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06/10/2011 | FRANCE | N°10/02779

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 06 octobre 2011, 10/02779


RG N° 10/02779



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU JEUDI 06 OCTOBRE 2011







Appel d'une décision (N° RG 05/03433

)

rendue par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

en date du 29 mai 2007

suivant déclaration d'appel du 11 Juin 2010

arrêt de la cour de la cassation du 5 mai 2010



APPELANTE :



La S.A. SITA MOS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par ...

RG N° 10/02779

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 06 OCTOBRE 2011

Appel d'une décision (N° RG 05/03433)

rendue par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON

en date du 29 mai 2007

suivant déclaration d'appel du 11 Juin 2010

arrêt de la cour de la cassation du 5 mai 2010

APPELANTE :

La S.A. SITA MOS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Dominique PEROL (avocat au barreau de LYON)

INTIME :

Monsieur [F] [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Isabelle DAVID substituée par Me GAYET (avocats au barreau de LYON)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de Président,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Septembre 2011,

Monsieur Bernard VIGNY, chargé du rapport, en présence de Madame Hélène COMBES, assisté de Melle Sophie ROCHARD, Greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Notifié le :

Grosse délivrée le :

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 06 Octobre 2011, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 06 Octobre 2011.

RG 10/2779BV

M. [K] a été embauché par la société MOS devenue SITA MOS, le 28 mai 2001, en qualité d'assistant de gestion. Le 1er mars 2003, il a été promu aux fonctions de responsable du service de gestion, statut cadre.

Le premier août 2005, M. [K] a reçu un courrier émanant de M. [X], responsable de l'agence de [Localité 5], ainsi rédigé :

... « Il n'est plus possible que nous travaillions ensemble pour une raison de perte de confiance dans la qualité de votre travail. En effet, force est de constater que vous n'avez pas, ces derniers mois en particulier, assuré votre mission régalienne d'alerte par rapport à des incohérences dans les documents de gestion et reporting, et de fiabilité de leur qualité... J'ai noté récemment quatre absences injustifiées ou non programmées et non régularisées à ce jour : 28 juin 2005 après-midi, 29 juin 2005, 1er juillet 2005 et 21 juillet 2005..... Enfin vous n'avez pas souhaité que l'entretien de développement se déroule et vous n'avez pas planifié vos congés d'été..... Ces derniers points constituent une faute et dénotent un comportement inacceptable avec votre fonction et statut. C'est pourquoi il est indispensable que vous quittiez rapidement l'agence [Localité 5] industrie, d'autant que des échéances capitales arrivent dans les semaines à venir... qui demandent un pilotage administratif par une personne de confiance et motivée. Nous reprendrons contact rapidement avec le directeur des ressources humaines afin de définir les modalités pratiques de ce départ ».

Par lettre du 16 août 2005, M. [K] a contesté les griefs énoncés dans la lettre du premier août 2005 dans les termes suivants :

« Enfin et à titre principal, après l'échec des diverses tentatives de mutation au sein du groupe j'ai bien pris note de la conclusion de votre lettre du premier août courant par laquelle vous me donnez acte, dès ce jour, de la rupture de mon contrat de travail au sein de l'agence de [Localité 5] et, par voie de conséquence, au sein de la société SITA MOS. Je ne peux accepter une telle mesure qui, vous le savez, n'est justifiée que par le mépris constant que vous avez toujours su adopter à mon égard. Quels que soient les motifs de complaisance que vous trouverez à l'appui de la rupture de mon contrat, je vous indique, dès à présent, saisir la juridiction compétente d'une contestation de mon licenciement »

Par lettre du 18 octobre 2005, l'employeur de M. [K] lui a notifié son licenciement pour insubordination résultant de son refus de prendre son poste au siège social le 15 septembre 2005.

Le conseil des prud'hommes de Lyon, saisi par M. [K], par jugement en date du 29 mai 2007, a :

- dit le licenciement de M. [K] sans cause réelle et sérieuse

- condamné la société SITA MOS à payer à M. [K] les sommes suivantes

30'000 € à titre de dommages-intérêts

9708 € au titre du préavis, outre les congés payés afférents

2265,20 € au titre de la mise à pied, outre les congés payés afférents

3339 55 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

1500 € en application de l'articles 700 du CPC.

X

Par arrêt en date du 4 novembre 2008, la cour d'appel de Lyon a :

- infirmé le jugement en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et alloué différentes sommes à ce titre,

- fixé la date de la rupture du contrat de travail au 16 août 2005

- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M. [K] produisait les effets d'une démission

- confirmé le jugement en ce qui concerne l'indemnité de préavis les congés payés afférents.

X

La Cour de Cassation, par arrêt en date du 5 mai 2010 a cassé cet arrêt et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Grenoble.

La Cour de Cassation a jugé que la cour d'appel de Lyon avait modifié l'objet du litige, dès lors qu'aucune des parties ne soutenait que le salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail.

