ARRÊT DU
29 Mars 2024
N° 272/24
N° RG 22/00492 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UGJQ
PL/VM
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
en date du
09 Mars 2022
(RG 21/00728 -section 2 )
GROSSE :
aux avocats
le 29 Mars 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANTE :
S.A.S.U. SONIA B
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Krystel SCOUARNEC, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE :
Mme [C] [B]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Philippe PREVEL, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS : à l'audience publique du 30 Janvier 2024
Tenue par Philippe LABREGERE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Annie LESIEUR
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Philippe LABREGERE
: MAGISTRAT HONORAIRE
Pierre NOUBEL
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Muriel LE BELLEC
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Philippe LABREGERE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 09 Janvier 2024
EXPOSE DES FAITS
[C] [B] a été embauchée en qualité d'esthéticienne par la société SONIA B par contrat de professionnalisation à durée déterminée du 21 octobre 2019 au 4 septembre 2020, suivi d'un contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 1er octobre 2020. Elle relevait de la catégorie des employés, coefficient 175 de la convention collective nationale de l'esthétique-cosmétique et de l'enseignement technique et professionnel lié aux métiers de l'esthétique et de la parfumerie.
Le 21 mai 2021, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie puis, après l'invitation par écrit de son employeur à trouver une issue amiable aux manquements qu'elle lui reprochait et différents échanges de courriers, elle a pris acte de la rupture de son contrat, le 22 juin 2021.
Par requête reçue le 30 juillet 2021, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Lille afin de faire constater que la prise d'acte de rupture produisait les effets d'un licenciement et d'obtenir le versement de rappels de salaire, d'heures supplémentaires, d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts.
Par jugement en date du 9 mars 2022, le conseil de prud'hommes a dit que la prise d'acte de rupture s'analysait en une démission mais a condamné la société à lui verser
-1283,44 euros bruts à titre de rappel de salaire afférent à la requalification au coefficient 230
-1205,50 euros au titre de salaire correspondant pour le rappel des heures supplémentaires
-11622,54 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé
-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
dit que les affaires personnelles de la salariée étaient quérables et non portables, invité les parties à convenir d'un rendez-vous en vue de leur restitution,
débouté la société de sa demande au titre de la procédure abusive
et condamné cette dernière aux dépens.
Le 31 mars 2022 la société SONIA B a interjeté appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance et l'audience des plaidoiries a été fixée au 30 janvier 2024.
Selon ses conclusions récapitulatives et en réplique reçues au greffe de la cour le 25 novembre 2022, la société SONIA B appelante sollicite de la cour la réformation du jugement entrepris et la condamnation de l'intimée à lui verser
-888,33 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
-96,95 euros
-5000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive'
-3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelante expose, sur les manquements à l'obligation de santé et sécurité, que bien qu'elle n'ait pas bénéficié d'un suivi médical, l'intimée ne l'a jamais déploré, que sa dernière visite d'information et de prévention initiale s'est déroulée le 29 septembre 2017 chez son précédent employeur, que selon l'article R.4624-15 du code du travail, lorsque le travailleur a bénéficié d'une visite d'information et de prévention dans les cinq ans précédant son embauche, l'organisation d'une nouvelle visite d'information et de prévention n'est pas requise, qu'en outre, ce type de manquement n'est pas de nature à justifier une prise d'acte de rupture, que la société ne l'a pas empêchée de reprendre son poste après la visite médicale de reprise, que la prise d'acte de rupture est antérieure à la fin de son arrêt de travail pour maladie, que son état de santé ne présentait pas de grave dégradation, que la société n'a pas méconnu les dispositions légales relatives à la durée du travail, que durant le confinement, elle n'a que très peu placé ses salariés en activité partielle, que l'intimée n'a connu que quelques jours d'activité