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10/01/2011 | FRANCE | N°10/00694

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 10 janvier 2011, 10/00694


RG N° 10/00694



N° Minute :



























































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU LUNDI 10 JANVIER 2011







Appel d'une dé

cision (N° RG F08/00121)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTELIMAR

en date du 01 février 2010

suivant déclaration d'appel du 12 Février 2010





APPELANT :



Monsieur [P] [L]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Comparant et assisté par Me Dominique FLEURIOT (avocat au barreau de VALENCE)



INTIMEE :



La S.A. ETABLISSEMENT [Y] [O], prise en la personne de son rep...

RG N° 10/00694

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU LUNDI 10 JANVIER 2011

Appel d'une décision (N° RG F08/00121)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTELIMAR

en date du 01 février 2010

suivant déclaration d'appel du 12 Février 2010

APPELANT :

Monsieur [P] [L]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Comparant et assisté par Me Dominique FLEURIOT (avocat au barreau de VALENCE)

INTIMEE :

La S.A. ETABLISSEMENT [Y] [O], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre-yves FORSTER (avocat au barreau de VALENCE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 29 Novembre 2010,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 10 Janvier 2011.

L'arrêt a été rendu le 10 Janvier 2011.

Notifié le :

Grosse délivrée le :

RG 1000694 DD

M. [P] [L] a été embauché en 1982 par la société [O] en qualité de comptable. En 1990 il est devenu directeur administratif et financier (DAF) et il a été nommé au directoire de la société en 1996 tout en conservant son contrat de travail.

M. [L] a démissionné du directoire le 16 janvier 2008.

M. [L] a eu connaissance le 21 février 2008 d'une lettre du 5 décembre 2007 émanant de 7 directions d'agence et du personnel de ces agences dont il connaissait l'existence mais non le contenu qui le mettait, ainsi que les autres directeurs gravement en cause, une copie cette lettre lui ayant été remise par M. [K] [O] le 27 février. Cette lettre avait été adressée par le même à son fils, M. [W] [O], président du directoire, le 6 février 2008.

Sa situation étant devenue intenable, M. [L] a adressé sa démission le 3 mars 2008, faisant valoir d'une part la mise en cause de ses diligences et d'autre part l'absence de défense par M. [W] [O] qui lui disait avoir mis ces courriers sous le coude, ce qui laissait penser qu'il partageait l'opinion de son père et des directeurs d'agence et ce qui le mettait dans l'impossibilité d'assumer ses fonctions.

Le Conseil de Prud'hommes de Montélimar a été saisi le 28 avril 2008 par M. [L] qui a demandé que la démission produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de la société [O] à lui payer les sommes suivantes :

- 250 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- 110 843 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a rendu sa décision le 1er février 2010. Il a constaté la validité de la démission de M. [L], le déboutant de toutes ses demandes et le condamnant à payer à la société [O] la somme de 100 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens.

La Cour est saisie par l'appel interjeté le 12/02/2010 par M. [L], le jugement lui ayant été notifié le 06/02/2010.

Demandes et moyens des parties

M. [L], appelant, demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de juger que la rupture du contrat de travail est imputable à faute à l'employeur et en conséquence de condamner la société Ets [Y] [O] à lui payer les sommes suivantes :

- 250 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- 110 843 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Et à payer les dépens.

M. [L] expose par conclusions régulièrement communiquées, déposées et développées oralement à l'audience que :

Après avoir rappelé qu'il était dans l'entreprise depuis 26 ans au moment de la rupture et qu'en septembre 2007, alors que la cession de la société [O] était envisagée, une convention d'intéressement en cas de vente à un tiers lui a été consentie dans les termes suivants :

«M. [P] [L] et M. [S] [V] ont, par leur énergie, leurs compétences et leur dévouement, 'uvré au développement au groupe [O].

Les diligences et efforts mis en 'uvre ont notablement excédé les simples obligations inhérentes à leur contrat de travail. »

1) début 2008, alors que la situation financière était devenue délicate sans être catastrophique, il s'est inquiété à plusieurs reprises de cette situation en raison d'un découvert important garanti par un portefeuille de titre, découvert qu'il convenait d'apurer en vendant tout ou partie des titres au lieu de payer des agios, sans être entendu,

1-2) le 14 janvier 2008, il s'est vu mis en accusation par M. [K] [O], président du conseil de surveillance, lors d'un déplacement de celui-ci à [Localité 4], devant d'autres salariés de la société dont M. [R] qui a attesté des propos tenus par M. [K] [O], lequel lui a reproché des « fautes dans la communication des résultats du groupe et s'est interrogé sur sa réaction timide et tardive au vu des mauvais résultats en registrés »,

1-3) cette attitude est anormale dans la mesure où il a alerté les administrateurs depuis des mois sur la situation de la société, la nécessité de procéder à une réorganisation des objectifs et des méthodes et celle de mettre fin à la coexistence d'un important découvert et d'un important portefeuille titres, ce à quoi M. [K] [O] s'était opposé,

1-4) il a démissionné du directoire le 16 janvier 2008 en raison de la situation financière aberrante et suicidaire et de sa mise en cause par M. [K] [O],

2) a- le 21 février il a connaissance du courrier des chefs d'agence du 5 décembre 2007 le mettant en cause sans que le président du directoire ne réagisse, et

b- le 27 février 2008, M. [K] [O] lui a adressé copie de la lettre qu'il a envoyée à M. [W] [O], président du directoire, lettre qui reprend celle des directeurs d'agence et est une charge vigoureuse contre lui

c- lettre dont il a accusé réception le 28 février tout en demandant la copie des courriers d'alerte écrits par M. [K] [O] de 2004 à 2007, sans obtenir de réponse,

