RG No 07 / 02635 C. C. No Minute :
Notifiée aux parties le :
COUR D' APPEL DE GRENOBLE
AUDIENCE SOLENNELLE
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU MARDI 22 OCTOBRE 2007
Recours contre une décision du Conseil Régional de Discipline des Avocats rendue le 11 juin 2007
Suivant déclaration d' appel du 13 Juillet 2007
APPELANT :
Maître André X... né le 16 Mai 1950 à ECHIROLLES (38130) de nationalité Française ...38130 ECHIROLLES
Comparant
EN PRESENCE DU :
BATONNIER DE L' ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE GRENOBLE Maison des Avocats 45 rue Pierre Sémard 38026 GRENOBLE CEDEX
Représentée par Maître MODELSKI, avocat au barreau de GRENOBLE
PROCUREUR GENERAL Cour d' Appel de Grenoble Place Firmin Gautier- BP 110 38019 GRENOBLE CEDEX
Représenté par Madame PICCOT, Avocat Général
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur CATTEAU, Premier Président Madame LANDOZ, Président Madame KUENY, Conseiller Madame KLAJNBERG, Conseiller Monsieur BERNAUD, Conseiller
Assistés lors des débats de Mme Simone VERDAN, Greffier.
DEBATS :
A l' audience solennelle tenue en Chambre du Conseil le 01 OCTOBRE 2007, Monsieur CATTEAU Premier Président a été entendu en son rapport ; les avocats en leurs plaidoiries et Madame PICCOT Avocat Général en ses réquisitions.
Puis l' affaire a été mise en délibéré pour l' arrêt être rendu à l' audience solennelle et non publique du LUNDI 22 OCTOBRE 2007.
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Le 13 juillet 2007 Maître X... a formé recours contre la décision du conseil régional de discipline des avocats du 11 juin le condamnant à quinze jours d' interdiction temporaire pour manquement à la probité, à l' honneur, à la délicatesse et au devoir de son état, ce sans publicité de la décision.
Le conseil a rappelé que Maître D..., avocat constitué des consorts Z..., Y..., E... et F... dans une instance intentée contre l' association d' éducation populaire de Haute Jarrie en révocation de donation avec réserve de reprise en cas de non affectation à l' usage d' école libre ou d' oeuvre populaire, avait reçu, après une mise en état ordonnant un renvoi pour permettre l' intervention de la commune de Jarrie, un mail de Madame Y... accompagné d' un courrier de Maître X... du 22 mars 2006 énonçant que son avocat n' était pas présent à la mise en état, qu' elle aurait " dû envoyer la lettre dictée dans son bureau car maintenant la commune est en plus grande position de force ".
Le conseil de discipline a dit qu' il était régulièrement constitué et n' avait pas à produire les documents relatifs à sa composition, que les fautes énoncées étaient parfaitement claires et la citation régulière, que le courrier incriminé n' était pas soumis au secret professionnel parce qu' il n' émanait pas d' un avocat constitué, que Madame Y... n' était pas soumise à ce secret et l' avait levé, que Maître X... n' était pas mandaté et mentionnait lui- même l' avocat, que ses termes étaient trompeurs parce que la présence de l' avocat n' était pas nécessaire dans une mise en état informatisée, que ces termes étaient discourtois parce qu' il faisait passer ses confrères pour incompétents voir malhonnêtes, qu' il faisait état d' une lettre dictée en son cabinet alors qu' il n' avait pas prévenu les avocats de son intervention.
Maître X... demande l' annulation du jugement du 11 juin 2007, demande subsidiairement que soit écartés des débats la lettre du 22 mars 2006, le mail de Madame Y... et leurs envois au bâtonnier, demande l' audition de Madame Y... et demande sa relaxe.
Il invoque la composition illégale du conseil de discipline dont les membres n' ont pas été légalement élus, la non communication des procès-verbaux de sa composition, la partialité du conseil, Maîtres A... et C... étant ses concurrents ; il invoque l' irrégularité de la saisine en ce que l' acte de saisine ne lui a pas été communiqué ni notifié ; il invoque la nullité de la citation en ce que les termes trompeurs et discourtois ne sont pas précisés ; il soutient que la poursuite a été réputé rejetée parce que la décision est intervenue plus de six mois après la saisine qui est au moins du 04 septembre 2006, date de désignation du rapporteur ; subsidiairement il soutient qu' il est l' avocat de Madame Y... depuis 2005, que Maître B... a violé le secret professionnel en transmettant sa lettre et le mail de Madame Y..., soutient que Maître B... et D... ne pouvaient se défendre qu' auprès de la cliente qui n' avait pas saisi le bâtonnier ; il soutient que la poursuite n' est pas fondée parce qu' il était bien mandaté et qu' il devait exercer son devoir de conseil, qu' il bénéficie de l' immunité de la défense même s' il ne postule pas dans la procédure civile, qu' il n' a pas utilisé de termes trompeurs et discourtois.
