RG N° 09/03195
N° Minute :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 29 SEPTEMBRE 2010
Appel d'une décision (N° RG 07/00369)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 29 juin 2009
suivant déclaration d'appel du 09 Juillet 2009
APPELANTE :
Le CONSEIL D'ARCHITECTURE D'URBANISME ET DE L'ENVIRONNEMENT (C.A.U.E.) DE L'ISERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Monsieur GROS (Directeur) et par Monsieur BESCHER (Président) et assisté par la SCP CLEMENT-CUZIN LONG LEYRAUD DESCHEEMAKER (avocats au barreau de GRENOBLE)
INTIMEE :
Madame [Z] [P]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Comparante et assistée par Me Bénédicte DELL'ACCIO-ROUDIER (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, faisant fonction de Président,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,
Madame Astrid RAULY, Conseiller,
Assistés lors des débats de Simone VERDAN,. Greffier ;
DEBATS :
A l'audience publique du 02 Septembre 2010,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 29 Septembre 2010.
L'arrêt a été rendu le 29 Septembre 2010.
Notifié le :
Grosse délivrée le :
RG N° 09-3195 BV
Madame [P] a été embauchée le 15 février 1995 par le Conseil d'Architecture d'Urbanisme et de l'Environnement de l'Isère -C.A.U.E.- en qualité de conseiller paysagiste.
Madame [P] a été en congé formation du 13 octobre 2003 au 31 décembre 2004.
Madame [P] a fait l'objet le 11 octobre 2007, d'un licenciement pour inaptitude, après deux avis du médecin du travail : 24 août 2007 et 7 septembre 2007.
Par jugement de départage du 29 juin 2009, le Conseil de Prud'hommes de Grenoble a :
- prononcé la résiliation du contrat de travail de Madame [P] aux torts de son employeur
- condamné la résiliation le C.A.U.E de l'Isère à payer à Madame [P] :
- 8.919,75 € à titre de préavis outre les congés payés afférents
- 6.860,84 € à titre des congés payés de 40 jours
- 2.401,29 € à titre de rappel de salaire
- 47.600,00 € à titre de dommages-intérêts
- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le C.A.U.E de l'Isère qui a relevé appel conclut au débouté de toutes les demandes de Madame [P] et sollicite 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il expose que :
- le C.A.U.E de l'Isère est une association départementale fondée par le Conseil Général, dont la mission est l'amélioration du cadre de vie, le conseil aux particuliers, la préservation du patrimoine. Il compte moins de 11 salariés
- l'employeur a eu un comportement exempt de déviance, il cite les faits énumérés par Madame [P] :
' [Localité 3] : le C.A.U.E de l'Isère a appris que Madame [P] pendant le CIF avait fait une offre courant 2004 à cette commune pour laquelle le C.A.U.E de l'Isère travaille. Une polémique s'en est suivie entre la Commune, la salariée, le C.A.U.E de l'Isère. Madame [P], plutôt que de s'expliquer, a invectivé son employeur.
' Le C.E.RT.U. (Centre d'Etudes sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques) : Madame [P] était chargée d'un dossier concernant le campus, elle ne l'a pas menée à bien avant le CIF
' Le planning : le courrier du 17 mars 2004 adressé par son employeur à Madame [P] n'est pas fautif : il lui demandait le programme détaillé de sa formation. Elle n'a jamais répondu.
' Le bureau de Madame [P], à son retour du CIF très dégradé selon le jugement. C'est la salariée qui l'avait choisi. Des travaux devaient être faits (fuites de colonne de descente d'eau.)
' Le projet intranet-extranet Il est inexact qu'elle ait été écartée de ce projet pour lequel un autre salarié a été désigné, avant le CIF de Madame [P]
' La réunion régionale des C.A.U.E. de septembre 2008 : Madame [P] a été rappelée à l'ordre après avoir tenu des propos déplacés à ses collègues
- il n'y pas eu de faits répétés. Les faits dénoncés se sont étalés sur plusieurs années
- le lien entre les faits dénoncés et l'état de santé de Madame [P] est très incertain (dépression). Son inaptitude n'est pas d'origine professionnelle
- Madame [P] ne livre aucun témoignage
- aucun reclassement n'était possible (taille C.A.U.E.)
