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06/06/2024 | FRANCE | N°21/05408

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 06 juin 2024, 21/05408


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 06/06/2024





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/05408 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T5GU



Jugement (N° 20/06464)

rendu le 31 août 2021 par le tribunal judiciaire de Lille





APPELANTE



Madame [P] [M]

née le 06 mars 1953 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Localité 6]



représentée par Me Florence Mas, av

ocat au barreau de Lille, avocat constitué substitué par Me Sylvain Verbrugghe, avocat au barreau de Lille



INTIMÉE



La SCI Patmajo

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Locali...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 06/06/2024

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/05408 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T5GU

Jugement (N° 20/06464)

rendu le 31 août 2021 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANTE

Madame [P] [M]

née le 06 mars 1953 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Localité 6]

représentée par Me Florence Mas, avocat au barreau de Lille, avocat constitué substitué par Me Sylvain Verbrugghe, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

La SCI Patmajo

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Sandra Vansteelant, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

La SARL Maisonormes

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

assignée en intervention forcée

représentée par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Kathia Beulque, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 25 mars 2024, tenue par Céline Miller magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Céline Miller, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 04 mars 2024

****

Suivant acte authentique du 1er octobre 2019, Mme [P] [M] a cédé à la SCI Patmajo un local à usage de magasin ou de local professionnel dans un immeuble situé [Adresse 3] (secteur Lomme), pour le prix de 105 000 euros.

Le certificat de mesurage 'Loi Carrez' joint à l'acte de vente, réalisé par la Sarl Maisonormes les 20 mars et 9 avril 2019, mentionnait une surface de 72,9 mètres carrés.

Après avoir fait mesurer à nouveau la surface du local, qui s'est avérée inférieure à la surface annoncée dans le certificat de mesurage, et aucun accord amiable n'ayant pu intervenir entre les parties, la SCI Pamajo a fait assigner Mme [M] par acte d'huissier du 28 septembre 2020 aux fins de se voir restituer la somme de 16 665 euros au visa des articles 46 de la loi du 10 juillet 1965 et 1619 du code civil, au titre d'une erreur de mesurage de plus d'un vingtième.

Mme [P] [M] ne s'est pas fait représenter dans le cadre de cette procédure.

Par jugement du 31 août 2021, le tribunal judiciaire de Lille l'a condamnée à payer à la SCI Patmajo la somme de 13 568 euros en diminution du prix de vente du local, ainsi qu'aux dépens et à payer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [P] [M] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 27 juin 2023, le conseiller de la mise en état l'a notamment déclarée irrecevable en son assignation en intervention forcée délivrée en cause d'appel à l'encontre de la Sarl Maisonormes aux fins de la voir condamner à la garantir et relever indemne de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 1er mars 2024, Mme [M] demande à la cour :

- à titre principal, au visa de l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de débouter la société intimée de l'ensemble de ses demandes et de la condamner, outre aux dépens de première instance et d'appel, à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- à titre subsidiaire, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil et de l'article 552 du code de procédure civile, de mettre en cause d'office la société Maisonormes à la procédure d'appel et condamner cette dernière, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel, à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- en toutes hypothèses, dire que Me Mas pourra recouvrer directement les frais dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 3 mars 2024, la société Patmajo demande à la cour, au visa de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 1619 et suivants du code civil, de confirmer le jugement entrepris et,

y ajoutant, de :

- condamner l'appelante à lui payer la somme complémentaire de 3 097 euros ;

à titre subsidiaire :

- retenir une superficie de 65,62 m² pour fonder la condamnation, conformément au métrage effectué par la société Maisonormes, métreur de Mme [M],

- condamner Mme [M] au paiement de la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire,

- à titre infiniment subsidiaire, ordonner tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de se rendre sur place après avoir convoqué les parties et procéder au mesurage du local qu'elle a acquis ;

- condamner Mme [M], outre aux dépens, à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour le détail de l'argumentation des parties, il est référé à leurs dernières conclusions écrites par application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 4 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en restitution d'une partie du prix de l'immeuble

Aux termes de l'article 46 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, toute promesse unilatérale de vente ou d'achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d'un lot ou d'une fraction de lot mentionne la superficie de la partie privative de ce lot ou de cette fraction de lot. La nullité de l'acte peut être invoquée sur le fondement de l'absence de toute mention de superficie. (...) Si la superficie est supérieure à celle exprimée dans l'acte, l'excédent de mesure ne donne lieu à aucun supplément de prix. Si la superficie est inférieure de plus d'un vingtième à celle exprimée dans l'acte, le vendeur, à la demande de l'acquéreur, supporte une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure. L'action en diminution du prix doit être intentée par l'acquéreur dans un délai d'un an à compter de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente, à peine de déchéance.

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L'article 16 du code de procédure civile dispose par ailleurs que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

Il est constant qu'hormis le cas où la loi en dispose autrement, si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties par un technicien de son choix. (Cass., ch. Mixte, 28 septembre 2012, n°11.18-710 P).

En l'espèce, il résulte de l'acte authentique de vente du 1er octobre 2019 conclu entre les parties que la superficie des parties privatives du lot numéro 160 de l'immeuble objet de la vente, consistant en un local à usage de magasin ou local professionnel situé à l'entresol du bâtiment A de cet immeuble, est de 72,90 m², les mesures ayant été effectuées par le Cabinet Maisonormes dont le certificat en date du 20 mars 2019 est joint à l'acte.

