8 juin 1984 ;

Attendu que [G] [F] produit l'intégralité de ses bulletins de salaire de 1977 à 1984, sur lesquels elle apparaît comme technico-commercial, puis comme technico-commercial imprimeur, puis comme opérateur ;

Attendu que l'existence d'un contrat de travail apparent résulte de la délivrance de ces bulletins de salaire par un employeur exerçant son activité en nom personnel, de sorte que c'est à la société Vassel de rapporter la preuve du caractère fictif de ce contrat, ce qu'elle ne fait pas ;

Attendu qu'il convient donc de retenir que [G] [F] avait la qualité de salariée pendant toute la période où elle a travaillé pour le compte de l'entreprise en nom personnel [H] ;

Attendu qu'après le décès de [C] [H], sa veuve et ses deux filles [E] [D] et [G] [F] ont constitué le 8 juin 1984 la Sarl [H] ;

que la gérance de la société a dans un premier temps été exercée par Madame veuve [H], puis en cogérance par Madame veuve [H] et [E] [D] ;

Attendu que la cogérance a duré jusqu'au 24 septembre 2001, date à laquelle Madame veuve [H] et [E] [D] ont démissionné de leur mandat de cogérantes, [G] [F] étant alors nommé en qualité de gérante, ainsi qu'il résulte de l'extrait du registre du commerce et des sociétés versé aux débats (pièce intimée n° 7) ;

qu'elle a exercé ces fonctions jusqu'au 7 février 2003, date de la cession de l'entreprise à la société UGS ;

Attendu que contrairement à ce qu'affirme la société Vassel en page 13 de ses conclusions, le fait que de 1984 à 2001, [G] [F] ait été associée dans la Sarl [H], même de façon égalitaire avec sa soeur [E] [D], n'était nullement incompatible avec l'exercice d'un contrat de travail dans le cadre d'un lien de subordination ;

Attendu que tous les bulletins de salaire établis pendant cette période mentionnent un emploi de 'Imp.Tech.Photogravure' ;

Attendu que l'absence de cotisations aux Assedic à compter de 1989, ne suffit pas à exclure l'existence d'un contrat de travail alors que l'intimée n'était investie d'aucun mandat social ;

Attendu qu'en revanche, à compter du moment où elle a assuré la gérance de la société en raison de la maladie et de l'éloignement de sa soeur, [G] [F] a nécessairement occupé dans l'entreprise une position exclusive de tout lien de subordination, puisque de fait, elle ne se trouvait plus sous l'autorité d'un employeur qui avait le pouvoir de lui donner des directives et d'en contrôler l'exécution ;

qu'il est peu important à cet égard qu'elle ait continué d'exercer des fonctions techniques distinctes de ses responsabilités de gérante ;

Attendu qu'en l'absence de lien de subordination, critère essentiel du contrat de travail, [G] [F] n'est pas fondée à invoquer le cumul du contrat de travail avec le mandat social ;

qu'il en résulte que le contrat de travail qui n'avait pas été rompu s'est trouvé suspendu à compter du mois de septembre 2001 ;

Mais attendu que lorsque que [G] [F] n'a plus exercé de mandat social après la cession de l'entreprise, la suspension du contrat de travail a pris fin au mois de février 2003 ;

qu'ainsi, c'est bien par suite du transfert de son contrat de travail et non d'une embauche qu'elle est devenue salariée de la société UGS ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que [G] [F] justifie de l'existence d'un contrat de travail de 1977 à 2009 avec une période de suspension du mois de septembre 2001 au mois de février 2003 ;

Attendu que la convention collective nationale de travail du personnel des imprimeries de labeur dispose en son article 210 :

'Dans tous les cas où il est fait état de l'ancienneté dans l'entreprise, cette ancienneté s'entend depuis le jour de l'entrée dans l'entreprise (période d'essai ou de coup de main compris) sans que soient déductibles les périodes d'absence (maladie, accident, périodes militaires, etc.) qui n'ont pas pour effet de rompre le contrat de travail. Elle s'entend pour le total des périodes de présence dans l'entreprise à l'exception des périodes qui seraient d'une durée inférieure à 3 mois consécutifs.'

