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13/10/2010 | FRANCE | N°10/00103

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 13 octobre 2010, 10/00103


RG N° 10/00103



N° Minute :





















































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU MERCREDI 13 OCTOBRE 2010







Appel d'une décision (N° RG 08/151

6)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 24 novembre 2009

suivant déclaration d'appel du 23 Décembre 2009



APPELANT :



Monsieur [R] [N]

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représenté par Me Sophie BAUER CACHAT (avocat au barreau de GRENOBLE)



INTIMEE :



La SA LES ARCHERS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qua...

RG N° 10/00103

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MERCREDI 13 OCTOBRE 2010

Appel d'une décision (N° RG 08/1516)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 24 novembre 2009

suivant déclaration d'appel du 23 Décembre 2009

APPELANT :

Monsieur [R] [N]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie BAUER CACHAT (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIMEE :

La SA LES ARCHERS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Franck BENHAMOU (avocat au barreau de GRENOBLE) substitué par Me PONCET (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de Président,

Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

DEBATS :

A l'audience publique du 22 Septembre 2010,

Madame Hélène COMBES, Conseiller, chargée du rapport, en présence de Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller faisant fonction de Président, assistés de Simone VERDAN, greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 13 Octobre 2010, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 13 Octobre 2010.

Notifié le :

Grosse délivrée le :

RG N° 10/103 HC

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat de travail à durée déterminée du 6 février 2006 suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée, [R] [N] a été embauché en qualité de serveur par la société Les Archers qui exploite une brasserie à [Localité 5].

Victime d'un accident de droit commun, il a été licencié pour inaptitude le 26 août 2008.

Le 13 novembre 2008, il a saisi le conseil de Prud'hommes de demandes tendant au paiement d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts pour travail dissimulé et par jugement du 24 novembre 2009, le conseil de Prud'hommes l'a débouté de toutes ses demandes.

[R] [N] qui a relevé appel le 23 décembre 2009, demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner la société Les Archers à lui payer :

- 1.008,82 euros au titre des majorations d'heures supplémentaires à 10 %

- 5.117,46 euros au titre des majorations d'heures supplémentaires à 20 % et 511,75 euros au titre des congés payés afférents

- 10.908,80 euros au titre des majorations d'heures supplémentaires à 50 % et 1.090,09 euros au titre des congés payés afférents

- 2.000 euros en réparation du préjudice causé par la violation des règles relatives à la durée maximale du travail et au repos hebdomadaire

- 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé

- 2.000 euros au titre des frais irrépétibles

Il expose que bien que son contrat de travail ait mentionné un horaire hebdomadaire de 39 heures, les 4 premières heures supplémentaires ne lui ont pas été payées du mois de février 2006 au mois de mars 2007 et qu'il a effectué bien d'autres heures supplémentaires qui ne lui ont jamais été payées.

Il expose qu'il devait arriver 45 minutes avant la prise de service qui avait lieu :

- le midi tous les jours de 11 heures 30 à 15 heures (voire 16 heures en cas d'affluence)

- le soir, du mardi au samedi inclus de 18 heures 30 à 2 heures du matin - le dimanche et le lundi de 18 heures 30 à 1 heure du matin.

Il ajoute qu'à la fin du service, il devait faire le ménage et compter la caisse.

Il fait valoir qu'il travaillait donc 11 heures par jour du mardi au samedi et 10 heures par jour les dimanche et lundi, alors que la durée maximale quotidienne de travail est de 10 heures.

Il invoque les attestations qu'il produit et s'étonne que les premiers juges aient écarté celle de [G] [T] qu'il a par la suite épousée, alors qu'ils ont retenu celle du cousin du gérant.

Il relève que la société Les Archers est incapable de justifier de ses horaires et produit des attestations contradictoires et incompatibles avec les horaires d'ouverture, ainsi qu'un agenda, manifestement annoté pour les besoins de la cause.

Il note également que lors de la régularisation de 270 heures supplémentaires au mois d'août 2008, aucun décompte n'a été produit et il conteste avoir demandé à capitaliser ces heures pour obtenir des congés payés en vue de son mariage.

Il conteste également avoir bénéficié de repos compensateurs qui ne figurent pas sur ses bulletins de salaire.

La société Les Archers conclut à la confirmation du jugement et réclame 2.500 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle réplique que toutes les heures supplémentaires ont été payées dans le cadre du solde de tout compte et fait valoir que [R] [N] n'apporte pas la preuve de ce qu'il allègue.

Elle relève en outre que le décompte qu'il produit a été établi a posteriori et que plusieurs attestations ne répondent pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile.

Elle demande à la cour d'écarter l'attestation de la salariée qui est devenue son épouse ainsi que celles des salariés qui ont attesté pour lui alors qu'ils sont peu restés dans l'entreprise et qu'ils n'y étaient pas là en même temps que lui.

Elle ajoute que le seul salarié qui connaît bien l'établissement, [A] [D], a fait l'objet d'une plainte pénale.

Si elle admet que [R] [N] a pu faire des heures supplémentaires, elle soutient que ces heures ont été payées ou récupérées en repos et fait valoir que [R] [N] mélange horaire de travail et heures d'ouverture de l'établissement.

