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07/03/2024 | FRANCE | N°21/04739

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 07 mars 2024, 21/04739


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 07/03/2024





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/04739 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2MK



Jugement (N° 19/07477)

rendu le 17 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANTS



Madame [H] [R]

née le 22 juillet 1986 à [Localité 6]

et

Monsieur [D] [S]

né le 03 août 1989 à [Localité 8]


[Adresse 1]

[Localité 4]



représentés par Me Stéphane Bessonnet, avocat au barreau de Lille, avocat constitué



INTIMÉE



La SELAS MJS Partners agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Renov Express

a...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 07/03/2024

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/04739 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2MK

Jugement (N° 19/07477)

rendu le 17 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANTS

Madame [H] [R]

née le 22 juillet 1986 à [Localité 6]

et

Monsieur [D] [S]

né le 03 août 1989 à [Localité 8]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentés par Me Stéphane Bessonnet, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

La SELAS MJS Partners agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Renov Express

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 3]

défaillant, à qui l'assignation en reprise d'instance a été signifiée le 13 juillet 2023 à l'étude d'huissier

DÉBATS à l'audience publique du 07 décembre 2023, tenue par Bruno Poupet magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Céline Miller, conseiller

ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 mars 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 28 août 2023

****

Par acte du 23 juin 2016, Mme [H] [R] et M. [D] [S] ont acquis un appartement situé [Adresse 2] à [Localité 7], dans un immeuble en copropriété comprenant cinq lots.

Souhaitant y faire réaliser une toiture terrasse, ils ont sollicité les services de la société France Renov Express, laquelle a établi, le 26 mai 2017, un devis de 53'097'euros TTC.

Le 8 juin 2017, ils ont accepté ce devis, qui comportait la mention «'sous réserve de l'accord de la copropriété (jusque fin septembre 2017)'», en portant eux-mêmes à la main : «'sous réserve d'accord écrit des copropriétaires avant le 30 septembre 2017'».

Le 16 août 2017, ils ont remis à la société France Renov Express un chèque de 15'929'euros TTC.

L'opération ne s'est pas faite et par acte du 2 octobre 2019, Mme [R] et M.'[S] ont fait assigner la société France Renov Express devant le tribunal de grande instance de Lille afin d'obtenir sa condamnation à leur rembourser la somme versée, outre des dommages et intérêts, en faisant valoir que la condition suspensive tenant à l'accord écrit des autres copropriétaires se s'était pas réalisée.

Par jugement du 17 juin 2021, le tribunal judiciaire de Lille :

- les a déboutés de leurs demandes,

- a déclaré la société France Renov irrecevable en sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour comportement contractuel déloyal,

- a condamné in solidum Mme [R] et M. [S] aux dépens et à verser à la société France Renov Express la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [R] et M. [S] ont interjeté appel de ce jugement et, aux termes de leurs dernières conclusions remises le 31 mai 2022, demandent à la cour, au visa des articles 1103 et 1304 alinéa 2 du code civil, de l'infirmer et de condamner la société intimée à leur payer les sommes de :

- 15 928,99 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 14 mai 2018,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et vexatoire,

- 5 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles,

- 2 000 euros en remboursement de la somme versée au titre de l'exécution du jugement dont appel,

ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions du 1er mars 2022, la société France Renov Express a pour sa part demandé à la cour, au visa des articles 8 et 25 de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 1103, 1112-1, 1231-1, 1304-6 et suivants du code civil, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner solidairement les appelants à lui verser 4 500 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et dilatoire ainsi que 3 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, outre les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Le tribunal de commerce de Lille ayant, depuis lors, prononcé la liquidation judiciaire de cette société, Mme [R] et M. [S] ont appelé en cause son liquidateur, la SELAS MJS Partners, par acte du 13 juillet 2023, laquelle n'a pas constitué avocat.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé de leur argumentation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L'article 1304-6 du même code dispose notamment que l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive ; qu'en cas de défaillance de la condition suspensive, l'obligation est réputée n'avoir jamais existé.

L'article 1304-3 précise que la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.

M. [S] et Mme [R] font valoir que la condition suspensive a défailli dès lors qu'ils n'ont pas obtenu l'accord écrit de tous les copropriétaires.

Cependant, ils versent eux-mêmes aux débats un courriel qu'ils ont adressé le 4 septembre 2017 à M. [C], de la société France Renov Express, ainsi rédigé : «'Suite à notre conversation téléphonique de ce jour, je vous confirme notre souhait de ne pas poursuivre le projet de modification de notre toiture'», ainsi qu'une lettre du 3 octobre 2017, soit un mois plus tard, dans laquelle ils écrivaient «'Comme indiqué à M. [C] par téléphone le 4 septembre 2017 et confirmé par écrit ce même jour, nous vous confirmer (sic) notre souhait de renoncer à la poursuite du projet'» et proposaient « d'échanger'» sur la suite à donner à leur dossier.

