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04/06/2008 | FRANCE | N°06/03836

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ct0269, 04 juin 2008, 06/03836


RG No 06 / 03836
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 04 JUIN 2008
Appel d'une décision (No RG 06 / 00393) rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en date du 28 septembre 2006 suivant déclaration d'appel du 12 Octobre 2006

APPELANT :
Monsieur Eric X... ... 73000 BARBERAZ

Représenté par Me Laure GERMAIN PHION (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMEES :
La S. N. C. EI MONTAGNE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 3, rue de la Paix 38800 LE PONT DE CLAIX



Représentée par Me Sylvain JACQUES (avocat au barreau de GRASSE)
L'INSTITUTION DE PREV...

RG No 06 / 03836
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 04 JUIN 2008
Appel d'une décision (No RG 06 / 00393) rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE en date du 28 septembre 2006 suivant déclaration d'appel du 12 Octobre 2006

APPELANT :
Monsieur Eric X... ... 73000 BARBERAZ

Représenté par Me Laure GERMAIN PHION (avocat au barreau de GRENOBLE)
INTIMEES :
La S. N. C. EI MONTAGNE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 3, rue de la Paix 38800 LE PONT DE CLAIX

Représentée par Me Sylvain JACQUES (avocat au barreau de GRASSE)
L'INSTITUTION DE PREVOYANCE UNIP prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 10 rue Massue 94307 VINCENNES CEDEX

Représentée par Me Laurent FAVET (avocat au barreau de GRENOBLE) substitué par Me GUERRY (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre, Monsieur Bernard VIGNY, Conseiller, Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 30 Avril 2008, Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 04 Juin 2008.
L'arrêt a été rendu le 04 Juin 2008.

Monsieur X... a été embauché en octobre 1989 en qualité de technicien de chantier par la S. N. C. EI MONTAGNE.
Le 17 août 1994, Monsieur X... a été détaché sur un chantier à la Réunion et un avenant a été établi pour ce détachement.
En février 1999, Monsieur X... apprenait qu'il était atteint d'une leucémie et revenait en Métropole.
Il suspendait son activité le 25 octobre 1999 puis cessait celle- ci le 24 janvier 2000.
Il a été licencié le 14 août 2001.
Monsieur X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Grenoble de différentes demandes :
- contre la S. N. C. EI MONTAGNE : congés payés, prime grand déplacement et de responsabilité, congés travaillés non payés, compléments de salaire, préjudice fiscal...- contre la Société UNIPREVOYANCE : compléments de salaires (20 novembre 2001-25 octobre 2002), pension invalidité (dernier trimestre 2002, premier trimestre 2003, troisième trimestre 2003, quatrième trimestre 2003, années 2004 et 2005).

Le Conseil a débouté Monsieur X... de toutes ses demandes. Il a retenu l'effet d'une transaction conclue le 21 novembre 2001 (procès- verbal de conciliation du bureau de la section encadrement).
Monsieur X... qui a relevé appel demande :
- la régularisation de ses bulletins de salaire des années 1998 à 2001- la condamnation de la S. N. C. EI MONTAGNE, sous astreinte de 100 € par jour à communiquer aux organismes sociaux concernés, caisses de retraite et de prévoyance, les déclarations de salaires corrigées pour les années 1998 à 2001 :

-8. 438, 05 € à titre de prime de grand déplacement de mai 1999 à août 1999-1. 417, 78 € à titre de prime de responsabilité de septembre 1999 à février 2000-2. 542, 01 € à titre d'apurement des congés-8. 699, 17 € nets à titre de maintien des salaires nets- la condamnation d'UNIPREVOYANCE à lui payer 234. 296, 17 € à titre de rente deuxième catégorie du 25 octobre 2002 au 31 décembre 2007 et à partir du 1er janvier 2008 une rente invalidité deuxième catégorie de 3. 711 € mensuels.

Subsidiairement- dire l'arrêt commun à UNIPREVOYANCE- la condamnation à lui verser, à titre de dommages- intérêts :-234. 296, 17 € au titre du préjudice du 25 octobre 2002 au 31 décembre 2007-555. 927, 66 € au titre du préjudice de janvier 2008 à avril 2020

Il sollicite 2. 000 € de chacune des parties intimées au titre de ses frais irrépétibles.
Il expose que :
- sur l'accord transactionnel du 22 novembre 2001 prévoyant le versement de la somme de 350. 000 Frs : cette somme ne vise que la rupture du contrat de travail par l'exécution de celui- ci, par les bulletins de salaire, par les rappels de complément maladie et de rente...- lors de l'accord : il ignorait qu'il serait placé en invalidité (décision du 25 octobre 2002) et que son salaire annuel de 1999 servirait de référence au calcul des prestations maladie et invalidité. Il ne pouvait évidemment deviner l'évolution de son état de santé.- la S. N. C. EI MONTAGNE n'ayant pas réglé son solde de congés payés, il a dû saisir le Conseil de Prud'hommes- l'unicité d'instance ne peut lui être opposée

