R.G. No 06/02627V.K.
SCP GRIMAUD
SCP CALAS
SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC
SCP POUGNAND
Me RAMILLONAU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 13 OCTOBRE 2008
Appel d'un Jugement (No R.G. 04/00399)rendu par le Tribunal de Grande Instance de BOURGOIN-JALLIEUen date du 29 mai 2006suivant déclaration d'appel du 27 Juin 2006
APPELANTES :
Société PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège47 route de Saint Georges01213 PETIT LANCY - GENEVE
représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
S.N.C. PROCTER et GAMBLE FRANCE poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège96 avenue Charles de Gaulle92200 NEUILLY SUR SEINE
représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
Société EUROCOS COSMETIC GMBH poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège47 Zeppelinallee60487 FRANKFURT AM MAIN
représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
INTIMEES :
S.A.R.L. MEL26 Bis rue de l'Oiselet38300 BOURGOIN-JALLIEU
représentée par la SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC, avoués à la Cour
Société BG DIFFUSION - ENSEIGNE STAR ACCESS poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège71 Grande Rue de la Croix Rousse69004 LYON 04
représentée par la SELARL DAUPHIN et MIHAJLOVIC, avoués à la Cour
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
SOCIETE HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GMBH et CO KG12 Dieselstrasse72555 METZINGEN (ALLEMAGNE)
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Françoise LANDOZ, Président,Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller,Madame Véronique KLAJNBERG, Conseiller,
Assistées lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 08 Septembre 2008, Madame KLAJNBERG a été entendue en son rapport.
Les avoués ont été entendus en leurs conclusions.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
Dûment autorisée par ordonnance du 4 octobre 2004, la société EUROCOS COSMETIC a fait procéder le même jour à la saisie contrefaçon par Maître Pierre Z..., huissier de justice, de 120 flacons ayant fait l'objet d'une retenue des services des Douanes et Droits indirects de Chambéry opérée dans les locaux de la boutique STAR ACCESS, située galerie marchande du Centre Edouard Leclerc à Bourgoin Jallieu (38) et de 251 flacons en provenance des locaux de la société MEL, située 26 bis rue de l'Oiselet à Bourgoin Jallieu.
Le 18 octobre 2004, les sociétés EUROCOS COSMETIC, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTÉ et PROCTER et GAMBLE FRANCE ont fait assigner les sociétés MEL et BG DIFFUSION devant le tribunal de grande instance de Bourgoin Jallieu en contrefaçon, concurrence déloyale et actes de parasitisme.
Par jugement du 29 mai 2006, le tribunal a:
"Dit que les flacons d'eau de toilette LEADER, VICTOR MEN, VICTOR WOMAN (et) ATOMIUM H2O commercialisés par la SARL BG DIFFUSION et la SARL MEL constituent des contrefaçons par imitation illicite des marques tridimensionnelles No 726166, No696278, No 697766, No 696222, No 697765, No 701184 BOSS, HUGO, HUGO WOMAN, BOSS AQUA ELEMENTS, appartenant à la société EUROCOS COSMETIC GmbH, ce qui est source de confusion à son détriment,
Condamné in solidum la SARL BG DIFFUSION et la SARL MEL à payer à la société EUROCOS COSMETIC GmbH la somme de 15.000 euros, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon,
Interdit aux sociétés BG DIFFUSION et MEL de commercialiser les eaux de toilette litigieuses LEADER, VICTOR MEN, VICTOR WOMAN et ATOMIUM H2O sous quelle que forme et à quel que titre que ce soit, directement ou indirectement, par toute personne physique ou morale interposée, sous astreinte de 500 euros par manquement constaté,
Ordonné la publication du présent jugement aux frais in solidum de la SARL BG DIFFUSION et de la SARL MEL dans deux journaux ou magazines au choix de la société EUROCOS COSMETIC pendant une durée de un mois, moyennant un coût maximum et total de 5.000 euros,
Rejeté comme étant non fondées les demandes en dommages intérêts des sociétés PROCTER ET GAMBLE PRESTIGE BEAUTÉ et PROCTER ET GAMBLE FRANCE SNC en concurrence déloyale et parasitaire,
Rejeté la demande d'exécution provisoire,
Rejeté les autres demandes (contrefaçon par imitation illicite de la marque No 726164 par le flacon dénommé ATOMIUM VERSION 2000 et de la marque dénominative DEEP RED No 795373 par le flacon dénommé ROUGE,
Condamné les défenderesses au paiement d'une somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens ».
