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29/03/2024 | FRANCE | N°21/01052

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 29 mars 2024, 21/01052


ARRÊT DU

29 Mars 2024







N° 399/24



N° RG 21/01052 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TVV5



NRS/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

18 Mai 2021

(RG 19/00091 -section 5)








































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GROSSE :



aux avocats



le 29 Mars 2024





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [Z] [V]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Mme [T] [M] (Défenseur syndical)





INTIMÉE :



S.A.S. BECK CRESPEL (ANCIENNEMENT BC2)



[Adresse 1]

[Localité 3]

re...

ARRÊT DU

29 Mars 2024

N° 399/24

N° RG 21/01052 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TVV5

NRS/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

18 Mai 2021

(RG 19/00091 -section 5)

GROSSE :

aux avocats

le 29 Mars 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [Z] [V]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Mme [T] [M] (Défenseur syndical)

INTIMÉE :

S.A.S. BECK CRESPEL (ANCIENNEMENT BC2)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Benoit GUERVILLE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 24 Janvier 2024

Tenue par Muriel LE BELLEC et Nathalie RICHEZ SAULE

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Serge LAWECKI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Muriel LE BELLEC

: conseiller faisant fonction de

PRESIDENT DE CHAMBRE

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Nathalie RICHEZ-SAULE

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, conseiller désigné pour exercer les fonctions de président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 03 Janvier 2024

Monsieur [Z] [V] a été engagé à compter du 1er septembre 2012 pour exercer les fonctions d'opérateur de débit, statut employé, qualification 1, coefficient 190 par la société BECK-CRESPEL, société spécialisée dans le secteur d'activité de la mécanique industrielle et notamment dans la fabrication et la distribution de boulonnerie de haute performance, qui emploie plus de 11 salariés.

La convention collective applicable est celle de la convention collective des industries métallurgiques des [Localité 4] (2562 B).

Monsieur [Z] [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille des demandes suivantes:

- Temps d'habillage/ déshabillage (¿ heure par jour) 1.328,09 €

- Congés payés y afférents 132,80 €

- Temps de douche (1/4 heure par jour) 1.328,09 €

- Congés payés y afférents 131,80 €

- Prime de 14ème mois septembre 2015 à septembre 2018 4 606,03 €

- Congés payés afférents au 14ème mois 460,30 €.

- Prime de casse-croûte au titre des congés payés 227,60 €

-Congés payés y afférents 22,77 €

- Prime de casse-croûte au titre de la maladie 435,03 €

- Congés payés y afférents 43,50 €

- Prime de Casse-croûte pendant les RTT 56,84 €

-Congés payés y afférents 5,68 €

-rappels de salaires au titre du minimum conventionnel

à titre principal 1878,20 euros

à titre subsidiaire 1552,66 euros

Congés payés afférents

à titre principal 187,82 euros

à titre subsidiaire 155,26 euros

- Article 700 du code de procédure civile 250 €

Par jugement en date du 18 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Lille a condamné la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [Z] [V] les sommes de

1 328,09 euros à titre de rappel de la prime de déshabillage/déshabillage et de 132,80 euros au titre des congés payés y afférents. Il a débouté Monsieur [Z] [V] de ses autres demandes, a condamné la société BECK-CRESPEL aux dépens ainsi qu'à payer au salarié la somme de 50 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il a débouté la société BECK-CRESPEL de ses demandes reconventionnelles.

Monsieur [Z] [V] a interjeté appel des chefs de dispositif du jugement le déboutant de ses demandes et a présenté des demandes additionnelles en cause d'appel.

La société BECK-CRESPEL a interjeté appel du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer au salarié les sommes de 1 328,09 euros à titre de rappel de la prime de déshabillage/déshabillage et de 132,80 euros au titre des congés payés y afférents et de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile  et en ce qu'il l'a débouté de ses demandes reconventionnelles.

Les deux affaires ont été jointes, par ordonnance du conseiller de la mise en état du 23 février 2022.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 30 mars 2022, Monsieur [Z] [V] demande à la cour de :

-infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Lille du 18 mai 2021, en conséquence, condamner l'employeur à payer à Monsieur [V] les sommes suivantes:

- Temps de douche (1/4 heure par jour) 1.328,09 €

- Congés payés y afférents 132,80 €

- Prime de 14ème mois 4 606,63 €

- Congés payés afférents au 14ème mois 460,66 €.

