RG N° 09/01740
N° Minute :
Notifié le :
Grosse délivrée le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MARDI 09 FEVRIER 2010
Appel d'une décision (N° RG 20080038)
rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GRENOBLE
en date du 19 mars 2009
suivant déclaration d'appel du 16 Avril 2009
APPELANTE :
LA CPAM DE L'ISERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Mme [B], munie d'un pouvoir spécial
INTIMEE :
LA S.A CARREFOUR HYPERMARCHE FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Etablissement de [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Laurent SAUTEREL substitué par Me HAZART (avocats au barreau de LYON)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Madame Dominique JACOB, Conseiller,
Madame Hélène COMBES, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Corinne FANTIN, Adjoint faisant fonction de Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 08 Décembre 2009,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 09 Février 2010.
L'arrêt a été rendu le 09 Février 2010.
M. [G] [I], employé de la société Carrefour Hypermarchés à [Localité 5], a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie le 8 avril 2005 au titre d'une maladie professionnelle du tableau 57 déclarée le 30 décembre 2004 suite à un certificat médical initial du 13 décembre 2004.
La société Carrefour Hypermarchés a contesté l'opposabilité de cette prise en charge devant la commission de recours amiable par un recours qui a été rejeté le 26 novembre 2007.
Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble a été saisi le 22 janvier 2008 et par jugement en date du 19 mars 2009 il a fait droit à la demande de la société Carrefour Hypermarchés, lui déclarant inopposable la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de prendre en charge l'affection de M. [I].
La Cour est saisie par l'appel interjeté le 16/04/2009 par la caisse primaire d'assurance maladie suite à la notification du jugement reçue le 06/04/2009.
Demandes et moyens des parties
La caisse primaire d'assurance maladie, appelante, demande à la cour de réformer le jugement entrepris, dire opposable à la société Carrefour Hypermarchés la prise en charge au titre de la maladie professionnelle de la pathologie dont a été reconnu atteint M. [I] le 13 décembre 2004, de débouter la société Carrefour Hypermarchés de sa demande d'expertise et subsidiairement de limiter la mission de l'expert à rechercher si les arrêts de travail ont une cause totalement étrangère à la maladie professionnelle.
La caisse expose en ses conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience que :
1) elle a bien respecté les articles R 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale par l'envoi du double de la déclaration de maladie professionnelle, (elle n'est pas tenue à l'envoi du certificat médical initial en dehors de toute demande de l'employeur), l'envoi de la lettre de clôture même si cet envoi n'a pas été adressé en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception (les lettres recommandées avec demande d'accusé de réception ont été reçues, les autres en envoi simple aussi, sauf la clôture qui a pourtant été adressé le 25 mars (et donc nécessairement reçue le 26 ou le 27) ce qui laissait un délai suffisant pour consulter le dossier (la copie de ce courrier est produit),
1-2) l'envoi en recommandé de la prolongation de délai du 30 mars 2005 ne notifie pas une reprise de l'instruction mais l'information nécessaire que le délai de 3 mois serait dépassé et donc prorogé,
2) le rapport du docteur [F] a été rendu sans même qu'il ait connaissance des certificats médicaux de prolongation alors qu'il apparaît qu'il y a bien eu continuité des soins et que la présomption d'imputabilité ne peut être écartée que par la preuve d'une cause totalement étrangère au travail
2-2) les lésions du 6 juin 2005 n'ont pas été prises en charge.
La société Carrefour Hypermarchés, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement et subsidiairement si la cour ne confirmait pas le jugement d'ordonner une expertise médicale.