Les sociétés EUROCOS, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTÉ et PROCTER et GAMBLE FRANCE ont le 27 juin 2006 relevé appel de ce jugement.
La société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GmbH et CO KG, à qui les droits de marques susvisés ont été transférés est intervenue volontairement devant la cour.
Elles demandent par voie d'infirmation partielle de :
"Dire que l'emballage et le flacon d'eau de toilette ROUGE commercialisés par les sociétés BG DIFFUSION et MEL constituent la contrefaçon par imitation illicite de la marque DEEP RED No 795372 appartenant à la société EUROCOS COSMETIC GmbH, ce qui est source de confusion à son détriment.
Condamner solidairement les sociétés BG DIFFUSION et MEL à payer à la société EURO COSMETIC GmbH la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon.
Dire que les sociétés BG DIFFUSION et MEL, en commercialisant des parfums contrefaisant les parfums commercialisés par les sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTÉ et PROCTER et GAMBLE FRANCE ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant leur responsabilité délictuelle à l'égard de ces sociétés.
Dire que les sociétés BG DIFFUSION et MEL. en commercialisant les eaux de toilette ROUGE, l'EAU BORDEAUX, LEADER, VICTOR MEN, VICTOR WOMAN, ATOMIUM H20, ATOMIUM VERSION 2000, ATOMIUM LIMITED VERSION et HERSELF EDITION 2000 qui constituent les imitations illicites des eaux de toilette HUGO (eau de toilette pour homme), HUGO (eau de toilette pour femme), DEEP RED, BOSS (emballage gris), BOSS WOMAN, BOSS AQUA ELEMENTS, HUGO DARK BLUE. BALDESSARINI (eau de cologne), créent un risque de confusion avec celles-ci et se placent dans leur sillage, ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant leur responsabilité délictuelle à l'égard des sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE de surcroît, aggravés par l'effet de gamme en résultant.
Condamner solidairement les sociétés BG DIFFUSION et MEL à payer aux sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTÉ et PROCTER et GAMBLE FRANCE la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire.
En toutes hypothèses,
Faire interdiction aux sociétés BG DIFFUSION et MEL, sous astreinte de 1.500 euros par infraction à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, de commercialiser les eaux de toilette litigieuses sous quelque forme et à quel que titre que ce soit, directement ou indirectement, par toute personne physique ou morale interposée.
Ordonner la publication de l'arrêt à intervenir aux frais solidairement des sociétés BG DIFFUSION et MEL dans cinq journaux ou magazines au choix des sociétés EUROCOS COSMETIC GmbH, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE et ce, pour un coût maximum de 5.000 euros par insertion.
Condamner solidairement les sociétés BG DIFFUSION et MEL à payer aux sociétés EUROCOS COSMETIC GmbH, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE, PROCTER et GAMBLE FRANCE et HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT GmbH et CO KG une indemnité de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Confirmer le jugement déféré pour le surplus.
CONDAMNER les sociétés BG DIFFUSION et MEL aux dépens de l'instance, qui comprendront les frais de saisie contrefaçon opérée le 4 octobre 2004.
