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19/05/2004 | FRANCE | N°04/2899

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre civile 1, 19 mai 2004, 04/2899


Soutenant que le projet de construction prévu sur les parcelles... sises à Briançon, lieu-dit... qu'ils avaient acquises par acte notarié du 19 décembre 2000 indivisément avec les époux X... n'avait pas abouti du fait de ces derniers, les époux Y... les ont fait assigner ainsi que la SCI JLM devenue titulaire des droits indivis des époux X... par suite de l'apport que ceux-ci lui en ont fait, aux fins d'annulation de l'état descriptif de division établi par acte du 26 octobre 2000 en vue de la réalisation des constructions envisagées, de partage de l'indivision et d'indemnisation

de leur préjudice devant le tribunal de grande instance de G...

Soutenant que le projet de construction prévu sur les parcelles... sises à Briançon, lieu-dit... qu'ils avaient acquises par acte notarié du 19 décembre 2000 indivisément avec les époux X... n'avait pas abouti du fait de ces derniers, les époux Y... les ont fait assigner ainsi que la SCI JLM devenue titulaire des droits indivis des époux X... par suite de l'apport que ceux-ci lui en ont fait, aux fins d'annulation de l'état descriptif de division établi par acte du 26 octobre 2000 en vue de la réalisation des constructions envisagées, de partage de l'indivision et d'indemnisation de leur préjudice devant le tribunal de grande instance de GAP qui par jugement rendu le 19 mai 2004 :
- a dit que l'immeuble situé à Briançon, cadastré section... n'est pas soumis au régime de la copropriété mais qu'il est indivis entre les époux Y... d'une part, et la SCI JLM, d'autre part,
- a ordonné l'ouverture des opérations de partage de l'indivision existant entre les époux Y... d'une part et la SCI JLM d'autre part, sur les parcelles situées à BRIANOEON, cadastrées section...,
- a commis à cet effet le Président de la Chambre Départementale des Notaires des Hautes-Alpes avec faculté de délégation,
- a ordonné une expertise et commis à cet effet Monsieur Z... aux fins d'évaluation de l'immeuble, de proposition de partage et à défaut de proposition d'une mise à prix en vue de sa licitation,
- a débouté les parties de leurs autres demandes,
- a ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- a réservé les dépens.
La société JLM ainsi que Monsieur et Madame X... ont relevé appel de cette décision.
Ils demandent à la Cour, réformant le jugement déféré,
- de dire que le règlement de copropriété, état descriptif de division n'est pas nul et de débouter les époux Y... de leurs prétentions,
Subsidiairement :
- de constater que l'acte notarié du 19 mars 2001 vaut à tout le moins acte de partage entre les parties avec attribution de la propriété de la SCI JLM venant aux droits des époux X... du lot... défini sur le plan annexé à l'acte notarié comme constituant la
moitié en superficie de la parcelle..., le lot... constituant l'autre moitié de cette parcelle étant attribué à la propriété des époux Y...,
- en conséquence, dans l'hypothèse où le règlement de copropriété serait considéré comme nul, de dire que la société JLM est propriétaire de la moitié de la parcelle... et de renvoyer les parties devant le tribunal d'instance de Briançon aux fins de mise en place du bornage sur le fondement du plan signé et annexé à l'acte notarié,
- de débouter les époux Y... de leurs prétentions,
- de constater la destination contractuelle à usage de passage commun de la parcelle ...,
- de condamner reconventionnellement les époux Y... à rembourser aux époux X... l'intégralité des frais qu'ils ont supportés seuls, à savoir les frais d'architecte pour la somme de 3 811 euros ainsi que le surcoût qu'ils ont supporté pour l'acquisition de leur résidence principale et professionnelle à CESANA aux lieu et place de celle prévue à Briançon, pour la somme de 50 000 euros,
- de condamner les époux Y... à leur payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que pour les peines et soins consacrés à la mise en place du projet outre la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils exposent que le projet de construction établi par l'architecte A... a été signé par les parties et qu'il engage ainsi les époux Y..., que ce projet n'a pas abouti du fait de ces derniers qui ont estimé son prix trop élevé, que le permis de construire est devenu caduc.
Ils soutiennent que l'état descriptif de division établi d'un commun accord entre les parties vaut à tout le moins comme partage des biens indivis, les lots 1et 2 étant parfaitement définis et attribués et la destination de la parcelle ... à la construction de la route desservant les futures habitations ressortant de la volonté contractuelle des parties.
Ils considèrent qu'aucune faute ne peut leur être reprochée et qu'ils ne sauraient, ainsi, être condamnés à des dommages et intérêts.
Ils estiment, au contraire, que le comportement des époux Y... qui ont bloqué le projet de construction auquel ils avaient souhaité à l'origine s'associer est abusif et leur cause gravement préjudice, justifiant le montant des dommages et intérêts qu'ils sollicitent.
Monsieur et Madame Y... concluent au mal fondé de l'appel et à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a :