Ses demandes visent :
- la régularisation des bulletins de salaire qui ont retenu à tort un abattement pour frais professionnels, de 10 %, un taux de charges sociales erroné, ont omis d'inclure l'indemnité de grand déplacement dans l'assiette des cotisations, les cotisations relatives au loyer du domicile et à la mise à disposition d'un véhicule.- les salaires non versés en 1999, les primes...- UNIPREVOYANCE devait lui verser, étant en invalidité deuxième catégorie, 95 % des revenus déclarés en 1999 après déduction de la pension C. P. A. M. (95 % = 80 % traitement de base + 5 % par enfant à charge). Or, ses salaires ayant été calculés de façon erronée, UNIPREVOYANCE a versé des sommes minorées.

La Société EI MONTAGNE conclut à la confirmation du jugement. Elle sollicite 2. 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure civile.
Elle relève que :
- le procès- verbal de conciliation a autorité de la chose jugée (cf. ce procès- verbal). La Société a réglé les somme dues à Monsieur X....- la conciliation a été totale- si Monsieur X... a omis d'aborder des demandes lors de cette conciliation, cela ne rend pas pour autant son action recevable- aucun reliquat de congés payés n'existait- le principe d'unicité d'instance s'oppose à la recevabilité des demandes de Monsieur X... . Son contrat de travail a pris fin le 14 août 2001, de sorte que le 21 novembre 2001 il n'y avait plus de lien contractuel. Lorsque ce procès- verbal est intervenu, Monsieur X... savait que, selon lui, ses salaires étaient erronés.

La société UNIRPEVOYANCE demande de dire l'appel de Monsieur X... irrecevable, subsidiairement de confirmer le jugement. Elle sollicite 3. 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
Elle expose que :
- le Conseil de Prud'hommes s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes de Monsieur X... à son encontre. Si cette décision n'a pas été mentionnée dans le dispositif, c'est par suite d'une erreur matérielle. Monsieur X... devait former un contredit.- en toute hypothèse, les demandes concernent l'exécution du contrat groupe d'assurance souscrit par l'employeur de Monsieur X..., par l'exécution du contrat de travail.- l'action est encore irrecevable en vertu de l'existence du procès- verbal de conciliation et du principe d'unicité d'instance.- si des erreurs de calcul ont été commises, elles l'ont été par la S. N. C. EI MONTAGNE, pas par elle.

MOTIFS DE L'ARRET :
1°) Sur les demandes formées contre la Société EI MONTAGNE :
L'article R. 1452-6 du code du travail (anciennement article R. 516-1) dispose :
" Toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du Conseil de Prud'hommes ".

Monsieur X... a saisi, le 26 septembre 2001, le Conseil de Prud'hommes de Grenoble, section encadrement, pour obtenir paiement :
- d'une indemnité de licenciement de 750. 000 Francs- de frais irrépétibles de 10. 000 Francs- d'une indemnité de préavis pour mémoire- d'une indemnité conventionnelle de licenciement pour mémoire.

Le 22 novembre 2001 un " procès- verbal de conciliation totale " est intervenu entre les parties en ces termes :
ACCORD DES PARTIES
La Société EI MONTAGNE accepte de payer à titre de dommages et intérêts pour la rupture du contrat de travail, au- delà de ce qui a été déjà réglé à Monsieur X... et notamment son indemnité de licenciement la somme de 350. 000 francs, somme forfaitaire, indemnitaire et transactionnelle. Cette somme sera réglée sous huitaine à réception du procès- verbal de conciliation. Le chèque sera établi à l'ordre de la CARAC. Monsieur Z..., représentant de la Société, s'engagera à apurer le solde de congés payés en accord avec Monsieur X.... Les parties conviennent avoir été informées de leurs droits respectifs. Cet accord réalise la conciliation totale des parties sur l'ensemble des prétentions formulées par le demandeur et entraîne l'extinction de l'instance et de l'action.

