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01/12/2008 | FRANCE | N°05/2100

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre civile 1, 01 décembre 2008, 05/2100


SCP CALAS

SCP POUGNAND
Me RAMILLON
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 01 DECEMBRE 2008
Appel d'un Jugement (No R. G. 02 / 02948) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE en date du 31 mars 2005 suivant déclaration d'appel du 10 Mai 2005

APPELANTS :

Monsieur Jean-Louis Y... né le 12 Mars 1945 de nationalité Française... 26460 LE POET CELARD

représenté par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour assisté de Me CHAMPAUZAC, avocat au barreau de VALENCE substitué par Me DELHOMME, avocat au même barrea

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Madame Annie B... épouse Y... née le 31 Mars 1947 de nationalité Française... 26460 LE POET C...

SCP CALAS

SCP POUGNAND
Me RAMILLON
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 01 DECEMBRE 2008
Appel d'un Jugement (No R. G. 02 / 02948) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE en date du 31 mars 2005 suivant déclaration d'appel du 10 Mai 2005

APPELANTS :

Monsieur Jean-Louis Y... né le 12 Mars 1945 de nationalité Française... 26460 LE POET CELARD

représenté par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour assisté de Me CHAMPAUZAC, avocat au barreau de VALENCE substitué par Me DELHOMME, avocat au même barreau

Madame Annie B... épouse Y... née le 31 Mars 1947 de nationalité Française... 26460 LE POET CELARD

représentée par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour assistée de Me CHAMPAUZAC, avocat au barreau de VALENCE substitué par Me DELHOMME, avocat au même barreau

INTIMEES :

S. A. SOCMA prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège Route de Valence Quartier Les Chirons 26760 BEAUMONT LES VALENCE

représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me CABROL-CACHARD, avocat au barreau de VALENCE

CAVENCO Ctra Castellon K 225 50730 EL BURGO DE EBRO ZARAGOZA (ESPAGNE)

représentée par la SCP HERVE-JEAN POUGNAND, avoués à la Cour assistée de Me Jean-Paul ARMAND, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Stéphanie JACQUEMIN, avocat au même barreau

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Françoise LANDOZ, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,

Assistées lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 27 Octobre 2008, Madame KLAJNBERG a été entendue en son rapport.
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
Jean Louis Y... a commandé le 5 février 1998 à la société SOCMA la fourniture d'une installation spéciale destinée à l'élevage de cailles pour un montant de 42.685,72 € HT (280.000 F).
Parallèlement il a conclu un contrat d'intégration avec la société BERANGER, qui fournissait des cailleteaux juste éclos, à charge pour lui de les engraisser jusqu'à maturité, et de les faire reprendre pour abattage et commercialisation.
Considérant que le matériel d'alimentation livré par le SA SOCAM était un équipement inadapté à l'élevage de cailles et que le matériel d'abreuvement également fourni par celle-ci était défectueux, les époux Y... ont assigné le 20 septembre 2002 la SA SOCMA devant le tribunal de grande instance de Valence en résolution judiciaire de la vente et réparation de leurs divers préjudices.
Par jugement du 31 mars 2005 le tribunal de grande instance de Valence les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes et condamnés à titre reconventionnel à payer à la société SOCMA la somme de 17.248, 60 € en règlement du solde impayé du matériel, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, outre une indemnité de 1.000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Les époux Y... ont relevé appel de cette décision et demandent par voie d'infirmation à la cour de :

" Rejeter la demande d'irrecevabilité ou de nullité de l'expertise formée par la société CAVENCO.
Prononcer la résolution du contrat de vente conclu avec la société SOCMA, aux torts exclusifs de celle-ci.
Condamner la société SOCMA à payer aux époux Y... la somme de 43.453,15 € en restitution des sommes perçues au titre du contrat résolu, outre intérêts de droit à compter de l'assignation, soit le 20 septembre 2002, et anatocisme au 20 septembre 2003, 2004 et 2006.
Donner acte aux époux Y... de ce qu'ils s'engagent à restituer, une fois la résolution prononcée, la partie de l'équipement SOCMA encore en place, démontée et conservée.
Condamner la société SOCMA à réparer l'entier préjudice subi par les époux Y... :
-7.421,40 € en réparation de la perte subie par rapport à la rémunération contractuelle minimale en application du contrat d'intégration,-2.527,60 € en réparation de la destruction de la première bande de cailles,-5.747,46 € au titre des pertes d'exploitation pour 1998,-15.816,93 € au titre des pertes d'exploitation pour 1999.

Subsidiairement sur ces deux derniers chefs de demande, ordonner une expertise comptable dont la consignation sera mise à la charge des époux Y....
Condamner la société SOCMA à leur payer une somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Condamner la société SOCMA aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise. "

Au soutien de leur recours ils font valoir en substance que :

- la SOCMA était présente aux deux accedits de l'expert et ce dernier n'avait pas l'obligation de rédiger un prérapport,
- l'expert a constaté la non-conformité du matériel installé et ses conséquences néfastes sur l'élevage des cailles,
- malgré les différentes interventions de la SOCMA pour changer les nourrisseurs à trois reprises en deux mois, les cailles livrées étaient d'un poids inférieur à celui requis par le contrat d'intégration,
- la non-conformité du système d'abreuvement en eau des cailles est caractérisée et avait été signalée dès mai 1998,
- aucune faute ne peut leur être imputée dans l'organisation et la gestion de leur élevage,
- précédemment éleveurs de pintades, ils connaissaient les règles sanitaires et techniques générales de cette activité avicole,
- l'expert a également mis en évidence la responsabilité de CAVENCO à l'égard de SOCMA,
- la responsabilité contractuelle de SOCMA est notamment engagée sur la perte de rémunération minimale contractuelle par la SA BERANGER qui s'est soldée par une transaction du 16 mai 2000 avec cette société.

La SA SOCMA sollicite la confirmation du jugement et subsidiairement demande à la cour de :

" Condamner CAVENCO à la relever et garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre pour tout ce qui concerne le matériel d'alimentation défectueux et les éventuels préjudices annexes.
Condamner les époux Y... à lui payer une somme de 3.000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Condamner la société CAVENCO à lui payer la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice causé par ses conseils inadaptés.
Condamner la société CAVENCO à lui payer une somme de 3.000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle conclut pour l'essentiel que :

- du jour où les assiettes BIG DEUTCHMAN ont été fournies en juillet 1998 l'installation de Jean Louis Y... était opérationnelle,
- les assiettes BIG DUTCHMAN convenaient parfaitement aux tubes livrés,
- la société SOCMA a justifié être intervenue à différentes reprises pour remplacer le matériel signalé comme étant défectueux par les époux Y..., dans des délais extrêmement rapprochés,
- il a été proposé à Jean Louis Y... de changer gratuitement les pipettes, ce qu'il a refusé,
- d'autres paramètres interviennent et permettent d'expliquer la non-rentabilité de cet élevage,
- le réglage en aliments et en eau relève de la responsabilité de l'éleveur exclusivement,
- les époux Y... ne démontrent pas que les pertes d'exploitation et l'arrêt de l'exploitation sont liés de façon directe et certaine au matériel installé par la société SOCMA,
- les pertes d'exploitation subies par les époux Y... sont imputables à une mauvaise gestion du système d'alimentation et du système d'abreuvement qui relève de leur propre négligence et de leur propre responsabilité,
- l'arrêt de l'élevage des cailles par les époux Y... résulte d'un choix commercial auquel elle est étrangère,
- la société SOCMA n'a pas été reconnue responsable de l'asphyxie d'une bande d'élevage en avril 1998,
- la demande présentée par la société SOCMA à l'encontre de la société CAVENCO est fondée sur la garantie contractuelle accordée par la société CAVENCO, comme indiqué dans son catalogue, et sur le défaut de conformité des produits livrés par la société CAVENCO,
- la société CAVENCO savait que le matériel était utilisé pour un élevage de cailles,
- le matériel était correctement monté selon le schéma fourni par la société CAVENCO avec un défaut pour l'écoulement de l'aliment, lequel reste concentré à la sortie de l'entonnoir,
- l'aliment distribué aux cailles ne peut être mis en cause,
- le jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001 qui l'a condamnée à payer la facture CAVENCO n'a pas statué sur le litige aujourd'hui soumis devant la cour.

La société de droit espagnol CAVENCO demande quant à elle à la cour de constater à titre principal l'inopposabilité du rapport d'expertise judiciaire voire sa nullité, à titre subsidiaire de confirmer le jugement déféré et, en tout état de cause, de condamner la société SOCMA ou la partie succombante à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait ainsi remarquer que :
- l'expert n'a pas informé suffisamment les parties notamment sur le calendrier et le déroulement de sa mission,
- il n'a pas transmis de compte-rendu de ces deux accédits et n'a pas établi de prérapport d'expertise,
- il ne lui a pas envoyé le rapport d'expertise,
- il ne s'agit pas d'une exception de procédure devant être portée devant le conseiller de la mise en état mais une violation du principe du contradictoire,
- les questions relatives à la validité de la vente, la garantie et plus généralement la responsabilité contractuelle de la société CAVENCO ont été définitivement tranchées par le jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001,
- les produits livrés sont conformes aux demandes de la société SOCMA,
- la société CAVENCO a fourni à la société SOCMA des assiettes mangeoires et non des lignes complètes de mangeoires,
- les auges CAVENCO ont été accouplées aux lignes d'alimentation non fabriquées par CAVENCO,
- ce n'est qu'après test de ces mangeoires qui ont donné toute satisfaction, que la commande a été validée par SOCMA,
- elle est étrangère aux problèmes de montage de l'installation,
- l'arrêt postérieur de l'élevage des cailles n'a en aucun cas été motivé par le défaut de fonctionnement technique du matériel destiné à nourrir lesdites cailles.

MOTIFS ET DÉCISION

Sur la nullité du rapport d'expertise :
Attendu qu'il résulte du rapport d'expertise et des pièces produites par les parties que la société CAVENCO était bien présente aux deux réunions d'expertise et qu'elle a tout comme la société SOCMA et les époux Y... pu adresser le 22 juin 2006 un dire à l'expert judiciaire, lequel, aux termes de la mission confiée par la cour, n'était pas tenu d'adresser un prérapport ;
Que si l'expert a omis d'adresser son rapport à cette société, il n'en demeure pas moins que par les communications intervenues entre les parties, la société CAVENCO a pris connaissance de ce document qui lui a été finalement remis et dont elle a débattu ;
Que la société CAVENCO qui échoue à démontrer la violation du principe du contradictoire lors des opérations d'expertise sera déboutée de sa demande de nullité du rapport ;
Sur la demande de résolution du contrat de vente :
Attendu que les époux Y... soutiennent que l'inadaptation du système installé par SOCAM ne leur a pas permis de fournir des cailles conformes au poids contractuel tel que défini dans le contrat d'intégration, ce qui a conduit au non-respect par la SA BERANGER de la rémunération minimale contractuelle et à la rupture anticipée du contrat d'intégration ;
Qu'il est établi par les pièces produites aux débats que le 5 février 1998 Jean Louis Y... a passé commande à la SA SOCMA d'une installation destinée à la production de cailles, comprenant le chauffage, l'abreuvement par pipettes spéciales cailles, l'alimentation automatique avec fourniture d'assiettes spéciales cailles et la gestion d'ambiance ;
Que ce matériel a été livré le 30 mars 1998 et que Jean Louis Y... ayant le 9 mars 1998 conclu un contrat d'intégration avec la SA BERANGER, un premier lot de cailles a été installé le 27 avril 1998 ;
Attendu que le 2 mai 1998 Annie Y... a avisé la SA SOCMA d'un certain nombre de dysfonctionnements parmi lesquels la déficience des nourrisseurs ;
Que le 22 mai suivant la SA BERANGER a écrit à Jean Louis Y... pour attirer son attention sur un déficit de poids des cailles provenant des mangeoires qui ne distribuaient pas correctement les aliments et ne correspondaient pas aux mangeoires qu'elle préconisait ;
Que le 3 juin 1998 la SA SOCMA a donc commandé à ses frais un second modèle d'assiettes, qui n'a pas plus donné satisfaction comme en atteste un second courrier de la SA BERANGER du 3 juillet 1998, menaçant Jean Louis Y... de rompre le contrat d'intégration après la prochaine bande si les mangeoires n'étaient pas à nouveau changées par des mangeoires de type BIG DUTCHMAN ;
Que le 3 juillet 1998 Jean Louis Y... en a donc avisé par courrier la SA SOCMA, en lui rappelant outre les dysfonctionnements visés dans son précédent courrier " les problèmes de fuites sur les pipettes ", ce qui a amené cette société à faire procéder le 31 juillet 1998 au remplacement à ses frais (31.277,61 F) de toutes les assiettes par un modèle de marque BIG DUTCHMAN ;
Qu'entre temps Annie Y... avait déclaré un incident d'élevage survenu le 1er juin 1998 dû à un dysfonctionnement du régulateur STA 06 Type 2 installé en mars 1998 par SOCMA et qui à l'origine de l'asphyxie de 24 300 cailles a été remplacé ;
Attendu que dès le 19 octobre 1998 Jean Louis Y... a manifesté son désaccord auprès de la SA BERANGER concernant " le point n° 3 de la nouvelle grille de rémunération " ;

Que si la SA SOCMA a fait diligence pour procéder au remplacement desdites assiettes, il reste que le tableau des résultats des 11 bandes dressé par l'expert judiciaire révèle que malgré une amélioration du taux de mortalité puis du poids moyen des cailles (prêt à cuire) à partir de l'utilisation de l'assiette BIG DUTCHMAN dont l'adéquation n'est cette fois-ci pas remise en cause, l'ensemble des résultats de cet élevage restait insuffisant puisque le poids moyen des cailles prévu au contrat d'intégration (162 grammes) ne sera atteint qu'une seule fois à l'occasion de la septième bande les 9 et 16 mars 1999 ;

Qu'en effet le 7 septembre 1999, la SA BERANGER a écrit à Antoine Y... , fils des appelants, que le poids des cailles abattues le 2 septembre 1999 était très faible (moins de 130 grammes) et que cela était dû " à un manque d'eau important " ;
Que le 12 janvier 2000 Annie Y... a écrit à la SA BERANGER pour se plaindre du non-respect par celle-ci de l'article 7 du contrat (non-respect des 90 cailles au m²), de l'article 10 et de l'article 14 relatif à la grille de rémunération, modifiée unilatéralement par la SA BERANGER ;
Que les 13 et 24 janvier 2000, elle a mis en demeure la société de lui payer une somme de 108.015,15 F TTC sur la base d'une rémunération minimale contractuelle de 81.600 F HT jamais versée depuis le début de leurs relations ;
Attendu que c'est dans ces circonstances que le 16 mai 2000 elle a signé une transaction avec la SA BERANGER faisant suite à la rupture anticipée du contrat d'intégration lié " aux conditions d'exécution de ce contrat et notamment à la rémunération de M. HILAIRE ", transaction aux termes de laquelle Jean Louis Y... a perçu pour solde de tout compte une somme de 60.000 F TTC ;
Que l'expert conclut, contrairement à la thèse soutenue par les époux Y..., que les assiettes BIG DUTCHMAN convenaient parfaitement aux tubes livrés par SOCMA, ce qui explique l'absence de récriminations des éleveurs après leur installation ;
Attendu qu'en revanche l'expert judiciaire met en cause le système d'abreuvage des cailles installé par la société SOCMA, lequel s'est avéré fuyard comme l'avait rappelé Jean Louis Y... dans sa lettre du 3 juillet 1998 ;
Que l'expert souligne en outre que le fournisseur et fabricant de pipettes avait finalement admis la nécessité de les changer et de les remplacer par un autre modèle mieux adapté à l'installation ;
Que d'ailleurs par télécopie du 27 avril 2000 la SA SOCMA avait proposé à Jean Louis Y... d'appuyer sa demande de remplacement des pipettes auprès du fournisseur à condition qu'il règle le solde de la facture de 113.143, 41 F, ce qu'il a refusé eu égard à cette condition et au fait que cette proposition arrivait trop tard, comme il l'a écrit à SOCMA le 14 juin 2000 ;
Que J. Chantepy, technicien d'élevage, atteste avoir dès son arrivée chez HILAIRE en juillet 2001 constaté un dysfonctionnement des pipettes qui gouttaient énormément sur les litières et lui avoir conseillé d'en changer en raison des conséquences néfastes de ces fuites sur les animaux ;
Que l'expert judiciaire précise que les fuites sur ces pipettes ne pouvaient qu'affecter la litière des cailles dont l'élevage est particulièrement délicat, favorisant les maladies respiratoires et les répercussions négatives sur le métabolisme de celles-ci, à l'origine de lots petits et hétérogènes ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le système d'abreuvement dont la déficience a été dénoncée de juillet 1998 à avril 2000 par Jean Louis Y... était impropre à sa destination à savoir l'élevage de cailles ;
Qu'en définitive, et quand bien même la SOCMA a finalement installé en juillet 1998 des mangeoires adaptées à cet élevage puis changé courant juin 1998, le régulateur défectueux installé dans un des bâtiments à l'origine de l'asphyxie de 24.300 cailles, la mise en oeuvre d'un système d'abreuvement qui n'a jamais cessé d'être défectueux car inadapté, s'ajoutant à ces précédents désordres, a constitué avec ceux-ci une accumulation de dysfonctionnements qui ont handicapé durablement l'élevage de cailles entrepris par les époux Y... à tel point qu'ils ont cessé cette activité en mai 2000 ;
Qu'il est ainsi établi que la SA SOCMA qui s'était engagée à fournir les équipements nécessaires à cet élevage de cailles à façon a mis en oeuvre des équipements inadaptés à la destination convenue avec Jean Louis Y... ;
Que le non-respect de ces engagements par cette société justifie par application de l'article 1604 du Code civil, de prononcer à ses torts la résolution du contrat de vente du 5 février 1998 ;
Que la SA SOCMA sera en conséquence condamnée à restituer le montant des sommes versées soit 43.453, 15 € conformément au relevé de comptes clients de la SA SOCMA de novembre 1999 et les intérêts de droit à compter du 20 septembre 2002 date de l'assignation, avec capitalisation à compter du 29 novembre 2006 date de la demande ;
Que les époux Y... seront condamnés à restituer à SOCMA les équipements qu'elle lui a livrés et qu'elle devra reprendre ;

Sur l'indemnisation des préjudices des époux Y... :

Attendu par ailleurs que les époux Y... n'ont pas perçu la rémunération minimale garantie au contrat d'intégration conclu avec la société BERANGER qui était de 81.600 F HT par bande, soit un différentiel de 108.861,22 F TTC pour 9 bandes en raison de leur incapacité à fournir des cailles dont le poids était conforme aux normes contractuelles ;

Que déduction faite de la somme de 60.000 F réglée à titre transactionnelle par la SA BERANGER dans le cadre de la résolution du contrat d'intégration consécutive également à d'autres inexécutions de ce contrat comme expliqué ci-dessus, cette perte de rémunération s'élevait donc à la somme de 7.421,40 € ;

Que la perte de la bande de cailles liée au défaut du régulateur installé par SOCMA ayant fait l'objet d'une indemnisation partielle par l'assurance GROUPAMA, la SOCMA devra en régler le solde aux époux Y... soit 2.527, 60 €, la faute de ceux-ci dans l'utilisation de ce matériel n'étant pas établi ;
Attendu que les époux Y... n'établissent pas que l'intégralité du déficit de leur élevage pendant les années 1998 et 1999 est imputable à la SOCMA, alors qu'ils débutaient dans l'élevage des cailles qui est beaucoup plus sensible que l'élevage de pintades auquel ils s'adonnaient antérieurement, qu'ils ne fournissent ni bilan prévisionnel de leur activité lorsqu'elle a commencé ni la grille de rémunération du contrat d'intégration et que le 16 septembre 1999 Annie Y... a incriminé la chaleur ayant affecté une bande de cailleteaux pendant le transport ou le couvoir et ainsi avisé la SA BERANGER qu'elle était responsable d'une mortalité importante des cailles ;
Que la lecture dues comptes de résultat révèle en outre que les mauvais résultats de l'exercice 1999 sont la résultante non pas seulement des travaux à façon plutôt en augmentation, mais d'une diminution des produits d'activités annexes et d'une très forte augmentation des charges de " combustibles " ;
Qu'ainsi outre le remboursement du coût de l'installation, la SA SOCMA sera condamnée à payer aux époux Y... la somme de 7.421,40 € correspondant à la perte de rémunération minimale garantie que la société BERANGER ne lui a pas payée intégralement en raison des résultats constamment insuffisants en nombre et en poids des cailles produites, du fait des inadaptations successives des différents équipements fournis par cette société et la somme de 2.527,60 € correspondant aux conséquences du dysfonctionnement du régulateur ;
Que le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;

Sur l'appel en garantie de la SA SACMO à l'encontre de la société CAVENCO :

Attendu sur la recevabilité de ce recours, que le tribunal de commerce de Romans dans son jugement du 25 avril 2001 a statué d'une part sur la demande en paiement de la société CAVENCO contre la SA SOCMA et d'autre part sur la défense à paiement développée par SOCMA devant cette juridiction, relative à l'inexécution de son obligation de délivrance par la société CAVENCO ;

Que la SOCMA soutenait en effet qu'elle n'était pas redevable du prix des mangeoires facturées par CAVENCO le 3 mars 1998 et le 18 juin 1998, car celles-ci s'étaient avérées inadaptées à l'élevage de Jean Louis Y..., qu'elle avait dû commander des mangeoires de marque Dutchman en remplacement et que son client retenait une somme de 113. 143, 41 F sur le montant de ses propres factures ;

Que le tribunal de commerce a dans la décision dont s'agit, retenu que la non conformité des fournitures livrées par CAVENCO n'était pas démontrée et a dans son dispositif : " Dit que la société SOCMA n'apparaît pas fondée à s'opposer au règlement des sommes facturées par CAVENCO en contrepartie des marchandises livrées " ;
Qu'il s'ensuit que la SA SOCMA n'est plus recevable à agir contre CAVENCO en l'état de ce jugement qui est aujourd'hui définitif et a autorité de la chose jugée ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,
Déboute la SA SOCMA de ses demandes,
Prononce la résolution du contrat de vente du 5 février 1998 aux torts de la SA SOCMA,
Condamne la SA SOCMA à rembourser aux époux Y... la somme de 43.453,15 € et les intérêts de droit à compter du 20 septembre 2002 date de l'assignation, avec capitalisation des intérêts en cours à compter du 29 novembre 2006,
Condamne la SA SOCMA à payer aux époux Y... la somme de totale de 9.949 € à titre de dommages et intérêts,
Dit que les époux Y... devront mettre à disposition de la SA SOCMA l'installation litigieuse qui sera reprise par ses soins,
Déboute la société CAVENCO de sa demande d'annulation des opérations d'expertise,
Déclare irrecevable l'appel en garantie de la SA SOCMA à l'encontre de la société de droit espagnol CAVENCO,

Condamne la SA SOCMA à payer aux époux Y... une indemnité de 2.500 € et à la société CAVENCO une indemnité de 1.500 € au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne la SA SOCMA aux dépens des procédures de première instance et d'appel avec application de l'article 699 au profit de Me RAMILLON qui en a demandé le bénéfice.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile,
SIGNÉ par Madame LANDOZ, Président, et par Madame LAGIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 05/2100
Date de la décision : 01/12/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

ARRET du 30 septembre 2010, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 30 septembre 2010, 09-11.552, Publié au bulletin

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Valence, 31 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-12-01;05.2100 ?
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