M. [K] demande de dire que la lettre du premier août 2005 doit être analysée comme une lettre de rupture constitutive d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il sollicite :

- 80'000 € à titre de dommages-intérêts pour la rupture

- 9708 € au titre du préavis, outre les congés payés afférents

- 3339,55 € au titre de l'indemnité de licenciement

- 2265,20 € au titre du salaire de la mise à pied, outre les congés payés afférents

- 15'000 € à titre de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

- 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement, il demande de dire que sa lettre du 16 août 2005 n'est pas une prise d'acte de la rupture,et plus subsidiairement, il demande de dire que la mutation a un caractère disciplinaire.

Il sollicite les mêmes sommes, à l'exception du montant des dommages-intérêts, pour licenciement abusif : 30'000 €.

Il expose que :

-son employeur a mis fin à son contrat de façon irrégulière (absence de procédure)

- les griefs- au surplus- ne sont pas fondés : la perte de confiance n'est pas, en soi, une cause réelle et sérieuse de licenciement ; l'insuffisance professionnelle ne peut être considérée comme fautive.

Il n'a jamais fait l'objet de reproches, il s'est toujours vu reconnaître ses qualités professionnelles (voir les entretiens annuels).

Les problèmes sont apparus lors de l'arrivée de M. [X] à la tête de l'agence lyonnaise. Celui-ci a fait « craquer » de nombreux collaborateurs.

Les absences reprochées ne sont pas injustifiées, il s'agissait de congés.

- la lettre du premier août 2005 n'est pas une lettre par laquelle M. [X] lui demandait de se mettre en relation avec M. [H] pour définir les modalités de sa venue au siège. Jamais, avant la réunion du 25 août 2005 avec ce dernier, la mutation au siège n'a été évoquée. Les rencontres alléguées par la société, pour envisager la mutation, n'ont pu avoir lieu, dès lors qu'il était lui-même en congé (11 juillet et 13 juillet 2005). Cette question n'a été abordée que le 25 août 2005.

-à titre subsidiaire, sur la prise d'acte, la Cour de Cassation l'a écartée. Il n'a jamais eu cette intention.

- sur le licenciement : la mutation était arbitraire ; il n'y avait pas de clause de mobilité valable la mutation avait un caractère disciplinaire (au surplus, il aurait été sous les ordres de M. [G], avec lequel il avait eu des relations conflictuelles par le passé).

-il n'a retrouvé un emploi stable qu'en 2009. Celui-ci est moins bien rémunéré.

==

La société SITA MOS demande à la cour de :

- dire que la lettre adressée le premier août 2005 à M. [K] ne peut constituer une lettre de licenciement

- dire que la lettre du 16 août 2005 adressée par M. [K] est une prise d'acte de la rupture et constitue une démission

- débouter en conséquence M. [K] de toutes ses demandes.

A titre subsidiaire, si la cour considérait que la lettre du 16 août 2005 ne constituait pas une démission, elle lui demande de débouter M. [K] de ses réclamations, en reconnaissant fondé le licenciement pour faute grave en date du 18 octobre 2005.

Très subsidiairement, elle demande, si le licenciement de M. [K] était reconnu fondé sur une cause réelle et sérieuse, de le débouter de toutes ses réclamations.

Elle sollicite la mainlevée de la somme de 31'000 € qui a été séquestrée.

Elle demande la condamnation de M. [K] à lui payer 4000 € en application de l'article 700 du CPC.

Elle fait valoir que :

- sur la lettre du premier août 2005 : cette lettre n'est en aucun cas une lettre de licenciement.

M. [K] était parfaitement informé préalablement à cette lettre, du transfert au mois de septembre 2005 de son poste de travail de l'agence de [Localité 5] industrie située à [Localité 7] au siège de la société, située [Adresse 1]. Il a été reçu pour cette raison par le directeur des ressources humaines, M.[H], le 11 juillet 2005. Cette rencontre est attestée par Mme [L]. La lettre du premier août 2005 ne faisait que confirmer à M. [K] qu'il changeait d'agence. Cette lettre ne fait nullement allusion à une quelconque rupture du contrat de travail. Elle n'est pas non plus une mutation disciplinaire. La mutation était parfaitement loyale.

- sur la prise d'acte de la rupture par M. [K] : celle-ci produit les effets d'une démission. M. [K] ne caractérise aucune faute à l'encontre de son employeur. Si la lettre du premier août 2005 devait être considérée comme constituant une mutation disciplinaire, la mutation n'était pas encore effective et M. [K] pouvait encore s'y opposer, sans pour autant être fondé à prendre acte de la rupture du contrat de travail.

- sur la légitimité du licenciement pour faute grave : M. [K] a persisté à se rendre à l'agence de [Localité 5] Industries alors qu'il devait rejoindre celle de la [Adresse 6].

MOTIFS DE L'ARRET.

La lettre du premier août 2005 adressée par M. [X] à M. [K], dont les termes ont été ci-dessus rappelés ne constituent pas une lettre de licenciement. En effet, cette lettre, qui n'a été précédée d'aucun entretien préalable, ne mentionne en aucune manière que le contrat de travail de M. [K] est rompu et ne mentionne aucune date à partir de laquelle prendrait effet cette rupture. Cette correspondance, faisant le constat de l'impossibilité de la poursuite du travail de M. [K] au sein de l'agence [Localité 5] Industries, demande à M. [K] de quitter ce lieu de travail pour un autre à définir, et lui indique que contact sera pris avec le directeur des ressources humaines afin de définir les modalités pratiques de ce départ.

