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07/07/2023 | FRANCE | N°23/00029

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale d salle 1, 07 juillet 2023, 23/00029


ARRÊT DU

07 Juillet 2023







N° 1059/23



N° RG 23/00029 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UVSK



PN/NB

































Ordonnance de référé

Conseil de Prud'hommes Lille

en date du

27 Décembre 2022

(RG 22/00157)







































GROSSE :

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aux avocats



le 07 Juillet 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



S.A. PROXISERVE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Guillaume GHESTEM, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE :



M. [U] [J]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Yann LEUPE, ...

ARRÊT DU

07 Juillet 2023

N° 1059/23

N° RG 23/00029 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UVSK

PN/NB

Ordonnance de référé

Conseil de Prud'hommes Lille

en date du

27 Décembre 2022

(RG 22/00157)

GROSSE :

aux avocats

le 07 Juillet 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

S.A. PROXISERVE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Guillaume GHESTEM, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

M. [U] [J]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Yann LEUPE, avocat au barreau de DUNKERQUE

DÉBATS : à l'audience publique du 15 Juin 2023

Tenue par Pierre NOUBEL

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 25 mai 2023

EXPOSE DU LITIGE ET PRETENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

M. [U] [J] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 janvier 2006 en qualité de technicien chauffage par la société PROXISERVE. Il a été promu responsable de secteur à compter du 1er septembre 2021.

La convention collective applicable est celle des cadres, ingénieurs et assimilés des équipements thermiques.

Le 29 décembre 2021, M. [U] [J] a présenté sa démission à son employeur ; la rupture du contrat de travail a pris effet le 21 février 2022.

Par lettre du 18 février 2022, réitérée le 3 mars 2022, la société PROXISERVE lui a rappelé la clause de non-concurrence et lui a demandé de justifier de sa situation professionnelle.

La société PROXISERVE a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Lille le 21 octobre 2022 afin qu'il soit ordonné à M. [U] [J] de cesser immédiatement toute activité concurrente et d'obtenir sa condamnation à titre provisionnel à lui payer diverses sommes au titre de la répétition de l'indu et à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence.

Vu l'ordonnance de la juridiction prud'homale du 27 décembre 2022, laquelle s'est déclarée compétente pour juger du litige et a :

- dit que M. [U] [J] n'a pas violé la clause de non-concurrence intégrée au contrat le liant à la société PROXISERVE,

- débouté les parties de l'ensemble de leurs prétentions,

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Vu l'appel formé par la société PROXISERVE le 4 janvier 2023,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société PROXISERVE transmises au greffe par voie électronique le 17 mars 2023 et celles de M. [U] [J] transmises au greffe par voie électronique le 2 mars 2023,

Vu l'ordonnance de clôture du 25 mai 2023,

La société PROXISERVE demande :

- de déclarer irrecevable l'appel incident de M. [J] tendant à voire infirmer l'ordonnance déférée en ce que la formation de référé s'est déclarée compétente pour juger du litige et l'a invité à se pourvoir devant la juridiction du fond,

- de débouter M. [U] [J] de ses prétentions,

- infirmer partiellement l'ordonnance déférée en ce qu'elle :

- a dit que M. [U] [J] n'a pas violé la clause de non-concurrence intégrée au contrat le liant à la société PROXISERVE,

- a débouté la société PROXISERVE de l'ensemble de ses prétentions et l'a invité à mieux se pourvoir par-devant les juges du fond,

- a débouté les parties de leurs prétentions fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens,

- de condamner, à titre provisionnel, M. [J] au paiement de :

- 13 680 euros au titre de la répétition de l'indu,

- 25 000 euros au titre des dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence ;

- 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais et dépens.

