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14/01/2008 | FRANCE | N°06/03430

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ct0269, 14 janvier 2008, 06/03430


RG No 06/03430
No Minute :

Notifié le :Grosse délivrée le :

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU LUNDI 14 JANVIER 2008
Appel d'une décision (No RG 20050640)rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VALENCEen date du 28 août 2006suivant déclaration d'appel du 04 septembre 2006

APPELANT :

Monsieur Abdelhakim X......07500 GUILHERAND GRANGES

Représenté par Me Christophe LE CHENE (avocat au barreau de VALENCE)

INTIMEES :

La S.A.R.L. GROUPEMENT 2000 prise en la personne de son représentant légal en

exercice domicilié en cette qualité audit siège63 Allée Joule26000 VALENCE

Représentée par Me Elodie BORONAD LE...

RG No 06/03430
No Minute :

Notifié le :Grosse délivrée le :

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU LUNDI 14 JANVIER 2008
Appel d'une décision (No RG 20050640)rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VALENCEen date du 28 août 2006suivant déclaration d'appel du 04 septembre 2006

APPELANT :

Monsieur Abdelhakim X......07500 GUILHERAND GRANGES

Représenté par Me Christophe LE CHENE (avocat au barreau de VALENCE)

INTIMEES :

La S.A.R.L. GROUPEMENT 2000 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège63 Allée Joule26000 VALENCE

Représentée par Me Elodie BORONAD LESOIN (avocat au barreau de Valence)
La CPAM D'ANNONAY prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siègeB.P. 12207104 ANNONAY CEDEX

Représentant : Mme Y... munie d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean-François GALLICE, Conseiller,Madame Dominique JACOB, Conseiller,Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 11 décembre 2007,Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2008.
L'arrêt a été rendu le 14 janvier 2008.RG 06/3430 DJ

EXPOSE DU LITIGE

Abdelhakim X... a été victime d'un accident du travail, le 4 décembre 2001, alors qu'il exerçait son activité de peintre pour le compte de la SARL GROUPEMENT 2000.
Les circonstances de l'accident sont ainsi décrites : "Lors des opérations de montage d'un échafaudage type nacelle sur mat, la plate-forme de travail a basculé du 6ème étage emportant avec elle l'ouvrier au poste de travail".
L'état de santé de Abdelhakim X... a été consolidé le 11 mai 2005 et la CPAM d'Annonay lui a servi une rente, à compter du 11 mai 2005, selon un taux d'incapacité permanente partielle de 47 %.Abdelhakim X... a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Valence qui, par jugement du 28 août 2006, l'a débouté de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur au motif que l'accident résulte uniquement d'une faute d'inattention des salariés travaillant sur la plate-forme qui était conforme à la réglementation.

La Cour est saisie par l'appel interjeté le 4 septembre 2006 par Abdelhakim X..., le jugement lui ayant été notifié le 29 août 2006.

Abdelhakim X... sollicite l'infirmation du jugement, la désignation d'un médecin expert pour déterminer ses préjudices, le versement d'une provision de 10 000 € à valoir sur son indemnisation, et la somme de 2 500 € par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il expose, en ses conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience :- qu'il n'a jamais fait l'objet d'une formation spécifique quant aux opérations de montage ou de démontage de la nacelle, puisqu'il est peintre ;- que l'accident est survenu lors de ces opérations, après le déplacement de la nacelle ; qu'en effet la réalisation de l'ensemble des travaux nécessaires au ravalement de façade nécessitait un tel déplacement ; - que l'employeur ne pouvait ignorer qu'à cette occasion les salariés se trouvaient dans une position délicate et qu'il y avait lieu de prévoir des mesures de sécurité complémentaires, compte tenu de l'instabilité relative de l'installation en phase de montage, notamment des harnais individuels de protection ;- qu'il n'est nullement démontré que le boulon manquant provient d'une omission ou négligence imputable à Abdelhakim X..., dans la mesure où le montage est effectué par trois salariés, et surtout, que le montage n'était pas terminé au moment de l'accident.

La SARL GROUPEMENT 2000, intimée, demande à la cour de confirmer le jugement.

