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06/11/2007 | FRANCE | N°05/3624

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre civile 1, 06 novembre 2007, 05/3624


RG No 05 / 03624

Grosse délivrée le :

S.C.P. CALAS S.C.P. GRIMAUD

COUR D'APPEL DE GRENOBLE 1èRE CHAMBRE CIVILE

AUDIENCE SUR RENVOI DE CASSATION
ARRET DU 06 NOVEMBRE 2007

Recours contre une décision (No R.G. 96 / 1186) rendue par le Tribunal de Grande Instance de DIGNE en date du 26 novembre 1997 ayant fait l'objet d'un arrêt rendu le 09 Janvier 2003 par la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE et suite à un arrêt de cassation du 26 Janvier 2005

SUIVANT DECLARATION DE SAISINE DU 24 Août 2005

APPELANTES :

ASSOCIATION CULTURELLE

DU TEMPLE PYRAMIDE-ACTP-prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qua...

RG No 05 / 03624

Grosse délivrée le :

S.C.P. CALAS S.C.P. GRIMAUD

COUR D'APPEL DE GRENOBLE 1èRE CHAMBRE CIVILE

AUDIENCE SUR RENVOI DE CASSATION
ARRET DU 06 NOVEMBRE 2007

Recours contre une décision (No R.G. 96 / 1186) rendue par le Tribunal de Grande Instance de DIGNE en date du 26 novembre 1997 ayant fait l'objet d'un arrêt rendu le 09 Janvier 2003 par la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE et suite à un arrêt de cassation du 26 Janvier 2005

SUIVANT DECLARATION DE SAISINE DU 24 Août 2005

APPELANTES :

ASSOCIATION CULTURELLE DU TEMPLE PYRAMIDE-ACTP-prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège La Baume 04120 CASTELLANE

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Antoine BERAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

ASSOCIATION VAJRA TRIOMPHANT-AVT-, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège La Baume 04120 CASTELLANE

représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Antoine BERAUD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES :

ASSOCIATION INTERDEPARTEMENTALE ET INTERCOMMUNALE POUR LA PROTECTION DE LA RETENUE DE FONTAINE L'EVEQUE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège BP 1-Les Salles du Verdon 83630 AUPS

représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me Catherine COHEN SEAT, avocat au barreau de NICE

Madame Jacqueline A... épouse B...... 04120 CASTELLANE

représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me Catherine COHEN SEAT, avocat au barreau de NICE

Monsieur Frédéric B...... 04120 CASTELLANE

représenté par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assisté de Me Catherine COHEN SEAT, avocat au barreau de NICE

Madame Marie-Louise C... épouse D...... 04120 CASTELLANE

représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me Catherine COHEN SEAT, avocat au barreau de NICE

Monsieur Pascal D...... 04120 CASTELLANE

représenté par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assisté de Me Catherine COHEN SEAT, avocat au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame LANDOZ, Président Madame KUENY, Conseiller Madame KLAJNBERG, Conseiller

Assistés lors des débats de Mme Hélène LAGIER, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique de renvoi de cassation tenue le 09 OCTOBRE 2007, les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience du MARDI 06 NOVEMBRE 2007.

Exposé du litige

Par arrêt du 20 décembre 1994 la Cour Administrative d'Appel de LYON saisie d'un recours à l'encontre du jugement rendu le 24 juin 1993 par le Tribunal administratif de MARSEILLE a annulé l'arrêté du maire de la commune de CASTELLANE du 16 avril 1992 par lequel il avait accordé à l'Association Cultuelle du Temple Pyramide dite A.C.T.P. un permis de construire un temple au lieudit La Baume.
Le Tribunal de Grande Instance de DIGNE a été saisi par les époux B..., les époux D... et l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE qui se plaignaient des désordres causés par les travaux entrepris pendant la procédure administrative, d'une demande de remise en état des lieux et réparation de leur préjudice ; par jugement du 26 novembre 1997 le Tribunal a déclaré recevable l'action des demandeurs, et avant-dire droit sur la réparation des préjudices, il a ordonné un transport sur les lieux, avec l'assistance technique d'un expert.
Par arrêt du 9 janvier 2003 la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE a confirmé le jugement sur le principe de la demande de remise en état et réparation du préjudice, et, avant-dire droit a ordonné une expertise confiée à Monsieur E....
Par arrêt du 26 janvier 2005 la Cour de Cassation, au motif que la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE n'avait pas recherché si les travaux effectués contrevenaient aux dispositions du Plan d'Occupation des Sols non atteintes par l'illégalité prononcée par la Cour Administrative d'Appel de LYON, a cassé l'arrêt du 9 janvier 2003 et renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'Appel de GRENOBLE.
L'A.C.T.P. et l'A.V.T. contestent la prétendue violation des dispositions de l'article L. 480-13 du Code de l'Urbanisme et assurent que les travaux qu'elles ont réalisés sont parfaitement conformes aux dispositions du P.O.S non visées par l'annulation.
Elles ajoutent qu'à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile déposée par les époux B..., les époux D... et Monsieur G..., en qualité de président de l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE, le Tribunal Correctionnel de DIGNE a relaxé les architectes chargés des travaux de terrassement et d'affouillement de la voie d'accès.
Elles soulèvent l'absence de préjudice personnel, les aménagements discutés n'étant pas visibles, tant des époux B... que des époux D..., d'autant que ces derniers ont vendu leur propriété, ainsi que l'absence d'intérêt à agir de l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE faute pour elle de pouvoir bénéficier des dispositions de l'article L. 480-13 du Code de l'Urbanisme.