Parmi les charges et conditions générales figurant à l'acte est stipulée une clause relative à l'état et la contenance de l'immeuble, aux termes de laquelle 'les parties déclarent être informées des dispositions de l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 issu de la loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 dit 'loi Carrez', aux termes desquelles si la superficie réelle est inférieure de plus d'un vingtième à celle exprimée aux présentes, le vendeur devra supporter, à la demande de l'acquéreur, une diminution de prix proportionnelle à la moindre mesure mais que si la superficie est supérieure à celle ci-dessus exprimées, l'excédent ne donne lieu à aucun supplément de prix.'

La société IDZ Consulting, mandatée par la SCI Patmajo, a procédé à de nouvelles mesures du local le 14 février 2020, qui ont permis d'établir une superficie de 61,33 m².

Interpellé par la SCI Patmajo au regard de ces constatations qui lui ont été communiquées avec le croquis coté et le métrage effectué par la société IDZ, le Cabinet Maisonormes a établi un nouveau certificat de mesurage après relevé du 20 mars 2020, mentionnant une superficie de 65,62 m².

Enfin, il résulte des écritures et pièces versées aux débats par Mme [M] que lorsque celle-ci a mis en vente le local litigieux début 2019, les annonces de vente mentionnaient une superficie du local de 66 m².

Ces éléments concordants suffisent à établir, sans qu'il soit besoin d'une expertise judiciaire, que la superficie réelle du local objet de la vente est bien inférieure de plus d'un vingtième à celle retenue dans l'acte de vente, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a retenu que Mme [M] devait supporter une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure.

C'est encore de manière pertinente que pour établir cette moindre mesure, le juge a retenu la moyenne des deux mesures dont se prévalait la SCI Patmajo, à savoir une superficie de 63,48 m².

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a condamné Mme [M] à payer à la SCI Patmajo la somme de 13 568 euros au titre de la restitution de la partie du prix correspondant à la surface excédentaire (9,42 m²). La SCI Patmajo sera en conséquence déboutée de sa demande de complément de restitution de prix.

Sur la demande de mise en cause de la société Maisonormes aux fins de garantie

Aux termes de l'article 914 in fine du code de procédure civile, les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application des articles 909,910, et 930-1 ont autorité de la chose jugée au principal.

En l'espèce, l'ordonnance du 27 juin 2023, par laquelle le conseiller de la mise en état a déclaré Mme [P] [M] irrecevable en son assignation en intervention forcée délivrée en cause d'appel à la société Maisonormes en l'absence d'évolution du litige depuis la première instance, a autorité de la chose jugée au principal.

Les dispositions de l'article 552 alinéa 3 du code de procédure civile, invoquées par Mme [M] pour solliciter la mise en cause d'office de la société Maisonormes afin de rendre commun et opposable à celle-ci l'arrêt à intervenir, ne sont pas applicables au cas d'espèce, dès lors qu'elles concernent la mise en cause d'office par la cour de tous les co-intéressés au litige en cas de solidarité ou d'indivisibilité de celui-ci à l'égard de plusieurs parties, ce qui implique que la partie dont la mise en cause est ainsi ordonnée en appel ait participé au litige de première instance, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Si Mme [M] expose qu'elle a assigné au fond la société Maisonormes par acte d'huissier du 29 février 2024 aux fins qu'elle la garantisse de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre du fait des fautes commises par celle-ci dans le cadre de son activité de diagnostiqueur, elle ne justifie pas avoir soumis à la juridiction saisie, ainsi qu'elle l'aurait pu si elle avait engagé cette action plus tôt, une exception de connexité qui aurait permis à celle-ci de se dessaisir au profit de la cour de céans pour joindre l'examen des deux litiges.

Mme [M] sera en conséquence déboutée de sa demande tendant à la mise en cause d'office de la société Maisonormes dans le cadre du présent litige.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La SCI Patmajo ne démontre pas qu'en faisant appel d'une décision lui faisant grief, Mme [M] ait fait dégénérer son droit d'appel en abus, dès lors que, l'appréciation inexacte qu'une partie fait de ses droits n'étant pas, en soi, constitutive d'une faute, l'abus ne peut se déduire du seul rejet de ses prétentions.

Aussi, la SCI Patmajo sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les autres demandes

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et frais irrépétibles.

Mme [M] sera condamnée aux entiers dépens d'instance, ainsi qu'à payer à la SCI Patmajo la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d'appel. Elle sera enfin déboutée de sa propre demande formulée à ce titre à l'encontre de la SCI Patmajo.

Enfin, sa demande subsidiaire tendant à voir condamner la société Maisonormes aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera déclarée irrecevable, cette société n'étant pas partie à la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme la décision entreprise,

Y ajoutant,

Déboute la SCI Patmajo de sa demande complémentaire de restitution de prix,

Déboute Mme [P] [M] de sa demande tendant à obtenir la mise en cause d'office de la Sarl Maisonormes,

Déboute la SCI Patmajo de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne Mme [P] [M] aux dépens d'appel,

La condamne à payer à la SCI Patmajo la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

La déboute de sa demande formée sur le même fondement,

Déclare irrecevables les demandes de Mme [P] [M] tendant à obtenir la condamnation de la Sarl Maisonormes aux dépens et au paiement d'une indemnité au titre de ses frais irrépétibles.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 21/05408
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;21.05408 ?
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