La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/11/2009 | FRANCE | N°09/00599

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 16 novembre 2009, 09/00599


RG N° 09/00599



N° Minute :



























































































AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU LUNDI 16 NOVEMBRE 2009







Appel d'une dÃ

©cision (N° RG F 07/01327)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 26 janvier 2009

suivant déclaration d'appel du 06 Février 2009





APPELANTES :



Madame [G] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 7]

[Localité 3]



Comparante et assistée par Me Willfried SAMBA-SAMBELIGUE (avocat au barreau de GRENOBLE)



INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE :



La S.A.R.L. MAIN SECURITE prise en la...

RG N° 09/00599

N° Minute :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU LUNDI 16 NOVEMBRE 2009

Appel d'une décision (N° RG F 07/01327)

rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE

en date du 26 janvier 2009

suivant déclaration d'appel du 06 Février 2009

APPELANTES :

Madame [G] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 7]

[Localité 3]

Comparante et assistée par Me Willfried SAMBA-SAMBELIGUE (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIMEE ET APPELANTE INCIDENTE :

La S.A.R.L. MAIN SECURITE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Thierry BRAILLARD (avocat au barreau de LYON) substitué par Me BERNARD ;

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 19 Octobre 2009,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 16 Novembre 2009.

L'arrêt a été rendu le 16 Novembre 2009.

Notifié le :

Grosse délivrée le :

RG 09 599 DJ

EXPOSE DU LITIGE

[G] [N] a été embauchée par la SARL MAIN SECURITE, selon contrat à durée indéterminée en date du 3 octobre 2005, comme agent d'exploitation au coefficient 120, après plusieurs contrats à durée déterminée conclus sur la période du 7 juin au 25 septembre 2005.

Elle effectuait ses prestations pour le compte de ST Microelectronics à [Localité 5].

Par avenant du 1er novembre 2006, l'employeur a modifié sa classification conventionnelle, lui attribuant le coefficient 140.

Le 31 janvier 2007, il lui a notifié un avertissement pour trois retards à la prise de service, les 24, 29 et 30 janvier 2007.

Le 30 avril 2007, [G] [N] a dénoncé auprès de l'inspecteur du travail des faits de harcèlement de la part de son supérieur hiérarchique.

Le 15 mai 2007, elle a été convoquée à un entretien préalable pour le 23 mai qui a été annulé. Une seconde convocation en date du 23 mai lui a été adressée pour le 1er juin, et elle a été licenciée par lettre du 8 juin 2007 pour des absences injustifiées les 7, 8 et 9 mai 2007.

Le 12 décembre 2007, [G] [N] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Grenoble qui, par jugement du 26 janvier 2009, a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et a condamné la SARL MAIN SECURITE à payer à la salariée :

- 1.626,17 euros de rappel de salaire de 2005 à 2007,

- 162,61 euros de congés payés afférents,

- 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

[G] [N], à qui le jugement a été notifié le 3 février 2009, a interjeté appel le 6 février 2009.

Elle sollicite l'infirmation du jugement, sauf en ce qu'il a fait droit à ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents. Elle demande à la cour de dire que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse et de condamner l'employeur à lui verser :

- 11.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose :

- que l'employeur a fait un usage abusif des modifications d'horaires de travail et de la clause de mobilité ;

- qu'en effet il lui a imposé un changement d'horaires de façon brutale, à partir du moment où elle a osé se plaindre de sa situation, et alors qu'il n'ignorait pas ses contraintes familiales puisqu'elle élève seule deux enfants qui avaient à l'époque 5 et 12 ans ;

- que, de même, il lui a imposé une mutation ;

- qu'elle justifie avoir reçu, entre le 14 juin 2005 et le 23 décembre 2005, sur son téléphone portable, des messages de son responsable hiérarchique, [W] [B], 'à la limite de ce que tolère la simple camaraderie ou l'échange entre collègues' ;

- qu'elle en a parlé au délégué syndical dès le mois de mars 2006, ainsi qu'à la direction de l'entreprise, car la situation perdurait avec des messages de plus en plus osés ;

- que l'employeur n'en a pas tenu compte et a fait preuve de mauvaise foi, en faisant état auprès de l'inspecteur du travail d'un prétendu harcèlement de sa part à l'encontre de sa collègue, Mme [I], alors qu'il ne l'a jamais interpellée pour ces faits.

En ce qui concerne la demande de rappel de salaire, [G] [N] soutient que lorsqu'elle a été embauchée en contrat à durée déterminée, en raison d'un accroissement temporaire d'activité, elle bénéficiait du coefficient 150, et que l'employeur ne pouvait, lors de l'embauche définitive, la classer à un niveau inférieur.

Elle précise ne pas avoir retrouvé de travail et avoir subi un préjudice moral et psychologique en lien avec les agissements de l'employeur et avoir même dû être arrêtée pour maladie.