M. [U] [J] demande :

- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce que la formation de référé s'est déclarée compétente pour juger le litige,

- inviter la société PROXISERVE à se pourvoir devant la juridiction du fond,

- subsidiairement, confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a débouté la société PROXISERVE de toutes ses demandes fins et conclusions,

- en tout état de cause, condamner la société PROXISERVE à lui payer 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande tendant à l'irrecevabilité de l'appel incident de M. [U] [J]

Attendu qu'en application de l'article 914 du code de procédure civile, les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour la caducité ou l'irrecevabilité des conclusions à moins que leur cause ne survienne ne soit révélée postérieurement à la clôture de l'instruction ;

Qu'en l'espèce, l'appelante conclut à l'irrecevabilité de l'appel incident en faisant valoir en substance que l'intimée ne précise aucun moyen de droit ou de fait au sein de ses conclusions au soutien de sa demande d'infirmation de l'ordonnance de première instance ;

Que cependant, ce moyen, visant indirectement à l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée, n'est pas recevable dès lors que ses écritures étaient connues de l'appelante antérieurement à l'ordonnance de clôture ;

Qu'il y sera fait observer que le dispositif des conclusions du salarié répond aux exigences de l'article 954 du code de procédure civile ;

Que la demande de la société PROXISERVE à cet égard doit donc être déclarée irrecevable ;

Sur la violation de l'obligation de non-concurrence

Attendu que selon l'article R.1455-7 du code du travail, la formation de référé peut ordonner l'exécution de l'obligation dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ;

Qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ;

Attendu que la société PROXISERVE qui souligne la validité de la clause de non-concurrence n'est pas remise en cause par [U] [J], fait valoir que ses demandes se voient justifiées par le fait que le salarié a violé son engagement contractuel en travaillant pour une société concurrente, la société Chauffage Services dans le cadre d'un emploi salarié comparable à celui qu'il exerçait en son sein ;

Que M. [U] [J] fait valoir qu'il a parfaitement respecté la clause de non-concurrence qui le liait à la société PROXISERVE, de sorte que la formation de référé de la juridiction prud'homale n'avait pas compétence pour statuer;

Attendu qu'en l'espèce, la clause de non-concurrence litigieuse, dont la validité n'est pas remise en cause est ainsi rédigée :

« La société PROXISERVE est spécialisée dans les travaux d'installation, et de maintenance d'équipements thermiques (plomberie, chauffage, prestations multi-techniques) et de comptage divisionnaire.

Elle évolue sur un marché très concurrentiel où le savoir-faire, la stratégie, les prix, la connaissance des clients et du marché sont des éléments non seulement confidentiels, mais encore déterminants à son fonctionnement, sa pérennité et son avenir.

Les fonctions de Responsable de Secteur que vous êtes amené à exercer vous conduisent à détenir des informations économiques et stratégiques ayant un caractère extrêmement confidentiel et sensible.

En conséquence, afin de protéger les intérêts légitimes de la société, vous serez soumis à la présente obligation de non-concurrence.

Dans ces conditions, postérieurement à la rupture du présent contrat de travail, quelle qu'en soit la cause, y compris la rupture de la période d'essai, vous vous engagez :

- A ne pas exercer, dans le secteur d'activité de la société PROXISERVE, directement ou indirectement, pour votre compte ou pour celui d'un tiers, à quelque titre que ce soit (salarié, mandataire, travailleur indépendant, etc.), toutes fonctions similaires ou comparables à celles que vous exercez au sein de te société PROXISERVE ;

- A ne pas créer, directement ou indirectement, une activité concurrente ou à prendre une participation majoritaire dans le capital d'une entreprise ayant une activité concurrente à celle de la société PROXISERVE.

Est considérée comme une activité concurrente toute activité relative aux travaux (installation et de maintenance d'équipements thermiques et de comptage divisionnaire).

Cette interdiction de non-concurrence est applicable pendant une durée d'un an à compter de la cessation de vos fonctions et limitée à la zone géographique de la région Hauts de France.

En contrepartie de l'interdiction de non-concurrence ci-dessus, l'employeur s'engage à vous verser, après la cessation de vos fonctions et pendant toute sa durée, une indemnité mensuelle égale à 30 % du dernier salaire de base mensuel brut.

Cette contrepartie sera soumise à cotisation sociales et versée trimestriellement durant toute la durée d'application de la clause sur présentation d'un justificatif (attestation Pôle Emploi).

L'employeur pourra toutefois renoncer à l'application de la présente clause et par là même se décharger du paiement de l'indemnité susvisée à l'occasion de la cessation du présent contrat, sous réserve d'une notification à votre égard par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre, au jour de la rupture du contrat de travail et au plus tard /e dernier jour de la période de votre préavis qui suit celle-ci, et en cas de dispense de préavis, au plus tard 15 jours après la date de votre départ effectif de l'entreprise.