partielle au mois d'avril 2021 mais aucun au cours du mois de mai 2021, que les seules attestations que la salariée verse aux débats émanent de sa propre mère, de son concubin, de la mère et du père de celui-ci, sur l'exécution déloyale du contrat, que ne sont pas établis l'absence de remise spontanée de ses bulletins de paie et le refus de restituer ses effets personnels, que l'intimée ne fournit aucune explication à l'appui du grief relatif à la non restitution du diplôme d'Etat ou du CQP par la société, que l'appelante ne le détient pas, sur la revendication d'une autre classification, que celle sollicitée correspondant au coefficient 230 de la convention collective attribué à la «Responsable adjointe du Chef d'entreprise » que l'intimée ne justifie pas qu'elle aurait participé au management de l'équipe, organisé l'activité, remonté les demandes des salariés, préparé des animations commerciales, géré les locaux, sur la réalité de la relation de travail, que l'intimée affirme sans l'établir que son état de santé se serait dégradé à raison de ses conditions de travail, qu'elle s'est très souvent ouverte, tant auprès de ses collègues de travail que des clientes, de ses souffrances et de ses difficultés rencontrées avec son compagnon, que la directrice de la société a toujours été à son écoute et la soutenait dans ces moments difficiles, que l'intimée a toujours été très heureuse et très fière de travailler au sein de l'institut de beauté, qu'en réalité elle voulait retravailler au sein de l'institut [3] et a ainsi recouru à la prise d'acte, qu'elle y a été réembauchée peu après la rupture, sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que du fait d'une ancienneté d'un an et neuf mois d'ancienneté, l'intimée ne peut prétendre, en application de l'article L1235-3 du code du travail, qu'à une indemnité entre à 0,5 mois et 2 mois de salaire, qu'elle a rompu son contrat de travail sans respecter le préavis de quinze jours auquel elle était tenue aux termes de l'article 30 de la convention collective, que la procédure qu'elle a engagée est manifestement abusive.
Selon ses conclusions récapitulatives et en réplique reçues au greffe de la cour le 3 octobre 2023, [C] [B] intimée et appelante incidente sollicite de la cour la réformation du jugement entrepris et la condamnation de la société à lui verser :
-10000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de santé et sécurité
-10000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
-881 euros à titre d'indemnité légale de licenciement
-1937,09 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
-193,71 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
-5000 euros à titre de dommages-intérêts pour entrave à la liberté de travail
-5000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive
-5000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation du droit à l'image,
la confirmation du jugement pour le surplus, la capitalisation des intérêts, l'irrecevabilité de la demande de la société pour procédure abusive
et la condamnation de la société à lui verser 3000 euros d'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel
L'intimée soutient, sur le manquement à l'obligation de santé et sécurité, qu'aucune visite médicale d'embauche n'a été organisée, que la société l'a fait travailler pendant le confinement, alors qu'elle n'exerçait pas une activité autorisée estimée essentielle, qu'elle a subi une grave détérioration de son état de santé, sur la durée du travail, qu'elle verse aux débats ses plannings, ses données de géolocalisation téléphoniques, un tableau récapitulatif de ses heures travaillées, jour par jour, avec total sur la semaine, qu'il lui est dû un rappel de salaire des heures non payées, sur le travail dissimulé pendant le confinement, qu'elle démontre la réalité du travail effectué durant cette période, en violation délibérée des interdictions en vigueur, par ses géolocalisations, un exemple de rendez-vous sur le logiciel de l'appelante, le jeudi 6 mai 2021, ses échanges de SMS avec la dirigeante, ses plannings, des attestations, sur l'exécution déloyale du contrat de travail, que l'appelante ne lui remettait pas spontanément ses bulletins de paie, qu'elle prenait des mesures discriminatoires de rétorsion à la suite de la maladie, qu'elle a refusé de lui remettre ses effets personnels, sur la requalification dans la convention collective et le rappel de salaire correspondant, que l'appelante l'a présentée comme «assistante manager» sur ses comptes Instagram et Facebook le 17 novembre 2020, que cette qualification correspond, au minimum, au coefficient 230 de la