La société Carrefour Hypermarchés expose en ses conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience que :
Sur la violation des articles R 441-10 et suivants du code de la sécurité sociale
1) la caisse ne rapporte pas la preuve qu'elle a adressé le 25 mars 2005 la lettre informant de la clôture de l'instruction,
1-2) le délai dont la société a disposé pour consulter le dossier a été insuffisant, au mieux de 7 jours,
2) le courrier de prolongation du 30 mars 2005 informant de la nécessité de recourir à un délai complémentaire d'instruction obligeait la caisse à informer la société d'une nouvelle date de fin d'instruction, de prise de décision et d'un nouveau délai de consultation des pièces du dossier,
3) l'examen des pièces du dossier par le médecin consulté par la société Carrefour Hypermarchés montre que l'importance de l'arrêt de travail prescrit est sans rapport avec des arrêts de travail constatés pour des affections similaires de sorte qu'il y a lieu d'ordonner une expertise médicale afin de distinguer les arrêts de travail et soins directement imputables à la pathologie déclarée et ceux imputables à un état antérieur.
MOTIFS DE LA DECISION :
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;
Attendu qu'il n'existe pas d'obligation pour la caisse primaire d'assurance maladie d'adresser en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception l'avis de clôture de l'instruction et de notification du délai de consultation du dossier avant la prise de décision dont la date est annoncée ;
Attendu que la prolongation du délai d'instruction fondé sur la nécessité de ne pas dépasser le délai d'instruction de trois mois, dépassement qui aurait pour conséquence une décision implicite d'acceptation de la prise en charge ne remet pas en cause le cours de l'instruction initiale ; que la lettre du 30 mars 2005 a informé la société Carrefour Hypermarchés de l'utilisation du délai complémentaire pour lui permettre de bénéficier de l'intégralité du délai de consultation du dossier dont elle avait été informé par le courrier du précédent, celui du 25 mars 2005 ;
Attendu que contrairement à ce que soutient la société Carrefour Hypermarchés, le simple avis du recours au délai complémentaire pour permettre de conserver à l'employeur l'usage du délai qui lui a été annoncé, ne fait pas courir en lui-même une nouvelle phase de l'instruction et ne nécessite donc pas une nouvelle notification de clôture de l'instruction faisant courir un nouveau délai de consultation avant décision ;
Attendu par ailleurs qu'il résulte des éléments du dossier, dès lors que la prise de décision a été annoncée pour le 8 avril 2005, que la société Carrefour Hypermarchés a bénéficié tant au regard du courrier du 25 mars 2005 qu'elle a nécessairement reçu dans les deux ou trois jours qu'au regard du courrier recommandé du 30 mars 2005 d'un délai suffisant pour consulter le dossier comme elle y était invitée et pour faire les observations qu'elle souhaitait faire sur les pièces de ce dossier, ce qu'elle n'a pas fait ;
Que le jugement doit donc être réformé en ce qu'il a déclaré inopposable à la société Carrefour Hypermarchés la décision de prise en charge de la maladie professionnelle dont a été atteint M. [I] dans le cadre de son activité professionnelle ;
Sur la demande d'expertise :
Attendu que la seule durée de l'arrêt de travail ne permet pas de présumer que celui-ci n'est pas la conséquence de la maladie professionnelle prise en charge étant rappelé que pour combattre la présomption d'imputabilité des conséquences médicales de cette maladie professionnelle, il appartient à l'employeur de démontrer que ses conséquences sont totalement imputables à une cause étrangère ; que la continuité des symptômes et des soins depuis l'arrêt initial est démontrée ; que la matérialité et l'imputabilité au travail de la maladie professionnelle n'est pas contestée ; que le taux d'IPP retenu de 8 % démontre l'importance de l'atteinte subie ;
Que la demande d'expertise qui ne vise qu'à prouver un état préexistant affirmé par le médecin consulté par la société Carrefour Hypermarchés et n'a pour objet que de pallier la carence de la société Carrefour Hypermarchés dans l'administration de la preuve qui lui incombe, est inopérante et doit être rejetée ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
Dit que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par M. [I] le 13 décembre 2004 est opposable à la société Carrefour Hypermarchés ;
Rejette la demande d'expertise de ladite société.
Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
Signé par Madame COMBES, pour le président empêché, et par Madame FANTIN, faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.