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30/06/2023 | FRANCE | N°20/02123

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 30 juin 2023, 20/02123


ARRÊT DU

30 Juin 2023







N° 1005/23



N° RG 20/02123 - N° Portalis DBVT-V-B7E-THQ6



GG/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

28 Septembre 2020

(RG F 19/00556 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 30 Juin 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



S.A.R.L. LES ARCADES

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Manuel DE ABREU, avocat au barreau de VALENCIENNES





INTIMÉE :



Mme [I] [U]

[Adresse 1]...

ARRÊT DU

30 Juin 2023

N° 1005/23

N° RG 20/02123 - N° Portalis DBVT-V-B7E-THQ6

GG/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES

en date du

28 Septembre 2020

(RG F 19/00556 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Juin 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A.R.L. LES ARCADES

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Manuel DE ABREU, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉE :

Mme [I] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Stephane DOMINGUEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS : à l'audience publique du 01 Février 2023

Tenue par Gilles GUTIERREZ

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 31 Mars 2023 au 30 Juin 2023 pour plus ample délibéré

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, Conseiller et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 11 Janvier 2023

FAITS ET PROCEDURE

La SARL LES ARCADES qui exploite un restaurant a engagé Mme [I] [U], née en 1985, suivant contrat à durée indéterminée à compter du 28/03/2015 en qualité de serveuse, niveau 1 échelon 1 de la convention collective des hôtels, cafés, restaurants.

La période d'essai a été renouvelée le 28/04/2015 pour une durée d'un mois.

Par lettre du 26/10/2015, Mme [U] a interrogé l'employeur quant aux modalités de récupération ou de paiement des heures supplémentaires, chiffrées en moyenne à 42,5 heures par mois.

Par lettre du 09/02/2017, Mme [U] a pris acte de la rupture du contrat de travail aux motifs suivants :

«-travail avec un nombre d'heures excessif : moyenne aux environs de 55 heures non payés en heures supplémentaires pour un contrat d'embauche à 39 heures,

-grand nombre d'heures de repos inférieur à 11 heures entre 2 jours de travail,

-jours fériés non rémunérés,

-congés payés non attribués dans sa totalité,

-pourboires rarement distribués,

-etc... ».

L'employeur a répondu le 13/02/2017 qu'il contestait les motifs de rupture et considérait que la salariée avait démissionné.

Par requête reçue le 23/04/2018, Mme [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Valenciennes pour faire requalifier la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et obtenir le paiement de rappel de salaire et celui d'indemnités au titre de la rupture.

Par jugement du 28/09/2020, le conseil de prud'hommes a :

-dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail du 9 février 2017 entre Mme [I] [U] et la SARL LES ARCADES, prise en la personne de son représentant légal, s'analyse en un licenciement abusif et en conséquence,

-condamné la SARL LES ARCADES, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mame [I] [U] les sommes suivantes :

-7.522,13 € à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires d'avril 2015 à octobre 2016,

-752,21 € au titre des congés payés y afférents,

-1.627 € au titre de rappel de congés payés non pris sur la durée du contrat de travail,

-7.454,58 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

-1.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-organisation de la visite d'embauche,

-733,32 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-1.466,65 € à titre d'indemnité de préavis,

-146,66 € au titre des congés payés y afférents,

-1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-rappelé qu'en application des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail, les condamnations ci-dessus prononcées au titre des rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R.1454-14 et 15 du code du travail sont de plein droit exécutoires par provision dans la limite maximum de 9 mois de salaire, calculé sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, moyenne que le Conseil évalue à la somme de 1.627 €,

-débouté Mme [I] [U] du surplus de ses demandes,

-ordonne en vertu des articles L. 1235-2 et suivants du code du travail, le remboursement par l'employeur au POLE EMPLOI des indemnités chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé par le conseil, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage,

-débouté la SARL LES ARCADES, prise en la personne de son représentant légal, de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamne la SARL LES ARCADES, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens.

Par déclaration reçue le 16/10/2020, la SARL LES ARCADES a régulièrement interjeté appel de la décision précitée.

Selon ses conclusions récapitulatives reçues le 07/07/2021, la SARL LES ARCADES demande à la cour d'annuler le jugement déféré pour défaut de motivation sur le fondement des articles 455 et 458 du code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales,

sur le fond des demandes

-Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :

-dire et juger la demande relative à la non compensation des jours fériés irrecevable et mal fondée

-S'agissant du rappel d'heures supplémentaires d'avril 2015 à octobre 2016:

'infirmer le jugement et débouter Mme [I] [U] de cette demande ;

-S'agissant du prétendu travail dissimulé, infirmer le jugement et débouter Mme [I] [U] de cette demande ;

-S'agissant du rappel de congés payés, infirmer le jugement et débouter Mme [I] [U] de cette demande ;

-s'agissant de l'absence de visite médicale d'embauche, infirmer le jugement et débouter Mme [I] [U] de cette demande ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

'débouter Mme [U] de son appel incident tendant à obtenir la condamnation de la société LES ARCADES au versement des sommes suivantes :

-7.522,13 € brut au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires et les congés payés y afférents,

-1.627,04 € brut au titre du rappel de congés payés non pris,

-7.454,58 € bruts à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

-5.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la visite médicale d'embauche,

-1.200 € au titre de la non compensation des jours fériés,

-SUR LES DEMANDES RELATIVES A LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

A TITRE PRINCIPAL

Infirmer le jugement déféré,

Et statuant à nouveau.

