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08/09/2008 | FRANCE | N°07/00263

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ct0269, 08 septembre 2008, 07/00263


RG N° 07 / 00263
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU LUNDI 08 SEPTEMBRE 2008
Appel d'une décision (N° RG 06 / 00316) rendue par le Conseil de Prud'hommes de VALENCE en date du 15 décembre 2006 suivant déclaration d'appel du 10 Janvier 2007

APPELANTE :

Madame Stéphanie X... ... 26120 CHABEUIL

Représentée par Me Isabelle ROUX (avocat au barreau de VALENCE)

INTIME :

Monsieur Ghislain Y... ...26000 VALENCE

Représenté par Me DEMICHEL substituant Me Jacques GRANGE (avocats au barreau de LYON)

COMPOSITION

DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean-François GALLICE, Conseiller, faisant fonction d...

RG N° 07 / 00263
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU LUNDI 08 SEPTEMBRE 2008
Appel d'une décision (N° RG 06 / 00316) rendue par le Conseil de Prud'hommes de VALENCE en date du 15 décembre 2006 suivant déclaration d'appel du 10 Janvier 2007

APPELANTE :

Madame Stéphanie X... ... 26120 CHABEUIL

Représentée par Me Isabelle ROUX (avocat au barreau de VALENCE)

INTIME :

Monsieur Ghislain Y... ...26000 VALENCE

Représenté par Me DEMICHEL substituant Me Jacques GRANGE (avocats au barreau de LYON)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean-François GALLICE, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur Eric SEGUY, Conseiller, Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme LEICKNER, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 23 Juin 2008, Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 08 Septembre 2008.
L'arrêt a été rendu le 08 Septembre 2008.
Stéphanie X... a été engagée le 28 octobre 2002 pour une durée indéterminée par Ghislain Y..., chirurgien-dentiste, afin d'exercer les fonctions de réceptionniste dans son cabinet dentaire.
Elle a présenté sa démission par lettre du 10 février 2006 à effet au 10 avril 2006, fin du préavis conventionnel de deux mois. Ayant trouvé un autre emploi à compter du 6 mars 2006, elle a notifié le 20 février 2006 à son employeur qu'elle écourtait en conséquence son préavis.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Valence, le 24 mai 2006, aux fins d'obtenir la requalification de sa démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et aux fins d'obtenir le paiement des indemnités de rupture ainsi que de divers rappels d'heures supplémentaires et de primes de secrétariat et d'ancienneté.
Par jugement du 15 décembre 2006, le conseil de prud'hommes a dit que Stéphanie X... exerçait les fonctions d'assistante dentaire non qualifiée, a condamné le Dr Y... à lui verser un rappel de 199, 77 € + 19, 97 € d'heures supplémentaires sur la période du 1er mai 2004 au 6 mars 2006, mais a débouté Stéphanie X... de ses autres demandes salariales et s'est déclaré en partage de voix sur la question de la requalification de la démission et de ses conséquences.
Stéphanie X... a relevé appel de ce jugement le 10 janvier 2007.
Le conseil de prud'hommes, en formation de départage, a constaté le 24 mai 2007 qu'il n'était pas dessaisi de la partie du litige ayant fait l'objet d'une déclaration de partage de voix, a déclaré se dessaisir de cette affaire en raison de l'existence d'une connexité et a renvoyé en l'état l'affaire à la connaissance de la cour d'appel de ce siège.
Stéphanie X... demande à la juridiction d'appel :- de réformer en totalité le jugement du 15 décembre 2006,- de dire qu'elle avait toujours exercé les fonctions d'assistance dentaire qualifiée sans avoir suivi la formation à laquelle elle pouvait prétendre et qu'elle avait effectué des taches ouvrant droit à la prime conventionnelle de secrétariat,- de dire que son employeur avait eu un comportement irrespectueux à son encontre,- de dire qu'elle effectuait des heures supplémentaires non rémunérées,- de requalifier sa démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner le Dr Y... à lui verser : rappel de prime de secrétariat et congés payés afférents : 5. 514, 82 € + 551, 48 €, heures supplémentaires non rémunérées et congés payés afférents : 5. 971, 88 € + 597, 19 €, indemnité de préavis et congés payés afférents : 3. 171, 40 € + 317, 14 €, indemnité conventionnelle de licenciement : 528, 57 €, dommages et intérêts pour rupture abusive : 9. 514, 20 €, indemnité pour frais irrépétibles : 2. 000 €.