La SARL MAIN SECURITE, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement bien fondé et, formant appel incident, sollicite le rejet de la demande de rappel de salaire et la condamnation de [G] [N] à lui payer 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose :

- que le changement de poste (du bâtiment 'accueil visiteurs n° 216" au bâtiment 'magasin 92" à 300 mètres, sans changement de site ni de client ) n'est pas une mutation et qu'il a été effectué en laissant le temps à [G] [N], qui avait bien reçu ses plannings, de s'organiser ;

- que la salariée n'apporte aucun élément probant sur les accusations de harcèlement qu'elle porte à l'encontre de [W] [B] avec lequel elle a eu une relation extra-professionnelle à laquelle l'employeur est totalement étranger.

Elle fait remarquer que [G] [N] ne formule pas de demande concernant ce grief de harcèlement.

Elle soutient avoir respecté la loi et la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité en attribuant à [G] [N] le coefficient conventionnel des salariés qu'elle remplaçait puis en lui appliquant la classification d'agent d'exploitation chargé de l'accueil et les critères conventionnels d'évolution professionnelle.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues oralement et sans modification à l'audience.

Sur le licenciement :

Aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, l'employeur vise le fait que [G] [N] s'est présentée à son poste les 7, 8 et 9 mai 2007 à 8 heures alors qu'elle était planifiée de 13 heures à 20 heures.

Il ajoute : 'Compte tenu du contexte social et de votre récente plainte auprès de M. l'inspecteur du travail nous avons cherché à jauger dans quelle mesure vos nombreuses absences et retards de ces derniers mois pouvaient être liés à ce climat ambiant. Nous vous avons alors proposé une affectation chez un autre de nos clients du bassin de [Localité 6] afin de vous permettre de demeurer dans nos effectifs tout en vous éloignant de chef de site que vous avez nommément mis en cause (sans que cette proposition revête un quelconque caractère de reconnaissance, même implicite, d'une éventuelle culpabilité du chef de site en question).

Vous nous avez alors expliqué que vos contraintes familiales ne vous permettent pas d'assumer d'autres horaires de travail qu'en jours ouvrés. Nous vous avons alors fait remarquer que cette position est incompatible avec vos engagements contractuels et conventionnels. (...) D'autre part nous vous avons confirmé ne pas avoir sur [Localité 6] de postes de travail pouvant vous garantir des horaires ouvrés. Vous nous avez alors confirmé votre incapacité à pouvoir assumer les horaires de ces sites clients.

Comme nous avons eu l'occasion de vous le rappeler, le strict respect des horaires fait partie intégrante de vos obligations contractuelles et conventionnelles ; en ne vous y conformant pas et en nous informant dès à présent que vous persisterez dans ce comportement sauf à obtenir les horaires de travail que vous estimez compatibles avec vos obligations familiales, vous démontrez votre incapacité à assumer vos obligations contractuelles et conventionnelles. Un tel manquement constitue une faute professionnelle qui nuit à la bonne marche du service auquel vous êtes affecté et donc à la qualité de notre prestation.'

[G] [N] ne conteste pas la réalité de ces faits mais estime qu'ils ne sont pas suffisamment sérieux pour justifier son licenciement et soutient que, suite à la dénonciation de faits graves de harcèlement de la part de son chef de site, l'employeur l'a abusivement contrainte à effectuer des horaires qu'il savait incompatibles avec sa vie familiale.

Au vu des pièces produites, et notamment des plannings de travail produits pour les mois d'octobre à décembre 2005, de mai et août 2006 et de janvier à mai 2007, il apparaît que c'est à compter du mois de janvier 2007 que [G] [N] a cumulé des retards ' les 24, 29 et 30 janvier, pour lesquels l'employeur lui a notifié un avertissement le 31 janvier 2007 ' des absences pour maladie (les 1er et 2 février, du 12 au 25 février, le 1er mars, du 6 au 25 avril, les 3 et 4 mai) et des absences non autorisées (les 20 et 30 mars).

Si les appels téléphoniques invoqués par la salariée à l'appui de ce qu'elle qualifie de harcèlement datent de l'année 2005 et, aux dires mêmes de la salariée à l'huissier de justice mandaté par elle pour les constater, ont cessé en février 2006, l'employeur ne conteste pas que [G] [N] en avait informé le délégué syndical, [T] [U], avant même de les dénoncer à l'inspecteur du travail et à l'employeur le 30 avril 2007.

L'employeur n'ignorait donc pas les difficultés relationnelles entre [G] [N] et son responsable, [W] [B], qu'il a pourtant promu, courant 2006, au poste de chef de site.