Le bâtonnier observe qu' il n' y a pas de contestation de la composition du conseil de discipline dans l' autre dossier appelé ce jour, que la Cour le 12 février 2007 a rejeté les récusations des membres du conseil, observe au fond que les termes de la lettre de Maître X... caractérisent le manquement à ses devoirs, que la confidentialité a été levée par Madame Y... qui avait la liberté d' adresser cette lettre à qui elle voulait.
Le Ministère Public fait la même analyse que le bâtonnier et insiste sur la présentation dramatique des faits dans la lettre pour persuader la destinataire.
SUR CE :
Attendu que Maître X... a demandé que les débats ne soient pas publics.
Attendu que Maître X... n' apporte aucune preuve de l' illégalité de la composition du conseil de discipline, les registres des ordres étant consultables, que la composition en l' espèce est conforme à l' article 180 du décret du 27 novembre 1991, que la récusation de Maître A... et C... a été rejetée par la Cour le 12 février laquelle a écarté le soupçon de partialité.
Attendu que l' acte de saisine de l' instance disciplinaire de l' article 188 n' est pas produit mais que Maître X... a été entendu par la rapporteur désigné par le conseil de l' ordre, a été cité le 28 novembre 2006, qu' il n' a rien ignoré des faits reprochés et a pu se défendre sans restriction, que la non communication et la non justification de la notification de l' acte de saisine originel n' a causé aucun grief et ne peut entraîner l' annulation de la procédure.
Attendu sur le délai de la décision que selon l' article 195 dans sa rédaction antérieure au 17 mai 2007, date d' entrée en vigueur du nouveau délai le conseil de discipline devait statuer dans les six mois de la saisine de l' instance disciplinaire ; que l' acte de saisine ainsi qu' il vient d' être dit n' étant pas produit la Cour n' a pas la preuve que la décision du 11 juin a été rendue, en tenant compte de la suspension entraînée par la procédure de récusation (deux mois moins 1 jour), dans le délai de l' article 195 du décret déjà cité ; que la décision rendue hors délai doit être annulée mais que l' effet dévolutif joue.
Attendu au fond que Maître X... ne justifie pas d' une constitution dans l' instance civile opposant les consorts Z...- Y... et l' AEP de Haute Jarrie, qu' il n' était pas l' avocat de Madame Y... dans cette instance ; que sa lettre du 22 mars n' était pas couverte par le secret, qu' elle avait été communiquée par Madame Y... qui était libre de le faire ; que Maître B... victime d' un comportement révélant un manquement à la déontologie pouvait saisir le bâtonnier sans plainte préalable de la cliente, le respect de la déontologie ne pouvant dépendre d' une volonté particulière ; que Maître X... ne peut invoquer une obligation de conseil ni l' immunité de la défense parce qu' il n' était pas dans l' instance ; que les termes employés " votre avocat n' était pas présent mais avait envoyé au greffe ses demandes par la voie de l' internet, chose qui se fait mais me semble déjà difficile à accepter dans cette affaire importante et urgente " étaient bien inexacts et donc trompeurs ; que l' allégation : " je ne sais pas si il y avait d' autres instructions précises de votre avocat adressées au juge mais il semblerait que ledit juge soit parti pour favoriser l' intervention de la commune puisque votre avocat semble la faciliter... " suivie d' une dramatisation caractérisée des conséquences (expropriation, substitution de la commune à l' association) induit que l' avocat constitué n' a pas agi dans l' intérêt de sa cliente, ce qui est pour le moins discourtois et improbe ; que le manquement aux devoirs de l' article 183 est caractérisé.
Attendu que la sanction du manquement ne peut être complète sans que la peine puisse être connue des membres de la profession qui ont à respecter ces devoirs.
PAR CES MOTIFS
Statuant après débats en chambre du conseil,
ANNULE la décision du conseil de discipline des avocats du 11 juin 2007,
INTERDIT temporairement pour quinze jours Maître X... et ORDONNE à titre de sanction accessoire la publicité de la peine par affichage du seul dispositif de l' arrêt dans les locaux de l' ordre,
CONDAMNE Maître X... aux dépens.
PRONONCÉ en audience publique par Monsieur CATTEAU, Premier Président, qui a signé avec Madame LAGIER, Greffier.