R.G. No 04/01227 No Minute : Grosse délivrée le : à : S.C.P. CALAS S.C.P. GRIMAUD Me RAMILLON S.C.P. POUGNAND S.E.LA.R.L. DAUPHIN etamp; MIHAJLOVICAU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE GRENOBLE 1ERE CHAMBRE CIVILE ARRET DU MARDI 10 JANVIER 2006 Appel d'un Jugement (No R.G. 01/05527) rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE en date du 26 février 2004 suivant déclaration d'appel du 16 Mars 2004 APPELANTE : S.C.I. VALRUDE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège Z..I. du Petit Besset 38140 CHARNECLES représentée par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour assistée de Me CIARAMELLA, avocat au barreau de INTIMEE : S.A. NAHMIAS IMMOBILIER prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 15 rue Thiers 38000 GRENOBLE représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour assistée de Me Michel BENICHOU, avocat au barreau de GRENOBLE COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame Odile FALLETTI-HAENEL, Président, Madame Claude-Françoise KUENY, Conseiller, Monsieur Jean-Pierre VIGNAL, Conseiller, Assistés lors des débats de Madame Laure X..., Greffier. DEBATS : A l'audience publique du 21 Novembre 2005, Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
Se prévalant du mandat de vente avec exclusivité d'un bien situé à Charnècles confié par la SCI Valrude suivant acte du 27 mars 2001 et reprochant à sa mandante de lui avoir causé préjudice en refusant de signer le compromis avec l'acquéreur qu'elle lui avait trouvé, la société Nahmias Immobilier a fait assigner la SCI Valrude aux fins d'obtenir réparation de son préjudice devant le tribunal de grande instance de Grenoble qui, par jugement du 26 février 2004 : - a dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer, - a condamné la SCI Valrude à
payer à la SA Nahmias Immobilier la somme de 10 000 ç à titre de dommages-intérêts, - a dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter de la décision, - a débouté la SA Nahmias Immobilier de ses demandes de dommages-intérêts pour résistance abusive et au titre de l'article 700 du NCPC, - a débouté la SCI Valrude de toutes ses prétentions, - a condamné la SCI Valrude aux dépens. La SCI Valrude a relevé appel de cette décision. Elle demande à la cour, réformant le jugement déféré : A titre principal, - de surseoir à statuer jusqu'à solution de la plainte pénale déposée par l'agence Nahmias, A titre subsidiaire, - de constater que la SCI Valrude par l'intermédiaire de sa gérante dénie sa signature portée sur le mandat de vente donnée par l'agence Nahmias Immobilier, - en conséquence, de dire et juger nul le mandat de vente de l'agence Nahmias Immobilier pour défaut de signature de la gérante de la SCI, - de dire que la SCI n'a aucun lien contractuel avec l'agence Nahmias Immobilier, - de dire que l'action de l'agence immobilière est irrecevable et non fondée, - de dire qu'il n'a pas été procédé à une vérification d'écriture, - en conséquence, d'ordonner une vérification d'écriture, - de dire que l'agence Nahmias Immobilier a commis une faute professionnelle grave et a agi avec légèreté en ayant accepté d'agir sans mandat régulier, - en conséquence, de condamner l'agence Nahmias Immobilier à lui payer la somme de 5000 ç à titre de dommages-intérêts outre, la somme de 3000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC. Elle prétend que les démarches entreprises pour parvenir à la vente du tènement immobilier l'ont été par Madame Y... Z..., mère des trois associés de la SCI Valrude, dont celle-ci n'est ni l'associée ni la gérante, cette-dernière étant mademoiselle Sandrine Z... qui n'est jamais venue à l'agence et n'a pas signé le mandat de vente dont se prévaut l'intimé. Elle considère, ainsi, que cet acte ne peut lui être opposé, qu'il est nul
et entache de nullité tous les actes subséquents. Elle observe que madame Y... Z... ayant reconnu être signataire du mandat de vente, le tribunal ne pouvait, en conséquence, retenir que la signature apposée sur le mandat était celle de mademoiselle Sandrine Z..., et ce d'autant, que le tribunal n'a pas précisé avoir procédé à la comparaison des écritures à partir d'éléments originaux. Elle relève qu'aucune convocation à la signature du compromis ne lui avait été adressée. Elle fait valoir, d'autre part, que l'agence Nahmias qui détenait les statuts de la SCI Valrude savait que Madame Y... Z..., signataire du mandat n'était pas sa fille, mademoiselle Sandrine Z..., gérante de la SCI Valrude et qu'en sa qualité de professionnelle, l'agence a agi avec légèreté en acceptant de voir son mandat régularisé par une personne ne représentant pas la personne morale figurant sur son mandat. Elle soutient que s'agissant d'un acte de disposition, l'agence devait exiger pour la validité du mandat, le procès-verbal d'assemblée générale de la SCI mentionnant de plus l'acceptation de l'ensemble des associés. Elle sollicite qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que la plainte pénale déposée par elle soit instruite. Elle affirme, enfin, que l'attestation de Monsieur A... constitue un faux témoignage émanant d'un ancien employé qui ne peut être pris en considération. La société Nahmias Immobilier conclut à la confirmation partiel du jugement entrepris en ce qu'il a considéré comme étant régulier le mandat de vente du 27 mars 2001 et rejeté les prétentions de la SCI Valrude. Formant appel incident, elle demande la condamnation de la SCI Valrude au paiement de la somme de 22868 ç à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la lettre recommandée avec AR en date du 10 août 2001, valant mise en demeure, outre celle de 1525 ç à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et 4000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC. Elle souligne que les honoraires étaient