- Prime de casse-croûte au titre des congés payés 227,67 €

-Congés payés y afférents 22,76 €

-Prime casse-croûte au titre de la maladie 435,03 €

-congés payés y afférents : 43,50 €

-Prime casse-croûte au titre des congés RTT 56,80 euros

-congés payés y afférents 5,68 euros

-rappel minimum conventionnel 1878,20 euros

-congés payés y afférents 187,82 euros

Subsidiairement

minimum conventionnel : 1552,66 euros

Congés payés y afférents : 152,26 euros.

-Condamner l'employeur à payer les sommes suivantes concernant la période de novembre 2018 à juin 2021

temps d'habillage/ déshabillage 1295,78 euros

congés payés y afférents 129,57 euros

temps de douche ¿ d'heure par jour 1295,78 euros

congés payés y afférents 129,57 euros

prime de 14ème mois 4889,40 euros

congés payés y afférents 488,94 euros

prime casse -croûte au titre des congés payés 247,96 euros

congés payés y afférents 24,79 euros

Prime casse -croûte au titre de la maladie 323,99 euros

congés payés y afférents 32,39 euros

Prime casse-croûte au titre des congés RTT 35,25 euros

congés payés y afférents 3,52 euros

rappel minimum conventionnel 959,69 euros

congés payés y afférents 95,96 euros

subsidiairement

minimum conventionnel 757 euros

congés payés y afférents 75,70 euros

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à Monsieur [V] les sommes de 1328,09 euros au titre du temps d'habillage/déshabillage et de 132,80 euros au titre des congés payés y afférents, ainsi que la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-Dire que les créances porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le Bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale, et à compter du prononcé de la décision pour les sommes de nature indemnitaire,

-Condamner l'employeur aux dépens d'appel ainsi qu'à payer la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 novembre 2022, la société BECK CRESPEL demande à la cour de :

Réformer la décision en ce qu'elle a condamné la société SAS BECK CRESPEL à verser à Monsieur [Z] [V] les sommes de 1.328,09 euros à titre de rappel de prime de temps d'habillage/déshabillage, 132,80 € à titre d'indemnité de congés payés y afférents et 50 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le Bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale, et à compter du prononcé de la décision pour les sommes de nature indemnitaire ; débouté la société de ses demandes reconventionnelles au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, ordonné l'exécution provisoire du jugement dans la limite des dispositions de l'article R1454-28 du code du travail et condamné la société BECK CRESPEL aux entiers frais et dépens.

- confirmer la décision sur le surplus en ce qu'elle a débouté Monsieur [O] de ses autres demandes au titre des temps de douche et congés payés y afférents, de la prime de 14ème mois et congés payés y afférents, des primes « Casse-croûte » sur « les congés payés », « RTT », « maladie », « congés d'ancienneté », et les congés payés y afférents,

-Statuant à nouveau uniquement sur les points réformés et y ajoutant :

débouter Monsieur [Z] [V] de ses demandes au titre du temps d'habillage/déshabillage

A titre subsidiaire, réduire dans de plus amples proportions le montant de la condamnation prononcée au titre de l'indemnisation du temps d'habillage/déshabillage, des congés payés y afférents, et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

-Débouter Monsieur [Z] [V] de l'ensemble de ses demandes additionnelles formulées en cause d'appel pour la période de novembre 2018 à juin 2021.

-condamner Monsieur [O] à verser à la société la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile toutes instances confondues, et aux dépens de première instance et d'appel,

A titre subsidiaire, réduire dans les plus amples proportions les demandes formulées par le salarié.

Il convient de se référer aux dernières conclusions des parties régulièrement notifiées par le RPVA pour l'exposé de leurs moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture des débats a été prononcée par ordonnance du 3 janvier 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 24 janvier 2024 et mise en délibéré au 29 mars 2024.