Elle invoque comme motifs de rupture l'absence de délivrance de la formation professionnelle nécessaire à l'exercice des fonctions d'assistance dentaire qualifiée, des brimades régulières par son employeur, l'absence de paiement des heures supplémentaires et d'une prime conventionnelle.
Elle fait valoir qu'elle n'avait jamais exercé les fonctions de réceptionniste mais celles d'assistante dentaire qualifiée, sans avoir toutefois reçu la formation normalement à la charge de l'employeur, lequel lui avait attribué une qualification non prévue par la convention collective et l'avait assignée à des taches de secrétariat sans lui verser la prime conventionnelle correspondante.
Elle ajoute qu'elle n'avait pas pu remplir complètement un dossier de validation des acquis de l'expérience, au terme de trois années d'ancienneté, précisément faute de justificatif de cette formation.
Elle fait observer qu'elle accomplissait bien des tâches de secrétariat, qu'elle tenait notamment le journal des paiements et préparait les éléments destinés à être transmis au comptable. Elle ajoute que, sur ses bulletins de paye, la prime de secrétariat n'était pas distinguée de son salaire et qu'aucune prime de cette nature ne lui avait été versée.
Elle reproche à son ancien employeur d'avoir eu un comportement irrespectueux à son égard.
Elle réclame le paiement d'heures supplémentaires à hauteur d'une heure trente par semaine depuis novembre 2002 jusqu'à avril 2004 et refait devant la cour ses calculs au centième. Elle soutient que l'organisation pratique de la modulation invoquée par le Dr Y... n'avait pas été respectée.
S'agissant de la période de mai 2004 à mars 2006, elle reconnaît que le Dr Y... avait récapitulé les heures au titre de la modulation mais elle considère ces récapitulatifs comme insuffisants et estime qu'un solde de 199, 77 euros outre congés payés lui restait dû.
Le Dr Y... demande à la cour d'infirmer les dispositions du jugement qui lui sont défavorables, de confirmer les autres, de considérer que la lettre de rupture s'analyse en une démission, de débouter la salariée de ses prétentions et de la condamner à lui verser une somme de 2. 000 € au titre de ses frais irrépétibles.
Il conteste avoir reçu la lettre ou la note motivée annexée à la lettre de licenciement dont Stéphanie X... faisait état pour expliquer les raisons de sa démission et conteste en tout cas avoir commis à son égard des manquements d'une gravité suffisante pour entraîner la rupture du contrat de travail.
Il conteste que Stépahnie X... puisse prétendre recevoir la qualification invoquée en rappelant qu'elle avait été engagée comme simple réceptionniste.
Il explique qu'elle avait été promue assistante dentaire non qualifiée le 1er décembre 2002, qu'elle avait été augmentée de 40 % en trois ans et soutient qu'il avait engagé en sa faveur une procédure de validation des acquis fin 2004, dans le cadre d'un processus régional généralisé au dernier trimestre 2005 mais que c'était seulement en raison de sa démission que Stéphanie X... n'en avait pas bénéficié.
L'employeur conteste avoir confié à Stéphanie X... les tâches énoncées à la convention collective ouvrant droit à la prime de secrétariat et conteste le caractère habituel de l'exécution de ces tâches.
Pour contester la demande de rappel d'heures supplémentaires, le Dr Y... explique :- qu'il avait appliqué volontairement de l'accord de branche du 18 mai 2001 puis l'accord du 5 décembre 2003 étendu le 16 juillet 2004 applicable de plein droit au 29 juillet 2004,- que le contrat de travail prévoyait un horaire annualisé de 1. 587 h. lissé à 151, 67 h. par mois, avec compensation en période basse des dépassements effectués en période haute,- qu'un décompte était établi en fin de période de modulation, duquel il ressortait, pour la période 2004-2006, que Stéphanie X... avait effectuait un horaire moyen inférieur à 35h de sorte qu'aucune heure supplémentaire n'était due,- que Stéphanie X... oubliait que le cabinet était fermé tous les mercredis après-midi puis, à partir de novembre 2003, tous les vendredis après-midi et que, certaines semaines, certains jours n'étaient pas travaillés.

Il conteste toute agressivité orale et tout comportement irrespectueux à l'égard de l'intéressée ; il produit divers témoignages de patients et d'une ancienne assistante et fait observer qu'au contraire, il avait été contraint d'adresser à sa salariée une lettre de recadrage le 30 septembre 2004.