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Madame [P] sollicite la confirmation du jugement, subsidiairement de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle sollicite 605,66 € de congés payés (salaire juillet au 12 octobre 2007), 2.200 € à titre de dommages-intérêts pour refus du DIF, 3.447,55 € de congés payés (primes 13ème mois) et 2.000 €au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose que :
- sa demande de CIF a sonné le glas de la relation contractuelle
- sur les faits de harcèlement :
' Le CERTU : c'est un projet de plusieurs années, qu'elle a interrompu lors de son départ en CIF
' Les reproches sur le CIF : elle a été convoquée le 5 avril 2004 par son employeur pour expliquer les modalités, alors qu'il n'avait pas débuté. Elle a fourni tous éléments. Puis ce fut une convocation le 1er juin 2004
' [Localité 3] Elle n'a pas compris le reproche de son employeur, a demandé des précisions à la Mairie pour laquelle, avant le CIF, elle avait émis un avis paysager. Un échange de courriers s'en est suivi
' Le bureau, l'isolement : à son retour, l'accueil de son employeur est très froid. Son bureau est dans un état de décrépitude avancé (champignons au mur...), il est devenu un débarras
' le projet intranet-extranet, elle a été tenue à l'écart, le C.A.U.E de l'Isère a embauché Madame [I] pour faire le travail
' L'ordinateur : son employeur a refusé de payer la franchise de l'ordinateur qu'il avait fallu réparer après qu'elle l'ait fait tomber accidentellement
- fin juin 2006, la situation s'est brutalement dégradée : reproches de son employeur, entretiens, accusation de mise en place d'un réseau destiné à échanger les expériences entre salariés, lettre recommandée avec accusé de réception. Elle a 'craqué'. Sa messagerie lui sera supprimée. Ses mails sont reçus par Madame [J], l'assistante de son employeur
- son état de santé s'est dégradé : cf. pièces médicales, syndrome anxio-dépressif depuis avril 2004
- il n'y a pas eu de recherches de reclassement.
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MOTIFS DE L'ARRET :
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [P] :
Madame [P] fonde son action sur des agissements de harcèlement moral que son employeur lui a fait subir.
En application de l'article L 1154-1 du code du travail, il appartient au salarié qui se dit victime de faits de harcèlement de son employeur d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence dudit harcèlement et il incombe à l'employeur de prouver que ces faits ne sont pas constitutifs de harcèlement.
Il convient d'examiner l'ensemble des faits invoqués par Madame [P].
La demande de congé individuel de formation CIF :
Madame [P] a présenté sa demande de CIF à son employeur, par lettre du 14 mars 2003, la formation envisagée devant débuter en octobre 2003.
L'employeur de Madame [P] lui a rapidement répondu, insistant sur la nécessité d'étudier les modalités de faisabilité du congé. Après divers entretiens avec Madame [P], à laquelle un accord de principe a été donné en mai 2003, après renseignements auprès de l'organisme financeur, le C.A.U.E de l'Isère a, le 10 juillet 2003, fait connaître à la salariée, son accord définitif et lui a précisé, le 8 septembre 2003, sa rémunération pendant le CIF.
Les différents courriers produits aux débats n'établissent pas que le C.A.U.E de l'Isère aurait traité la demande de CIF de Madame [P] d'une façon qui laisserait présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Madame [P] reproche à son employeur d'avoir décidé que son contrat de travail sera suspendu pendant le CIF, décision destinée à la mettre à l'écart. Ce grief n'est pas fondé. Le CIF entraîne obligatoirement la suspension du contrat de travail du salarié.
Le premier fait invoqué par Madame [P] ne laisse pas présumer l'existence d'un harcèlement moral de la par du C.A.U.E de l'Isère.
