ARRET No
R. G : 08/ 00532
COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 26 FEVRIER 2010
X...
C/
X... A... Y...
Décision déférée à la cour : Jugement du tribunal de grande instance de Cayenne, en date du 27 juin 2001, après cassation de l'arrêt en date du 07 Mars 2005 de la cour d'appel de chambre détachée de Cayenne, par arrêt de la Cour de cassation en date du 06 Février 2008.
APPELANT :
Monsieur Mario Cléophas X............ 97300 CAYENNE
représenté par Me Isabelle OLLIVIER, avocat au barreau de FORT DE FRANCE
INTIMES :
Monsieur Max Cyrus X...... 97300 CAYENNE
non comparant.
INTERVENANTS VOLONTAIRES :-
Madame Gisèle Marie Félix A... épouse B...... 75013 PARIS
représentée par Me Dinah RIOUAL-ROSIER, de la SELARL RIOUAL-ROSIER, avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008/ 005115 du 17/ 02/ 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de FORT DE FRANCE)
Monsieur Gérard Y......... 92000 NANTERRE
représentée par Me Dinah RIOUAL-ROSIER, de la SELARL RIOUAL-ROSIER, avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Décembre 2009, en chambre du conseil, devant la cour composée de :
Mme Marie HIRIGOYEN, présidente, Mme SUBIETA-FORONDA, conseillère rapporteur, Mme DERYCKERE, conseillère,
qui en ont délibéré, les parties ayant été avisées de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 26 Février 2010.
Greffier, lors des débats :
Mme DELUGE,
Ministère public
L'affaire a été communiquée au ministère public qui a fait connaître son avis.
ARRET :
Défaut. prononcé publiquement après débats en chambre du conseil par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
OBJET DU LITIGE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte du 24 novembre 1999, M. Amelius D... a saisi le tribunal de grande instance de Cayenne aux fins de voir prononcer la nullité de la reconnaissance de paternité qu'il avait faite à l'égard de Mario X..., né le 28 septembre 1964, suivant acte notarié du 14 octobre 1996, transcrit le 3 mars 1997.
Par jugement du 27 juin 2001, le tribunal de grande instance a prononcé la nullité de la reconnaissance de Mario X..., ordonné la transcription du jugement en marge de l'acte de naissance de ce dernier et condamné M. X... à verser à M. D... la somme de 5 000 francs au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. D... est décédé le 25 mars 2001, laissant pour héritier M. Max X..., reconnu par lui suivant acte notarié du 14 octobre 1996 tel que son frère Mario.
Selon déclaration reçue le 10 avril 2003, M. Mario X... a relevé appel du jugement du 27 juin 2001.
M. Gérard Y... et Mme Gisèle A... épouse B..., légataires à titre particulier de M. D..., sont intervenus volontairement à l'instance d'appel.
Par arrêt du 7 mars 2005, la cour d'appel de Fort-de-France, chambre détachée de Cayenne, a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de M. Gérard Y... et de Mme Gisèle A... épouse B... et a confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions.
M. Mario X... a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt sus-visé.
Par arrêt en date du 6 février 2008, la Cour de cassation, première chambre civile, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt du 7 mars 2005, au motif qu'il ne résulte ni des mentions de la décision ni des pièces de la procédure que la cause ait été communiquée au ministère public, a remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et les a renvoyé devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée.
Par déclaration déposée au greffe le 30 mai 2008, M. Mario X... a saisi la cour d'appel de Fort-de-France.
Aux termes des assignations délivrées aux intimés, et intervenants volontaires par exploits des 9, 10 et 23 octobre 2008, M. Mario X... demande à la cour de déclarer irrecevables les interventions volontaires de M. Y... et Mme B..., d'infirmer en tous points le jugement du 27 juin 2001, de dire et juger valable la reconnaissance de paternité du 14 octobre 1996 et de condamner solidairement M. Y... et Mme B... à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Il soutient que son frère Max X... étant héritier de M. D..., M. Y... et Mme B... n'ont ni intérêt ni qualité à agir, n'étant que de simples légataires à titre particulier et leurs droits dans la succession ne dépendant pas du sort de l'instance.
Il expose que M. D... s'est comporté comme un père envers lui et qu'il lui a rendu son affection, ayant pris soin de M. D... et employé plusieurs personnes à cet effet, soulignant que M. D... a signé en sa faveur un mandat notarié dès janvier 1995 lui permettant de gérer tous ses biens et qu'il lui a cédé un immeuble pour la somme de 400 000 francs, dont le prix de vente était converti en une obligation de soins par l'acheteur. Il attribue la dégradation de ses relations avec M. D... à l'altération des facultés mentales de celui-ci, l'ayant amené à révoquer en 1999 la procuration qu'il lui avait donnée puis à l'assigner en justice.
Il rappelle que par jugement du 10 janvier 2001 devenu définitif, le tribunal de grande instance de Cayenne a débouté M. D... de sa demande d'annulation de reconnaissance de paternité à l'égard de Max X..., faute d'élément de preuve, arguant qu'aucune pièce supplémentaire n'a été versée dans le dossier le concernant.
Il soutient qu'il n'est pas établi que le consentement de M. D... ait été vicié ni que ce dernier n'est pas son père biologique, alors qu'il appartient à celui qui conteste la reconnaissance d'apporter la preuve de son caractère mensonger, ce qui n'a pas été fait par M. D... ni par son héritier Max X....