Sur quoi :
- sur la fonction exercée :
Attendu que le certificat de travail et l'attestation Assedic émis le 9 mars 2006 mentionnent que Stéphanie X... avait occupé pendant toute la période d'emploi le poste d'" assistante dentaire non qualifiée ", niveau de qualification employé qualifié 52 ;
Attendu que seuls ses deux premiers bulletins de paie mentionnent l'emploi de réceptionniste mais que ses bulletins de paie suivants font référence à celui d'" assistante dentaire non qualifiée " ; que le salaire versé était supérieur au salaire minimal conventionnel pour une réceptionniste ;
Attendu que la classification des emplois annexée à la convention collective nationale du 17 janvier 1992 des cabinets dentaires ne prévoit pas l'existence d'un emploi d'assistant (e) dentaire " non qualifié (e) " mais définitif seulement les emplois d'assistant (e) dentaire stagiaire et d'assistant (e) dentaire qualifié (e)- avec ou sans la spécialisation en orthopédie dento-faciale ;
Que cette même convention collective prévoit, d'une part, que l'employeur est tenu d'assurer à l'assistant (e) dentaire stagiaire la formation pratique nécessaire à l'exercice de la fonction et de lui laisser le temps nécessaire à la participation à tous les stages, modules ou cours théoriques de formation mis en place par la profession en vue de la préparation à l'examen de la qualification et prévoit, d'autre part, l'engagement, pour le salarié, de passer cet examen de qualification d'assistant (e) dentaire ;
Attendu que les attributions attachées par la classification conventionnelle à l'emploi d'assistant (e) dentaire qualifié (e) prévoient que l'intéressé (e) est notamment chargé (e) de la mise en fonctionnement du cabinet, du nettoyage et de la décontamination des surfaces et appareils, de la stérilisation des instruments, de l'assistance opératoire du praticien, outre des fonctions d'accueil des patients, des compétences administratives et de gestion du stock de petit matériel et consommables ainsi que des fonctions d'enregistrement des opérations comptables courantes ;
Que les attributions conventionnelles de l'assistant (e) dentaire stagiaire consistent, pendant sa formation, à l'assistance du praticien au fauteuil et, sous certaines conditions, à l'entretien, à la décontamination, au nettoyage et à la stérilisation du matériel ;
Attendu que le Dr Y... produit un formulaire rempli par sa salariée dans le cadre de la constitution d'un dossier de validation des acquis de l'expérience pour la certification d'assistante dentaire qualifiée, dossier dont l'intimé indique qu'il était resté inachevé du fait de la démission et sur lequel Stéphanie X... avait indiqué qu'elle effectuait les actes suivants :- établissement de la liste des produits manquants pour la gestion des stocks et passation de la commande lorsque le dentiste ne la passait pas lui-même,- rangement mensuel du stock et vérification des dates de péremption,- suivi informatique des dossiers (saisie des actes, établissement des feuilles de soins électroniques, établissement des reçus, des factures, des devis, recherches multicritères, demandes de prise en charge aux mutuelles),- stérilisation de l'instrumentation,- comptabilité du cabinet,- aspiration lors des extractions (assistance au fauteuil) ;