Le dossier CERTU (Centre d'Etudes sur les Réseaux les Transports, l'Urbanisme et les Constructions Publiques) :
Dans un courrier adressé le 27 novembre 2003 à Madame [P], soit pendant son C.I.F., le C.A.U.E de l'Isère a écrit :
'Nous avons eu plusieurs occasions pour échanger sur les dossiers que vous laissiez en instance. Par ailleurs, nous avons fait en sorte que [N] [L], paysagiste chargé d'assurer votre intérim, partage plusieurs journées de travail avec vous, afin d'échanger sur chaque opération engagée. Je regrette cependant que le dossier CERTU sur l'espace public, traitant du campus de [Localité 5]/[Localité 6], n'ait pas été finalisé, comme je vous l'avais demandé, ce qui ne nous permet pas de tenir nos engagements vis-à-vis de nos partenaires'.
Madame [P] soutient que le retard ne lui incombe pas et que Madame [L] a dut être remplacée, en raison d'un arrêt-maladie, par Monsieur [T].
Les pièces versées aux débats montrent que le dossier CERTU ne figurait pas dans la lise des travaux en cours lors du départ en CIF de Madame [P] et établi par celle-ci et que Madame [L], paysagiste, est intervenue pour remplace Madame [P], en octobre 2003, alors qu'elle avait commencé son CIF.
Le courrier adressé à Madame [P] le 27 novembre 2003 se borne à lu reprocher de ne pas avoir mené sa mission à son terme avant son départ en CIF.
Madame [P] n'allègue pas avoir achevé sa mission avant le 13 octobre 2003.
Le courrier litigieux ne permet pas de présumer l'existence d'un fait de harcèlement moral.
Les reproches sur le CIF :
Dans un courrier du 17 mars 2004, le C.A.U.E de l'Isère a écrit à Madame [P] :
'Concernant votre congé, nous regrettons de n'avoir pas reçu de votre part, conformément
à vos obligations, le programme détaillé de votre formation avant le 16 février 2004, alors que votre formation a débuté en octobre 2003.
Un appel aux services de l'INPG (Madame [V]) nous a révélé des précisions qui témoignent de réelles différences vis à vis de nos accords.
Le C.A.U.E de l'Isère a couvert comme convenu votre traitement à hauteur de 90 % son remboursement s'effectuant au vu des heures réelles effectuées en formation, à concurrence de 40 h. Or, ce remboursement n'est pris en comte que sur la base de jours ouvrés, alors que nous apprenons qu'une partie de formation est dispensée le samedi.
La comptabilité des jours de stage effectués et de leur remboursement au C.A.U.E. de l'Isère s'avèrent dès lors très différents des prévisions établies au vue de votre programme initial et de notre accord. Soit un remboursement de 3.247 € pour un coût de 15.967 € pour me 4ème trimestre 2003.
Vous comprendrez aisément que cette situation n'est pas acceptable pour notre organisme qui n'est pas à l'origine de votre démarche de CIF. Nous vous réitérons donc notre demande nous faire parvenir au plus vite votre programme détaillé de formation afin que nous puissions arrêter une position.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, nous vous invitons à vous présenter pour un entretien le 5 avril 2004 à 11 heures au siège du C.A.U.E de l'Isère pour étudier de vive voix les mesures à envisager pour les mois prochains'.
Par ce courrier, le C.A.U.E de l'Isère se bornait à demander des précisions à Madame [P] sur son programme de formation, à la suite d'un appel téléphonique auprès de l'INPG au sein duquel Madame [P] effectuait sa formation, appel téléphonique qui révélait que partie de la formation était dispensée le samedi, circonstance qui entraînait pour le C.A.U.E de l'Isère un remboursement inférieur de la part de l'organisme de formation.
La demande faite par le C.A.U.E de l'Isère auprès de Madame [P] était légitime et ne constitue pas un fait permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Mairie de [Localité 3] :
Par lettre du 27 mars 2004, le C.A.U.E de l'Isère a demandé à Madame [P] des explications sur une offre de service qu'elle aurait faite, au Maire de [Localité 3], en partenariat avec l'ONF, pour un aménagement paysager.