prévus à la charge du vendeur et non de l'acquéreur comme le prétend l'appelante. Elle réplique que le mandat de vente a été consenti par la SCI Valrude représentée par sa gérante en exercice, mademoiselle Sandrine Z... qui a signé l'acte. Elle relève qu'aux termes des nombreuse correspondances échangées entre les parties, jamais avant la présente procédure, mademoiselle Z... n'avait contesté sa signature. Elle souligne que la signature qui figure au bas du courrier du 7 août 2001 est strictement identique à celle apposée sur le mandat de vente du 27 mars 2001, ces deux pièces étant produites en original. Elle fait valoir que l'irrégularité résultant de l'absence de réunion d'assemblée générale ne lui est pas opposable. Elle conteste toute valeur probante à l'expertise graphologique effectuée de manière non contradictoire par l'appelante au mépris de la décision du conseiller de la mise en état ayant rejeté la mesure d'instruction sollicitée par celle-ci. Relevant qu'elle a entièrement exécuté sa mission et trouvé un acquéreur dans les termes du mandat, elle fait valoir que son préjudice est équivalent au montant de la commission qu'elle aurait dû percevoir si la SCI Valrude n'avait pas de manière fautive refusé de réaliser la vente. Elle sollicite, en outre des dommages-intérêts pour résistance abusive, eu égard à la mauvaise foi de l'appelante et à son comportement dilatoire. MOTIFS ET DÉCISION Il convient de rejeter des débats les conclusions de la SCI Valrude signifiées le 14 novembre 2005, à la veille de l'ordonnance de clôture prononcée le 15 novembre 2005, ces écritures n'étant pas un simple complément de celles signifiées le 10 octobre 2005 mais présentant des éléments nouveaux en termes d'exposé des faits et de discussion concernant l'expertise graphologique non contradictoire produite aux débats ainsi que l'application des dispositions des articles 1323, 1324 du code civil et 287 du NCPC. La société Nahmias Immobilier n'étant pas en mesure de répondre en temps
utile à ces explications nouvelles, le respect du principe du contradictoire impose que les conclusions signifiées le 14 novembre 2005 soient rejetées des débats, la cour se fondant sur les conclusions de la SCI Valrude signifiées le 10 octobre 2005. Sur la validité du Sur la validité du mandat de vente Il résulte des pièces produites aux débats que : - propriétaire d'une maison d'habitation construite sur un terrain de 3746 m2 sis à Charnècles, la SCI Valrude représentée par sa gérante Sandrine Z... a, suivant acte du 27 mars 2001, confié, pour une durée de trois mois renouvelable, mandat exclusif de vendre ce bien immobilier au prix de trois millions de francs pour le vendeur, honoraires d'agence fixés à 5 % du prix de vente T.T.C, en sus, à l'agence Nahmias Immobilier, - par lettre du 27 avril 2001, l'agence Nahmias informait le notaire de la SCI Valrude de l'imminence de la régularisation d'un compromis au prix de 3 135 000 francs nets vendeur, et de la nécessité d'obtenir de la gérante de la SCI Valrude les procurations des deux autres associés de la SCI qui sont les frères de mademoiselle Sandrine Z..., cette-dernière étant également destinatrice du courrier adressé au notaire par lettre du même jour, - l'acquéreur ayant signé le compromis de vente le 26 juillet 2001, l'agence Nahmias a, par acte d'huissier du 30 juillet 2001, fait sommation à la SCI Valrude de signer l'acte de vente, ce à quoi mademoiselle Sandrine Z..., gérante de la SCI Valrude a répondu : "Je refuse de signer le compromis de vente", - par lettre du 7 août 2001, la SCI Valrude, exposant que "le contrat d'ordre professionnel qui avait amené la décision de vente du bien immobilier a été retardé pour être définitivement annulé, obligeant la SCI à conserver ce bien", a dénoncé le mandat de vente signé avec la société Nahmias, - par lettre recommandée avec AR du 10 août 2001, l'agence Nahmias Immobilier rappelait à la SCI Valrude l'existence du mandat de vente