Par dernières conclusions reçues le 25 juin 2009, Mme B... et M. Y... demandent à la cour de déclarer recevable leur intervention volontaire, de faire injonction à M. X... de leur communiquer l'arrêt de la Cour de cassation ainsi que l'acte de saisine de la cour de renvoi, de confirmer le jugement déféré et de condamner M. X... à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Ils soutiennent que leur intervention est recevable, étant légataires de M. D..., lequel est décédé sans descendance véritable.
Ils font valoir que l'arrêt du 7 mars 2005 mentionne que l'aveu par l'appelant de ce que M. D... n'est pas son père biologique suffit à établir le caractère mensonger de la reconnaissance, d'autant que celle-ci ne procède manifestement que de considérations matérielles ou patrimoniales et que les pièces versées aux débats ne laissent aucunement présumer du lien filial ou affectif allégué par l'appelant, citant un courrier du 11 juin 1998 adressé par ce dernier à M. D.... Ils ajoutent que le délai dont se prévaut M. X... de 10 ans ne pouvait être acquis au moment du décès de M. D..., survenu en 2001, seule pouvant être prise en compte la période postérieure à la reconnaissance.
La procédure, qui a été communiquée et visée par le ministère public, a été clôturée le 26 novembre 2009.
L'assignation concernant M. Max X... ayant été délivrée par acte déposé à l'étude et celui-ci n'ayant pas constitué avocat devant la cour d'appel de Fort-de-France, il sera statué par arrêt de défaut.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité des interventions volontaires
Il résulte des dispositions de l'article 554 du code de procédure civile que peuvent intervenir en cause d'appel lorsqu'elles y ont intérêt
les personnes qui n'ont pas été parties en première instance, l'article 339 ancien du code civil précisant que la reconnaissance de paternité peut être contestée par toutes personnes qui y ont intérêt.
En l'espèce, à la suite du décès de M. D..., Mme B... et M. Y..., en leur qualité de légataires particuliers, ont un intérêt à agir dans la présente instance, la reconnaissance éventuelle du lien de filiation étant susceptible d'avoir des conséquences sur la dévolution successorale.
Par conséquent, il convient de déclarer recevables les interventions volontaires de M. Gérard Y... et de Mme Gisèle A... épouse B....
M. X... ayant communiqué l'arrêt de la Cour de cassation du 6 février 2008 ainsi que la déclaration de saisine à Mme B... et de M. Y... selon bordereau de communication déposé le 21 octobre 2009, leur demande tendant à voir déférer une injonction de production de ces pièces devient sans objet.
Sur la reconnaissance de paternité
L'article 339 ancien du code civil dispose que la reconnaissance de paternité peut être contestée par toute personne y ayant intérêt, y compris son auteur mais que quand il existe une possession d'état conforme à la reconnaissance et qui a duré dix ans au moins depuis celle-ci, aucune contestation n'est plus recevable.
En l'espèce, l'action a été intentée le 24 novembre 1999 par M. D... qui est décédé le 25 mars 2001, soit moins de 10 ans après la reconnaissance de paternité qu'il avait effectuée le 14 octobre 1996 vis-à-vis de Mario X..., de sorte que l'action est recevable.
Une reconnaissance de paternité est présumée être l'expression de la vérité et il incombe à celui qui la conteste d'apporter la preuve de son caractère mensonger.
En l'espèce, M. D... a procédé à une reconnaissance de paternité à l'égard de Mario X... le 14 octobre 1996 et il n'est nullement rapporté la preuve d'une absence de consentement ou d'un vice du consentement de M. D... lors de la passation de cet acte, aucune pièce du dossier ne démontrant un affaiblissement intellectuel de ce dernier ou que celui-ci souffrait de troubles psychiques en 1996. En outre, la reconnaissance a été établie par acte notarié, ce qui lui confère son authenticité.
Pour considérer comme établi le caractère mensonger de la reconnaissance, le premier juge a retenu d'une part que celle-ci n'avait été dictée que par des considérations extérieures à la véritable filiation,
soit le seul intérêt matériel, d'autre part, que M. X... ne s'était pas comporté en véritable fils. Cependant, les pièces versées au dossier n'évoquent que des problèmes de gestion ou de vente de biens ayant opposé M. D... à M. Mario X... et on ne saurait déduire du seul comportement de M. Mario X... la vérité de sa filiation et la validité de la reconnaissance, étant souligné que cette preuve ne peut en aucun cas résulter des déclarations de l'appelant devant la cour d'appel de Fort-de-France, section détachée de Cayenne, au demeurant non réitérées devant la présente cour.
La preuve n'étant pas rapportée du caractère mensonger de la reconnaissance effectuée par M. D..., la décision déférée sera infirmée en toutes ses dispositions. Les demandes tendant à voir annuler la reconnaissance de paternité de M. Mario X... par M. D... seront rejetées et la reconnaissance déclarée valable.
Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Au vu de la nature du litige, chaque partie devra supporter la charge de ses propres dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après débats en chambre du conseil, par arrêt de défaut ;
Constate la communication de la procédure au ministère public ;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, en date du 6 février 2008 ;
Déclare recevables en leurs interventions volontaires M. Gérard Y... et Mme Gisèle A... épouse B... ;
Infirme le jugement du 27 juin 2001 du tribunal de grande instance de Cayenne en toutes ses dispositions ;
Rejette les demandes tendant à voir prononcer la nullité de la reconnaissance de paternité de Mario X... effectuée par Amélius D... suivant acte notarié du 14 octobre 1996, transcrit le 3 mars 1997 ;
Déclare valable cette reconnaissance de paternité ;
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens d'appel par elle exposés.
Signé par Mme HIRIGOYEN, présidente, et par Mme SOUNDOROM, greffier lors du prononcé, auquel la minute a été remise.
LE GREFFIER. LA PRESIDENTE.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement,
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,