Madame [P] a communiqué au Maire de [Localité 3], la lettre reçue du C.A.U.E de l'Isère, en lui demandant ce qu'il pouvait lui dire de cette affaire.
Le courrier adressé par le Maire de [Localité 3] au C.A.U.E de l'Isère, le 2 août 2004, indiquait avoir fait appel à l'ONF pour effectuer un diagnostic de solidité des arbres et précisait que le technicien de l'ONF lui avait appris qu'un 'personne du C.A.U.E de l'Isère était en congé formation dans ses services'.
Or, Madame [P] a effectivement été en stage à l'ONF.
Madame [L], qui a remplacé Madame [P] pendant son CIF, dans une attestation très précise, confirme l'intervention de Madame [P] auprès du maire de [Localité 3], dans ces termes :
'Lors d'une réunion de travail, Monsieur [R], maire de [Localité 3] m'informe et aussi m'interroge sur la possible candidature de l'ONF à cette étude. Je lui réponds que cette candidature est envisageable mais que conformément à l'avis d'appel à candidature que nous avions établi avec le groupe de travail, il faut que l'ONF dispose de compétences complémentaires et notamment d'un paysagiste. Ce que le maire me confirme, m'évoquant une conversation qu'il avait eu quelques temps plus tôt avec un agent de l'ONF sur le chantier du groupe scolaire. Je l'interroge sur l'identité de ce paysagiste, il me précise alors que c'est une personne du C.A.U.E de l'Isère en congé formation en stage à l'ONF du nom de Madame [P] . Devant mon incrédulité, il va dans son bureau, revient et me tend la carte C.A.U.E de l'Isère de [Z] [P].
Il était étonné que je ne sois pas au courant (et moi donc !).
Je lui ai proposé de faire le point avec [D] [A] pour avoir une réponse complète à sa question.
La veille de mes congés d'été en 2008, [Z] [P] qui était alors revenue depuis plusieurs mois au C.A.U.E de l'Isère, m'avait demandé de passer à son bureau avant de partir. Elle m'avait interrogée sur ce qui s'était passé à [Localité 3] voulant connaître tous les détails, savoir si j'étais au courant des courriers échangés à la suite de ces événements'.
Les critiques de Madame [P] sont particulièrement injustifiées, alors même que dans son courrier du 27 juillet 2004 adressé au maire de [Localité 3], elle mentionne 'nous avions été conduits à nous rencontrer au printemps dernier au sujet de la zone humide et du parc de la future mairie'.
La lettre du 27 mars 2004 adressée à Madame [P] par le C.A.U.E de l'Isère dont elle demeurait la salariée, est parfaitement légitime et ne constitue pas un fait permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Le bureau et l'isolement de Madame [P] :
Madame [P] a, elle-même, procédé au choix du bureau, bien situé et disposant d'une double orientation. Ce bureau, comme l'ensemble des locaux avait été refait.
Une fuite s'est produite dans la colonne de descente des eaux de l'immeuble, entraînant la formation de moisissures sur le mur.
Le syndic de l'immeuble dans lequel sont implantés les locaux du C.A.U.E de l'Isère a fait intervenir une entreprise pour rechercher l'origine de la fuite. L'importance de celle-ci imposait de remplacer la colonne de descente datant de la construction de l'immeuble, remplacement qui ne pouvait avoir lieu qu'à une époque où les occupants étaient absents (28 juillet 2008).
Le C.A.U.E de l'Isère n'a pas failli à ses obligations et ne pouvait procéder, seul, à la remise en état des lieux.
Cette situation ne constituait pas un fait permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Madame [P] se plaint d'avoir été isolée mais n'apporte aucun élément à cet égard.
Projet Intranet-Extranet
Madame [P] reproche au C.A.U.E. de l'Isère de l'avoir écartée du projet Intranet-Extranet.
Madame [P] ne produit aucun élément susceptible de caractériser ce fait.
Le C.A.U.E. de l'Isère , le 20 mars 2003 lui avait précisé, dans un courrier que le C.A.U.E. de l'Isère allait accueillir Monsieur [X] changé de la communication et du site inter et extranet, de sorte que Madame [P] ne pouvait espérer être retenue pour occuper le poste, après avoir effecuté un CIF.