Au soutien de leurs recours elles font valoir en substance que :
-EUROCOS COSMETIC, ès qualités de propriétaire des marques précitées, a agi en contrefaçon (par imitation) au titre de l'atteinte portée à ses droits exclusifs sur ses différentes marques,
-le flacon du parfum LEADER et son bouchon reproduisent quasi servilement la marque No 726166 (flacon BOSS),
-le nom LEADER évoque un sens identique à celui du nom BOSS de la marque de EUROCOS COSMETIC,
-le flacon VICTOR MEN constitue l'imitation illicite des marques tridimensionnelles No 696278 et 697766 (flacon HUGO),
-le flacon VICTOR WOMAN constitue l'imitation illicite des marques tridimensionnelles No 696222 et 697765 flacon HUGO WOMAN),
-tout un chacun fait un lien ou une association entre les dénominations VICTOR et HUGO, association d'idées nécessairement renforcée par la forme des flacons de parfum concernés,
-le flacon d'eau de toilette ATOMIUM H20 imite les caractéristiques de la marque No 701184 (flacon BOSS AQUA ELEMENTS) propriété de EUROCOS COSMETIC, et notamment, l'effet figurant un aquarium composé de bulles d'air, particulièrement spécifique de cette marque,
-la marque No 726164 (flacon HUGO/HUGO BOSS DARK BLUE) représente un flacon bombé de forme oblongue qui évoque un shaker,
-le flacon d'eau de toilette ATOMIUM VERSION 2000 copie la forme générale de la bouteille, le bouchon que constitue la partie supérieure du flacon et reprend deux des trois couleurs dominantes (le bleu foncé et le rouge) de la marque No 726164,
-ces ressemblances prises dans leur ensemble caractérisent un risque de confusion constitutif de l'imitation illicite au sens de l'article L 713-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,
-le flacon d'eau de toilette « ROUGE » reproduit cette dénomination sur un flacon de couleur rouge dont la forme hyperboloïde de révolution constitue une imitation caractérisée des flacons HUGO DEEP RED marque No795 372,
-les parties au litige sont en concurrence car elles commercialisent des produits identiques (parfums et eaux de toilette) et s'adressent, par voie de conséquence, à la même clientèle,
-les produits étaient commercialisés dans un magasin situé dans la galerie commerciale du centre commercial Leclerc de Bourgoin-Jallieu, dans laquelle se trouve également une parfumerie,
-la détention et la commercialisation par les sociétés MEL et BG DIFFUSION des flacons d'eau de toilette et de parfum litigieux constituent des contrefaçons des marques d'EUROCOS COSMETIC et des agissements de concurrence déloyale pour les deux sociétés PROCTER et GAMBLE,
-la commercialisation par MEL et BG DIFFUSION-STAR ACCESS des eaux de toilette "ROUGE et l'EAU BORDEAUX" et de leur conditionnement constituent des agissements de concurrence déloyale engageant la responsabilité délictuelle des intimées,
-l'emballage de l'eau de toilette, la transparence du flacon et la couleur jaune du jus du parfum BOSS sont repris par l'eau de toilette LEADER,
-la fragrance de ATOMIUM LlMITED VERSION présente indéniablement les mêmes notes olfactives et la même impression générale que l'eau de toilette BALDESSARINI,
-il en est de même de ATOMIUM VERSION 2000 qui imite nettement la fragrance de HUGO DARKBLUE,
-le bouchon du flacon de VICTOR MEN, la couleur bleu pâle du jus de parfum et sa fragrance imitent l'eau de toilette HUGO,
-l'emballage rouge vif caractéristique de l'eau de toilette HUGO est incontestablement imité par l'emballage de l'eau de toilette VICTOR WOMAN ainsi que la couleur jaune pâle du jus de parfum,
-l'emballage, le bouchon du flacon, le choix du nom de l'eau de toilette, H20 (AQUA), et sa fragrance imitent l'eau de toilette BOSS AQUA ELEMENTS,
-il en est de même pour l'emballage de HERSELF EDITION 2000, la forme du flacon en demi-lune, le bouchon et sa fragrance qui rappellent BOSS WOMAN,
-les intimées ont cherché à usurper, sans bourse délier, le pouvoir attractif que les sociétés PROCTER et GAMBLE ont su conférer à leurs parfums en s'approvisionnant à l'étranger dans les hauts lieux de la contrefaçon, auprès notamment de la société BELLURE.