MOTIFS

Sur les contreparties au temps d'habillage et déshabillage

Il résulte de l'article L. 3121-3 du code du travail que lorsque le salarié est astreint au port d'une tenue de travail, en vertu de dispositions légales, conventionnelles, contractuelles ou du règlement intérieur, et qu'il est tenu de s'habiller et de se déshabiller dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, l'employeur doit lui accorder une contrepartie financière ou en repos.

L'employeur n'est tenu d'allouer une contrepartie au temps nécessaire à l'habillage et au déshabillage que si les deux conditions prescrites par ce texte sont réunies, à savoir l'obligation de porter une tenue de travail, et celle de la revêtir et de l'enlever dans l'entreprise ou sur le lieu de travail.

En l'espèce, il est établi que Monsieur [Z] [V], tenu de travailler en atelier, était astreint, en vertu du règlement intérieur (article 1.1.3), au port d'une tenue de travail composée d'un bleu de travail et d'un équipement de protection individuelle de sécurité (chaussures de sécurité, gants, bouchon d'oreilles) avant toute intervention sur son poste de travail. Le règlement intérieur précisait que le salarié devait se trouver à son poste en tenue de travail aux heures fixées pour le début et la fin de celui-ci.

Par ailleurs, si l'employeur soutient qu'il n'obligeait pas ses salariés à s'habiller et se déshabiller sur le lieu de travail, mais qu'au contraire, ces derniers étaient libres d'effectuer ces opérations où bon leur semblait, il ressort des pièces que, Monsieur [Z] [V] effectuait en sa qualité d'opérateur de débit des travaux salissant, l'exposant à des projections de fluides de coupe, et vapeurs de ces produits chimiques, que les protections installées sur les machines ne suffisaient pas à éviter en totalité, et qu'il était tenu pour des raisons de sécurité de porter des chaussures spécifiques. Il était en effet notamment tenu de maintenir en état les machines, de marquer les pièces, et de traiter les non-conformités.

L'obligation pour le salarié de mettre et enlever la tenue sur le lieu de travail résultait des conditions dans lesquelles il exerçait son activité qui lui imposaient pour des raisons d'hygiène et de sécurité de ne pas porter sa tenue de travail à l'extérieur de l'entreprise.

D'ailleurs la société BECK-CRESPEL l'a elle -même admis puisqu'elle a conclu le 4 février 2022 avec les représentants syndicaux CGT et UNSA un accord d'entreprise au terme duquel est prévu au titre de l'habillage/déshabillage une prime d'habillage correspondant à la prise en compte d'un temps d'habillage de 6 minutes par jour travaillé (3 en début, et 3 en fin de poste), payable à compter du mois de mars 2022.

En conséquence, la demande de Monsieur [V] est fondée.

La société BECK-CRESPEL soutient que l'évaluation de la contrepartie financière sollicitée par Monsieur [Z] [V] est trop élevée, mais ne propose pas d'autres éléments de calcul. Cependant, compte tenu de l'accord précité qui évalue le temps d'habillage/déshabillage à 6 minutes, il convient de réduire ce temps à la moitié du temps réclamé, et d'octroyer à Monsieur [Z] [V] la somme de 760 euros à ce titre pour la période allant du mois de septembre 2015 à septembre 2018, et la somme de 76 euros au titre des congés payés y afférents, ainsi que la somme de 648 euros à ce titre pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre la somme de 64,8 euros au titre des congés payés y afférents.

Sur le rappel de primes pour le temps de douche

L'article R 4228-8 du code du travail prévoit que « Dans les établissements où sont réalisés certains travaux insalubres et salissants, des douches sont mises à la disposition des travailleurs.

La liste de ces travaux ainsi que les conditions de mises à disposition des douches sont fixées par arrêté des ministres chargés du travail ou de l'agriculture et, en tant que de besoin, par le ministre chargé de la santé.

Cette liste déterminant les travaux et les conditions de mise à disposition des douches a été fixée par arrêté du 23 juillet 1947 modifié par arrêté du 6 décembre 1999 » .

Par ailleurs , le décret du 28 juin 2011 dans son article 2, prévoit que « Dans chaque entreprise, la liste des salariés intéressés par les travaux énumérés à l'article 1er (soit ceux pour lesquels les chefs d'établissements sont tenus de mettre des douches journalières à la disposition du personnel effectuant les travaux énumérés aux tableaux I et II annexés à l'arrêt de 1947) sera établie par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, par les délégués du personnel en accord avec le chef d'entreprise ».