Le C.A.U.E. de l'Isère a été parfaitement transparent avec Madame [P].
Le fait invoqué ne peut être retenu.
L'ordinateur :
Madame [P] reproche au C.A.U.E. de l'Isère de ne pas avoir pris en charge la réparation de son ordinateur portable qu'elle avait fait tomber. Elle prétend qu'elle avait pris son propre ordinateur, en raison de l'indisponibilité des deux ordinateurs portables du C.A.U.E. de l'Isère habituellement utilisés.
Madame [P] ne produit aucun élément établissant le fait qu'elle ait été contrainte d'utiliser son propre ordinateur.
Ce fait n'est pas établi.
Reproches adressés par Monsieur [A] le 30 juin 2006 :
Une discussion a eu lieu entre Monsieur [A] et Madame [P]. Selon un courrier de Monsieur [A] du 2 octobre 2006, il lui avait été demandé de 'se mobiliser' sur un dossier au lieu de se disperser'.
Une attestation produite par Madame [P] et émanant de Monsieur [B], précise qu'une vive altercation avait eu lieu et que Madame [P] avait été très affectée.
Cette attestation ne rapporte nullement le contenu de la discussion, le témoin qui a vu Madame [P] après, n'y a pas assisté.
Le fait invoqué par Madame [P] n'est pas établi.
La réunion régionale des C.A.U.E. les 28 et 29 septembre 206 :
Madame [P] fait grief au C.A.U.E. de l'Isère de lui avoir reproché, dans un courrier du 2 octobre 2006, d'avoir au cours de cette réunion, appelé les personnels à organiser un réseau direct destiné à échanger les expériences de chaque agent.
Il résulte des lettres de Monsieur [K], directeur du C.A.U.E. de Savoie et de Madame [O], directrice du C.A.U.E. de l'Ain, lettre adressée à Monsieur [A] que, lors de cette réunion, Madame [P] avait encouragé les paysagistes à se réunir de façon autonome, en raison de l'absence de coordination et d'intérêt des C.A.U.E. sur cette question. Madame [O] ajoute que cette proposition avait été faite avec 'véhémence, comme une sorte de défi aux directeurs, dont plusieurs étaient présents, considérant qu'ils n'avaient pas à donner leur avis et même que, s'ils n'étaient pas d'accord, on s'en f...'
L'attestation de Madame [Y], produite par l'intimée, indique que celle-ci a fait 'tourner une feuille pour que chacun y inscrive son adresse mail qui serait jointe au C.R.'
L'attestation de Monsieur [M], produite par Madame [P] ne fait pas état de remarques ou propos désobligeants envers les directeurs et président respectifs. Cette attestation ne dément pas la proposition de Madame [P] faite au cours de la réunion.
La demande d'explication adressée, le 2 octobre 2006 par le directeur du C.A.U.E. de l'Isère à Madame [P] sur son comportement le 29 septembre 2006 est parfaitement justifié.
La suppression de l'accès messagerie :
Madame [P] fait grief au C.A.U.E. de l'Isère de l'avoir privée, en février 2007, de son accès à sa messagerie personnelle.
Il est exact qu'à cette époque, le C.A.U.E. de l'Isère a décidé de rediriger les courriels reçus par Madame [P] sur la messagerie d'une autre salariée. A cette époque, Madame [P] était en arrêt-maladie et le C.A.U.E. de l'Isère était fondé à pouvoir traiter les courriels destinés à Madame [P].
Ce fait n'est pas constitutif de harcèlement moral.
Aucun des faits invoqués par Madame [P] ne caractérise des faits de harcèlement moral.
Le jugement sera en conséquence infirmé et la demande de résiliation judiciaire de Madame [P] sera rejetée. Toutes les demandes liées à la résiliation judiciaire seront rejetées.
Sur le licenciement de Madame [P] pour inaptitude :
Madame [P] reproche au C.A.U.E. de l'Isère d'avoir méconnu son obligation de reclassement.
