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19/05/2008 | FRANCE | N°06/03117

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ct0269, 19 mai 2008, 06/03117


RG No 06 / 03117
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU LUNDI 19 MAI 2008
Appel d'une décision (No RG 06 / 00002) rendue par le Conseil de Prud'hommes de GAP en date du 10 juillet 2006 suivant déclaration d'appel du 03 Août 2006

APPELANTE :
L'ADAPEI DES HAUTES ALPES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège La Source Villarobret BP 62 05002 GAP

Représentée par Me BARRAUT de la SCP ANDRE DERUE- JACQUES BARTHELEMY et ASSOCIES (avocats au barreau de LYON)
INTIME :
Monsieur Ahm

ed X... ... 38100 GRENOBLE

Représenté par Me SAMBA- SAMBELIGUE substituant Me Assia BOUMA...

RG No 06 / 03117
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU LUNDI 19 MAI 2008
Appel d'une décision (No RG 06 / 00002) rendue par le Conseil de Prud'hommes de GAP en date du 10 juillet 2006 suivant déclaration d'appel du 03 Août 2006

APPELANTE :
L'ADAPEI DES HAUTES ALPES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège La Source Villarobret BP 62 05002 GAP

Représentée par Me BARRAUT de la SCP ANDRE DERUE- JACQUES BARTHELEMY et ASSOCIES (avocats au barreau de LYON)
INTIME :
Monsieur Ahmed X... ... 38100 GRENOBLE

Représenté par Me SAMBA- SAMBELIGUE substituant Me Assia BOUMAZA (avocats au barreau de GRENOBLE)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006 / 006808 du 09 / 10 / 2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean- François GALLICE, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur Eric SEGUY, Conseiller, Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 07 Avril 2008, Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 19 Mai 2008.
L'arrêt a été rendu le 19 Mai 2008. Ahmed X..., né en 1961, faisait partie des effectifs des établissements " la Source " du centre d'aide par le travail de l'ADAPEI des Hautes- Alpes depuis le 8 septembre 1981 en qualité d'ouvrier.