L'article 3 du même décret ajoute que « le directeur départemental du travail et de la main-d''uvre pourra, après avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou à défaut, des délégués du personnel, dispenser le chef d'établissement de l'obligation imposée par l'article 1er, lorsque les travaux visés s'effectueront en appareil clos ».

Enfin, aux termes des dispositions de l'article R 3121-1 du code du travail, « En cas de travaux insalubres et salissants, le temps passé à la douche en application de l'article R 4228-8 est rémunéré au tarif normal des heures de travail sans être pris en compte dans le calcul de la durée du travail effectif ».

Parmi les tâches énumérées par l'arrêté du 23 juillet 1947 modifié par arrêté du 6 décembre 1999 sont compris les travaux d'usinage comportant un contact permanent avec les fluides de coupe.

Monsieur [Z] [V] estime qu'il effectue de tels travaux, visés par l'arrêté du 23 juillet 1947.

Cependant, la société BECK-CRESPEL soutient que les machines sur lesquels il travaille comportent des capots de protection, et qu'il porte un équipement individuel de protection. Or, Monsieur [Z] [V] ne démontre qu'il resterait en dépit de ces équipements, soumis de manière permanente aux fluides de coupe.

Il n'est en outre pas allégué que conformément au décret précité du 28 juin 2011, son nom figure sur la liste des salariés établie par le comité d'hygiène et de sécurité.

En conséquence, Monsieur [Z] [V] sera débouté de ses demandes d'indemnisation des temps de douche.

Sur la prime du 14ème mois

Les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d'accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives sont présumées justifiées et qu'il appartient alors à celui qui les conteste de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

Il en va différemment lorsque la différence a sa source dans une décision unilatérale de l'employeur ou dans un usage parce que la justification tenant à l'importance reconnue à la négociation collective comme source normative est en ce cas absente.

Dans cette hypothèse, celui qui entend justifier cette différence doit établir qu'elle repose sur des raisons objectives et pertinentes, étrangères à toute discrimination illicite.

En l'espèce, il est établi qu'une prime de 14 ème mois était versée aux cadres mais également à certains agents de maîtrise. En admettant que les cadres ne soient pas placés dans une situation identique aux non-cadres, il incombait alors à l'employeur d'établir que ceux des agents de maîtrise auxquels elle versait la prime étaient dans une situation identique, à l'égard des fonctions accomplies, à celle des cadres et différente de celle des ouvriers et employés qui ne percevaient pas la prime.

En effet, dès lors que le critère d'attribution de cette prime ne tenait pas à la différence entre d'une part, les salariés cadres, agents de maîtrise et d'autre part, les ouvriers, en sorte que le salarié se trouvait, au regard de l'avantage considéré, dans la même situation que celle des salariés auxquels il se comparait, la différence de traitement constatée, devait reposer sur des raisons objectives.

Or , l'employeur ne justifie d'aucune raison objective expliquant cette différence de traitement mais indique que cette prime du 14 ème mois a été supprimée à compter du 1er janvier 2015, plus aucun salarié n'en bénéficiant à compter de cette date, ce qui n'est pas contesté.

Monsieur [Z] [V] fait cependant valoir à cet égard que la dénonciation d'un usage n'est régulière que si les représentants du personnel n'en sont pas informés, et qu'elle encourt au surplus la nullité si le motif ayant conduit à la décision de dénonciation est illicite ou porte atteinte aux droits des salariés. Cependant il ne ressort pas des pièces que l'usage ait été dénoncé de manière irrégulière, les représentants du personnel ayant signé l'accord de dénonciation, ni pour un motif illicite ou en méconnaissance des droits des salariés, cette preuve ne pouvant résulter de la condamnation de l'employeur à payer une telle prime à un salarié. En conséquence, Monsieur [Z] [V] sera débouté de sa demande en paiement de rappel de prime du 14ème mois.

Sur la prime casse-croûte

Prime pendant les congés payés

Il n'est pas contesté que la prime casse croûte correspond à la rémunération forfaitaire des temps de pause (20 minutes) en application de l'accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail.