La SARL MEL et la SARL BG DIFFUSION font appel incident pour demander à titre principal l'infirmation du jugement entrepris ainsi que le débouté des sociétés appelantes et à titre subsidiaire la réduction des indemnités pouvant leur être allouées. Elles sollicitent en outre leur condamnation solidaire à leur payer à chacune 10.000 € par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elles concluent pour l'essentiel que :
-les photographies du procès-verbal de contrefaçon rapprochées de la représentation des marques précitées permet d'exclure toute confusion possible dans l'esprit d'un acquéreur moyen,
-la marque BOSS déposée ne s'entend pas de tous les synonymes ou de toutes ces traductions dans des langues diverses et variées,
-la société EUROCOS COSMETIC n'a déposé que deux mots "DEEP RED" et non pas toutes les "déclinaisons approchantes", en comparaison, traduction, synonymes, et en association d'idées,
-elles n'ont commis aucune imprudence en acquérant les lots de parfums vendus en Italie ou en Belgique,
-les produits de luxe commercialisés par la société EUROCOS COSMETIC ne sont pas concurrencés par les marchandises litigieuses,
-la présentation des produits n'est pas de nature à entretenir une confusion dans l'esprit de la clientèle des produits vendus en parfumerie ou chez des distributeurs agréés,
-les parties ne s'adressent pas à la même clientèle et surtout elles commercialisent des produits très différents,
-la forme des flacons déjà évoquée par la société EUROCOS COSMETIC, de même que la comparaison entre les dénominations des eaux de toilette, ne peuvent à la fois être utilisés dans l'action en contrefaçon et dans l'action en concurrence déloyale,
-l'imitation des fragrances n'est pas démontrée par des tests et ne peut être retenue au titre des faits de concurrence déloyale,
-les produits litigieux n'étaient pas présentés comme des équivalents des produits HUGO BOSS et ne créent aucun risque de confusion.
MOTIFS ET DÉCISION
Attendu qu'il convient tout d'abord de recevoir l'intervention volontaire de la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT, dont il n'est pas contesté qu'elle a acquis, en avril 2006, la propriété des marques sur le fondement desquelles la présente action en contrefaçon est engagée ;
Que la société EUROCOS COSMETIC fonde son action, en application de l'article L 713-3 du Code de la propriété intellectuelle, sur l'imitation d'un certain nombre de marques dont elle est titulaire ;
Qu'il convient à cet égard de rechercher s'il existe entre les marques tridimensionnelles de la société EUROCOS COSMETIC et les produits litigieux un risque de confusion visuel ou conceptuel au terme d'une appréciation globale fondée sur l'impression d'ensemble produite, en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs ainsi que des ressemblances et non des différences ;
Que l'appréciation du risque de confusion dépend d'une part du caractère distinctif de la marque par sa reconnaissance sur le marché, d'autre part de la similitude entre la marque et le signe contesté, d'autre part encore de l'identité ou la similitude entre les produits désignés ;
Sur la contrefaçon de la marque No726 166 (flacon BOSS) par le flacon d'eau de toilette "LEADER".