Elle précise sur ce point que la brasserie ferme souvent avant l'heure en raison de l'absence de clients, que le midi, les serveurs partent plus tôt quand leur présence n'est plus indispensable et qu'elle dispose d'un effectif suffisant pour assurer une rotation des serveurs sur toute l'amplitude horaire.

DISCUSSION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Attendu que s'il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande ;

Attendu que [R] [N] verse aux débats des captures d'écran du site Internet de la société Les Archers, dont il résulte que l'établissement se présente comme un lieu d'accueil pour les noctambules, l'un des rares restaurants ouvert 7 jours sur 7 et 365 jours par an, jusqu'à une heure le dimanche et le lundi et jusqu'à deux heures le reste de la semaine ;

Attendu que le paiement de 270 heures supplémentaires à hauteur de 4.182 euros au moment du solde de tout compte (soit l'équivalent de deux mois de salaire sans aucun décompte), révèle à tout le moins que l'employeur ne s'était pas acquitté de son obligation de les rémunérer pendant plusieurs mois ;

Attendu que la société Les Archers ne justifie par aucune pièce qu'il s'agit en réalité de repos compensateurs cumulés pour des raisons personnelles ;

Attendu que [R] [N] étaye sa demande par ces éléments, ainsi que par l'attestation de [X] [I] qui décrit les mêmes horaires que lui ;

Attendu que le fait que ce salarié n'ait travaillé dans l'entreprise que du mois de janvier au mois d'août 2006, ne suffit pas à ôter toute crédibilité à son attestation ;

Attendu que s'il convient d'écarter l'attestation de [G] [T] en raison de ses liens avec [R] [N] (épouse) et celle de [A] [D] en raison de son contentieux avec la société Les Archers, il convient tout autant d'écarter celle de [J] [E], dont il n'est pas contesté qu'il a un lien de parenté avec le gérant de la société ;

Attendu que la société Les Archers fait valoir qu'elle dispose du personnel suffisant pour assurer une rotation sur toute l'amplitude d'ouverture du restaurant ;

qu'elle n'indique cependant pas dans ses conclusions le nombre de serveurs qu'elle emploie en permanence et qu'interrogé sur ce point lors de l'audience, son conseil n'a pu apporter aucune précision ;

Attendu qu'aucun planning n'est produit qui démontrerait que [R] [N] confond effectivement horaire de travail et horaires d'ouverture du restaurant et qu'il ne peut avoir travaillé selon les horaires qu'il décrit en page 4 de ses conclusions ;

Attendu que la société Les Archers est manifestement défaillante dans la production des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et ne supplée pas cette carence par les quelques attestations de salariés qu'elle produit ;

Attendu qu'elle confirme l'indication selon laquelle les serveurs devaient arriver 45 mn avant leur prise de service et ne conteste pas qu'en fin de service, ils devaient faire le ménage et compter la caisse ;

Attendu que selon plusieurs attestations de la société Les Archers, [R] [N] assurait l'entretien de la terrasse en période estivale et certaines fois le bar (attestation [F]) ;

qu'il ne pouvait donc quitter l'entreprise avant que les derniers clients soient eux-mêmes partis ;

Attendu que [R] [N] observe à juste titre que les attestations que produit la société Les Archers sur ses horaires de travail comportent des différences et des contradictions de nature à les priver de toute crédibilité ;

Attendu que même s'il apparaît raisonnable d'admettre que les soirs de faible fréquentation l'établissement fermait avant une heure ou deux heures du matin, les éléments produits par [R] [N] permettent de retenir qu'il travaillait en moyenne 50 heures par semaine ;

Attendu qu'en tenant compte du nombre de jours travaillés tels qu'ils figurent sur les bulletins de salaire, des 270 heures payées par l'employeur au moment de la rupture du contrat de travail et des majorations applicables, il est dû à [R] [N] :

- la somme de 1.008,82 euros au titre du solde sur les heures supplémentaires à 10 % (après déduction de la somme de 4.182,65 euros mentionnée sur le solde de tout compte)

- la somme de 8.943 euros outre 894 euros au titre des congés payés afférents au titre des heures supplémentaires majorées à 20 % et 50 % ;

Attendu que [R] [N] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour violation des règles relatives à la durée du travail ;

Attendu qu'en rémunérant tout au long de la relation contractuelle un nombre d'heures de travail inférieur à celui qui était réellement accompli, la société Les Archers s'est intentionnellement soustraite à ses obligations ;

que [R] [N] est bien fondé à solliciter sur le fondement de l'article L 8223-1 du code du travail l'indemnité forfaitaire dont le montant sera fixé à 15.000 euros ;

Attendu qu'il lui sera alloué la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 novembre 2009 par le conseil de Prud'hommes de Grenoble et statuant à nouveau, condamne la société Les Archers à payer à [R] [N] :

la somme de 1.008,82 euros au titre du solde sur les heures supplémentaires à 10 %

la somme de 8.943 euros outre 894 euros au titre des congés payés afférents au titre des heures supplémentaires majorées à 20 % et 50 %

la somme de 15.000 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 8223-1 du code du travail

la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

- Déboute [R] [N] de ses autres demandes.

- Condamne la société Les Archers aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur VIGNY, président, et par Madame VERDAN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00103
Date de la décision : 13/10/2010

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°10/00103 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-13;10.00103 ?
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