République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 11/07/2024
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N° de MINUTE :
N° RG 21/04089 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TYKD
Jugement (N° 19/00055)
rendu le 24 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes
APPELANT
Monsieur [V] [M]
né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 15] (Belgique)
[Adresse 5]
[Localité 13]
représenté par Me Jonathan Daré, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [Z] [M]
né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 15] (Belgique)
[Adresse 11]
[Localité 13]
représenté par Me Loïc Ruol, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué
Madame [O] [M] épouse [W]
née le [Date naissance 4] 1945 à [Localité 15] (Belgique)
[Adresse 6]
[Localité 12]
défaillante à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 9 septembre 2021 à sa personne
DÉBATS à l'audience publique du 25 mars 2024, tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Céline Miller, conseiller
ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024 après prorogation du délibéré en date du 06 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 novembre 2023
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[C] [M] est décédé le [Date décès 7] 2002, laissant ainsi pour lui succéder son épouse, [R] [T], décédée à son tour le [Date décès 3] 2015, et ses trois enfants : Mme [O] [M] épouse [W] et MM. [V] et [Z] [M].
En l'absence de partage amiable des successions de leurs parents, M. [V] [M] a fait assigner ses frère et soeur devant le tribunal de grande instance de Valenciennes par actes des 11 décembre 2018 et 7 janvier 2019 aux fins, notamment, d'obtenir l'ouverture des opérations de partage desdites successions.
Par jugement avant dire droit du 10 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Valenciennes a réouvert les débats afin d'ordonner la production de l'acte de partage de la succession de [C] [M], la déclaration effectuée à l'administration fiscale, ainsi que la production, par M. [Z] [M], de l'ensemble des pièces remises par Me Piettre concernant les différentes courses, factures de la maison de retraite et dépenses effectuées.
Par jugement contradictoire du 24 juin 2021, le tribunal judiciaire de Valenciennes a :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession d'[R] [T] ;
- commis, à cette fin, M. le président de la [14] en qualité de notaire liquidateur pour y procéder, avec faculté de délégation ;
- débouté M. [V] [M] de ses demandes tendant à l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre ses parents, ainsi que de la succession de son père ;
- condamné M. [Z] [M] à payer à la succession une indemnité de 450 euros par mois à compter du [Date décès 3] 2015 pour l'occupation privative de l'immeuble situé [Adresse 8], à [Localité 13], cadastré section C n° [Cadastre 10] ;
- débouté celui-ci de sa demande de condamnation d'une indemnité d'occupation pour l'immeuble situé [Adresse 11], cadastré section C n° [Cadastre 9] ;
- débouté M. [V] [M] de sa demande de reddition des comptes ;
- débouté ce dernier de sa demande tendant à voir reconnaître l'existence d'un recel successoral d'un montant de 22 998,81 euros commis par M. [Z] [M], et de condamner ce dernier au rapport de cette somme à la succession ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [V] [M] a interjeté appel partiel de cette décision et, aux termes de ses dernières conclusions remises le 19 octobre 2021, demande à la cour de réformer le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de sa demande de reddition des comptes et, statuant à nouveau, au visa des articles 1992 et suivants du code civil, d'ordonner à M. [Z] [M] qu'il rende compte de sa gestion des comptes bancaires de leur mère, confirmer le jugement pour le surplus et condamner M. [Z] [M], outre aux dépens de l'appel, à lui verser la somme de 2 300 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 11 janvier 2022, M. [Z] [M] demande à la cour, au visa des articles 1992, 1993 et 1353 du code civil et de l'article 9 du code de procédure civile, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de condamner l'appelant, outre aux dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile, à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour le détail de l'argumentation des parties, il est fait référence à leurs dernières conclusions écrites par application de l'article 455 du code de procédure civile.
Mme [O] [M] épouse [W], à qui la déclaration d'appel a régulièrement été signifiée à sa personne le 9 septembre 2021 et les conclusions d'appelant signifiées par dépôt de l'acte à l'étude le 21 octobre suivant, n'a pas constitué avocat devant la cour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'appel étant limité à la demande de reddition de compte formulée par M. [V] [M], les autres dispositions du jugement entrepris, non discutées et désormais définitives, ne seront pas évoquées.
Sur la demande en reddition de compte
Aux termes de l'article 1992 du code civil, le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire.
L'article 1993 du même code ajoute que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant.
En application de ce texte, le mandant est en droit d'exiger cette reddition de compte même si aucune circonstance ne laisse penser que les mandataires ont dépassé les limites de la procuration donnée. Cette obligation n'existe qu'au profit du mandant et s'exécute auprès de la succession en cas de décès de celui-ci (Civ. 1ère, 20 février 2008, 06-19.977). Elle s'impose à tout mandataire, que le mandat soit à titre gratuit ou à titre onéreux.
Enfin, il résulte de l'article 1353 du code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge, ayant constaté que quand bien même M.'[V] [M] contestait certaines dépenses effectuées sur le compte de sa mère, telles que des frais de fuel ou des frais de carburant dont son frère aurait bénéficié, ou encore le fait que les fermages dus à leur mère aient été versés directement en espèces entre les mains de son frère, aucune des pièces versées par M.'[V] [M] ne permettait d'établir que M. [Z] [M] ait bénéficié d'une procuration de la part de Mme [R] [M], ou que celle-ci ait bénéficié d'une mesure de protection ou ait eu des problèmes d'insanité d'esprit, a débouté M. [V] [M] de sa demande de reddition de compte.
La cour y ajoute qu'il résulte des factures versées au débat par M. [Z] [M] (Ehpad, soins infirmiers, ambulances, divertissements, assurance habitation, mutuelle, etc...) que les frais d'hébergement de leur mère étaient pour la plupart payés en espèces et que les dépenses effectuées, que ce soit sur le compte courant ou par paiements en espèces, sont concordantes avec le train de vie d'une personne âgée hébergée en Ehpad qui a conservé son immeuble d'habitation.
Rien ne permet par ailleurs d'affirmer que M. [Z] [M] aurait perçu les fermages dus à leur mère, d'un montant annuel compris entre 646 euros en 2008 et 764 euros en 2016, sans les reverser à celle-ci.
M. [V] [M] n'apporte pas plus d'éléments au soutien de sa demande en appel.
La décision entreprise sera en conséquence confirmée.
Sur les frais accessoires
M. [V] [M], qui succombe en son appel, sera tenu aux entiers dépens de celui-ci, avec possibilité pour Me Ruol de recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Il convient par ailleurs de le condamner à payer à M. [Z] [M] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour
Statuant dans les limites de l'appel,
Confirme la décision entreprise,
Y ajoutant,
Condamne M. [V] [M] aux entiers dépens d'appel, avec possibilité pour Me Ruol de recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Le condamne à payer à M. [Z] [M] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet