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13/10/2008 | FRANCE | N°08/887

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre civile 1, 13 octobre 2008, 08/887


SCP GRIMAUD

SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 13 OCTOBRE 2008

Appel d'un Jugement (N° RG 03 / 00185) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP en date du 20 février 2008 suivant déclaration d'appel du 27 Février 2008

APPELANTE :

Madame Michèle X... épouse Y... née le 08 Décembre 1950 à DIGNE LES BAINS (04000) de nationalité Française... 05100 BRIANCON

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Alfred DERRIDA, avocat au barreau de GRENOBLE
>INTIME :

Monsieur Stéphane A... né le 30 Août 1968 à BRIANCON (05100) de nationalité Française... 33470 G...

SCP GRIMAUD

SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 13 OCTOBRE 2008

Appel d'un Jugement (N° RG 03 / 00185) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GAP en date du 20 février 2008 suivant déclaration d'appel du 27 Février 2008

APPELANTE :

Madame Michèle X... épouse Y... née le 08 Décembre 1950 à DIGNE LES BAINS (04000) de nationalité Française... 05100 BRIANCON

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Alfred DERRIDA, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

Monsieur Stéphane A... né le 30 Août 1968 à BRIANCON (05100) de nationalité Française... 33470 GUJAN MESTRAS

représenté par la SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC, avoués à la Cour assisté de Me DESQUEYROUX-LABORDE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame Françoise LANDOZ, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller, Assistées lors des débats de Mme Hélène X..., Greffier.

DEBATS :
A l'audience publique du 08 Septembre 2008, fixée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 02 avril 2008, Madame LANDOZ a été entendue en son rapport.
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
Exposé du litige

Casimir X... né le 15 mars 1922, est décédé le 15 août 2002, sans enfants.

Il avait fait un testament olographe le 24 mai 1991 déposé en l'étude de Maître C... notaire à BRIANÇON par lequel il instituait comme légataire universelle sa nièce, Michèle X... épouse Y... à laquelle il léguait la totalité de ses biens mobiliers et immobiliers.
Par un autre testament daté du 24 mars 2000, déposé en l'étude de Maître D... notaire à CASTELSARRASIN, Casimir X... instituait Stéphane A... légataire universel de tous ses biens.
Entre-temps, par acte du 30 décembre 1999, Casimir X... avait fait donation de la nue-propriété de la maison à usage d'habitation et des parcelles de terre lui appartenant à Laurent Y..., fils de Michèle X... épouse Y....
Par acte du 13 février 2003 Michèle X... épouse Y... a fait assigner Stéphane A... devant le Tribunal de Grande Instance de GAP pour voir annuler le testament du 24 mars 2000.
Monsieur E... a été désigné en qualité d'expert par ordonnance du juge de la mise en état du 20 janvier 2004 ; ce magistrat a ordonné la consignation par Stéphane A... au compte séquestre de la CARPA de la somme de 106 757, 72 € représentant les liquidités de la succession ; Madame F... a été désignée en qualité d'expert par ordonnance du juge de la mise en état du 18 octobre 2005.
Au vu des conclusions du rapport d'expertise de Monsieur E... du 22 février 2005 et du rapport de Madame F... du 20 décembre 2006, le tribunal a dit que la preuve n'était pas rapportée de la fausseté du second testament.
Michèle X... épouse Y... a interjeté appel de cette décision le 27 février 2008.
Elle fait valoir que Casimir X... n'était pas en mesure d'écrire au mois de mars 2000 le testament daté du 24 mars 2000 en raison des tremblements importants qui l'affectaient ; outre les éléments du rapport d'expertise de Madame G..., qu'elle a sollicitée, elle fait état, à titre de comparaison, de documents signés par Casimir X... les 9 février 1999, 6 décembre 1999, 30 décembre 1999, 24 février 2000, de la déclaration d'impôts du mois de mars 2000 qui comporte une signature quasi illisible, d'un document signé le 16 mai 2000 avec une écriture de juin 1999.
Elle invoque encore la déclaration de revenus signée le 23 mars 2001, un document du 20 janvier 2001, et diverses attestations de personnes qui confirment que l'intéressé ne pouvait plus écrire à la fin de l'année 1999.
Michèle X... épouse Y... fait également état des éléments médicaux qui attestent des difficultés de santé de Casimir X... atteint d'un syndrome parkinsonien avéré depuis le 23 décembre 1998 ainsi que du placement de ce dernier sous sauvegarde de justice le 8 octobre 2001 et sous la protection de la tutelle par jugement du 21 janvier 2002, éléments qui établissent qu'il ne pouvait être l'auteur du testament daté du 24 mars 2000.
Michèle X... épouse Y... invoque les très bonnes relations qu'elle entretenait avec son oncle et conteste les attestations versées par Stéphane A... pour établir " la grande affection " dont il aurait bénéficié de la part de Casimir X....
Elle relève que Madame F... dans son rapport d'expertise est formelle : le testament n'est pas écrit en entier de la main du testateur, il n'est ni signé ni daté de la main du testateur, la date ayant été ajoutée postérieurement au texte lui-même ; elle soutient que si cet expert a estimé que certaines parties du testament, écrites plusieurs années plus tôt, étaient bien de la main de Monsieur X..., les éléments essentiels tels que SOMMOLONE, le nom de A..., les deux signatures LAGIERne l'étaient pas, ce dont il résulte que ce testament ne répond pas aux exigences de l'article 970 du Code Civil.
Elle critique le jugement déféré en ce qu'il a inversé la charge de la preuve de la sincérité du testament et rappelle qu'en application des dispositions des articles 1315, 1323 et 1324 du Code Civil et 287 et 296 du nouveau code de procédure civile, cette charge pèse sur le légataire qui se prévaut de l'écrit litigieux dès lors qu'il y a dénégation expresse de l'écriture du défunt par ses héritiers et ce, qu'il y ait eu legs particulier, à titre particulier ou à titre universel, ou encore legs universel.
Selon Michèle X... épouse Y..., quelles que soient les limites de la fiabilité de l'expertise F..., Stéphane A... ne rapporte pas la preuve de la sincérité de l'écriture du testament du 24 mars 2000 et de ce que Casimir X... est bien le seul rédacteur de ce testament ; en conséquence, elle demande à la Cour de réformer le jugement déféré.
En tout état de cause, elle rappelle que selon les quatre experts qui ont examiné le testament et les éléments de comparaison, ce testament n'est pas écrit en entier de la main de Casimir X..., il n'est pas signé ni daté de la main de ce dernier.
Elle souligne l'ingratitude de Stéphane A... et les circonstances dans lesquelles le testament litigieux aurait été établi et enregistré.
À titre subsidiaire, elle fait état des conclusions du rapport d'expertise établi le 27 mars 2008 par Madame I..., expert en écriture près la Cour d'Appel de PARIS, agréée par la Cour de Cassation, Conservateur en Chef archiviste-paléographe, diplômée de l'école des Chartes et qui fait " nationalement " autorité en matière de vérification d'écritures ; elle fait valoir que cet expert souligne les réelles différences dans les tracés qui semblent recopiés avec plus ou moins d'aisance à partir du testament de 1993 et le fait que le mouvement de l'écriture litigieuse est aisé et maîtrisé, ce qui ne peut être le cas d'un scripteur diminué physiquement... éléments qui conduisent à mettre en doute l'authenticité du testament.

Elle prétend que dans la mesure où Madame I... a conclu que Casimir X... n'a pas écrit de sa main le testament du 24 mars 2000 et qu'il n'est pas l'auteur des deux signatures y figurant, ce testament étant une imitation à main levée dont de nombreux tracés semblent avoir été effectués à partir du testament du 24 mai 1993 et de son brouillon, une nouvelle expertise technique n'est pas nécessaire.

Elle demande à la Cour de prononcer la nullité du testament du 24 mars 2000, de dire que la somme de 106 757, 72 € déposée sur le compte séquestre de la CARPA des Hautes-Alpes lui sera remise sur simple notification de l'arrêt à intervenir, de condamner Stéphane A... à lui payer les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 31 octobre 2002 outre la capitalisation, et de condamner Stéphane A... à lui payer les sommes suivantes :
-16 000 € en réparation de son préjudice financier,
-30 000 € en réparation de son préjudice moral,
-10 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en remboursement des frais de première instance,
-5 000 € sur le même fondement pour la procédure d'appel.

Stéphane A... répond qu'il résulte des documents médicaux que Casimir X... présentait un tremblement d'attitude, des mains et des bras tendus devant soi, associé à un tremblement d'action qui entraînait une gêne dans les actions de la vie courante, telles que manger, boire, verser de l'eau, dessiner ou écrire.

Il fait valoir que l'expert, Madame F..., rappelle qu'il y a une perturbation de l'écriture et non pas une abolition de celle-ci et que le tremblement idiopathique autosomique signifie que lors de la rédaction d'un document, Casimir X... conservait le tremblement modifiant ainsi ou rendant incertaine son écriture.
Il soutient qu'il est difficile de comparer les formes de lettres changeantes d'un mot à l'autre en raison de ce tremblement, et que cet élément médical est primordial pour mettre en doute certaines analyses de Madame F....
Il souligne que l'expert a mis en avant deux éléments incontestables, à savoir l'absence de manipulation frauduleuse, ou forgerie, du testament, et la certitude que les lignes 1 à 14 ont bien été rédigées par Monsieur X....
Il prétend que l'expert s'est trompé sur la datation de l'écriture du testament et sur la date du testament lui-même, en particulier sur l'année 2000 et souligne que le technicien a parlé de rectification non de fausseté de l'année 2000 et relève que la validité du testament situé dans une période déterminée comme en l'espèce, postérieure à 1998, en fonction de l'adresse indiquée, ne peut être remise en cause.
S'agissant des majuscules pour A... et SOMMELONE, Stéphane A... soutient que Casimir X..., conscient de l'irrégularité de son écriture et des difficultés de relecture, a pu contourner ces risques et faire le choix des majuscules ; le prénom de Stéphane n'est pas contesté, non plus que sa qualité de neveu et son adresse.
Il conteste l'appréciation subjective de l'expert sur la main inconnue qui aurait écrit SOMMELONE et " soussigné " et rappelle qu'il était présent auprès de son oncle lors de la rédaction du testament et qu'il a épelé ces mots pour éviter des fautes.
Sur la mention " fait et écrit de ma main ", Stéphane A... prétend que c'est sur les conseils du notaire, Maître D..., joint par téléphone, que cette formule a été rajoutée et que même si des lettres avaient pu être d'une main étrangère au sein d'un même mot, il n'en reste pas moins que Casimir X... a participé à la rédaction de cette formule et qu'il en a eu parfaitement conscience.
En ce qui concerne les deux signatures apposées sur le testament, Stéphane A... relève que comme d'autres figurant sur divers documents de comparaison, la certitude qu'elles n'émanent pas de Casimir X... n'est pas démontrée.
Selon lui, les trois points de l'identité de l'auteur du testament, de l'identité du bénéficiaire et du lieu de rédaction sont confirmés et rappelle que Casimir X... savait, voyait et comprenait le texte, et que même s'il tremblait, ce qui handicapait son écriture, il n'a jamais été reconnu comme incapable de comprendre ses actes ou incapable de faire un choix ou prendre une décision.
Stéphane A... prétend que le tribunal n'a pas inversé la charge de la preuve puisque selon la Cour de Cassation, c'est à celui qui conteste l'écriture de rapporter la preuve de ses affirmations, et qu'en absence de fausseté établie, le testament reste valable.
Il maintient que la sincérité du testament résulte de l'intention réelle du testateur et que la volonté de Casimir X... est confortée par le conteste familial et les échanges conflictuels entre Michèle X... épouse Y... et son oncle depuis la donation qu'elle lui a fait consentir le 30 décembre 1999, au lendemain de sa sortie de l'hôpital, au bénéfice de son propre fils.
Stéphane A... conteste toute force probante au rapport de Madame I..., dès lors qu'il n'est pas contradictoire, que cet expert a été influencé par les rapports précédents et qu'elle ne s'est appuyée que sur des copies des documents et non pas sur des pièces originales.
Stéphane A... conteste le grief d'ingratitude et rappelle que c'est Michèle X... épouse Y... qui lui nie la qualité d'héritier ; il rappelle sa moralité exemplaire, sa carrière d'officier de l'armée de l'air et les distinctions dont il a fait l'objet.
Il conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qui concerne la validité du testament et forme appel incident pour obtenir la somme de 40 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ; il demande que soit ordonnée à son profit la remise de la somme de 106 757, 72 € avec intérêts au taux légal à compter d'octobre 2002 et la condamnation de Michèle X... épouse Y... à lui payer la somme de 20 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Motifs et décision

Il est de principe que dans le cas où l'écriture et la signature d'un acte sous seing privé sont déniées ou méconnues, il appartient au juge de vérifier l'acte contesté, et que si cette vérification ne lui permet pas de conclure à la sincérité de l'acte, la partie qui fonde ses prétentions sur cet acte doit être déboutée.

L'article 970 du Code Civil dispose que le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit, daté et signé de la main du testateur.
De jurisprudence constante, l'écriture du testateur doit être reconnaissable en dépit des marques d'assistance matérielle qu'un tiers aurait pu lui apporter, de manière à révéler qu'il en est bien le scripteur ; l'assistance doit laisser voir que le testament est l'expression de la volonté propre du signataire, et la nullité est encourue en cas de mention de sa date par un tiers.
Il est également constant que la fausseté de la date énoncée dans un testament olographe équivaut à une absence de date et entraîne la nullité de l'acte, lorsque les éléments émanant de celui-ci ne permettent pas de lui restituer sa date véritable.
Le testament contesté est rédigé comme suit :
" Vallouise le 24 Mars 2000
Testament
Je soussigné X... Casimir né le 15 Mars 1922 à Vallouise étant sain de corps et d'esprit déclare après ma mort je lègue : ma maison, Les champs et L'argent qui me reste à neveu Stéphane A... Demeurant..., 55 170 SOMMELONE

fait à Vallouise le 24 Mars 2000 "

signé X...

et suit la mention manuscrite
" fait et écrit de Ma MAIN ", avec une nouvelle signature X...

Madame F... a procédé à un examen physique du document sous rayonnement infrarouge, rayonnement ultraviolet, lumière rasante multidirectionnelle, sous divers rayonnements et forts agrandissements et a émis l'avis qu'il n'y avait pas de manipulations, ni d'altération, ni de traces de foulages qui auraient servi à guider la main du scripteur ; elle a indiqué avoir trouvé une seule correction, à savoir le 1 remplacé par 2 pour l'année 2000 en tête du testament.