* dit que l'immeuble situé à Briançon, cadastré... n'est pas soumis au régime de la copropriété et est indivis,
* ordonné l'ouverture des opérations de partage de l'indivision existant entre les parties,
* commis à cet effet le Président de la Chambre Départementale des Notaires,
* ordonné une expertise,
* débouté les époux X... et la SCI JLM de leurs demandes en dommages et intérêts.
Ils sollicitent, en outre, de la Cour qu'elle évoque les points non jugés au vu du rapport d'expertise de Monsieur Z...
Ils demandent, en conséquence :
- d'ordonner la licitation à la barre du tribunal de grande instance de GAP des parcelles..., lieu-dit... à Briançon en un seul lot sur la mise à prix de 180 000 euros,
- et si la Cour estimait les biens commodément partageables en nature, d'ordonner qu'il sera procédé au tirage au sort par devant le notaire chargé des opérations de partage des deux lots composés par le géomètre B... selon plan du 6 juillet 2005, annexé au rapport d'expertise Z... £
Ils demandent, en outre, à la Cour, réformant le jugement déféré sur les dommages et intérêts sollicités de condamner solidairement les époux X... à leur payer les sommes de 3 913 euros au titre des frais notariés de l'état descriptif, de 3 811 euros au titre des frais d'architecte, de 18 240 euros au titre du préjudice de jouissance et de 1 500 euros au titre du préjudice moral, de 82 996, 90 euros au titre du préjudice résultant de l'évolution du coût de la construction.
Ils demandent, enfin, à la Cour d'ordonner une expertise aux fins d'évaluer le préjudice résultant de l'absence de construction mitoyenne et de condamner les appelants à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils répliquent que le régime de la copropriété ne s'appliquant qu'aux immeubles bâtis, la parcelle... qui n'est pas construite n'y est pas soumise, qu'en conséquence, l'état descriptif de division, en outre, dépendant de la réalisation des constructions qui est une condition potestative doit être déclaré nul et de nul effet.
Ils contestent être à l'origine de la non-réalisation du projet de construction, disposant des fonds nécessaires et soutiennent que ce sont les consorts X... qui ont fait avorter le projet, n'ayant pas les liquidités suffisantes.
Ils soutiennent que la nullité de l'état descriptif de division emporte celle de l'attribution des lots, la totalité des parcelles restant ainsi en indivision, justifiant leur demande de partage.
Ils considèrent que la licitation sur la mise à prix de 180 000 euros est la meilleure procédure, le partage en nature s'avérant difficile compte tenu de la mauvaise entente existant entre les parties.
Soutenant que la non-réalisation du projet de construction est entièrement imputable aux appelants, ils demandent réparation de leur entier préjudice.
MOTIFS ET DÉCISION :
Le premier juge, par une motivation pertinente que la Cour adopte a retenu, à bon droit, que le statut de la copropriété ne s'appliquant qu'aux immeubles bâtis, la parcelle acquise en indivision située à Briançon, cadastrée section... ne pouvait être soumise à ce statut dès lors que la construction prévue n'avait pas été édifiée.
Il a également, estimé à juste titre que l'état descriptif de division figurant dans l'acte de vente, stipulé comme devant s'appliquer aux constructions futures qui seront édifiées sur la parcelle section..., ne pouvait valoir comme partage de la parcelle indivise, chaque lot comprenant outre une partie privative, une quote-part de parties communes, ce qui ne se comprend qu'en copropriété.
Les appelants prétendent, en outre, vainement que la stipulation contractuelle mentionnée en page 7 de l'acte du 26 octobre 2000 ainsi libellé :
" L'autre partie servira pour la construction de la route desservant les futures habitations " concernerait la parcelle indivise... et s'imposerait encore aux époux Y... alors que cette stipulation qui figure dans l'état descriptif de division relatif à la seule parcelle... et distingue la partie du terrain supportant les constructions
de l'autre partie servant pour la construction de la route ne peut être considérée comme concernant la parcelle....
D'autre part, aucun document contractuel ne confère à la parcelle... la destination de desserte des constructions à édifier sur la parcelle..., laquelle n'apparaît pas non plus sur le plan annexé à l'acte du 26 octobre 2000 et signé par les parties.
La revendication des appelants concernant l'application de la stipulation précitée à la parcelle... n'est donc pas fondée.
Comme l'a jugé le tribunal, nul n'étant tenu de demeurer dans l'indivision, la demande en partage des parcelles indivises... qui n'ont pas vocation à rester dans l'indivision, formée par les époux Y... est justifiée.
L'expertise ordonnée par le premier juge avec exécution provisoire ayant été effectuée, il y a lieu d'évoquer les points non jugés en application de l'article 568 du nouveau code de procédure civile.
L'expert observe que le partage des parcelles... est possible, le découpage des terrains permettant la réalisation de deux lots d'égale valeur.
Il souligne, cependant, qu'une vigilance toute particulière devra être apportée pour l'établissement d'un règlement de copropriété qui devra être établi par le notaire chargé de l'acte, afin de garantir l'engagement commun des deux propriétaires des lots d'une part à réaliser en commun les travaux d'accès et d'autre part, à effectuer l'entretien de cet accès.