Les nombreuses pièces versées aux débats : courriers émanant de Monsieur X... adressés à son employeur et réponses de ce dernier (datés des 19 août 2000, 1er septembre 2000, 22 septembre 2000, 19 avril 2000, 29 septembre 2000, 15 novembre 2000, 22 novembre 2000, 27 novembre 2000, 13 décembre 2000, 6 décembre 2000) montrent que Monsieur X..., avant de saisir la juridiction prud'homale, a interrogé son employeur sur ses droits salariaux, indemnités et frais : indemnités de séjour, prime de responsabilité, congés payés, notes de frais, jours de fractionnement, prime de vacances, indemnités d'arrêt de travail.
Il n'est pas douteux que si Monsieur X... a interrogé son employeur sur l'ensemble des éléments mentionnés ci- dessus, c'est qu'il avait conscience qu'ils revêtaient une importance certaine dans le calcul des droits ou avantages auxquels il pouvait prétendre dans la situation dans laquelle il se trouvait.
Ainsi, Monsieur X... avait de toute évidence saisi que plus l'assiette de calcul des cotisations sociales était étendue, plus les prestations auxquelles il avait droit étaient importantes.
En ce qui concerne la pension d'invalidité (deuxième catégorie) qui a été attribuée à Monsieur X... le 1er octobre 2002 par la C. P. A. M. de la Savoie, le montant de celle- ci a été calculé conformément à l'article R. 341-4 du Code de Sécurité Sociale (sur la base des salaires des années 1985, 19991 à 1999).
Si Monsieur X... ne pouvait savoir, en 2000 ou 2001, qu'il serait placé en invalidité et percevrait de ce chef une pension, il avait pleine connaissance, ainsi que cela a été exposé plus haut, que l'importance de l'assiette des cotisations et de ses rémunérations conditionnerait l'ensemble des prestations auxquelles il pouvait prétendre.
La circonstance que Monsieur X... ait bénéficié du versement d'une pension d'invalidité, certes imprévisible en 1999, 2000 et 2001, ne peut justifier qu'il puisse, après la saisine du Conseil de Prud'hommes et le procès- verbal de conciliation, revenir sur le choix arrêté lors de celle- ci.
Le montant de la pension d'invalidité dépendait d'éléments que Monsieur X... connaissait lors de la première saisine du Conseil de Prud'hommes de Grenoble et qui a été clôturée par le procès- verbal de conciliation.
L'ensemble des éléments ci- dessus analysés établit que, le 26 septembre 2001, jour de la saisine du Conseil de Prud'hommes de Grenoble, toutes les prétentions dont Monsieur X... a saisi la Cour avaient un fondement né ou révélé antérieurement à la première saisine du Conseil de Prud'hommes de Grenoble.
Monsieur X... devait soumettre l'ensemble de ses demandes au Conseil de Prud'hommes de Grenoble, lors de la première saisine de ce dernier.
En ce qui concerne les congés payés à propos desquels le procès- verbal de conciliation mentionne que l'employeur de Monsieur X... s'engage à les apurer en accord avec ce dernier, la demande à nouveau présentée dans le cadre de la présente procédure se heurte au principe d'unicité d'instance.
Les parties étaient d'accord pour procéder à une vérification et la circonstance que celle- ci n'ait pas révélé que la société intimée était débitrice ne peut permettre de soutenir que la conciliation n'ait pas été totale.
Le procès- verbal de conciliation du 22 novembre 2001 est revêtu de l'autorité de la chose jugée.
Monsieur X... n'était pas recevable en vertu du principe d'unicité d'instance et de l'autorité de la chose jugée attachée au procès- verbal de conciliation du 22 novembre 2001 à saisir le Premier Juge, le 13 avril 2006, des demandes objet de la présente procédure.
2°) Sur les demandes formées contre la Société UNIPREVOYANCE :
Le Premier Juge s'est déclaré incompétent en ce qui concerne les demandes formées par Monsieur X... à l'encontre de la société UNIPREVOYANCE. Toutefois, si cette incompétence figure dans la motivation du jugement, elle n'est pas mentionnée dans le dispositif de ce dernier, de sorte que les dispositions de l'article 80 du Code de Procédure Civile ne sont pas applicables.
L'appel de Monsieur X... à l'encontre du jugement relatif à ses demandes formées contre la Société UNIPREVOYANCE est en conséquence recevable.
Cependant, les demandes formées par Monsieur X... à l'encontre de la société UNIRPEVOYANCE ne relèvent pas de la compétence de la juridiction prud'homale qui ne connaît que des différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail, conformément à l'article L. 1411-1 du Code du Travail (anciennement L. 511-1).
Aucune considération d'équité ne commande l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit des parties intimées.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes formées à l'encontre de la Société EI MONTAGNE.
Statuant à nouveau
Dit les demandes de Monsieur X... irrecevables.
Dit la juridiction prud'homale et la Chambre Sociale incompétente pour connaître des demandes formées par Monsieur X... à l'encontre de la Société UNIPREVOYANCE.
Dit le Tribunal de Grande Instance compétent pour connaître des ces demandes.
Débout les parties de toute autre demande.
Condamne Monsieur X... aux dépens d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame VERDAN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ct0269
Numéro d'arrêt : 06/03836
Date de la décision : 04/06/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Grenoble, 28 septembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-06-04;06.03836 ?
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