Attendu que le Dr Y... travaillait dans un cabinet où exerçait un autre dentiste, le docteur A... ;
Que Stéphanie X... produit une attestation établie le 10 juillet 2006 par Lise Z..., assistante dentaire qualifiée du Dr A... depuis mars 2001, laquelle indique que le Dr Y... lui avait fait part, au début du contrat de travail de Stéphanie X..., de son refus de former sa collaboratrice, alors que, selon ce témoin, cela avait été " pourtant promis à cette dernière à la signature du contrat " ;
Que Lise Z... atteste également que Stéphanie X... faisait quotidiennement les mêmes tâches qu'elle, c'est-à-dire le secrétariat, l'assistance en chirurgie, la stérilisation, la gestion des stocks, les opérations de radiographie, plus la comptabilité, ce témoin précisant que Stéphanie X... effectuait cette comptabilité tous les mois ;
Attendu que Stéphanie X... produit une autre attestation, établie le 9 juillet 2006 par Sabine B..., employée comme assistante non qualifiée par le Dr Y... de janvier 2000 à novembre 2002, date à laquelle elle avait démissionné ;
Que cette salariée, à laquelle Stéphanie X... avait donc succédé, indique qu'elle avait formé Stéphanie X... pendant son préavis notamment aux préparations, aux actes de désinfection du matériel et du plan de travail, à la rédaction des fiches de laboratoire et des documents administratifs, à l'encaissement des soins et à la vérification de la comptabilité par semaine et par mois, à l'édition des journaux de caisse et de banque, à la vérification des stocks et aux commandes, au développement des radios, à l'usage de l'appareil de stérilisation,
Attendu que la gestion des rendez-vous, la rédaction des notes d'honoraires et la rédaction des documents officiels administratifs (feuilles de sécurité sociale, feuilles destinées aux mutuelles ou aux organismes d'assurance complémentaire, reçus) font certes partie du travail d'une réceptionniste comme de celui d'une assistante dentaire qualifiée mais que les autres actes, notamment l'assistance au fauteuil, la stérilisation et la désinfection du plan de travail, le suivi des stocks, ne relèvent pas des attributions normales d'une réceptionniste mais bien de celles d'une assistante dentaire qualifiée ;
Attendu que l'examen du cursus professionnel de Stéphanie X... fait apparaître qu'elle était seulement titulaire d'un BEP carrières sanitaires et sociales, d'un baccalauréat sciences médico-sociales et qu'elle justifie, avant l'emploi chez le dentiste Y..., d'une expérience d'employée et d'agent des services hospitaliers ; qu'elle n'avait donc aucune qualification théorique ou pratique d'assistante dentaire avant l'embauche ;
Attendu que les éléments qui précèdent font apparaître qu'à l'issue du contrat de travail de sa précédente salariée, qui avait formé sa remplaçante pendant la période d'emploi commune, le docteur Y... avait affecté Stéphanie X..., à partir de décembre 2002, non pas à de simples fonctions de réceptionniste, en dépit de ce qu'il avait expliqué dans sa lettre du 30 septembre 2004, mais à des fonctions relevant en fait de l'emploi conventionnel d'assistante dentaire qualifiée, sans lui accorder toutefois le statut de stagiaire ni sans lui accorder un temps de travail salarié lui permettant, pendant le cursus de formation de deux ans, de participer aux actions de formation théorique définies par la convention collective ;
Que les autres moyens de contestation invoqués par le Dr Y..., qui fait état de l'introduction fin 2004 d'un dispositif nouveau et expérimental de validation des acquis et de l'expérience, sont inopérants pour justifier le statut hybride dans lequel il avait maintenu Stéphanie X..., dès lors qu'au moment de son embauche, il existait déjà un dispositif conventionnel adapté aux mêmes fins, à savoir le statut d'assistante dentaire stagiaire ;
Attendu que Stéphanie X... n'a donc pas reçu la partie théorique de la formation professionnelle à laquelle elle pouvait prétendre et n'a, en conséquence, pas été en mesure de passer les épreuves l'examen de qualification d'assistante dentaire ;
Que d'ailleurs elle a été dans l'impossibilité de remplir la partie consacrée aux formations reçues au cours de la période d'expérience personnelle, du dossier de VAE en vue de la certification d'assistante dentaire qualifiée ;
Qu'en dépit du montant du salaire versé par rapport aux minima conventionnels et des augmentations de salaire, l'absence de mise en oeuvre de ces dispositions conventionnelles et l'emploi de Stéphanie X... dans sous un statut non prévu par la convention collective constitue un premier manquement de l'employeur ;
- sur les heures supplémentaires :
Attendu que son contrat de travail du 28 octobre 2002 énonce que Stéphanie X... effectuera un horaire mensuel moyen de 151 heures 2 / 3, que le contrat était placé dans le cadre conventionnel de l'accord sur l'aménagement du temps de travail dans les cabinets dentaires, que la salariée effectuera un horaire annuel de 1 587 heures et aura droit à des journées de repos fixées 7 jours au moins à l'avance ;
Que la salariée a dénoncé le 17 septembre 2004 puis le 22 septembre 2004 (lettre recommandée présentée le 24 septembre 2004) l'absence d'affichage de ses horaires de travail, le non paiement de ses heures supplémentaires de " mai à ce jour " soit 20h30 supplémentaires et a indiqué qu'elle avait travaillé depuis son embauche de 8h45 à 12h et de 13h45 à 19h00 soit 30 minutes supplémentaires non rémunérées par jour depuis l'embauche ;
Attendu que dans ses réponses écrites des 30 septembre 2004 et 1er octobre 2004, le Dr Y... a fait observer à sa salariée qu'elle était soumise à une modulation annuelle de son temps de travail sur la base de 1 587 heures de travail annuelles mais qu'il était " prêt à discuter... des heures éventuelles dépassant la modulation sur l'exercice antérieur (au 1er octobre 2004) sur la base de son récapitulatif du 22 avril " et que " pour la période en cours, les éventuelles heures dépassant la modulation se discuteront en mai 2005 " ;
Attendu que le Dr Y... revendique l'application volontaire de l'accord de branche des cabinets dentaires du 18 mai 2001 ;
Que l'accord du 5 décembre 2003 relatif à la modulation du temps de travail pour les salariés employés à temps plein, étendu par l'arrêté du 16 juillet 2004, d'application directe, prévoit, s'agissant de l'organisation de la modulation, que pour chaque salarié il sera établi un calendrier mensuel de programmation indicative de la modulation et que mensuellement il sera établi un décompte des heures effectivement travaillées ;
Que l'intimé ne justifie pas avoir remis à la salariée, conformément aux deux accords de branche, aucun calendrier mensuel de programmation indicatif ni aucun décompte mensuel des heures effectivement travaillées, ni avant ni après le 29 juillet ou le 1er octobre 2004, Stéphanie X... faisant observer que le " compteur de modulation 28 / 10 / 02 au 6 / 03 / 06 " n'avait été produit par le Dr Y... qu'à l'occasion du litige prud'homal ;
Attendu que d'ailleurs ce document n'est pas accompagné des relevés des temps de travail correspondants ; que les fiches de paie ne font apparaître aucune régularisation en fin de période de prétendue annualisation, comme le fait justement remarquer Stéphanie X... ;
Attendu qu'en revanche, Stéphanie X... produit aux débats la copie des agendas professionnels du cabinet pour les années 2003, 2004 et 2006 ;
Qu'ils font apparaître que, les jours d'ouverture du cabinet, des rendez-vous étaient systématiquement pris de 8h45 à 12 h et de 13h45 à 19 h, mais aussi que le cabinet était effectivement fermé certains mercredi après midi en 2003 mais pas systématiquement (17 mercredis après-midi travaillés en 2003), que le cabinet avait été ouvert les mercredis après-midi en 2004 et 2006 et qu'en revanche, il avait été effectivement fermé tous les vendredis après-midi à partir de novembre 2003 ainsi que le rappelle l'intimé ;
Que Stéphanie X... produit par ailleurs des fiches de pointage hebdomadaires à partir de mai 2004, un décompte d'heures supplémentaires pour 2004 et une analyse dont il ressort un total de 16h15 supplémentaires ;
Attendu qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, Stéphanie X... étaye suffisamment sa demande à hauteur de 2, 25 heures supplémentaires par semaine soit les rappels chiffrés suivants, au vu des jours travaillés relevés sur les agendas produits : janvier à avril 2003 : 389, 70 euros, mai à août 2003 : 305, 64 euros, septembre 2003 à avril 2004 : 909, 58 euros, mai 2004 à mars 2006 (décompte pièce 13) : 199, 77 euros,