L'expert conclut que compte tenu des mauvaises relations existant entre les parties, il serait judicieux afin d'éviter de retrouver celles-ci en conflit de voisinage, d'envisager soit le rachat de la part indivise par l'une des deux parties à une valeur de 100 000 euros soit la vente par licitation de la totalité du bien avec une mise à prix de 180 000 euros.
Il résulte des constatations de l'expert que si les parcelles indivises sont matériellement partageables en deux lots d'égale valeur, leur division serait, cependant, malaisée compte tenu de l'importance des travaux à réaliser pour accéder à la partie supérieure des terrains sur lesquelles doivent être édifiées les constructions et de la mésentente existant entre les parties.
L'expert indique, en effet, que les terrains forment un tènement, en légère pente sur la partie du dessus, sans accès direct sur la voie publique lequel doit être réalisé sur une partie en très forte pente. Il précise que l'accès aux terrains pose un problème majeur car la pente importante nécessite la réalisation d'une voie en pente obligeant à décaisser fortement et à tenir le terrain avec des murs de soutènement de part et d'autre, l'ensemble de ces travaux étant d'un coût onéreux.
Il ressort des constatations de l'expert que les parcelles supérieures ne peuvent être desservies que par un seul accès matériellement non divisible et que le partage du reste du tènement qui implique la réalisation de cet accès commun pour un coût important est économiquement incommode.
Les immeubles concernés ne pouvant être commodément partagés, il doit être procédé à la vente par licitation devant le tribunal sur la mise à prix de 180 000 euros proposée par l'expert judiciaire, conformément aux dispositions de l'article 827 du code civil et suivant un cahier des charges établi à la requête de la partie la plus diligente.
Sur les demandes en dommages et intérêts :
Appelants et intimés s'imputent mutuellement la responsabilité de la non-réalisation du projet de construction.
Les murs et les autres prétendent justifier leurs allégations par la production des correspondances qu'ils se sont mutuellement adressées soit directement soit par l'intermédiaire de leur conseil.
Ces correspondances écrites en italien, non traduites par un traducteur assermenté qui émanent des parties sont dépourvues de toute valeur probante et ne sont pas de nature à établir les faits allégués.
Les appelants comme les intimés ne rapportant pas la preuve d'une faute commise par leur adversaire à l'origine de la non-réalisation du projet de construction ils seront mutuellement déboutés de leurs demandes en dommages et intérêts.
Ils le seront également de leurs demandes respectives en remboursement de frais dont ils ne justifient par aucune pièce avoir fait l'avance.
Le fait que le dossier de construction ait été établi au nom de X... ne suffit pas à démontrer que les appelants aient seuls entrepris les démarches nécessaires à sa constitution et aient exposé des frais pour cela.
Chaque partie succombant, il sera fait masse des dépens de première instance et d'appel incluant les frais d'expertise qui seront supportés par moitié par chaque partie.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR :
Statuant en audience publique, contradictoirement, après en avoir
délibéré conformément à la loi,
CONFIRME le jugement déféré,
ORDONNE la licitation à la barre du tribunal de grande instance de GAP des parcelles... lieu-dit... à Briançon en un seul lot sur la mise à prix de 180 000 euros, suivant le cahier des charges établi à la requête de la partie la plus diligente,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives en dommages et intérêts et au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
FAIT MASSE DES DÉPENS de première instance et d'appel, incluant les frais d'expertise judiciaire et dit qu'ils seront supportés par 1 / 2 par chaque partie avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause,
PRONONCE en audience publique par Mme FALLETTI-HAENEL, Président, qui a signé avec Madame PAGANON, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 04/2899
Date de la décision : 19/05/2004
Type d'affaire : Civile

Analyses

INDIVISION - Partage - Partage en nature - Commodité - Appréciation - Critères - Prise en compte aussi bien matériellement qu'économiquement

Est justifiée la demande en partage de parcelles indivises qui n'ont pas vocation à rester dans l'indivision, néanmoins l'expertise réalisée ayant révélé que ces parcelles bien que matériellement partageables en deux lots d'égale valeur seraient difficilement divisibles compte tenu de l'importance et du coût des travaux à réaliser (accès à la voie publique sur une partie du terrain en très forte pente) et de la mésentente existant entre les parties, il y a lieu, le partage en nature s'avérant économiquement incommode, de procéder à la vente par licitation de ces immeubles conformément aux dispositions de l'article 827 du code civil.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2004-05-19;04.2899 ?
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