convention collective, soit un salaire mensuel brut de 1695 euros pour 35 heures, et un écart de 1283,44 euros sur huit mois par rapport à la rémunération qu'elle a perçue, sur la prise d'acte, qu'elle est justifiée par les manquements précédemment relevés et le retard apporté au paiement du salaire et des indemnités journalières de sécurité sociale, que son ancienneté doit être calculée à compter du 28 août 2019, qu'elle est en droit de solliciter une indemnité de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, ainsi que des dommages-intérêts en application de l'article 1235-3 du code du travail, sur l'entrave à la liberté du travail, que ses diplômes concernant sa formation au drainage lymphatique selon la méthode Renata ne lui ont jamais été restitués par la société, que cette rétention est fautive, qu'elle ne pouvait pas effectuer les prestations afférentes à la formation qu'elle avait suivie, sur la résistance abusive de l'appelante, que le conseil de celle-ci n'a communiqué ses pièces et conclusions que deux jours avant l'audience fixée devant le conseil de prud'hommes malgré des relances antérieures, que l'intimée a subi un préjudice dans la préparation de sa défense, sur la violation du droit à l'image, qu'elle n'a pas donné son consentement à la diffusion de son image par la société sur les réseaux sociaux ou sur le site internet de cette dernière, que son image a continué d'être exploitée après la rupture du contrat de travail.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Attendu, sur l'attribution du coefficient 230 de la convention collective, que selon l'article 2 de l'avenant 23 du 11 juillet 2019 modifiant l'article 11 point 6 de ladite convention, ce coefficient qui correspond à un emploi d'agent de maîtrise est attribué à la salariée responsable-adjointe de la responsable d'exploitation, justifiant d'une expérience professionnelle effective de trois années en esthétique et chargée de mettre en 'uvre les objectifs et les directives de ladite responsable ; que ses principales missions consistent à effectuer l'accueil et le suivi de la clientèle, vérifier les prises de rendez-vous, proposer des produits et des services adaptés, renseigner la fiche client, préparer des actions de fidélisation, exécuter des soins esthétiques du visage et du corps et réaliser des maquillages, conseiller et vendre des prestations de service, des matériels, des produits cosmétiques et des produits de parfumerie, créer des besoins et effectuer des ventes complémentaires de prestations et de produits, participer au management de l'équipe et à l'organisation de l'activité, remonter les demandes des salariés, préparer et suivre des animations commerciales, des sessions de formation, organiser les ventes promotionnelles, gérer les locaux notamment en procédant à l'affectation des espaces, à l'aménagement des postes de travail et à la planification de leur utilisation maximale ; que pour revendiquer le coefficient 230, l'intimée se borne à se fonder sur sa présentation par la société à l'ensemble des salariés, par message du 17 novembre 2020, en qualité d'assistante manager et sur l'envoi d'un SMS à Prudence B. le 25 avril 2021 dans lequel l'intimée lui communique les horaires de la semaine de cette dernière ; qu'elle ne communique aucune autre pièce susceptible de faire apparaître qu'elle accomplissait les multiples missions dévolues à un agent de maîtrise et qui ne se limitaient pas à un simple management qui, en l'espèce, apparaît en outre occasionnel ; que de plus, il résulte du message du 17 novembre 2020 dont elle se prévaut que l'intimée ne jouissait pas d'une expérience professionnelle effective en esthétique de trois années à la date du 1er octobre 2020 puisque ne pouvait être assimilée à une telle expérience la période de deux années durant laquelle l'intimée se trouvait en stage au sein de la Parfumerie [3] pour l'obtention d'un B.T.S, antérieurement à son embauche par l'appelante ; qu'elle n'apporte donc pas la preuve de la réalité de la qualification qu'elle revendiquait ; que par ailleurs, elle ne sollicite pas l'attribution d'un coefficient inférieur ;
Attendu en application de l'article L3174-1 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. ; que le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées ; qu'après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant ;