Le second avis du médecin du travail, en date du 7 septembre 2007 est un avis d'inaptitude à tout poste définitivement dans l'entreprise.
Le C.A.U.E. de l'Isère a effectué des recherches de reclassement au sein de la structure. Le nombre très limité d'emplois -moins de 10 emplois équivalents temps plein- et les termes de l'avis du médecin du travail ne permettaient pas de reclasser Madame [P] au sein de cette structure. Aucun poste n'était disponible. Un seul poste de paysagiste existait.
Ainsi que le rappelle la lettre de licenciement, la C.A.U.E. de l'Isère a effectué les recherches de reclassement en collaboration avec le médecin du travail qui a constaté, compte tenu des besoins du C.A.U.E. de l'Isère et de sa structure, l'absence de poste disponible et l'impossibilité d'un aménagement de poste.
Aucune recherche de reclassement ne pouvait être effectuée dans les autres C.A.U.E. implantés sur le territoire français. En effet chaque C.A.U.E. est une association juridiquement indépendante.
Les demandes de Madame [P] fondées sur la violation de l'obligation de reclassement doivent être rejetées.
Sur l'irrégularité de la procédure :
Madame [P] indique que la lettre de licenciement ne mentionnait pas l'adresse de la mairie de son domicile où elle pouvait consulter la liste comportant les noms des personnes susceptibles de l'assister.
S'il est vrai que l'adresse de la mairie de la ville d'[Localité 4], ville où résidait Madame [P] ne figurait pas sur la lettre de convocation à l'entretien préalable, Madame [P] ne pouvait ignorer cette adresse. La mairie d'[Localité 4] est, en effet, située à moins de 5 minutes à pied de son domicile.
La demande de dommages-intérêts de Madame [P] sera rejetée.
Sur le paiement des salaires du 7 au 12 octobre 2007 :
Cette demande est fondée. A compter du deuxième avis du médecin du travail, en date du 7 septembre 2007, le C.A.U.E. de l'Isère disposait d'un délai d'un mois pour reclasser ou licencier Madame [P].
Le licenciement n'étant intervenu que le 11 octobre 2007, le salaire est dû à compter du 7 octobre 2007 jusqu'au 12 octobre 2007, soit la somme de 605,66 € outre les congés payés afférents.
Sur le DIF :
L'article L 6323-17 du code du travail dispose que le DIF est transférable en cas de licenciement, sauf faute grave ou faute lourde.
En l'espèce, la rupture du contrat de travail est intervenue le 12 octobre 2007, date de la réception de la lettre de licenciement.
Le C.A.U.E. de l'Isère était fondé, après cette date, de refuser la mise en oeuvre du DIF.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les primes du 13ème mois :
Madame [P] estime avoir été privée à tort des primes de 13ème mois pour les années 2003, 2004 et 2006.
Cette demande n'est pas fondée. En effet, les statuts des personnels du C.A.U.E. de l'Isère prévoient que le montant de la prime de 13ème mois est calculé prorata temporis.
Par ailleurs, ces statuts précisent que la prime serait tout de même versée en cas d'absences par la fréquentation obligatoire de cours professionnels.
Le CIF ne correspond pas à l'hypothèse de cours professionnels imposés mais est un choix du salarié.
En 2003, Madame [P] a été absente une partie de l'année, en 2004, elle a été absente toute l'année et en 2006, elle a été absente pendant 4 mois (arrêt-maladie).
Cette demande n'est pas fondée.
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L'équité commande la condamnation de Madame [P] à payer au C.A.U.E. de l'Isère 750 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi;
Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté Madame [P] de sa demande de rappel de salaire.
Statuant à nouveau
Condamne le C.A.U.E. de l'Isère à payer à Madame [P] 605,66 euros à titre de rappel de salaire (7 au 12 octobre 2007) et 60,56 euros au titre des congés payés afférents.
Déboute Madame [P] de toute autre demande.
Condamne Madame [P] à payer au C.A.U.E. de l'Isère 750 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Madame [P] au dépens de première instance et d'appel.
Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
Signé par Monsieur VIGNY, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.