Attendu qu'il ressort de ces dispositions, que la période de suspension du contrat de travail de [G] [F] est sans incidence sur son ancienneté qui était bien de 32 ans et 8 mois à la date de la rupture du contrat de travail ;

qu'il n'est pas nécessaire de commenter les nombreuses modifications de l'ancienneté observées sur les bulletins de salaire et fort opportunément relevées par le conseil de prud'hommes ;

Attendu que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a fait droit aux demandes de [G] [F] au titre du rappel sur l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de préavis ;

Attendu qu'il sera également fait droit à sa demande au titre du rappel sur le 13ème mois non contesté ni dans son principe ni dans son montant ;

2 - Sur le licenciement

Attendu que dans la lettre de licenciement du 27 août 2009, la société Vassel explique qu'elle subit les conséquences de la crise mondiale et invoque la baisse de l'activité et du chiffre d'affaires, le résultat déficitaire du premier semestre 2009 et l'insuffisance des mesures prises depuis le début de l'année ;

qu'il y est invoqué l'impossibilité de reclassement en l'absence de poste disponible correspondant aux capacités de la salariée ;

Attendu que pour contester l'existence du motif économique de son licenciement, [G] [F] invoque au premier chef l'absence d'éléments sur la santé financière du groupe Firopa auquel appartient la société Vassel ;

Attendu qu'en réponse, la société Vassel réplique qu'elle n'appartient à aucun groupe, que son capital est exclusivement détenu par des personnes physiques et que si la société Firopa détient directement ou indirectement 20 sociétés, elle ne figure pas dans la liste ;

Attendu que cette affirmation non étayée par des documents fiables (la pièce 71 à laquelle elle se réfère est incomplète) est contredite par les pièces suivantes versées aux débats :

- la présentation du site Internet de la société Vassel qui se situe clairement au sein du groupe Firopa 'qui réalise des produits de communication',

- son dossier de presse dans lequel elle indique 'Vassel Graphique fait partie du groupe Firopa, 100 millions de chiffre d'affaires en 2005",

- un article de 2001 présentant la société Vassel comme la filiale locale du groupe Firopa,

- la liste des sociétés faisant partie du groupe, parmi lesquelles 'Vassel Graphique Grenoble', toutes ces sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activité,

- la page d'accueil du groupe Firopa et sa position nationale,

- les renseignements obtenus à partir des données collectées auprès des greffes selon lesquelles [R] [N] est le Président de la SAS Firopa (holding) et [M] [B] directeur général,

- une convocation à la réunion de la DUP signée par le président et adressée entre autres destinataires à [M] [B] et [X] [P], directeur général de la société Vassel ;

Attendu que l'appartenance de la société Vassel au groupe Firopa est amplement démontrée ;

Attendu qu'il est de jurisprudence constante que lorsque l'entreprise appartient à un groupe, les difficultés s'apprécient au niveau du groupe, dans la limite de son secteur d'activité ;

Attendu que [G] [F] observe à juste titre qu'aucun élément n'est produit sur la situation économique du groupe Firopa, de sorte que la réalité du motif économique invoqué pour justifier le licenciement, ne peut être vérifiée ;

Attendu pour ce seul motif, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'en l'état d'un groupe qui oeuvre sur le territoire national à travers 20 sociétés, c'est à bon droit que [G] [F] invoque surabondamment un manquement de la société Vassel à son obligation de reclassement ;

qu'il ressort en effet des termes mêmes de la lettre de licenciement, qu'aucune recherche de reclassement n'a été faite au sein du groupe Firopa qui compte pourtant quatre sociétés sur les départements du Rhône et de l'Isère ;

Attendu que le préjudice causé à [G] [F] par la perte de son emploi doit être apprécié non seulement au regard de son âge et de son ancienneté, mais aussi au regard de l'attitude déloyale qui a présidé à son départ ;

que cette attitude déloyale est caractérisée par la négation de sa véritable ancienneté qui s'est traduite par quatre modifications sur les bulletins de salaire établis par la société Vassel, qui a néanmoins considéré pendant de nombreux mois que l'ancienneté remontait à 1977

que son directeur général en a d'ailleurs attesté dans un document établi le 28 juillet 2006 ;

Attendu qu'un seul cadre commercial ayant été licencié au mois d'août 2009, [G] [F] serait restée dans l'entreprise si son ancienneté avait été loyalement la prise en compte ;

qu'il lui sera alloué la somme de 45.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Attendu qu'il y a lieu en application de l'article L 1235-4 du code du travail, d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par [G] [F] ;

qu'au vu des circonstances de la cause, le remboursement sera ordonné dans la limite de six mois ;

Attendu qu'il sera alloué à [G] [F] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Confirme le jugement rendu le 29 septembre 2011 par le conseil de prud'hommes de Grenoble en ses dispositions relatives au complément de l'indemnité de licenciement, au complément de l'indemnité de préavis, aux frais irrépétibles et aux dépens.

- Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau, dit que le licenciement de [G] [F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société Vassel à lui payer :

45.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

220,41 euros à titre de rappel sur le 13ème mois

2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

- Ordonne en application de l'article L 1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par [G] [F] dans la limite de six mois.

- Dit qu'à cette fin, une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée à Pôle Emploi Rhône-Alpes - service contentieux - [Adresse 4].

- Condamne la société Vassel aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame COMBES, président, et par Madame HAMON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/05313
Date de la décision : 31/10/2012

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°11/05313 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-31;11.05313 ?
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