Attendu que l'intimée percevait un salaire calculé sur la base de 151,67 heures de travail mensuel augmenté de 17,33 heures supplémentaires majorées au taux de 25 % ; qu'elle produit un tableau récapitulatif précis de son temps de travail hebdomadaire pour la période de décembre 2020 à avril 2021 faisant apparaître le nombre d'heures supplémentaires qu'elle prétend avoir accomplies ; que l'appelante se borne à critiquer les pièces produites en prétendant notamment qu'elles ne constituaient pas une preuve sans communiquer le moindre élément susceptible de démontrer les horaires réellement accomplis par l'intimée ; que toutefois, il résulte des différents bulletins de paye produits que pour le mois de décembre 2020, l'intimée a été rémunérée pour 179,48 heures de travail, que l'employeur a bien pris en compte la totalité des heures supplémentaires qu'elle a exécutées ce mois-là et qu'elle mentionne sur le tableau précité ; qu'en revanche aucune heure supplémentaire n'a été comptabilisée durant les mois suivants, alors que l'intimée prétend avoir accompli, selon le tableau récapitulatif, en janvier 2021, 189,30 heures de travail, en février 2021 164,30 heures de travail, en mars 38,137 heures, en avril, 116,30 heures et en mai, 134 heures ; qu'il apparaît que l'intimée n'a accompli des heures supplémentaires non rémunérées qu'en janvier 2021 qui doivent être évaluées à la somme de 447,02 euros ;
Attendu en application de l'article L8221-5 d du code du travail qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié notamment le fait pour tout employeur de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ;
Attendu que le confinement correspond à la période du 17 mars au 10 mai 2020, du 30 octobre au 14 décembre 2020 et du 3 avril au 19 mai 2021, les mesures de restriction des déplacements en journée étant levées à compter du 3 mai 2021 ; que l'intimée prétend que durant le confinement, elle aurait continué à travailler alors qu'elle était censée se trouver en activité partielle et que ses heures de travail n'auraient pas été mentionnées sur les bulletins de paye établis par la société ; qu'il résulte toutefois des bulletins de paye versés aux débats qu'elle a perçu une rémunération mensuelle correspondant à 169 heures, augmentée en décembre 2020 d'heures supplémentaires majorées, accomplies au-delà de ce temps de travail ; que seul le bulletin de paye du mois d'avril 2021 fait apparaître qu'elle avait été placée en activité partielle du 1er au 18 avril et du 27 au 30 avril 2021 ; que les pièces qu'elle produit, destinées à démontrer une activité irrégulière durant le confinement, consistant en des géolocalisations, des échanges de SMS avec la dirigeante de la société, et des plannings, sont toutes postérieures au 2 mai ; que le bulletin du mois de mai ne mentionne que des absences de l'intimée pour maladie du 21 au 31 mai 2021 ; qu'il n'apparaît nullement que durant la période du 3 au 19 mai 2021 l'intimée ait accompli des heures de travail non mentionnées sur le bulletin de paye de ce mois ;
Attendu en application de l'article L1222-1 du code du travail que le reproche tiré du défaut de remise spontanée des bulletins de paye n'est étayé par aucun élément de preuve, l'intimée n'ayant par ailleurs jamais émis de protestation face à une telle situation durant toute la relation de travail ; qu'elle ne démontre pas davantage que le retard apporté au versement des indemnités journalières de sécurité sociale à la suite de son arrêt de travail pour maladie soit imputable à la volonté délibérée de son employeur de transmettre tardivement l'attestation de salaire sollicitée par la Caisse primaire d'assurance maladie ; que s'agissant du refus de restituer les effets personnels de l'intimée, il résulte du courriel du 31 mai 2021 annexé à l'attestation établie par [I] [G], que ceux-ci consistaient en une table de massage et en une veste en cuir ; que l'intimée n'explique pas les motifs pour lesquels elle entendait récupérer ce matériel qui se trouvait en rapport avec son activité alors que la relation de travail n'était suspendue qu'en raison d'un arrêt de travail pour maladie et que la salariée n'a pris acte de la rupture du contrat de travail que le 22 juin 2022 ; qu'il résulte de l'attestation de [F] [J] que la restitution a eu lieu le 24 août 2021 et qu'à cette occasion une altercation a éclaté entre le témoin et [A] [T], beau-père de l'intimée ; que la mauvaise volonté temporaire de la société opposée à [I] [G] qui s'était présenté le 1er juin 2021 pour obtenir la restitution de ce matériel doit être appréciée au regard de la tension des relations entre les parties mise en évidence par le courriel au ton comminatoire transmis le 26 mai 2021 par le conseil de l'intimée à la gérante de la société ; que par courriel du 12 juillet 2021, l'intimée a sollicité également la restitution de son diplôme de formation ; qu'aucune précision n'est donnée par cette dernière sur ce diplôme ni sur ceux qu'elle réclame ultérieurement par courriel du 1er avril 2022 et dont la détention matérielle, selon ses écritures, serait indispensable à son travail ;