Seul le départ de M. [K] pour un autre poste était envisagé dans cette lettre. Celle-ci doit s'analyser en une lettre de mutation, le poste devant être précisé ultérieurement.

La lettre du 16 août 2005, dont les termes ont été également reproduits ci-dessus, n'est pas une lettre de prise de date de la rupture du contrat de travail de M. [K]. Ce dernier, en effet contestait la décision de son employeur exprimée dans la correspondance du premier août 2005, dans les termes suivants : « enfin et, à titre principal, après l'échec des diverses tentatives de mutation au sein du groupe, j'ai bien pris note de la conclusion de votre lettre du premier août courant par laquelle vous me donnez acte, dès ce jour, de la rupture de mon contrat de travail au sein de l'agence de [Localité 5] et, par voie de conséquence, au sein de la société SITA MOSS. Je ne peux accepter une telle mesure... »

Dans cette correspondance, M. [K] relevait que son contrat de travail avait été rompu et n'avait, en conséquence, aucun motif de « prendre acte » de la rupture dudit contrat. Dans cette lettre, il n'emploie aucun terme tel que : « prise d'acte, rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur », ni n'emploie de termes explicites équivalents, ni ne sollicite la délivrance des documents de fin de contrat de travail ni ne forme de demandes particulières liées à la rupture.

Si M. [K] avait entendu attacher à la lettre du 16 août 2005 les effets d'une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, il n'aurait pas, dans la lettre adressée à ce dernier le 25 août 2005, mentionné que son préavis devait prendre fin le 30 octobre 2005, soit trois mois après le premier août 2005. De la même manière, si M. [K] avait entendu attacher à sa lettre les effets d'une prise d'acte, son Conseil n'aurait pas adressé à son employeur, le 30 août 2005, un courrier l' informant de la saisine du conseil des prud'hommes en contestation de la « rupture abusive du contrat de travail par lettre recommandée avec accusé de réception du premier août 2005 ».

La lettre du 01 août 2005, par laquelle l'employeur de M. [K] lui demande de quitter l'agence [Localité 5] Industries, n'est pas une lettre de rupture du contrat de travail mais est une lettre de mutation disciplinaire. Cette lettre fait état des motifs pour lesquels la mutation de M. [K] est rendue nécessaire : perte de confiance dans la qualité de son travail, non exécution de sa mission régalienne d'alerte par rapport à des incohérences dans les documents de gestion et reporting, et de fiabilité de leur qualité, absences injustifiées ou non programmées et non régularisées, refus de la tenue de l'entretien de développement, faits que la société SITA MOSS qualifie de « faute » et de « comportement inacceptable ».

Les termes employés dans la lettre du premier août 2005 ne permettent pas de douter de la volonté de l'employeur de M. [K]. Les termes employés ne sont pas ceux utilisés lorsqu'un employeur informe un de ses salariés de sa décision de mettre en oeuvre une clause de mobilité.

Dans ces conditions, il importe peu de rechercher si le départ de M. [K] pour une autre agence avait été antérieurement envisagé, eu égard à la nature dudit « départ ».

Contrairement à ce que soutient la société SITA MOSS , la mutation de M. [K] n'est pas résultée d'une décision loyale et légitime de sa part. Elle ne s'est pas inscrite pas dans le contexte normal de la mobilité des salariés au sein de la société SITA MOSS , notamment dans la région lyonnaise, mobilité rendue nécessaire par l'évolution de ses activités.

La société SITA MOSS qui a procédé à la mutation disciplinaire de M. [K] n'a pas mis en oeuvre la procédure qu'elle devait suivre en pareille circonstance.

La société SITA MOSS ne produit au débat aucun élément susceptible de caractériser les griefs mentionnés dans la lettre de mutation du premier août 2005.

Le licenciement de M. [K], notifié par la lettre de son employeur du 18 octobre 2005, pour avoir refusé de rejoindre sa nouvelle affectation, est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Les sommes allouées par le conseil des prud'hommes de Lyon au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, du rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire ainsi que des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement ayant été exactement calculées, seront confirmées.

La somme allouée par le conseil des prud'hommes au titre de la rupture a été exactement déterminée, eu égard à l'ancienneté de M. [K] (quatre années) et eu égard à ses difficultés pour retrouver un emploi stable.

En ce qui concerne la demande de M. [K] au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, cette demande doit être rejetée, l'intéressé n'établissant pas la réalité des griefs imputés à son employeur.

L'équité commande de la condamnation de la société SITA MOSS à payer à M [K] la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi.

Confirme le jugement du conseil des prud'hommes de Lyon en date du 29 mai 2007 en toutes ses dispositions.

Condamne la société SITA MOSS à payer à M. [K] la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel.

Déboute M. [K] de tout autre demande.

Condamne la société SITA MOSS aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. VIGNY, président, et par Mlle ROCHARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02779
Date de la décision : 06/10/2011

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°10/02779 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-06;10.02779 ?
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