Attendu que la société de droit allemand EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de la marque tridimensionnelle no 726 166 dans la classe de produits no 3 relative aux savons de toilette, parfumerie, cosmétiques etc. enregistrée le 17 décembre 1999 ;
Que cette marque est constituée d'une bouteille cylindrique avec un socle légèrement plus large, la couleur grise revendiquée, une bouteille translucide et l'inscription BOSS gravée verticalement en gros caractères ;
Que les constatations effectuées par Me Pierre Z... lors de la saisie contrefaçon et l'examen comparatifs des flacons remis à la cour permettent de retenir une identité quasi servile des flacons et des bouchons "clipsés" de couleur gris clair ;
Qu'à juste titre les premiers juges ont retenu également l'agencement vertical similaire du nom du parfum en gros caractères, avec une lecture de bas en haut d'une dénomination intellectuellement proche puisque BOSS et LEADER font l'un et l'autre référence à l'idée du chef ou de celui qui dirige un groupe, de sorte que par de motifs auxquels la cour se réfère ils ont considéré que le flacon "LEADER" commercialisé par les SARL MEL et BG DIFFUSION était une imitation illicite de la marque no 726 166 ;
Que le jugement déféré sera confirmé de ce chef ;
Sur la contrefaçon des marques no 696 278 et 697 766 (flacon HUGO) par le flacon d'eau de toilette "VICTOR men"
Attendu que la société EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de deux marques tridimensionnelles no696 278 et 697 766 dans la classe de produits no 3 enregistrées les 19 juin et 10 juillet 1998 ;
Qu'elles représentent chacune un flacon en forme de gourde dont la face arrière est plate, revêtu d'un bouchon dont la partie supérieure présente une circonférence plus grande et crantée, relié au goulot, à l'instar des gourdes, par un lien plat et large ;
Que la marque no 696 278 fait également apparaître sur la face avant du flacon, un carré séparé en deux dans la partie supérieure duquel figure le nom HUGO/ HUGO BOSS écrit un lettre majuscule sur fond rouge ;
Que l'examen comparatif des flacons révèle une grande similitude entre ceux-ci, le flacon "VICTOR men" ayant adopté malgré une taille légèrement plus petite, la forme et le bouchon caractéristiques d'une gourde avec un lien également de couleur vert ;
Que les premiers juges ont par une juste appréciation des faits de la cause, précisé que la dénomination VICTOR renforçait la confusion en suscitant une association d'idées accessible à la clientèle française et retenu à bon droit que le flacon litigieux malgré quelques différences, donnait une impression globale de similitude caractérisant une imitation source de confusion évidente pour un client d'attention moyenne n'ayant pas les deux produits simultanément sous les yeux ;
Que le jugement qui a retenu que le flacon "VICTOR MEN" constituait une imitation illicite des marques no 696 278 et 697 766 sera confirmé ;
Sur la contrefaçon de la marque No 696 222 et 697 765 (flacon HUGO woman) par le flacon d'eau de toilette "VICTOR woman"
Attendu que la société EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de deux marques tridimensionnelles no 696 222 et 697 765 dans la classe de produits no 3 enregistrées les 19 juin et 10 juillet 1998 ;
Que ces deux marques représentent chacune un flacon en forme de gourde ronde avec les faces avant et arrière aplaties, revêtu d'un bouchon dont la partie supérieure présente une circonférence plus importante et crantée, relié au flacon par un lien plat et large ;
Que sur la face avant du flacon apparaît un carré séparé en deux, avec dans la partie supérieure de couleur rouge le nom HUGO/ HUGO BOSS en lettres majuscules et dans la partie inférieure translucide, le mot "woman" en lettres minuscules ;
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont sur la base d'un examen comparatif des flacons, retenu la similitude prononcée du flacon et du bouchon relié par un lien de même couleur rouge, imitant également une gourde ronde, associée d'une part à la disposition et la taille des lettres rouges composant les mots "VICTOR" et "woman", d'autre part au choix d'une dénomination qui suscite elle-aussi une association d'idée aisée et accessible à la clientèle française, pour considérer que la flacon "VICTOR Woman" était une contrefaçon illicite des marques no 696 222 et 697 765 ;