Le 25 octobre 2001, la COTOREP lui a reconnu le statut de travailleur handicapé catégorie C + pour la période du 1er novembre 2002 au 1er novembre 2006 avec la mention " orientation professionnelle : centre d'aide par le travail " pour la même période et donc pour une durée de 5 ans.
Divers arrêts maladie lui ont été prescrits, notamment à partir de 2003 et, d'une manière continue, du 15 juillet 2003 au 31 août 2004.
Le directeur de ces établissements a attesté le 19 novembre 2004 qu'Ahmed X... ne faisait plus partie de l'effectif du CAT la Source depuis le 1er octobre 2004.
Le 6 octobre 2004, Ahmed X... a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble d'une demande en paiement de salaires et d'une indemnité compensatrice de congés payés sur la période du 1er janvier 2000 au 1er octobre 2004 ainsi que d'une demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Par jugement du 12 décembre 2005, ce conseil de prud'hommes a dit que le demandeur a été bénéficiaire d'un contrat de travail soumis au droit commun, s'est déclaré matériellement compétent pour connaître du litige mais a constaté que le demandeur exerçait son emploi dans un établissement situé à Gap et s'est donc déclaré territorialement incompétent au profit du conseil de prud'hommes de Gap.
L'ADAPEI des Hautes- Alpes a relevé appel de cette décision et, par arrêt du 15 mars 2006, la cour d'appel de Grenoble a constaté que cet appel était irrecevable. Aucun pourvoi n'a été formé contre l'arrêt du 15 mars 2006.
C'est dans ce contexte que le 10 juillet 2006, le conseil de prud'hommes de GAP a jugé qu'Ahmed X... avait fait l'objet d'un licenciement, que ce licenciement n'était pas abusif et discriminatoire mais était fondé sur une cause réelle et sérieuse et a condamné l'ADAPEI à lui verser les sommes de 670 € pour licenciement irrégulier, de 1. 541 € à titre d'indemnité légale de licenciement, de 1. 334 € à titre d'indemnité de délai- congé, plus les congés payés afférents, de 100 € en réparation de son préjudice moral et de 100 € au titre de ses frais irrépétibles.
L'ADAPEI a interjeté appel de cette décision le 21 juillet 2006. Elle demande principalement à la cour, sous le visa de l'alinéa 2 de l'article 92 du code de procédure civile, de se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif de Marseille, subsidiairement, de réformer le jugement, de débouter Ahmed X... de ses prétentions, de le condamner à indemniser ses propres frais irrépétibles et d'ordonner le remboursement des sommes versées.
Elle conteste l'existence de tout contrat de travail entre les parties en faisant valoir que l'intéressé était simple usager d'un service public dans lequel il avait été affecté ou orienté, en sa qualité de travailleur handicapé, par la COTOREP dont il relevait et que le code du travail ne régissait les relations en cause que pour les questions relatives à l'hygiène et à la santé au travail.
Subsidiairement, elle soutient que l'intéressé avait démissionné en raison de son déménagement dans l'Isère, qu'elle avait tiré les conséquences du fait qu'il ne se présentait plus au CAT et que la lettre qu'A. X... avait envoyée le 13 mai 2004 à l'ADAPEI signifiait seulement qu'il voulait rester dans un CAT, d'où le transfert de son dossier à la COTOREP de l'Isère.
Ahmed X... s'oppose à l'exception d'incompétence soulevée par l'appelante en faisant valoir, sous le visa de l'article 92 du code de procédure civile, que l'espèce ne constituait pas l'un des cas où le juge était tenu de prononcer d'office l'incompétence et, d'autre part, en invoquant le caractère définitif de la décision du 12 décembre 2005 du conseil de prud'hommes de Grenoble.
Il demande à la cour de considérer que son licenciement était nul et discriminatoire au sens de l'article L. 122-45 du code du travail comme fondé sur sa maladie et son handicap, de condamner en conséquence l'ADAPEI à lui verser une indemnité de 16. 080 €.
Subsidiairement, il lui demande de confirmer le jugement sur l'absence de cause réelle et sérieuse ainsi que sur les indemnités mises à la charge de l'appelante, sauf à porter à 2. 000 euros celles allouées en réparation de son préjudice moral et à condamner l'ADAPEI à lui verser les sommes de 146, 15 euros au titre de 37 heures supplémentaires restées impayées et de 1. 200 euros au titre des frais irrépétibles.
Sur le fond, il invoque l'existence d'un contrat de travail au regard du traitement qui lui avait été réservé, équivalent à celui d'un salarié, en raison notamment d'horaires de travail imposés, des bulletins de salaires émis depuis 1981 et sur lesquels ses congés payés étaient décomptés, au regard de l'expression " radiation d'une liste de salariés " utilisée par l'ADAPEI en février 2004, de la référence à la notion d'employeur utilisée dans une convention de stage signée par cette association et de la délivrance de la médaille du travail en octobre 2001.
Il conteste avoir remis une démission claire et non équivoque, qui ne pouvait être déduite de son absence du CAT, mais invoque une volonté contraire exprimée dans son écrit du 13 mai 2004 par lequel il avait informé le CAT qu'il était en longue maladie à compter de juillet 2003. Il prétend que l'ADAPEI avait, en realité, voulu le licencier en raison de son classement en invalidité.
Sur quoi :
Attendu que le jugement du 12 décembre 2005, par lequel le conseil de prud'hommes de Grenoble a notamment dit que monsieur Ahmed X... avait été bénéficiaire d'un contrat de travail soumis au droit commun avec l'ADAPEI des Hautes- Alpes et s'était déclaré matériellement compétent, est devenu définitif par l'effet de l'absence de contredit et de l'arrêt du 15 mars 2006 de cette même cour, laquelle a déclaré irrecevable l'appel interjeté contre cette décision ;
Attendu qu'en application de l'article 92 du code de procédure civile, " L'incompétence peut être prononcée d'office en cas de violation d'une règle de compétence d'attribution lorsque cette règle est d'ordre public ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. Elle ne peut l'être qu'en ces cas. Devant la cour d'appel et devant la Cour de cassation, cette incompétence ne peut être relevée d'office qui si l'affaire relève de la compétence d'une juridiction répressive ou administrative ou échappe à la connaissance de la juridiction française " ;