Il n'était donc pas question, alors, d'une impossibilité de concrétiser le projet faute d'obtention de l'accord des autres copropriétaires.

Ce n'est que par une lettre recommandée de leur conseil à l'intimée en date du 14 mai 2018 qu'ils se sont prévalu d'une telle circonstance.

En outre, s'ils ont accepté le devis par la formule manuscrite «'Bon pour accord le 08/06/17, sous réserve d'accord écrit des copropriétaires avant le 30/09/17'», la formule figurant dans le devis est «'sous réserve de l'accord de la copropriété'». Dès lors qu'ils insistent dans leurs conclusions sur le fait qu'ils sont ignorants en matière juridique, on ne saurait considérer qu'ils ont voulu modifier les termes de la condition suspensive mais plutôt que leur formule résulte d'une maladresse, étant observé que la formule rédigée par la société n'a pas été barrée et s'imposait, pour la régularité de l'opération, eu égard au caractère d'ordre public des dispositions de la loi du 10 juillet 1965 relatives à la prise de décisions au sein d'une copropriété.

L'article 25 de cette loi dispose que ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant (...) l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci.

Or, il n'est pas contesté par les appelants qu'ils n'ont pas demandé l'inscription de la demande d'avis sur leur projet à l'ordre du jour d'une assemblée générale de copropriétaires ni sollicité, le cas échéant, la convocation d'une assemblée générale à cette fin, la circonstance que la copropriété ait été alors gérée de façon plus ou moins informelle par un syndic bénévole n'étant pas susceptible de justifier une dérogation à la loi.

Au demeurant, il convient d'observer que la réserve, manuscrite, de l'accord écrit des copropriétaires'est imprécise dès lors qu'elle ne permet pas de savoir si l'accord attendu devait être donné à l'unanimité ou à la majorité (et laquelle, par personne ou par tantièmes), ce qui confirme la nécessité de se référer aux dispositions de la loi. Les appelants ne peuvent donc se prévaloir utilement du refus des propriétaires de l'un des lots et, à cet égard, l'attestation du syndic bénévole susvisé, en date du 16 septembre 2019, selon laquelle M.'[S] et Mme [R] ont organisé une réunion d'information mais «'n'ont pas obtenu d'accord écrit de'l'ensemble des copropriétaires'» et la lettre du 30 juin 2020 censée émaner de M.'et Mme [P], propriétaires d'un lot, faisant état de leur refus, sont inopérants, indépendamment de la faiblesse de leur caractère probant qu'a soulevée le tribunal compte tenu de leur tardiveté. Enfin, si les appelants produisent un courriel du 25 juin 2017 par lequel ils adressaient aux autres copropriétaires un dossier de présentation du projet et ajoutaient «'nous aurions besoin d'un retour de votre part d'ici la fin du mois de juillet pour nous organiser avec l'entreprise de travaux'», ils ne démontrent nullement avoir sollicité une réponse sous une forme précise ni avoir relancé leurs voisins alors qu'ils ne produisent aucune réponse écrite.

Il en résulte que, même à supposer que la présentation de l'abandon du projet comme un souhait de M. [S] et Mme [R] procède d'une maladresse de rédaction, la condition suspensive a, en tout état de cause, défailli par leur faute et doit être considérée comme accomplie, et le contrat définitif.

Dans les deux hypothèses, renoncement de leur part ou condition suspensive tenue pour accomplie, c'est à bon droit que la société France Renov Express a refusé de restituer la somme versée que le contrat stipule expressément comme un acompte et non des arrhes, de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement.

Néanmoins, l'appel est un droit et la confirmation du jugement en l'espèce ne saurait suffire pour qualifier d'abusif et dilatoire l'appel de Mme [R] et M. [S] qui est argumenté à défaut de l'être pertinemment.

En revanche, il appartient à ces derniers, partie perdante, de supporter la charge des dépens et de leurs autres frais. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile nonobstant la situation économique de la société ayant conduit à sa liquidation.

PAR CES MOTIFS

La cour

confirme le jugement entrepris,

déboute la société France Renov Express de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif et dilatoire,

déboute les parties de leurs demandes d'indemnités pour frais irrépétibles,

condamne in solidum Mme [H] [R] et M. [D] [S] aux dépens.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 21/04739
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;21.04739 ?
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