Elle expose, en des conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience :- que le mode opératoire de montage de la nacelle est tel que le personnel, pendant l'opération, est en permanence dans une posture de travail entièrement sécurisée, la première opération consistant à installer la plate-forme de travail de façon définitive sur la position zéro au niveau du sol, puis de monter le mât à l'aide d'éléments métalliques d'environ un mètre de haut, au fur et à mesure, et boulonnés les uns aux autres ;- que lors de l'accident, le mât était ancré dans la façade à l'aide de tubes métalliques chevillés au 4ème et au 6ème étage ; que, arrivés au 6ème étage, les salariés ont mis en place, par emboîtement, un élément de mât sans solidariser, au moyen des boulons prévus à cet effet, le dernier élément assemblé ; qu'ils ont actionné l'ascension de la plate-forme sur le dernier tronçon et que c'est à cet instant que la nacelle a basculé en emportant le dernier morceau de mât ;- que l'accident résulte exclusivement du fait que les trois salariés n'ont pas stabilisé le dernier élément du mât en boulonnant les éléments entre eux, ne respectant pas les consignes de montage; - que Abdelhakim X... n'était exposé à aucun danger prévisible et que l'employeur ne pouvait avoir conscience d'un danger ;- qu'il a rempli son obligation d'informer et de former le salarié sur le fonctionnement du matériel utilisé ; - qu'il a mis en place les dispositifs de protection requis.

La CPAM d'Annonay s'en rapporte à justice et, pour le cas où la faute inexcusable serait reconnue, elle demande que le montant de la majoration soit fixé de sorte que la rente allouée n'excède pas la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité et de condamner la SARL GROUPEMENT 2000 à lui rembourser les sommes qu'elle serait amenée à verser au titre de la rente et des préjudices extrapatrimoniaux.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail.

Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir connaissance du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures pour l'en préserver.
C'est à la victime d'apporter la preuve du caractère inexcusable de la faute commise par l'employeur, c'est-à-dire de démontrer que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger et qu'il n'a pas pris les mesures de protection nécessaires.
En l'occurrence il ressort des déclarations de M. Z..., responsable administratif de la SARL GROUPEMENT 2000, recueillies par les services de Police le 14 décembre 2001 :
- que Abdelhakim X... est ouvrier façadier de qualification niveau 3 ;- qu'il travaille dans l'entreprise depuis le 1er avril 2000 ;- que le matériel en cause était mis à disposition de la SARL GROUPEMENT 2000 par la société LAHO depuis le 7 juin 2001 ;- que cette société a apporté son aide technique au montage, au cours de 8 journées de formation entre le 6 juin et le 14 novembre 2001 pour s'initier aux règles de montage et de démontage ;- que les trois ouvriers présents sur le chantier, dont Abdelhakim X..., ont suivi cette formation ;- que, durant cette même période, le personnel de la SARL GROUPEMENT 2000 a assuré lui-même les déplacements de l'installation (montage et remontage) à 5 reprises, sans difficulté particulière.Selon les investigations menées tant par les services de Police que par l'Inspection du Travail sur les lieux de l'accident, à la base du matériel de levage se trouvait un engin à 4 roues stabilisé, muni d'un mât métallique vertical atteignant le balcon du 7ème étage ; deux points d'ancrage en façade étaient en place au moment de l'accident, dont un a été arraché au moment de la chute de la plate-forme ; celle-ci s'est en effet détachée au niveau du 6ème étage avec un élément du mât, a basculé dans le vide et est restée accrochée sur le rebord du balcon du 1er étage, touchant le sol de l'autre côté ; il s'agit d'une plate-forme à crémaillère à commande électrique.

Selon l'Inspecteur du Travail, le basculement de la plate-forme est dû à une faute d'inattention des salariés qui ont omis de fixer correctement le dernier élément du mât. Si cet élément avait été fixé, il y aurait eu nécessairement renversement de l'ensemble ou des traces d'arrachement des parties solidarisées du mât, ce qui n'a pas été constaté. Il ajoute qu'il ne s'agissait pas de la première opération de montage sur le site et que le montage des éléments eux-mêmes est répétitif quant aux opérations à effectuer.