L'A.C.T.P. et l'A.V.T. demandent à la Cour de réformer le jugement du 26 novembre 1997 de rejeter les prétentions des intimés et de les condamner à leur payer une indemnité de 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

-o0o-
Les époux B..., les époux D... et l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE répondent que les conditions d'exercice de leur action sont remplies :
-l'A.C.T.P. a bénéficié d'un permis de construire déclaré illégal, la violation d'une règle d'urbanisme est démontrée,
-l'annulation a été prononcée au motif que le permis de construire violait certaines dispositions du P.O.S. notamment les articles suivants :
-NB 1 qui interdit les affouillements et exhaussements de sol tels que visés par l'article R. 442-2 du Code de l'urbanisme,
-NB 3 b qui déclare que les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à éviter tout danger pour la circulation publique,
-NB 10 qui interdit la hauteur des constructions au-delà de 7 mètres à l'égout du toit,
-NB 11 qui précise que les terrassements doivent être réduits au strict minimum et le sol remodelé selon son profil naturel.
Ils rappellent l'importance des travaux engagés puisque les perspectives naturelles de tout un pan de la montagne de La Baume ont été détruites, le non-respect de l'environnement, le risque de séismes engendré par les travaux, le fait que les affouillements et exhaussements de la route d'accès dont la pente avoisine 40 %, dépassent à certains endroits deux mètres de hauteur sur plus de cent m ².
-dès lors qu'il est établi que les travaux entrepris sortent en partie du champ du permis de construire annulé et sont des constructions au sens de l'article L. 380-13 du Code de l'urbanisme, ils sont fondés à solliciter la démolition ou la remise en état,
-ils justifient d'un préjudice personnel : les époux B... et les époux D... sont les riverains directs du site et leurs propriétés ont été nettement dévaluées par la proximité du site Mandarom, ils ont vu leur environnement saccagé au fil des années et ont dû subir toutes sortes de nuisances liées au bruit, à la circulation intense de gros engins et à l'accroissement de la dangerosité du CD 402 ; quant à l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE, les travaux constituent une atteinte directe aux intérêts qu'elle défend.
Les époux B..., les époux D... et l'Association pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE sollicitent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu leur intérêt à agir.
Ils demandent à la Cour d'ordonner la remise en état des lieux selon les mesures qui seront prescrites par Monsieur E... qui sera désigné pour faire l'étude et le suivi des dits travaux.
À titre subsidiaire, ils sollicitent la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions.
En tout état de cause, ils sollicitent l'allocation de la somme de 10. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Motifs et décision

L'intérêt et la qualité à agir des époux B..., des époux D... et de l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE ne sont pas sérieusement contestés par l'A.C.T.P. et l'A.V.T.

En tout état de cause, les propriétaires des tènements riverains ont un intérêt évident à faire remettre les lieux en l'état où ils étaient avant les travaux incriminés et à solliciter la réparation des divers préjudices que ceux-ci leur ont causé ; quant à l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE, son action se situe exactement dans l'objet pour lequel elle a été créée, à savoir la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE, dit lac de Sainte-Croix, des lacs et sites du Verdon et de leur environnement.
Les intimés agissent en application des dispositions de l'article 480-13 du Code de l'Urbanisme qui prévoit que " lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire ne peut être condamné par un Tribunal de l'ordre judiciaire du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement le permis a été annulé pour excès de pouvoir ou si son illégalité a été constatée par la juridiction administrative ".
L'A.C.T.P. et l'A.V.T. contestent le droit d'agir des intimés au motif que les travaux qu'ils ont entrepris n'ont pas le caractère d'une construction ; cependant, le permis de construire a bien été donné pour l'édification d'une construction, en l'espèce un temple, et le fait que l'édification ait été interrompue n'interdit pas aux victimes de solliciter la remise en état des lieux et la réparation du préjudice résultant de l'ensemble des travaux qui participaient à la réalisation de l'ouvrage dont la construction avait été autorisée.
Dès lors que les prévenus étaient poursuivis pour construction sans permis de construire, la procédure pénale ayant donné lieu au jugement correctionnel du 30 juillet 1998 est sans incidence sur la présente instance.
S'agissant des conditions de fond de l'action en réparation, par l'arrêt du 20 décembre 1994 la Cour Administrative d'Appel de LYON a annulé l'arrêté du maire de la commune de CASTELLANE du 16 avril 1992 pour les motifs suivants :
-l'article 4 b du règlement du plan d'occupation des sols est illégal puisqu'il écarte, pour les projets qu'il vise, l'ensemble des règles édictées par le plan, sans leur substituer des dispositions spécifiques et, par là même, sans les soumettre au cadre normatif minimum que tout plan d'occupation des sols doit comporter,
-le permis de construire en litige n'a pu être délivré qu'à la faveur de la disposition illégale de l'article 4 b ; qu'il doit, par suite, être annulé par voie de conséquence de cette illégalité.
Ainsi, dans la mesure où la juridiction administrative a dit que l'ensemble des règles édictées par le plan avait été écarté par le permis de construire, il ne subsiste pas de dispositions du plan d'occupation des sols non atteintes par l'illégalité prononcée, de sorte que les travaux ont bien été effectués en contravention aux règles d'urbanisme.
Il convient de relever que l'A.C.T.P. et l'A.V.T. qui assurent que les travaux qu'elles ont réalisés sont parfaitement conformes aux dispositions du P.O.S non visées par l'annulation, ne produisent pas ledit P.O.S.
Enfin, selon les éléments versés au débat par les intimés, notamment diverses photographies panoramiques du site, il apparaît que les travaux entrepris contreviennent aux dispositions de l'article NB 1 du P.O.S qui interdit les affouillements et exhaussements de sol tels que visés par l'article R. 442-2 du Code de l'urbanisme, de l'article NB 3 b qui précise que les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à éviter tout danger pour la circulation publique, et de l'article NB 11 qui dispose que les terrassements doivent être réduits au strict minimum et le sol remodelé selon son profil naturel.
L'existence d'un préjudice résultant de la dégradation du site environnant causé tant aux époux B... et aux époux D... qu'à l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE en lien de causalité avec l'exécution des travaux incriminés est établie.
Pour déterminer l'étendue de ce préjudice et les moyens à mettre en oeuvre pour la remise des lieux en leur état d'origine, la Cour doit recourir à un technicien.
Monsieur E... précédemment désigné, et qui a dû interrompre ses opérations après l'arrêt de la Cour de Cassation, alors que selon lui, sa mission était pratiquement terminée, sera à nouveau désigné.
Par ces motifs

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu le jugement du 26 novembre 1997 et l'arrêt de la Cour de Cassation du 26 janvier 2005,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré fondée la demande de réparation de leurs préjudices respectifs formée par les époux B..., les époux D... et l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE,
Avant-dire droit sur la réparation de ces préjudices et les moyens à mettre en oeuvre pour la remise en état du site,
Ordonne une expertise et désigne pour y procéder,
Monsieur Pierre E..., expert inscrit sur la liste de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE,
...83390 CUERS ...

Dit que l'expert aura pour mission de :
-se rendre sur les lieux, les décrire,
-décrire la nature des travaux entrepris par l'A.C.T.P. et l'A.V.T.,
-décrire les travaux devant être effectués pour remettre les lieux en leur état naturel antérieur,
-en indiquer la durée et en chiffrer le coût,
-fournir tous éléments permettant d'évaluer les divers préjudices subis par les époux B..., les époux D... et l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE,
Dit que l'expert devra déposer son rapport dans le délai de six mois à compter de l'avis de la consignation,
Dit que les époux B..., les époux D... et l'Association Interdépartementale et Intercommunale pour la protection de la retenue de FONTAINE-L'ÉVÈQUE devront consigner au greffe de la Cour d'Appel de GRENOBLE avant le 15 décembre 2007 la somme de 3. 000 € à titre de provision à valoir sur la rémunération de l'expert,

Réserve les dépens.
Prononcé en audience publique par Madame LANDOZ, Président, qui a signé avec Madame LAGIER, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 05/3624
Date de la décision : 06/11/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 09 janvier 2003


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2007-11-06;05.3624 ?
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