Cette prime constitue en conséquence un élément de rémunération qui entre dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés. La société BECK-CRESPEL ne le conteste pas mais indique que depuis 2015, la prime casse croûte est prise en compte dans l'indemnisation des congés payés, et que la situation a été régularisée.

Cependant, il ressort des bulletins de versées aux débats que la prime casse- croûte n'a pas été versée pendant les jours de congés payés de sorte que Monsieur [Z] [V] est bien fondé en sa demande. La société BECK-CRESPEL sera condamnée à lui payer la somme de 227,67 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 22,76 euros, et la somme de 247,96 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 24,79 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la prime casse croûte pendant les congés maladie

La convention collective des industrie métallurgiques des [Localité 4] prévoit en son article 10.2.10 qu'en cas d'arrêt maladie, ou accident du travail, le salarié reçoit la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué de travailler pendant 45 jours. De même il n'est pas contesté que l'accord d'annualisation du temps de travail de l'entreprise prévoit la garantie de la rémunération comme si le salarié avait travaillé.

Dès lors qu'il est établi que la prime casse croûte fait partie intégrante de la rémunération du salarié, celle-ci doit donc lui être versée pendant les congés maladie du salarié. Or, il ressort des bulletins de de salaires versés aux débats que tel n'a pas été le cas. En conséquence, la société BECK-CRESPEL sera condamnée à lui payer la somme de 435,03 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 43,50 euros, et la somme de 323,39 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 32,33 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la prime casse-croûte sur congés RTT

Dès lors qu'il ressort des bulletins de salaires de paie que la prime de casse croûte n'a pas été versée au salarié de manière systématique pendant les jours de congés du salarié, et notamment pendant ses congés RTT, il sera fait droit à la demande du salarié, et la société BECK-CRESPEL sera condamnée à payer à Monsieur [V] la somme de 56,84 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 5,68 euros, et la somme de 35,25 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 3,52 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la demande de rappels de salaires au titre du minimum conventionnel

Aux termes de l'article 9.2.1 « La classification et le barème des salaires minima des mensuels figurent en annexe;

Dans le champ d'application de la présente Convention collective, les rémunérations minimales hiérarchiques des ouvriers déterminées par accord collectif territorial sont majorées de 5% dans les conditions suivantes:

Le barème territorial devra distinguer, d'une part, les rémunérations minimales hiérarchiques et, d'autre part, la majoration s'ajoutant à celles applicables aux ouvriers.

Toutefois, sur le bulletin de paie d'un ouvrier, l'employeur pourra n'indiquer que le montant total des garanties de rémunération minimale découlant de l'application des dispositions du présent article, montant qui servira de base de calcul à la prime d'ancienneté susceptible d'être due à l'intéressé".

L'article 9.2.1 bis de de la convention collective des industrie métallurgiques de [Localité 4] prévoit :

« Pour l'application des rémunérations minimales hiérarchiques ainsi adoptées, il sera tenu compte de l'ensemble des éléments bruts de salaires quelles qu'en soient la nature et la périodicité , soit de toutes les sommes brutes figurant sur le bulletin de paye mensuel et supportant les cotisations en vertu de la législation de la sécurité sociales à l'exception des éléments suivants :

prime d'ancienneté prévue par la convention collective territoriale des industries métallurgiques applicable ou par l'accord national sur la mensualisation du 10 juillet 1970 modifié ;

-primes et gratifications ayant un caractère exceptionnel et bénévole,

En application du principe défini à l'alinéa 1 du présent article, seront exclues de l'assiette de vérification :

-les participations découlant de la législation sur l'intéressement et n'ayant pas le caractère de salaire,

-les sommes, qui constituant un remboursement de frais, ne supportent pas de cotisations en vertu de la législation sociale ».

Les différents accords de salaire des années 2014 et suivants, pris en application de la convention collective stipulent dans leur article 1.1 que « les barèmes des taux effectifs annuels (TEGA) valables pour l'ensemble de l'année civile à partir de l'année 2014 (2016,2017, 2018, 2019, 2020) fixent, pour chaque niveau et échelon de la classification résultant de l'accord national du 21 juillet 1975 modifié , la rémunération annuelle brute au -dessous de laquelle aucun mensuel ne peut être rémunéré pour une durée hebdomadaire de travail effectif de 35 heures ».

