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12/10/2011 | FRANCE | N°10/03043

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 12 octobre 2011, 10/03043


RG N° 10/03043



N° Minute :















































































































Notifié le :



Grosse délivrée le :











AU NOM DU

PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU MERCREDI 12 OCTOBRE 2011







Appel d'une décision (N° RG 09/00176)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN-JALLIEU

en date du 22 juin 2010

suivant déclaration d'appel du 01 Juillet 2010



APPELANT :



Monsieur [W] [U]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Adresse 8]



Représenté par Me Jacqueline PADEY-GOURJUX (avocat au barreau de LYON)



...

RG N° 10/03043

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU MERCREDI 12 OCTOBRE 2011

Appel d'une décision (N° RG 09/00176)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN-JALLIEU

en date du 22 juin 2010

suivant déclaration d'appel du 01 Juillet 2010

APPELANT :

Monsieur [W] [U]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

Représenté par Me Jacqueline PADEY-GOURJUX (avocat au barreau de LYON)

INTIMES :

Maître [I] [M] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la S.A.S. EZ TRANSFERT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Véronique MASSOT-PELLET (avocat au barreau de LYON)

AGS - CGEA D'[Localité 5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Jean FOLCO substitué par Me TOURRETTE (avocats au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Madame Astrid RAULY, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Septembre 2011,

Madame Hélène COMBES, chargée du rapport, en présence de Monsieur Daniel DELPEUCH, assistés de Melle Sophie ROCHARD, Greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 12 Octobre 2011, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 12 Octobre 2011.

RG 10/3043HC

EXPOSE DU LITIGE

La société Friga Bohn fabriquait sur les sites de [Localité 7] et [Localité 6] des matériels de réfrigération et de climatisation.

L'actionnariat a changé à plusieurs reprises ; ainsi l'entreprise a été rachetée en 1998 par la société LGL pour devenir Heatcraft, puis la production a été scindée et le site de [Localité 6] qui fabriquait des échangeurs et des produits chaudronnés, a été revendu en 2002 à la société Outokumpu.

Au mois de juin 2005, le site a été repris par la société Nordic Capital qui l'a fermé au mois de décembre 2006.

La société MCH (Mobile Comfort Holding) dont l'actionnaire unique est [E] [G] a acquis au mois de juillet 2006 le capital de la société qui a changé de nom pour devenir la société EZ Transfert et la production a redémarré au mois d'août 2006 avec 145 salariés.

La société MCH détient des participations majoritaires dans six sociétés dont la société EZ Transfert, la SAS Soprano Industry.

En 2006, un dispositif de départs volontaires a conduit au départ de 20 salariés.

Au mois de juillet 2008, le commissaire aux compte de la société EZ Transfert a déclenché la procédure d'alerte et une première procédure de licenciement économique collectif concernant 47 salariés a été mise en oeuvre, aboutissant au prononcé de 26 licenciements économiques au mois de novembre 2008 et au transfert de 21 salariés au sein de la SAS Soprano Industry à compter du 1er février 2009.

Le 19 décembre 2008, le tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu statuant en matière commerciale a ouvert sur déclaration de cessation des paiements, le redressement judiciaire de la société EZ Transfert.

Au cours de la période d'observation, le juge commissaire a par ordonnance du 6 février 2009 autorisé la société à procéder à 38 licenciements économiques (dont 29 ouvriers) sur 71 salariés.

C'est ainsi que [W] [U] a été licencié par courrier du 26 février 2009.

Après suppression de la compétence commerciale du tribunal de grande instance de Bourgoin-Jallieu, le tribunal de commerce de Vienne a le 25 mai 2009, arrêté le plan ce cession de la société EZ Transfert au profit de la société Paradise Holding qui s'est substitué une Sarl dénommée EZT.

Cette société immatriculée le 30 juin 2009, a été mise en liquidation judiciaire immédiate le 28 février 2011 (Maître [P] liquidateur) et le même jour, le tribunal de commerce a converti en liquidation judiciaire le redressement judiciaire de la société EZ Transfert, Maître [M] étant nommé liquidateur.