2-2) déstabilisé par les attaques de M. [K] [O] et sans aucun soutien de M. [W] [O] qui lui a oralement répondu qu'il avait mis la lettre des directeurs sous le coude indiquant qu'il s'agissait d'une « bombe », il a eu la surprise de voir arriver le 29 février un contrôleur de gestion externe qui devait réaliser un audit des comptes,

2-3) sa situation étant devenue intenable, M. [L] a démissionné le 3 mars 2008 en expliquant les motifs de cette démission et ses griefs,

2-4) une réponse de M. [W] [O] lui a été adressée le 5 mars, confirmant la défiance de ses employeurs vis-à-vis de M. [L],

3) en ne soutenant pas un cadre qui a toujours loyalement exécuté les instructions de l'employeur et respecté la ligne politique de l'entreprise, la société [O] a manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat de travail,

4) les explications de la société [O] ne résistent pas à l'analyse.

La société Ets [Y] [O], intimée, demande à la cour de confirmer le jugement rendu, de débouter M. [L] de ses demandes et de le condamner à payer à la société Ets [Y] [O] la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, de le condamner aux dépens.

La société Ets [Y] [O] expose par conclusions régulièrement communiquées, déposées, et développées oralement à l'audience que :

1) les griefs invoqués par M. [L] ne résistent pas à l'analyse,

1-2) M. [K] [O] n'a aucun pouvoir hiérarchique vis-à-vis de M. [L] et celui-ci n'a pas de comptes à lui rendre, seul M. [W] [O] ayant été destinataire de ses inquiétudes sur la situation financière,

1-3) la lettre des directeurs d'agence n'est que l'expression de leur droit d'expression, et elle n'a pas été diffusée au sein de l'entreprise, et c'est M. [L] qui, en ayant finalement pris connaissance qui lui a donné une large publicité au sein de l'entreprise,

1-4) son employeur n'était tenu à aucune obligation vis-à-vis de M. [L] auquel il a gardé sa confiance,

1-5) la meilleure preuve en est que M. [L] a été augmenté en janvier 2008 après son retrait du directoire, et il a perçu 74 752 euros bruts lors de son départ effectif de l'entreprise, conservant ses attributions pendant son préavis,

1-6) la mission d'audit visait la mise en place d'un plan d'action pour améliorer la performance du groupe,

2) la démission de M. [L] n'est que le fruit d'une susceptibilité exacerbée face aux critiques des directeurs d'agence qu'il n'a pas supportées,

3) les demandes sont sans fondement, M. [L] ayant créé une société Orgages avec M. [V] en septembre 2008.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience sans modification ;

Attendu qu'il importe peu de savoir dans quelles conditions M. [L] a pu avoir eu connaissance du courrier daté du 5 décembre 2007 que 7 chefs d'agence ont adressé à MM [K] et [W] [O] ; que ni l'existence ni le contenu n'en sont discutés ;

attendu qu'en présentant le 16 janvier 2008 sa démission du conseil de surveillance de la société [O] en raison de la mise en cause de ses capacités par M. [K] [O], président du conseil de surveillance, M. [L] n'a fait que tirer les conséquences de cette mise en cause ; qu'il a indiqué continuer à assurer ses fonctions salariées de directeur administratif et financier ;

Attendu qu'ayant eu communication du courrier du 5 décembre 2007 émanant de certains directeurs d'agence le mettant en cause en ces termes :

« Nous sommes surpris de constater que nous n'avons aucun contact avec notre direction financière qui semble ne rien faire pour nous aider et pire ne pas se soucier des résultats du Groupe », M. [L] a écrit le 3 mars 2008 à M. [W] [O], président du directoire, pour l'informer de sa démission ;

Attendu que M. [L] explique les motifs de cette démission par le fait que la direction ayant reçu la lettre du 5 décembre 2007 sans prendre de décision, la direction partageait les critiques le concernant : « vous m'avez répondu que vous l'aviez laissée sous le coude parce que c'était une bombe et vous n'avez pas jugé utile de prendre une décision, ce qui me laisse à penser que vous et M. le président du conseil de surveillance, destinataires, partagez ces propos pour le moins calomnieux » ;

Mais attendu qu'il n'est pas discutable que M. [L] qui jusqu'au 16 janvier 2008 était membre du conseil de surveillance de la société, a été associé aux décisions stratégiques des dirigeants, même s'il résulte des comptes-rendus produits qu'il laissait de fait les décisions dans ce domaine aux actionnaires, et qu'il ne pouvait ignorer les difficultés rencontrées tant au niveau du groupe au plan économique qu'entre les actionnaires au niveau de la gestion stratégique ;

Attendu qu'il relevait de la seule décision des dirigeants de choisir les modalités de prise en compte des accusations portées par les 7 directeurs d'agence contre les dirigeants de leur société ;

Attendu que le fait qu'un audit soit mis en 'uvre par la direction, si elle a paru insupportable à M. [L], ne démontrait à ce stade, ni la volonté de son employeur de se passer de ses services, ni ne le mettait dans l'impossibilité de continuer à exercer ses fonctions ;

Attendu qu'il n'est donc rapporté la preuve ni de la mauvaise foi imputée à son employeur dans l'exécution de son contrat de travail, ni celle d'un manquement de celui-ci d'une gravité suffisante pour empêcher la continuation de son contrat de travail ;

Attendu que c'est donc par des motifs pertinents que les premiers juges ont rejeté les demandes de M. [L] ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné M. [L] au paiement d'une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau de ce chef,

Dit que l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société [O] et M. [L] des leurs demandes faites en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne M. [L] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00694
Date de la décision : 10/01/2011

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°10/00694 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-10;10.00694 ?
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