Sur la contrefaçon de la marque No701 184 (flacon BOSS AQUA ELEMENTS) par le flacon d'eau de toilette "ATOMIUM H²O"
Attendu que la société EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de la marque tridimensionnelle no 6701 184 dans la classe de produits no 3 enregistrée les 19 juin et 10 juillet 1998 ;
Que cette marque est constituée d'un flacon de forme rectangulaire aux côtés ondulés et dont la face arrière est gravée de bulles figurant un aquarium ;
Que sur la face avant figurent les mentions "BOSS" en majuscules et "ELEMENTS AQUA" en grosses lettres latines ;
Que l'examen comparatif des deux flacons révèle que le flacon commercialisé par les intimées, également en verre épais translucide et d'une profondeur identique, comporte sur sa face arrière gravée en creux outre des bulles d'air, des courbes ayant l'aspect d'herbes aquatiques donnant une ambiance aquatique voire d'aquarium, caractéristique essentielle du flacon, "ELEMENTS AQUA" ;
Que les premiers juges ont donc à juste titre retenu qu'en dépit des quelques différences tout à fait mineures concernant la forme du bouchon et du flacon, l'impression globale de similitudes qui se dégage du flacon litigieux constituait une imitation illicite de la marque no 701 184 ;
Sur la contrefaçon de la marque No 726 164 (flacon HUGO/ HUGO BOSS DARK BLUE) par le flacon d'eau de toilette "ATOMIUM VERSION 2000"
Attendu que la société EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de la marque tridimensionnelle no 6701 184 dans la classe de produits no 3 enregistrée les 19 juin et 10 juillet 1998 ;
Que cette marque représente un flacon de forme oblongue qui évoque un "shaker" et se caractérise par un bouchon de couleur argentée en forme de cape, par sa partie inférieure de forme bombée et de couleur bleu nuit et l'inscription en caractères rouges inscrits verticalement de la dénomination HUGO ;
Or attendu que le flacon litigieux ne saurait se confondre avec le flacon HUGO DARK BLUE dont le bouchon présente la particularité de recouvrir le tiers supérieur du flacon, alors que le sien certes de couleur grise comme le tiers supérieur du flacon, est simplement cylindrique ;
Qu'en outre il ne présente pas de forme cylindrique puisqu'il est constitué de six faces plates en verre rouge sur lesquelles apparaît la mention verticale ATOMIUM VERSION 2000 en lettres bleues, alors que le flacon objet de la marque sus-visée est bombé, plus petit et en verre bleu nuit avec la mention "HUGO" écrite en lettres verticales de couleur rouge, de sorte que les quelques ressemblances relatives à la forme du tiers supérieur du flacon et à la position verticale des lettres ne donnent pas une impression globale de similitude source de confusion évidente et ne sont donc pas de nature à permettre de retenir une contrefaçon de la marque par imitation ;
Que le jugement déféré sera confirmé de ce chef ;
Sur la contrefaçon de la marque No 795 372 (flacon DEEP RED) par le flacon d'eau de toilette "ROUGE"
Attendu que la société EUROCOS COSMETIC GmbH est titulaire de la marque dénominative "DEEP RED" no 6701 184 dans la classe de produits no 3 enregistrée le 4 novembre 2002 ;
Que le flacon litigieux présente sur la face avant, la dénomination "ROUGE" en lettres majuscules verticales de couleur grise ;
Que par des motifs auxquels la cour se réfère le jugement déféré retient à bon droit que titulaire de la seule marque dénominative sus-visée, la société EUROCOS COSMETIC ne peut prétendre à l'interdiction de toutes les déclinaisons approchantes en traduction de "DEEP RED" et que l'imitation illicite de sa marque par la dénomination "ROUGE" n'était pas caractérisée ;
Sur l'indemnisation du préjudice de la société EUROCOS COSMETIC
Attendu qu'il ressort du courrier de la Direction des Douanes de Chambéry qu'ont été saisis- 96 flacons LEADER-59 flacons VICTOR WOMAN-72 flacons VICTOR MEN-24 flacons ATOMIUM H²O
soit au total 251 flacons ;
Qu'il est établi en outre par la saisie d'une facture du 5 mai 2004, que la société italienne ACTORY a vendu à la société BG distribution 6.000 flacons contrefaits (Leader, Victor man et Victor woman) ;
Que ces faits de contrefaçon portent atteinte aux droits privatifs de la société EUROCOS COSMETIC GMBH et contribuent par leur banalisation à la dépréciation de ses marques ;