[W] [U] a contesté son licenciement devant le conseil de Prud'hommes de Bourgoin-Jallieu, qui par jugement du 22 juin 2010 l'a débouté de toutes ses demandes.

Ayant relevé appel le 1er juillet 2010, il demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse et de fixer sa créance au passif de la société EZ Transfert à la somme de 45.000 euros à titre de dommages-intérêts outre 4.543,06 euros au titre de l'indemnité de préavis outre les congés payés afférents.

Il sollicite subsidiairement la fixation de sa créance à 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect des critères d'ordre des licenciements.

Il réclame la condamnation de Maître [M] pris en sa qualité de liquidateur au paiement de la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

I - [W] [U] soutient à titre principal que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse

(1) Il invoque l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi

Après avoir rappelé qu'un plan de sauvegarde de l'emploi doit contenir un plan de reclassement comprenant des mesures précises et concrètes et doit satisfaire dès l'origine aux exigences de l'article L 1233-62 du code du travail, soit dès sa première présentation aux représentants du personnel, il expose qu'en l'espèce le plan de sauvegarde de l'emploi a fait l'objet d'un avis défavorable du comité d'entreprise à l'unanimité.

Il fait valoir qu'aucun poste de reclassement n'y figure et qu'aucun plan de reclassement n'a été établi, carence d'ailleurs reconnue par la société.

Après avoir relevé que la société EZ Transfert se borne à rappeler les obligations mises à sa charge, il note :

- l'inexistence des mesures destinées à éviter les licenciements,

- le caractère aléatoire et suspensif des mesures prises au titre du reclassement externe,

- l'absence de tout effort de formation et d'adaptation à l'évolution du marché de l'emploi.

(2 ) Il invoque également l'irrégularité de l'ordonnance du juge commissaire.

Il fait valoir sur ce point que l'ordonnance du 6 février 2009 ne respecte pas les exigences de l'article R 631-26 du code de commerce, en ce qu'elle opère une confusion entre emploi et catégorie professionnelle, de sorte qu'elle se trouve dépourvue d'effet.

Il relève qu'elle ne définit pas des catégories professionnelles comme l'exige le texte, mais des catégories sociales, ce qui ne veut rien dire au regard de la définition de la Cour de cassation selon laquelle appartiennent à une même catégorie professionnelle des salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature, supposant une formation professionnelle commune.

Il critique également la répartition des postes supprimés par services, alors qu'au sein d'un même service, plusieurs catégories professionnelles existent.

(3) Il conclut enfin au non respect de l'obligation de reclassement.

Il soutient sur ce point qu'aucun salarié n'a reçu la moindre proposition de reclassement et que la société EZ Transfert n'a entrepris aucune recherche effective de postes disponibles, s'attachant uniquement à créer une apparence de recherche de reclassement, sans même saisir la commission territoriale de l'emploi.

Il relève l'étroitesse des liens entre la société EZ Transfert et la société Soprano.

II - Il invoque subsidiairement le non respect des règles relatives à l'ordre des licenciements et dénonce une application subjective de ces règles.

Il observe que le cadre défini est trop large et trop vague et procède d'une confusion entre catégorie professionnelle et catégorie conventionnelle d'une part et entre catégorie professionnelle et emploi, d'autre part.

Il soutient que l'employeur a retenu des critères subjectifs (compétence stratégique / non stratégique, moins stratégique...) afin de pouvoir choisir les salariés à maintenir et ceux à licencier, attitude totalement contraire au but recherché par la réglementation.

Il dénonce une application opaque des critères et indique que les salariés n'ont jamais été informés des points qu'ils avaient obtenus.

Maître [M] liquidateur de la société EZ Transfert conclut à la confirmation du jugement et réclame 1.000 euros au titre des frais irrépétibles

I - Sur le plan de sauvegarde de l'emploi, il réfute les critiques du salarié et expose qu'il a notifié le plan de sauvegarde de l'emploi à la direction départementale du travail et de l'emploi qui n'a pas formulé la moindre observation sur son contenu.

Il rappelle que la société EZ Transfert venait juste de terminer un premier plan social et qu'il était impératif d'assurer la pérennité des autres activités du groupe.