Pour contester le lien entre les changements d'horaires qu'il a décidés et les faits dénoncés par la salariée, l'employeur explique que, par lettre du 3 avril 2007, il a confirmé à [G] [N] qu'à compter du 1er avril 2007 la prestation sur le site de ST Microelectronics [Localité 5] était profondément réorganisée ; que la prestation d'accueil féminin de sécurité au bâtiment B1 était arrêtée et que de nouveaux postes étaient créés ; qu'en application du critère de sélection retenu (l'ancienneté inverse dans la fonction) [G] [N] se trouvait affectée à un nouveau poste de travail toujours sur le site de [Localité 5] ; que, compte tenu du délai extrêmement court de prévenance accordé par le client, et pour tenir compte de ses difficultés à assumer la garde de ses enfants, ses plannings et rythmes de travail avaient été modifiés pour le mois d'avril 2007, mais que ces aménagements spécifiques ne pourraient perdurer.

Il ne produit toutefois aucun document relatif à la réorganisation prétendument imposée par le client à la fin du mois de mars 2007.

Par ailleurs en ce qui concerne le refus opposé par [G] [N] à la proposition de poste chez un autre client du bassin de [Localité 6], la cour ne trouve dans les pièces des parties aucun autre document que le courrier adressé le 30 avril 2007 par [G] [N] à l'inspecteur du travail, avec copie à l'employeur, dans lequel elle fait état de pressions morales et de harcèlement de la part de sa hiérarchie, et de ce qu'il lui est 'imposé un changement radical de statut et de modifications d'horaires (la) mettant dans l'obligation de refuser en raison de (ses) obligations familiales'.

Dans sa réponse le 11 mai 2007 à l'inspecteur du travail, l'employeur, après avoir rappelé la chronologie de la relation de travail, s'étonne des doléances de la salariée relatives à ses plannings et note, à propos du changement de statut et d'horaires à l'origine du refus de celle-ci: 'elle semble oublier les dispositions des articles 6 de son contrat de travail et 7.01 de la convention collective', sans autre commentaire.

Ainsi, comme l'employeur le précise lui-même dans la lettre de licenciement, la réponse qu'il a apportée aux plaintes de la salariée relatives à ses difficultés relationnelles avec le chef de site a été une proposition de poste sur un autre site avec des horaires dont il n'ignorait pas les incidences sur la vie familiale de la salariée, alors que jusqu'alors il avait été en mesure de lui assurer des plannings compatibles avec ses contraintes horaires.

A défaut de preuve des motifs inhérents à l'organisation de l'entreprise, l'employeur a fait une application abusive de la clause contractuelle de mobilité, et le refus de la salariée de se plier aux modifications d'horaires qui lui étaient ainsi imposées ne saurait constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement sera donc infirmé.

[G] [N] qui avait moins de deux ans d'ancienneté peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse calculée en fonction du préjudice réellement subi.

Compte tenu de son ancienneté de 20 mois, du montant de sa rémunération, des circonstances de la rupture et du fait qu'elle n'a pas retrouvé de travail, il lui sera alloué la somme de 6.000 euros réparant l'ensemble des préjudices subis.

Sur le coefficient :

La qualification professionnelle d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions qu'il exerce réellement et par référence aux définitions conventionnelles, en l'occurrence celles contenues dans l'accord national du 1er décembre 2006 sur les métiers de la prévention sécurité.

Il n'est pas contesté que, lors de son embauche en contrat à durée indéterminée le 3 octobre 2005, [G] [N] exerçait en qualité d'agent d'exploitation, chargé de l'accueil.

Au terme de l'annexe II de l'accord, relative à la classification des postes, les agents d'exploitation sont répartis, selon l'étendue de leurs tâches, en 5 niveaux.

[G] [N] était classée au niveau II, échelon 2, coefficient 120 puis, à compter du mois de novembre 2006, au niveau III, échelon 2, coefficient 140.

Le fait qu'elle ait précédemment, dans le cadre de contrats à durée déterminée distincts, occupé des postes en remplacement de salariés dont le coefficient était supérieur ne lui a pas conféré le droit de conserver cette classification.

Le seul élément versé aux débats pour apprécier les activités qu'elle exerçait réellement est sa fiche signalétique faisant apparaître notamment ses diplômes et formations, et sa fonction d'hôtesse d'accueil.

Or il apparaît à l'examen des fiches signalétiques de quatre de ses collègues, hôtesses comme elle, ayant pour certaines moins de diplômes qu'elle, que celles-ci bénéficiaient toutes du coefficient 150. L'employeur n'apporte pour sa part aucun élément concret de nature à justifier cette disparité.

La décision des premiers juges d'accorder à [G] [N] le coefficient 150 doit donc être confirmée.

Sur les frais de défense :

L'équité commande d'allouer à [G] [N] la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse,

et statuant à nouveau,

- Dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- Condamne la SARL MAIN SECURITE à payer à [G] [N] 6.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- confirme le jugement pour le surplus,

y ajoutant,

- Condamne la SARL MAIN SECURITE à payer à [G] [N] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne la SARL MAIN SECURITE aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/00599
Date de la décision : 16/11/2009

Références :

Cour d'appel de Grenoble, arrêt n°09/00599


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-16;09.00599 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award