Qu'eu égard à la masse contrefaisante, il convient de condamner in solidum les sociétés MEL et BG DIFFUSION, dont l'approvisionnement auprès notamment de la société BELLURE contrefacteur notoire dans le monde de la parfumerie exclut toute bonne foi de leur part, à payer à la société EUROCOS COSMETIC GMBH la somme de 30.000 € de dommages et intérêts ;
Attendu que les mesures d'interdiction de commercialiser les flacons litigieux ordonnées par le tribunal, seront confirmées et que les mesures relatives à la publication de la présente décision seront précisées au présent dispositif ;
Sur l'action en concurrence déloyale et parasitaire des sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC
Attendu tout d'abord que la société exploitante d'une marque qui ne dispose pas d'un droit privatif sur le titre de propriété industrielle est recevable à agir en concurrence déloyale, peu important que les éléments sur lesquels elle fonde sa demande soient les mêmes que ceux que le titulaire de la marque a pu opposer au titre de la contrefaçon ;
Qu'en effet le risque de confusion créé par les agissements sus-visés des sociétés intimées a pour but de fausser le jeu normal de la concurrence et d'attirer une clientèle captive, occasionnant ainsi un préjudice distinct aux sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC en charge de la commercialisation des produits HUGO BOSS et ce peu important que les produits litigieux ne soient pas commercialisés dans des parfumeries ou dans le cadre d'un réseau de distribution sélective agrée ;
Attendu par ailleurs, que l'action en concurrence déloyale peut être exercée à l'encontre d'un acte par lequel un concurrent en reproduisant ou en imitant un aspect distinctif d'un produit marqué non compris dans l'enregistrement de la marque, a crée un risque de confusion en l'absence de contrefaçon, ou aggravé le risque de confusion résultant d'une contrefaçon ;
Que la présentation commerciale d'un produit peut ainsi provoquer un risque de confusion entre les produits ou sur leur origine ;
Qu'en l'espèce il ressort de l'examen comparé des flacons et emballages de l'eau de parfum "DEEP RED" produit par HUGO BOSS et de l'eau de parfum "ROUGE" commercialisés par les intimées, qu'il y a imitation du conditionnement et de l'emballage du produit marqué ;
Qu'en effet l'emballage litigieux reprend la combinaison des deux couleurs du produit DEEP RED en utilisant le contraste entre la couleur noire dominante et le rouge vif caractéristique de l'emballage de l'eau de toilette HHUGO BOSS DEEP RED ;
Que la présentation du nom "ROUGE" est faite en lettres capitales de grande taille dans le sens de la hauteur à l'image du nom "HUGO", auquel s'ajoute une bande verticale de couleur rouge vif de la même longueur que celle du nom "ROUGE" rappelant la bande rouge vif sur laquelle est présentée la marque "HUGO"/HUGO BOSS ;
Qu'en outre la forme particulière de bobine du flacon HUGO BOSS DEEP RED et sa couleur rouge profond sont également reproduites par le flacon d'eau de parfum "ROUGE", ainsi que la forme légèrement évasée vers le haut du bouchon et sa couleur argentée ;
Que le flacons litigieux fait apparaître le nom de l'eau de parfum en lettres grises brillantes ou argentées à l'exemple du flacon HUGO DEEP RED, le nom "ROUGE" en lettres capitales de grande taille étant disposé de façon verticale dans la première moitié du flacon à l'image du nom "HUGO";
Que la ressemblance des flacons et de l'emballage sans en être la copie servile procure la même impression au public d'attention moyenne et peut permettre d'attribuer le produit à une même origine, l'indication d'une marque différente n'altérant pas le danger de méprise ;
Qu'en revanche tant l'emballage de l'eau de parfum "EAU BORDEAUX" dont la combinaison des couleurs noir et rouge, la présentation du nom de ce produit dans un rectangle sont tout à fait différentes, que le flacon certes en forme de bobine mais strié et de couleur partiellement argentée avec un bouchon constitué en deux parties solidaires de couleur bordeaux ne sont pas de nature à semer la confusion dans l'esprit du public d'attention moyenne avec l'emballage et le conditionnement de l'eau de parfum "DEEP RED" ;