Il invoque une situation urgente ne permettant pas de mettre en place les budgets de formation et les aides diverses ainsi que les mesures d'aménagement du temps de travail.

Sur la cellule de reclassement il réplique qu'elle a été mise en place et a permis de proposer trois offres valables d'emploi aux salariés intéressés et quatre offres aux salariés fragilisés, étant précisé que seuls 17 salariés ont adhéré à la cellule de reclassement.

II - Sur l'ordonnance du juge commissaire, il fait valoir qu'elle est conforme aux exigences légales, ni le code du travail, ni le code de commerce ne définissant la notion de catégorie professionnelle à laquelle l'ordonnance du juge commissaire doit faire référence.

Il soutient que l'ordonnance précise les activités et catégories professionnelles auxquelles appartiennent les salariés et fait référence aux catégories professionnelles de la convention collective.

III - Sur l'obligation de reclassement, il soutient que l'employeur y a satisfait en recherchant toutes les possibilités dans la société et précise qu'aucun emploi n'était disponible dans les autres sociétés du groupe.

Il observe que l'absence de proposition de reclassement n'est pas consécutive à une absence de recherche de solution au sein du groupe, mais indique que toutes les possibilités de reclassement ont été épuisées lors du précédent plan de restructuration.

IV - Sur les catégories professionnelles retenues et les critères d'ordre, il réplique que les catégories retenues correspondent bien à la définition qu'en donne la Cour de cassation et ajoute que la jurisprudence semble privilégier les catégories définies par la convention collective.

Il conteste toute application subjective des critères d'ordre et indique que les propos rapportés ont été sortis de leur contexte, l'employeur souhaitant uniquement dans le cadre de la seconde restructuration, privilégier les compétences considérées comme nécessaires.

Il ajoute que l'employeur peut parfaitement tenir compte des aptitudes professionnelles pour conserver les salariés les plus aptes et soutient que les points ont été attribués sur la base d'éléments objectifs.

Il conteste toute opacité, rappelle que par courrier du 17 mars 2009, la société a adressé à [W] [U] les éléments pris en compte pour l'application des critères d'ordre, ainsi qu'une copie de la version définitive du plan de sauvegarde de l'emploi et relève que le salarié n'a jamais contesté le nombre de points qui lui a été attribué.

Subsidiairement, s'il était fait droit à la demande de dommages-intérêts, il sollicite la minoration des sommes qui pourraient être allouées.

L'AGS qui s'associe à l'argumentation du liquidateur, conclut à la confirmation du jugement.

DISCUSSION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Sur le plan de sauvegarde de l'emploi

Attendu que le salarié dénonce l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi présenté le 22 janvier 2009 au comité d'entreprise qui comporte les mesures suivantes :

Partie 1 :

- reclassement envisageable dans le groupe : 0

- appel au volontariat, faculté offerte dans la limite des 38 emplois dont la suppression est envisagée,

- cabinet de reclassement dont l'intervention ne sera effective que si son coût est pris en charge par la direction départementale du travail et de l'emploi

- cellule de reclassement dont la mise en place est conditionnée par la prise en charge de son coût par la direction départementale du travail et de l'emploi.

Partie 2 :

- reclassement externe au moyen d'une cellule de reclassement

Partie 3 :

- mesures destinées à favoriser le reclassement des salariés fragilisés

Partie 4 :

- Commission de suivi (...)

Attendu que l'article L 1233-61 du code du travail dispose que le plan de sauvegarde de l'emploi a pour objet d'éviter les licenciements ou d'en limiter le nombre ;

qu'il doit intégrer un plan de reclassement dont les mesures sont énumérées de façon non exhaustive à l'article L 1233-62 du code du travail ;

Attendu que selon l'article L 1235-10 du code du travail, la validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe ;

que c'est donc en considération d'éléments concrets et non sur la base d'un raisonnement in abstracto, qu'il convient de rechercher si les mesures prévues dans le plan sont proportionnées aux moyens dont dispose l'entreprise ou le groupe ;