L'article 2.2 des avenants indiquent que tous les mensuels, à l'exception des titulaires d'un contrat de travail régi par des dispositions spécifiques en matière de rémunération bénéficient de la garantie instituée par l'article 1.1 des accords.

L'article 2.3 stipule que « pour vérifier si un Mensuel a bénéficié sur l'ensemble de l'année 2014 d'une rémunération brute au moins égale pour l'horaire considéré aux garanties constituées par le présent accord, il sera tenu compte des éléments définis par l'article 9.2.1 bis de la convention collective des industries métallurgiques des [Localité 4] ainsi que des indemnités représentant tout ou partie des compensations salariales de la réduction d'horaire que les entreprises ont, le cas échéant, instituée notamment au titre de la réduction du temps de travail et ce même, si cette indemnité figure à part sur le bulletin de paie... ».

Il résulte de ces stipulations conventionnelles, que pour vérifier si le salarié a bénéficié d'une rémunération mensuelle brute au moins égale à la rémunération minimum conventionnelle, doivent être prises en compte les primes vacances, les primes assiduité ainsi que le 13ème mois.

Il ressort aussi des différents avenants que la rémunération conventionnelle minimum est annuelle et fixée pour l'année civile concernée, indépendamment de la date de l'arrêté d'extension de l'avenant.

Compte tenu de ces éléments, au regard des bulletins de salaires du salarié, et de la rémunération annuelle conventionnelle minimum fixée pour chaque année civile, 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, et 2020, il apparaît que Monsieur [V] a bénéficié d'une rémunération annuelle au moins égale à la rémunération minimale conventionnelle. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur les intérêts légaux

Il convient de rappeler que les intérêts légaux courent à compter de la saisine du bureau de conciliation pour les créances salariales, et à compter de la décision pour les créances indemnitaires.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu de l'issue du litige, la société BECK-CRESPEL sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société BECK-CRESPEL à payer au salarié une somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure. Il n'est pas inéquitable de condamner la société BECK-CRESPEL à payer à la salarié une somme supplémentaire de 250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel .

PAR CES MOTIFS

La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

-confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [V] de ses demandes au titre de la prime de douche, au titre de la prime du 14ème mois, et au titre du rappel de salaire sur le minimum conventionnel et en ce qu'il a condamné la société BECK-CRESPEL aux dépens, ainsi qu'à payer au salarié une somme de 50 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-infirme le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Lille du 18 mai 2021 pour le surplus,

-condamne la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [Z] [V] au titre de la prime habillage/déshabillage la somme de 760 euros à ce titre pour la période allant du mois de septembre 2015 à septembre 2018, et la somme de 76 euros au titre des congés payés y afférents, ainsi que la somme de 648 euros à ce titre pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre la somme de 64,8 euros au titre des congés payés y afférents,

-condamne la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [V] au titre de la prime casse-croûte pendant les congés payés la somme de 227,67 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 22,76 euros, et la somme de 247,96 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 24,79 euros au titre des congés payés afférents,

-condamne la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [V] au titre de la prime casse-croûte pendant les congés maladie, la somme de 435,03 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 43,50 euros, et la somme de 323,39 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 32,33 euros au titre des congés payés afférents,

-condamne la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [V] au titre des congés payés RTT la somme de 56,84 euros pour la période de septembre 2015 à septembre 2018 outre 5,68 euros, et la somme de 35,25 euros pour la période postérieure jusqu'au mois de juin 2021, outre 3,52 euros au titre des congés payés afférents,

-rappelle que les intérêts légaux courent à compter de la saisine du bureau de conciliation pour les créances salariales, et à compter de la décision pour les créances indemnitaires,

-condamne la société BECK-CRESPEL à payer à Monsieur [V] la somme supplémentaire de 250 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-Condamne la société BECK-CRESPEL aux dépens d'appel.

le greffier

Serge LAWECKI

le conseiller désigné pour exercer

les fonctions de président de chambre

Muriel LE BELLEC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 21/01052
Date de la décision : 29/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-29;21.01052 ?
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