Attendu que l'imitation des fragrances de l'eau de cologne BALDESSARINI par l'eau de toilette ATOMIUM LIMITED VERSION commercialisée par les intimés, n'est pas établie en l'absence soit d'analyse comparative des constituants de ces deux jus soit de tests effectués auprès de consommateurs ;
Attendu en ce qui concerne l'eau de parfum BOSS WOMAN, que l'imitation des fragrances par l'eau de parfum "HERSELF" ne sera pas retenue pour les mêmes motifs que ci-dessus ;
Qu'outre son format inférieur, l'emballage de BOSS WOMAN de couleur blanche avec sur le quart gauche une bande argentée, ne saurait se confondre avec l'emballage de l'eau de toilette "HERSELF" figurant sur le côté gauche du papier déchirée de couleur bleu métallisé parsemé par côtés de cristaux de neige et un motif de nuages bleutés sur fond blanc du côté droit parsemé de lettres composant le mot "HERSELF" ;
Que l'inscription verticale sur le côté droit de la boîte du nom "HERSELF édition 2000", comme du nom "BOSS HUGO BOSS" sur le côté droit de l'emballage étant insuffisante pour donner à l'ensemble une impression de similitude ;
Qu'il en est de même en ce qui concerne les flacons ;
Qu'en effet s'ils sont certes en demi lune tous les deux, leur format et la couleur du jus sont différents, la forme du bouchon est droite pour "BOSS WOMAN" et évasée vers le haut pour "HERSELF", le verre du flacon "BOSS WOMAN" est bombé et translucide des deux côtés alors que celui du flacon "HERSELF" est plat, avec une façade incurvée et translucide en son milieu, mais légèrement opaque sur les côtés ;
Que l'inscription "HERSELF édition 2000" est située verticalement sur la face avant incurvée, alors que l'inscription "WOMAN" se situe horizontalement sur la partie inférieure de la face arrière du flacon et se lit par transparence ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède, que les société MEL et BG DIFFUSSION ont ainsi profité sans bourse délier, d'une part des investissements financiers engagés par les sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC pour promouvoir les seuls parfums DEEP RED, BOSS, HUGO, HUGO pour femme, BOSS AQUA ELEMENTS d'autre part de la notoriété certaine de ceux-ci auprès des consommateurs ;
Que les sociétés MEL et BG diffusion seront condamnées in solidum à ce titre à payer aux sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts ;
Que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ;
Attendu que l'indemnité de 3.000 € allouée en cause d'appel aux intimées comprend les frais de la procédure de saisie contrefaçon ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire après en avoir délibéré conformément à la loi,
Reçoit la société HUGO BOSS TRADE MARK MANAGEMENT en son intervention volontaire,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté les sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC de leur action en concurrence déloyale et parasitaire et en ce qui concerne les mesures de publication,
Statuant à nouveau,
Condamne in solidum les SARL MEL et BG DIFFUSION à payer aux sociétés PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC une somme de 30.000 € en réparation de la concurrence déloyale et parasitaire dont elles sont responsables concernant les eaux de toilette et de parfum DEEP RED, BOSS, HUGO, HUGO pour femme, BOSS AQUA ELEMENTS,
Confirme pour le surplus, sauf à condamner in solidum les SARL MEL et BG DIFFUSION à payer à la société EUROCOS COSMETIC une somme de 30.000 € de dommages et intérêts au titre de la contrefaçon de marques,
Ordonne la publication du présent arrêt aux frais des sociétés MEL et BG DIFFUSSION in solidum, dans trois journaux ou magazines au choix des sociétés EUROCOS COSMETIC, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC pendant une durée d'un mois moyennant un coût maximum de 3.000 € par insertion,
Condamne en cause d'appel la SARL MEL et la SARL BG DIFFUSSION in solidum à payer aux sociétés EUROCOS COSMETIC GmbH, PROCTER et GAMBLE PRESTIGE BEAUTE et PROCTER et GAMBLE FRANCE SNC, une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne in solidum la SARL MEL et la SARL BG DIFFUSSION aux dépens de la procédure d'appel avec application de l'article 699 au profit de la SCP GRIMAUD qui en a demandé le bénéfice.
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile,
SIGNÉ par Madame LANDOZ, Président, et par Madame LAGIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.