Attendu qu'il ressort des explications fournies par les parties que la société EZ Transfert a repris l'exploitation du site de [Localité 6] au mois d'août 2006, après une fermeture de huit mois ;

que le document soumis au comité d'entreprise le 22 janvier 2009 expose en page 13 les contraintes du redémarrage, telles que : générer rapidement du chiffre d'affaires, redevenir visible en tant que fournisseur, rétablir les contacts avec les clients ;

Attendu qu'un dispositif de départs volontaires a conduit au départ de 20 salariés courant 2006 ;

Attendu que les exercices 2006 et 2007 ont été gravement déficitaires (pièce 1c), le commissaire aux comptes évoquant même fin 2007 une incertitude sur la continuité d'exploitation ;

Attendu que le 24 juillet 2008 le commissaire aux comptes a déclenché la procédure d'alerte, la date du 24 juillet 2008 ayant ensuite été retenue par le tribunal de Bourgoin-Jallieu comme date de cessation des paiements, ainsi qu'il résulte du jugement d'ouverture du 19 décembre 2008 ;

Attendu qu'avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, la société EZ Transfert a engagé une procédure de licenciements collectifs concernant 47 salariés sur un effectif de 118 ;

que dans le cadre de cette procédure, 26 licenciements économiques ont été notifiés, 21 salariés étant transférés à la société Soprano Industry ;

Attendu que la société EZ Transfert appartient en effet à un groupe de huit sociétés dont certaines qui fonctionnent sous forme de Sarl emploient peu de salariés ainsi qu'il résulte des registres du personnel (MCH : 6 salariés, EZ Comfort Industry : 5 salariés, Eco Comfort : 1 salarié, Idtherm 1 salarié, Mobile Comfort : 11 salariés) ;

Attendu que le liquidateur produit également les extraits K.bis de deux autres sociétés, la SAS Soprano, immatriculée en 1998, et la SAS Soprano Industry, créée en 2004, qui ont toutes les deux leur siège social [Adresse 2] et déclarent la même activité (construction d'équipements pour matériel ferroviaire roulant, systèmes de conditionnement d'air, automatismes, convertisseurs d'énergie pour applications industrielles) ;

Attendu que selon les 'fiches entreprise' produites aux débats, la société Soprano avait un résultat déficitaire de 582.000 euros au 31 décembre 2008 et la SAS Soprano Industry, qui déclare 145 salariés, un résultat de 50.000 euros pour un chiffre d'affaires de 22.185.288 euros ;

Attendu que toutes les autres sociétés du groupe étaient déficitaires au 31 décembre 2008 ;

Attendu qu'il est fait état dans le jugement du 25 mai 2009 arrêtant le plan de cession, d'un rapport de l'administrateur judiciaire en date du 14 avril 2009, qui exclut toute sortie du redressement judiciaire par un plan de continuation ;

Attendu qu'en l'état de ces éléments, il ne peut être reproché au plan de sauvegarde de l'emploi l'absence des mesures destinées à éviter les licenciements, alors que dans le cadre de la procédure de licenciements collectifs qui venait de se terminer, 21 reclassements avaient été opérés au sein de la société Soprano, dont les résultats témoignent qu'elle avait épuisé ses possibilités d'intégration de salariés ;

Attendu qu'il n'est pas discuté que la société EZ Transfert n'a consacré aucun budget à la formation, à la cellule de reclassement et n'a pas financé le plan de sauvegarde de l'emploi ;

Mais attendu que sa situation ne lui permettait pas de le faire, ce qu'a d'ailleurs admis la direction départementale du travail et de l'emploi, qui dans une convention de cellule de reclassement a exonéré la société EZ Transfert de sa participation employeur compte tenu de sa situation financière ;

Attendu que [W] [U] ne peut être suivi en son argumentation lorsqu'il invoque l'inadéquation du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi aux moyens du groupe ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur l'ordonnance juge commissaire

Attendu que l'article L 631-17 du code de commerce dispose que l'administrateur judiciaire peut être autorisé par le juge commissaire à procéder pendant la période d'observation aux licenciements économiques qui présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable ;

que selon l'article R 631-26 du même code, l'ordonnance du juge commissaire indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées ;