soit en tout 1. 804, 69 euros outre 180, 47 euros au titre des congés payés afférents ;
Attendu que le non paiement des heures supplémentaires effectuées constitue un second manquement de l'employeur ;
- sur la prime de secrétariat :
Attendu qu'au mois de mai 2003, le bulletin de salaire a mentionné : " salaire mensuel 1375 euros prime de secrétariat incluse " ;
Attendu qu'au mois de septembre 2005, le salaire horaire pour 151, 67 heures a été porté de 1501, 50 euros à 1531, 53 euros avec cette mention : " y inclus prime de secrétariat " ;
Que l'employeur a reconnu en conséquence que les fonctions effectivement exercées par Stéphanie X... ouvraient droit à la perception de cette prime conventionnelle ;
Qu'au surplus, les attestations Z... et B... déjà citées établissent suffisamment que Stéphanie X... effectuait les tâches de secrétariat définies par les dispositions conventionnelles ;
Attendu que dans la mesure où la prime est de 10 %, la majoration de 30, 03 euros n'était pas suffisante ; que de la même façon, l'absence de référence à une prime sur les bulletins antérieurs à mai 2003 et postérieurs à mai 2003 alors que le salaire est resté inchangé, prouvent l'absence de versement effectif ;
Que Stéphanie X... est donc fondée à réclamer un rappel de prime de 5. 334, 64 euros pour la période de décembre 2002 à février 2006, déduction faite des 30, 03 euros versés à partir de septembre 2005 ;
Attendu que le non paiement de cette prime constitue un troisième manquement de l'employeur ;
- sur la démission :
Attendu que la salariée fait état de deux lettres de démission toutes deux datées du 10 février 2006 : l'une informant l'employeur de sa décision, sans exposer de griefs, la seconde exposant les reproches suivants :