Selon les éléments de l'expertise de Madame F..., qui s'est adjoint les services du docteur J..., Casimir X... était porteur d'un tremblement idiopathique autosomique dominant de nature à gêner son écriture, amélioré par un traitement ; l'analyse du dossier médical indique l'arrêt successif du traitement, avant et pendant l'hospitalisation de décembre 1999 ; l'interruption de ce traitement a pu aggraver ses tremblements lesquels handicapent fortement son écriture ; il apparaît clairement que Monsieur Casimir X..., gêné par ses tremblements aurait cessé d'écrire, confiant cette tâche à d'autres.
Après une étude minutieuse de l'écriture et des signatures du testament litigieux, et par comparaison avec des écrits antérieurs, l'expert a indiqué que ce testament, de la ligne 1 à la ligne 14 à l'exception des noms A... et SOMMELONE et de la date " 2000 " a été rédigé par Monsieur Casimir X... vers 1996 au début de ses tremblements ; Madame F... s'appuie sur la constatation que l'écriture du testament litigieux présente un grand nombre de similitudes formelles avec les écrits de 1993 et de 1999 mais que les tremblements observés dans les écrits de 1999 contrastent avec les lettres sensiblement cabossées de 2000, sachant qu'en 2000, Monsieur X... n'était plus apte à contrôler le déroulement de la séquence des graphèmes.
L'expert ajoute que les noms de A... et SOMMELONE émanent d'une main inconnue ; le 2 de la date " 2000 " de la ligne 1 semble avoir été rectifié par la même main inconnue ; la date " 2000 " à la ligne 14 a été ajoutée par une main inconnue.
La mention " fait et écrit de Ma MAIN " selon l'expert semble avoir été ajoutée au testament dans une deuxième étape et seules les lettres " ait ", " e " et le mot " ma " émanent de Monsieur Casimir X....
Quant aux deux signatures " X... " figurant au bas de l'acte, Madame F... qui reconnaît que les signatures de comparaison sont très variables, indique qu'elles n'émanent pas de la main de Casimir X... ; elle s'appuie sur les divergences qu'elle a observées sur le plan formel et gestuel entre la première signature de l'acte contesté et les signatures de 1996, 1999 et 2000 émanant de Monsieur X..., ainsi que sur les divergences gestuelles et structurelles relevées entre la deuxième signature de l'acte contesté et les signatures de Monsieur X....
Ainsi, si le corps du testament, sauf le nom de A... et SOMMELONE, bien que rédigé en 1996, émane bien de Casimir X..., la date de " 2000 ", la mention complète " fait et écrit de Ma MAIN " et les signatures ne sont pas de la main de Casimir X... ; en conséquence, les conditions essentielles à la validité du testament litigieux ne sont pas réunies.

Il convient de souligner, alors qu'il assure que Casimir X... " savait, voyait et comprenait le texte ", autrement dit, était sain d'esprit, ce que confirme le Docteur K... qui a suivi ce patient en 1999 et début 2000 et qui selon lui, " présentait un intellect parfaitement respecté ", que Stéphane A... n'explique pas comment le testateur qui venait de faire donation de la nue-propriété de ses biens immobiliers, a pu porter en toute connaissance de cause dans le testament contesté, qu'il lui léguait les mêmes biens ; il s'en déduit que la sincérité du testament n'est pas certaine.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le testament daté du 24 mars 2000 doit être déclaré nul.
Michèle X... épouse Y... est fondée à demander que la somme de 106 757, 72 € déposée sur le compte séquestre de la CARPA des Hautes-Alpes lui soit remise sur simple notification de l'arrêt à intervenir ; cependant sa demande tendant à se voir allouer les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 31 octobre 2002 outre la capitalisation n'a pas de fondement juridique et ne peut être accueillie.
Dans la mesure où aucune faute n'est établie à l'encontre de Stéphane A... la demande en paiement de dommages-intérêts formulée contre lui sera rejetée.
Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Michèle X... épouse Y... les frais qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits et non compris dans les dépens ; Stéphane A... devra lui payer une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,
Dit que le testament du 24 mars 2000 est nul,
Dit que Michèle X... épouse Y... légataire des biens de Casimir X... en vertu du testament du 24 mai 1991 pourra demander que la somme de 106 757, 72 € déposée sur le compte séquestre de la CARPA des Hautes-Alpes lui soit remise sur simple notification de l'arrêt,
Rejette les demandes de Michèle X... épouse Y... tendant à obtenir la condamnation de Stéphane A... à lui payer les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 31 octobre 2002 outre la capitalisation, et les sommes de 16 000 € en réparation de son préjudice financier, et de 30 000 € en réparation de son préjudice moral,

Condamne Stéphane A... à payer à Michèle X... épouse Y... une indemnité de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne Stéphane A... à tous les dépens de première instance et d'appel et autorise la SCP GRIMAUD, avoués, à recouvrer directement contre lui, les frais avancés sans avoir reçu provision.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile,
SIGNÉ par Madame LANDOZ, Président, et par Madame X..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08/887
Date de la décision : 13/10/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Gap, 20 février 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-10-13;08.887 ?
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