Que même dans les cas visés au second alinéa de cet article, le relevé d'office de l'incompétence n'est qu'une simple faculté ; qu'il n'apparaît pas nécessaire de relever d'office l'incompétence au cas présent ;
Attendu que l'ADAPEI, dans une correspondance adressée le 14 septembre 2004 à la COTOREP des Hautes- Alpes, a considéré Ahmed X... comme " démissionnaire de fait " au motif qu'il était absent de son poste depuis juillet 2003, qu'il avait emporté toutes ses affaires et qu'il logeait chez sa mère à Grenoble ;
Attendu que, toutefois, ni l'absence de l'intéressé à compter du mois de juillet 2003, ni le fait qu'en 2004 il vivait à Grenoble, ne pouvaient être considérés comme une démission claire et non équivoque, dès lors qu'à l'examen des bulletins de salaire émis en 2003 et 2004 par l'ADAPEI, cette absence était justifiée par un arrêt de travail ;
Qu'au surplus, l'ADAPEI ne pouvait non plus considérer de manière opérante qu'Ahmed X... ne l'avait pas tenue informée de sa situation personnelle, alors qu'il avait pris le soin de lui adresser, les 16 février 2004 et 13 mai 2004, deux courriers que l'ADAPEI ne conteste pas avoir reçus, destinés précisément à l'informer de son intention de ne pas démissionner ;
Qu'il écrivait notamment dans le premier : " je suis en congé de longue maladie du 15 juillet 2003 au 14 juillet 2006... je vous informe également qu'à la fin de mon arrêt maladie, je décide de reprendre mon travail et je ne veux pas démissionner " et dans le second : " je ne souhaite pas démissionner " ;
Attendu que, d'autre part, dans ce contexte, le fait pour Ahmed X... d'avoir sollicité dans ces deux lettres le paiement de cinq semaines de congés payés, non pour la période en cours mais pour la précédente, ne peut non plus être considéré comme l'expression d'une démission claire et non équivoque ;
Que d'ailleurs 911, 34 € lui ont été versés sur son bulletin de salaire du mois de mai 2004, à titre de solde de congés payés, sans que l'ADAPEI considère pour autant, à cette époque, que l'intéressé avait démissionné ;
Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a considéré qu'Ahmed X... avait fait l'objet, au 30 septembre 2004, d'une mesure de licenciement irrégulière en la forme, dépourvue de cause réelle et sérieuse et en ce que, au regard de son salaire mensuel de référence (667 €) et de son ancienneté remontant au 8 septembre 1981, il lui a alloué les indemnités de 670 euros sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du code du travail, de 1. 541 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, de 1. 334 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 133 euros au titre des congés payés afférents ;
Attendu que le conseil de prud'hommes a également fait une exacte appréciation des faits qui lui étaient soumis en considérant que la mesure n'était pas fondée sur la maladie ou sur le handicap et qu'elle n'était ni nulle ni discriminatoire ;
Attendu qu'Ahmed X... ne produit aucun élément pour étayer sa demande de paiement d'heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées tous les vendredis depuis le 21 mars 2003 jusqu'au 4 juillet 2003 pour un total de 37 heures, selon les termes de sa lettre du 16 février 2004 déjà citée ; qu'en particulier, il ne produit aucun décompte de ces heures ;
Attendu que les dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice consécutif à la rupture seront portés plus justement à la somme de 2. 000 euros en fonction de son préjudice consécutif à la perte de cet emploi ;
Attendu qu'Ahmed X... bénéficie du maintien de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il n'est pas inéquitable de rejeter sa demande formée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
la Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :
Dit n'y avoir lieu de se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif de Marseille ;
Confirme le jugement prononcé le 10 juillet 2006 par le conseil de prud'hommes de Gap, sauf à porter à 2. 000 euros la somme mise à la charge de l'ADAPEI des Hautes- Alpes en réparation du préjudice moral subi par Ahmed X... en raison de la rupture de son contrat de travail ;
Déboute Ahmed X... du surplus de ses prétentions ;
Déboute l'ADAPEI des Hautes- Alpes de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne l'ADAPEI des Hautes- Alpes aux dépens d'instance et d'appel.
Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.
Signé par Monsieur GALLICE, Président, et par Madame LEICKNER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ct0269
Numéro d'arrêt : 06/03117
Date de la décision : 19/05/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Gap, 10 juillet 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-05-19;06.03117 ?
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