Attendu en application de l'article L1231-1 du code du travail que l'intimée invoque à l'appui de sa prise d'acte de rupture des manquements de son employeur à son obligation de sécurité, aux dispositions sur la durée maximale de travail et aux règles de classification de l'emploi ; que toutefois, il résulte du tableau récapitulatif produit que l'intimée n'a dépassé qu'occasionnellement la durée maximale de travail de 10 heures par jour ou de 48 heures par semaine ; qu'elle ne démontre pas qu'elle pouvait revendiquer le coefficient 230 de la convention collective ; que si elle n'a pas bénéficié de la visite d'information et de prévention prévue par l'article R4624-10 du code du travail devant être réalisée dans un délai n'excédant pas trois mois, cette omission n'apparaît que comme une simple négligence de la gérante ; que si l'arrêt de travail initial du 21 mai 2021 a été prolongé jusqu'au 25 juin 2021, aucun élément versé aux débats ne permet d'établir qu'il puisse être consécutif aux conditions de travail de l'intimée qui ne conteste pas avoir retrouvé immédiatement un emploi auprès de la Parfumerie le Soleil d'or au sein de laquelle elle avait été formée avant d'être embauchée par la société appelante ; qu'il ne peut se déduire des données de géolocalisation et de deux exemples de rendez-vous fixés pour des drainages lymphatiques le 6 mai 2021, versés aux débats par l'intimée et dont il n'est pas démontré qu'ils aient été confirmés, qu'elle a bien accompli sa prestation de travail en violation des restrictions affectant l'activité du salon d'esthétique par suite du confinement ; que l'existence de manquements de la société à son obligation de sécurité de résultat n'est donc pas établie ; qu'en conséquence, la prise d'acte produit bien les effets d'une démission ;
Attendu en application de l'article 8 de la convention collective que l'intimée, qui avait plus de six mois d'ancienneté au sein de l'entreprise, n'ayant pas respecté le préavis d'un mois dont elle était débitrice, elle est bien redevable, au titre du préavis non exécuté, au moins de la somme de 888,33 euros sollicitée par la société ;
Attendu que les documents qui selon la salariée auraient été retenus par la société sont susceptibles de présenter, non la nature d'un diplôme, mais tout au plus d'une simple attestation ; que cette situation ne l'a pas empêchée de pratiquer des drainages lymphatiques selon la méthode Renata chez son nouvel employeur ; que pour ces motifs et ceux précédemment exposés, l'intimée ne démontre donc pas avoir subi une entrave à la liberté de travail ;
Attendu que l'intimée ne peut prétendre que la diffusion de son image se soit produite sans son consentement alors que cette opération, interne à la société, effectuée le 17 novembre 2020, était destinée à la mettre en valeur, comme le fait apparaître le message flatteur de son employeur accompagnant cette diffusion ;
Attendu que la transmission par la société de ses conclusions et de ses pièces deux jours avant l'audience fixée pour le jugement devant le conseil de prud'hommes n'a fait l'objet de la part des premiers juges d'aucune observation, ceux-ci n'ayant pas constaté qu'elle pouvait présenter un caractère dilatoire ; que l'intimée pouvait être en mesure d'y répondre si nécessaire ; que la résistance abusive alléguée n'est donc pas caractérisée ;
Attendu que l'intimée n'ayant pas été déboutée de sa demande dans son entier, la procédure qu'elle a engagée n'est pas entachée d'un abus de droit ;
Attendu que la société appelante sollicite la condamnation de l'intimée au paiement de la somme de 96,95 euros sans en exposer les motifs dans ses écritures ;
Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a dû exposer tant devant le conseil de prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement déféré
ET STATUANT A NOUVEAU,
DIT que la prise d'acte de rupture en date du 22 juin 2021 s'analyse en une démission,
CONDAMNE la société SONIA B à verser à [C] [B] 447,02 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,
CONDAMNE [C] [B] à verser la société SONIA B 888,33 euros au titre du préavis non exécuté,
DIT qu'il pourra être procédé par compensation pour le paiement des condamnations,
DÉBOUTE les parties du surplus de leur demande,
FAIT MASSE des dépens,
DIT qu'ils seront supportés par moitié par chaque partie.
LE GREFFIER
S. LAWECKI
LE PRÉSIDENT
P. LABREGERE