avec exclusivité, les différentes visites des acquéreurs, celle de Madame B..., le fait que la gérante avait toujours facilité ces visites et n'avait émis aucune réticence à la vente, le fait qu'elle ait été tenue au courant de l'intérêt de Madame B... pour l'acquisition du bien, l'absence de résiliation du mandat exclusif alors même qu'elle disposait de toutes les informations concernant l'acquéreur, - par lettre du 12 septembre 2001, le conseil de l'agence Nahmias adressait une lettre recommandée avec AR reprenant ces éléments, - ces correspondances n'ont été suivies d'aucune réponse de la part de la gérante de la SCI Valrude. Comme l'a observé le tribunal, avant l'engagement de la procédure judiciaire, la SCI Valrude n'a jamais mis en cause la signature de sa gérante figurant sur le mandat et ce, alors même qu'elle avait été invitée à plusieurs reprises à s'expliquer sur son refus de ne pas poursuivre la vente. La contestation émise tardivement ne correspond pas, en particulier, aux explications données par la gérante de la SCI dans sa lettre de dénonciation du contrat. D'autre part, le tribunal a justement considéré que la signature de la mandante figurant sur l'acte du 27 mars 2001 et celle figurant au bas du courrier à l'en tête de la SCI Valrude en date du 7 août 2001 étaient similaires. Ces signatures présentent également les mêmes caractéristiques que celle figurant sur l'accusé de réception de la lettre recommandée adressée à la SCI Valrude le 13 août 2001, étant précisé que ces différentes pièces sont produites en original. L'expertise graphologique faite de manière non contradictoire par Monsieur C... à la demande de la SCI Valrude est dépourvue de toute force probante et ne peut être prise en considération alors que les pièces de comparaison utilisées ne sont pas produites aux débats et que les circonstances suivant lesquelles l'expert a obtenu ces pièces ne sont pas précisées. La similitude des écritures de comparaison avec celle figurant sur le
contrat de mandat étant évidente, il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise graphologique. La plainte pour fausse déclaration déposée le 30 mai 2003 par madame Y... D... non explicite et non suivie d'effet, est sans portée. Elle n'est de nature ni à justifier un sursis à statuer ni à atténuer la portée du témoignage de Monsieur A..., ancien négociateur de l'agence Nahmias, établi le 4 février 2003, sur les conditions dans lesquelles avait été recueillie la signature de mademoiselle Sandrine Z.... L'attestation de Madame E... selon laquelle elle était présente aux côtés de Madame D... et non mademoiselle Z... lors de la première visite de Monsieur A... ne contredit pas utilement le témoignage de ce-dernier alors qu'aucune date n'est précisée et que les circonstances de cette visite ne sont pas autrement indiquées. Le premier juge a considéré à juste titre qu'il importait peu que la gérante ait ou non été autorisée à signer le mandat de vente par une assemblée générale de la SCI, à supposer qu'une telle décision ne soit pas intervenue, un tel moyen étant inopposable à l'agence Nahmias à l'égard de laquelle mademoiselle Sandrine Z... disposait au moins en apparence du pouvoir d'agir au nom et pour le compte de la SCI Valrude. Enfin, la SCI Valrude informée par lettre du 27 avril 2001 qu'un acquéreur avait été trouvé et qui, à compter du 27 juin 2001à l'expiration du délai de trois mois, avait la possibilité de dénoncer le contrat, ne l'ayant pas fait, ne peut se plaindre de ce que l'acquéreur ait signé le compromis aux conditions du mandat en son absence le 26 juillet 2001. Le jugement déféré ayant retenu à bon droit que le mandat de vente exclusif du 27 mars 2001 était parfaitement régulier sera, donc, confirmé. Sur les dommages-intérêts L'affirmation selon laquelle la vente de la maison était subordonnée à la cession de son activité professionnelle par Madame Z... Y..., mère de la gérante de la société venderesse, n'étant
établie par aucun élément et la connaissance que l'agence pouvait avoir de ce fait ne l'étant pas davantage, la SCI Valrude, comme l'a jugé le tribunal, en refusant arbitrairement de poursuivre la réalisation de la vente pour laquelle elle avait donné mandat exclusif à l'agence Nahmias Immobilier, a commis une faute à l'origine du préjudice subi par cette-dernière, consistant dans la perte de percevoir la commission de 5 % prévue au mandat. L'agence ayant rempli sa mission et trouvé un acquéreur aux conditions du mandat, le préjudice qu'elle subit du fait de la non réalisation de la vente est égal au montant de la commission stipulée au contrat soit à la somme de 22 867 ç. L'appelante sera, donc, condamnée à payer à l'agence Nahmias Immobilier la somme de 22 867 ç à titre de dommages-intérêts, cette somme qui a un caractère indemnitaire portant intérêt au taux légal à compter de la signification du présent arrêt. Le jugement déféré, confirmé en son principe, est ainsi réformé sur le montant des dommages-intérêts seulement. L'abus de procédure n'étant pas caractérisé, il n'ya pas lieu à dommages-intérêts de ce chef. PAR CES MOTIFS LA COUR Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
REJETTE les conclusions de la SCI Valrude signifiées le 14 novembre 2005,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions autres que le montant des dommages-intérêts alloués à l'agence Nahmias,
L'INFIRME de ce chef et statuant à nouveau :
CONDAMNE la SCI Valrude à payer à l'agence Nahmias la somme de 22.867 ç à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt,
DÉBOUTE l'agence de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive,
CONDAMNE la SCI Valrude à payer à l'agence Nahmias Immobilier la somme de 1.500 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
CONDAMNE l'appelante aux dépens. PRONONCE en audience publique par Madame FALLETTI-HAENEL, Président, qui a signé avec Madame F..., Greffier.