Attendu que le rôle du juge commissaire étant de vérifier le caractère urgent, inévitable et indispensable de chaque licenciement, il doit être en mesure de se prononcer sur les emplois à supprimer au regard des différentes activités et catégories professionnelles existant dans l'entreprise, cette dernière notion s'entendant des salariés qui exercent des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ;

Attendu qu'en l'espèce l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 6 février 2009 autorise le licenciement économique de 38 salariés dont : 1 cadre, 6 salariés article 36 (Etam), 29 ouvriers et 2 employés ;

qu'elle précise ensuite les services concernés : achat approvisionnement (1 salarié), commercial, (3 salariés) production (31 salariés) et maintenance (3 suppressions), sans qu'il soit cependant possible de déterminer dans quels services sont localisés le cadre, les articles 36, les ouvriers et les employés ;

Attendu que s'agissant du licenciement des 29 ouvriers, si l'on suppose que la majorité d'entre eux sont affectés au service production, il convient de noter qu'aucune précision n'est apportée sur la catégorie d'emploi à laquelle ils appartiennent, étant observé que travaillent sur le site des régleurs, des soudeurs, des tourneurs, des agents de finition, des mécaniciens électricité, des braseuses, des cisailleurs, des sableurs, des monteurs sertisseurs....autant de fonctions qui ne supposent pas nécessairement une formation professionnelle commune ;

Attendu que les regroupements opérés par le juge commissaire sont trop imprécis pour qu'un contrôle de la stricte nécessité des licenciements soit effectué ;

Attendu que la requête présentée par l'administrateur judiciaire présente les mêmes lacunes puisqu'elle ne précise pas la nature des emplois supprimés au sein de chaque service ;

Attendu que la rédaction de l'ordonnance laisse ainsi à l'employeur le libre choix des salariés à licencier ;

qu'il est en effet impossible de déterminer au stade de la décision du juge commissaire quels emplois seront finalement supprimés, la société EZ Transfert ayant par la suite, seulement, opéré une hiérarchie entre les compétences stratégiques, non stratégiques et moins stratégiques ;

Attendu que [W] [U] est bien fondé à soutenir que l'ordonnance du juge commissaire est irrégulière et qu'elle se trouve privée d'effet, de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Attendu que sur la base d'un salaire moyen de 2.605 euros (cumul 2008 sur le bulletin de salaire du mois de décembre 2008), il lui sera alloué la somme de 15.700 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L 1235-3 du code du travail ;

Attendu que [W] [U] qui n'a pas perçu l'indemnité de préavis en raison de son acceptation de la convention de reclassement personnalisé, sollicite à juste titre l'attribution de cette indemnité sous déduction de la somme de 992,52 euros qu'il reconnaît avoir perçue ;

qu'il sera donc fait droit à sa demande de ce chef à hauteur de la somme de : (2.605 x2) 5.210 euros - 992,52 euros = 4.217 euros outre 421,70 euros au titre des congés payés afférents ;

Attendu que Maître [M] es qualité sera condamné à lui payer la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement rendu le 22 juin 2010 par le conseil de Prud'hommes de Bourgoin-Jallieu en ce qu'il a dit le licenciement de [W] [U] fondé sur une cause réelle et sérieuse.

- Statuant à nouveau, dit que le licenciement de [W] [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- Fixe en conséquence sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société EZ Transfert aux sommes suivantes :

15.700 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

4.217 euros au titre de l'indemnité de préavis outre 421,70 euros au titre des congés payés afférents

- Dit que le présent arrêt est opposable à l'AGS représentée par le CGEA d'[Localité 5] et qu'elle doit sa garantie dans les conditions définies par L 3253-8 du code du travail dans la limite des plafonds légaux.

- Dit que son obligation de faire l'avance des sommes allouées à [W] [U] ne pourra s'exécuter que sur justification par le mandataire judiciaire de l'absence de fonds disponibles pour procéder à leur paiement.

- Dit qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée à Pôle Emploi [Localité 9] - service contentieux - [Adresse 4].

- Condamne Maître [M] es qualité à lui payer la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.

- Condamne Maître [M] es qualité aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame ROCHARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/03043
Date de la décision : 12/10/2011

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-12;10.03043 ?
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