Les deux autres ouvriers travaillant sur la plate-forme ont expliqué les manoeuvres qu'ils avaient exécutées juste avant l'accident.

Selon M. A..., ils étaient en train de finir de monter le dispositif de levage de la nacelle sur laquelle ils travaillaient ; ils devaient procéder à l'installation d'un élément après l'autre ; ils étaient en train de fixer l'avant-dernier élément ; avant de boulonner l'élément, ils ont arrimé la nacelle au mur car, ce jour-là, il y avait du vent ce qui donnait du ballant à la nacelle ; ils avaient arrimé la nacelle au mur et ils s'apprêtaient à monter le dernier élément ; pour ce faire, M. A... est allé avec Abdelhakim X... chercher le dernier élément qui était en bout de nacelle, ce qui a provoqué un déséquilibre ; comme l'avant-dernier élément n'était pas boulonné, la nacelle a basculé dans le vide.
M. B..., quant à lui, indique être venu sur le chantier pour aider M. A... et Abdelhakim X... à l'installation de la nacelle ; ils étaient en train de monter l'avant-dernier élément ; ils ont amarré la nacelle au 6ème étage ; puis ils ont décidé d'amarrer le dernier élément du mât ; ils avaient fini de travailler sur le mât et sont remontés tous les 3 dans la nacelle qui a alors basculé; il ne se souvient pas si l'avant-dernier élément avait été boulonné au pas ; en arrimant la nacelle au mur il n'a pas vérifié si l'ensemble avait été boulonné.
Le responsable de la société LAHO, M. C..., explique pour sa part que l'élévation de la plate-forme ne s'effectue que sur un mât déjà boulonné, les ouvriers devant, à chaque fois, fixer quatre boulons de 29 millimètres lors de l'emboîtement des mâts ; que le mât vertical présent au niveau de la motorisation ne semblait pas avoir été fixé à la colonne en place déjà montée, car il a vu qu'il n'y avait aucune déformation au niveau des points de fixation de l'échelle, aucun boulon ou morceau de boulon défectueux et pas d'arrachement de la structure métallique.
Il ajoute que l'opération de boulonnage avait bien été effectuée sur les éléments inférieurs et que le matériel, loué à la SARL GROUPEMENT 2000 depuis le 13 juin 2001, avait été utilisé et déplacé à de nombreuses reprises, et enfin que la notice de montage et d'utilisation se trouve dans la plate-forme de travail à disposition des utilisateurs.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la qualité du matériel utilisé n'est pas en cause, sa conformité aux différentes directives applicables étant établie et la dernière révision ayant été réalisée le 28 mai 2001, mais que, comme l'a souligné le premier juge, l'accident résulte uniquement d'une faute d'inattention des salariés travaillant sur la plate-forme.
Si l'employeur ne pouvait ignorer les dangers inhérents à un travail en hauteur sur un tel matériel, il s'avère qu'il a donné à ses ouvriers, dont Abdelhakim X..., la formation nécessaire à l'utilisation du matériel que ceux-ci mettaient en oeuvre depuis plusieurs mois sans difficulté, les opérations plus délicates de déplacement de l'ensemble de l'échafaudage, dont la base à stabiliser, étant effectuées par les employés de la société LAHO. Il n'est au surplus pas démontré que la formation donnée n'était pas adaptée ni comprise par des ouvriers dont le travail s'effectuait habituellement en façade d'immeubles.Par ailleurs les mesures individuelles de protection que Abdelhakim X... reproche à l'employeur de ne pas avoir mis en place n'étaient pas prévues par le constructeur, ni nécessaires en présence de dispositif de protection collective (garde-corps hauts et plinthe métallique).

L'employeur a donc pris les mesures nécessaires pour préserver ses salariés des dangers liés à un travail en hauteur, et la preuve d'une faute inexcusable n'est pas rapportée.
Par conséquent le jugement attaqué doit être confirmé.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
- Dispense Abdelhakim X... du paiement du droit prévu à l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur GALLICE, président, et par Madame LEICKNER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ct0269
Numéro d'arrêt : 06/03430
Date de la décision : 14/01/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence, 28 août 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2008-01-14;06.03430 ?
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