Cette notification n'aura pas à être motivée.

En cas de rupture conventionnelle, l'employeur pourra également renoncer à l'application de la présente clause, en la levant au plus tard à la date de la rupture du contrat de travail.

Le non-respect de votre part de cette clause libérera la société de son engagement à vous verser une contrepartie financière. Par ailleurs, la société se réservera expressément le droit de faire ordonner sous astreinte la cessation de l'activité litigieuse et de solliciter l'indemnisation de tout préjudice subi. » ;

Qu'il se déduit de ces dispositions contractuelles que M. [U] [J] avait l'obligation de ne pas exercer des fonctions similaires ou comparables à celles qu'il occupait au sein de la société PROXISERVE, soit en l'espèce celles de responsable de secteur, et ce pendant une durée d'un an, sur le secteur géographique de la région Hauts-de-France ;

Que postérieurement à sa démission auprès de PROXISERVE il a été engagé par une société CHAUFFAGE SERVICES en qualité de « responsable/auditeur qualité et responsable du maintien des certifications » à compter du 19 avril 2022 ;

Que les parties divergent tant dans la réalité des tâches accomplies par M. [U] [J] au sein de la société PROXISERVE que celles réalisées au sein de la société CHAUFFAGE SERVICES ;

Attendu que les sociétés PROXISERVE et CHAUFFAGE SERVICES évoluent dans le même secteur d'activité, de sorte que l'interdiction faite à M. [U] [J] d'exercer toutes fonctions similaires ou comparables à celles de responsable de secteur au sein de la société PROXISERVE est susceptible de lui être opposée, pour autant que l'appelante rapporte la preuve que les nouvelles fonctions du salarié au sein de CHAUFFAGE SERVICES soient assimilables à celle qu'il occupait précédemment auprès de PROXISERVE ;

Que cependant, la fiche de poste de responsable de secteur n'est pas produite aux débats par l'appelante, alors même que l'appelante ne précise pas de façon circonstanciée la teneur des fonctions dévolues au salarié;

Que la production d'une capture d'écran du site TRANSALLEY aux termes duquel M. [U] [J] est désigné en qualité de « responsable », sans autre précision, de l'activité de mise en 'uvre des procès spécifiques à la fois hydrauliques pneumatiques, au surchauffé et vapeur et de la gestion de la maintenance du système ENR ne suffit pas à caractériser en quoi le poste de M. [U] [J] au sein de correspond à celui qu'il occupait auprès de son employeur précédent, en sa qualité de responsable de secteur ;

Que le constat opéré par huissier de justice n'apporte aucune lumière quant à la similitude entre l'emploi précédemment occupé et celui exercé par le salarié au sein de CHAUFFAGE SERVICES;

Qu'il en est de même s'agissant de l'enquête effectuée par un détective privé, aux termes duquel il a été constaté que le salarié entrait dans l'agence de son employeur le 11 mars 2022 entre 7 et 8 heures ainsi que le 28 avril 2022 aux mêmes heures ;

Que dans ces conditions, il y a lieu de dire que les demandes visant à voir dire que M. [U] [J] a violé son obligation de non-concurrence et a déclaré que les agissements de l'intimée ont causé un préjudice à l'appelante se heurtent à une contestation sérieuse ;

Que les demandes formées par la société PROXISERVE ne sauraient aboutir ;

Qu'il y a lieu par conséquent d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce que la formation de référé du conseil de prud'hommes s'est déclarée compétente pour statuer sur le litige ;

Sur les frais irrépétibles

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a dû exposer, tant devant la formation des référés du conseil de prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

DECLARE IRRECAVABLE :

la demande visant à voir déclarer irrecevable l'appel l'incident de M. [U] [J] tendant à voir :

« - infirmer l'ordonnance du conseil de prud'hommes de Lille en ce que la formation de référé s'est déclarée incompétente pour juger du litige,

- invité le demandeur à se pourvoir devant la juridiction du fond »

INFIRME l'ordonnance entreprise,

STATUANT à nouveau,

DIT n'y avoir lieu à référé ,

CONDAMNE la société PROXISERVE aux dépens ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes au titre de leurs frais irrépétibles.

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

LE PRESIDENT

Pierre NOUBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale d salle 1
Numéro d'arrêt : 23/00029
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;23.00029 ?
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