- ne pas l'avoir secondée, malgré ses demandes, afin qu'elle puisse suivre la formation d'assistante dentaire qualifiée promise,- la modification de sa qualification sur ses fiches de paie,- la récupération d'heures selon des modalités imposées par l'employeur,- le manque de respect de son employeur lorsqu'elle avait voulu parler de ces problèmes avec lui ;

Que l'employeur conteste avoir reçu la seconde lettre du 10 février ;
Que la salariée produit une preuve de dépôt d'une unique lettre recommandée, expédiée le 11 février 2006 et présentée au docteur Y... le 14 février 2006 ;
Que la lettre de démission porte la mention " courrier avec AR " mais pas la seconde qui contient seulement la mention " lettre jointe à la lettre de démission " ; que la première lettre ne fait aucune référence à une pièce ou lettre jointe ; que la raison pour laquelle la salariée aurait rédigé le même jour deux lettres distinctes est inexpliquée ; que la preuve n'est donc pas rapportée de l'envoi de cette lettre motivée que, dès la première instance, l'employeur avait contesté avoir reçue ;
Mais attendu que la salariée avait envoyé à Ghislain Y... dès le mois de septembre 2004 une lettre de réclamation à propos de ses heures de travail, du règlement de ses heures supplémentaires et du refus de l'employeur de lui accorder la formation d'assistante dentaire qualifiée ;
Que dans ce contexte, la lettre de démission du 10 février 2006, même non motivée, doit être assimilée à une prise d'acte de la rupture du contrat de travail ;
Attendu que les trois manquements ci-dessus revêtent à eux seuls une gravité suffisante pour justifier une rupture du contrat de travail imputable à l'employeur, sans qu'il soit nécessaire de rechercher la réalité du quatrième grief invoqué tenant au comportement qualifié d'irrespectueux imputé au Dr Y... ;
- sur les conséquences de la requalification :
Attendu que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'au regard d'un salaire mensuel de référence de 1. 585, 70 euros et d'une ancienneté de 3 ans et 4 mois à la date de la rupture au 6 mars 2003, Stéphanie X... est créancière des sommes de 3. 171, 40 euros à titre d'indemnité de préavis, de 317, 40 euros au titre des congés payés afférents, de 528, 57 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
Attendu que Stéphanie X... a trouvé un emploi comme réceptionniste du 23 mars au 1er juin 2006 (salaire mensuel 1. 358 €) puis comme employée commerciale dans une grande surface en janvier 2007 (environ 1. 700 €) après une période de chômage ;
Que le Dr Y... lui versera la somme de 8. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'appelante ses frais non compris dans les dépens d'instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a consacré le principe d'une créance d'heures supplémentaires, sauf à porter le montant mis à la charge de Ghislain Y... à la somme de euros 1. 804, 69 euros outre 180, 46 euros au titre des congés payés afférents ;
Infirme le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau :
Dit que la démission du 10 février 2006 à effet au 6 mars 2006 s'analyse comme une rupture du contrat de travail en raison de manquements graves de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne Ghislain Y... à verser à Stéphanie X... les sommes suivantes :- rappel de prime de secrétariat : 5. 334, 64 euros,- congés payés afférents : 533, 46 euros,- indemnité de préavis : 3. 171, 40 euros,- congés payés afférents : 317, 14 euros,- indemnité de licenciement : 528, 57 euros,- dommages et intérêts pour rupture abusive : 8. 000 euros ;

Déboute Ghislain Y... de ses prétentions ;
Condamne Ghislain Y... aux dépens d'instance et d'appel et à verser à Stéphanie X... la somme de 2. 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur GALLICE, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ct0269
Numéro d'arrêt : 07/00263
Date de la décision : 08/09/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Valence, 15 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-09-08;07.00263 ?
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