-Constater l'absence de manquements imputables à l'employeur justifiant la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [I] [U] ;

-dire et juger que la prise d'acte de Mme [I] [U] produit les effets d'une démission ;

-débouter purement et simplement Mme [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

-SUBSIDIAIREMENT, si par impossible la cour confirmait le jugement entrepris s'agissant de la requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'infirmer le jugement et statuant à nouveau,

'débouter Mme [U] de ses demandes tendant à obtenir la condamnation de la société LES ARCADES au versement des sommes suivantes :

-10.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-3.254,08 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents

EN TOUT ETAT DE CAUSE

infirmer le jugement et débouter Mme [U] de sa demande d'indemnité procédurale en cause d'appel,

-condamner Mme [I] [U] à lui verser les sommes suivantes :

-2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant des frais irrépétibles exposés en première instance,

-3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, outre les entiers dépens, tant de première instance qu'en cause d'appel.

Selon ses conclusions d'intimée reçues le 13/04/2021, Mme [I] [U] demande à la cour de :

« dire bien jugé, mal appelé »,

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le quantum des sommes allouées,

statuant de nouveau :

-dire que la prise d'acte de rupture du contrat de travail du 9 février 2017 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-en conséquence,

-condamner la SARL LES ARCADES à lui verser les sommes suivantes :

'au titre du rappel de salaire sur les heures supplémentaires d'avril 2015 à octobre 2016: 7.522,13 € bruts, et les congés payés y afférents : 752,21 € bruts,

'au titre du rappel des congés payés non pris sur la durée du contrat de travail : 1.627,04 € bruts,

'au titre de l'infraction de travail dissimulé : 7.454,58 € bruts,

'au titre du non-respect de la visite médicale d'embauche : 5.000 € nets,

'au titre de la non-compensation des jours fériés : 1.200 €,

'au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 10.000 €,

'au titre du préavis : 3.254,08 €, et au titre des congés payés sur préavis : 325,40 €,

'au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 2.000 €,

-ordonner le remboursement des allocations chômage à l'organisme ASSEDIC à la charge de l'employeur dans la limite de 6 mois,

-condamner l'employeur aux entiers dépens.

Par ordonnance du 25/02/2022, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement de Mme [I] [U] de l'incident soulevé dans les conclusions enregistrées par RPVA le 13/04/2021, et constaté également l'acceptation par la SARL les Arcades de ce désistement qui de ce fait est parfait.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 11/01/2023.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère, en vertu de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la demande d'annulation du jugement

L'appelante indique que le jugement entrepris est dépourvu de motivation, la décision ne procédant pas d'une d'une réflexion juridique mais du bon vouloir du signataire.

En vertu de l'article 455 du code de procédure civile, le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date. Le jugement doit être motivé.

Il énonce la décision sous forme de dispositif.

Bien que laconique, le premier juge a motivé sa décision en expliquant, par exemple s'agissant de la prise d'acte, que l'employeur n'apportait aucune contradiction plausible aux éléments fournis par la salariée. Le rappel d'heures supplémentaires est quant à lui justifié par les éléments motivant l'indemnité allouée pour travail dissimulé, ce qui peut être maladroit, mais ne caractérise pas un défaut de motivation. La demande d'annulation du jugement est rejetée.

Sur l'exécution du contrat de travail

-sur la demande de paiement d'heures supplémentaires

L'appelante conteste les tableaux rédigés par la salariée qui ne sont pas contresignés par l'employeur, et y relève des incohérences, notamment des absences pour maladie ou congés payés, indique que les attestations versées aux débats par la salariée sont contestées. Elle se réfère aux bulletins de paie établies à partir de tableaux.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-3 du même code, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Mme [U] verse des tableaux récapitulatifs de ses horaires quotidiens, avec un décompte hebdomadaire des heures supplémentaires non rémunérées, le calcul afférent figurant à ses conclusions. Elle joint plusieurs attestations (d'anciens collègues, Mme [E] et M. [O] ; de son concubin M. [M], et de sa belle-mère Mme [M]).

Dès lors, Mme [U] produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies pour permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments

Pas plus qu'en première instance, l'employeur ne justifie des horaires de la salariée. Les attestations non pertinentes de M. [R], Mme [Y], Mme [J], Mme [F], Mme [G], qui se bornent pour l'essentiel à contester le témoignage de l'ancien chef cuisinier, et à certifier que Mme [U] a été mise « sur le même pied d'égalité que tous les autres employés », ne constituent pas des justifications du temps de travail de Mme [U].

L'employeur verse des feuilles de suivi de temps de travail faisant apparaître le temps de travail contractuel ou mensuel, qui fondent la déclaration faite à son cabinet comptable, mais ne justifient pas des horaires réels de la salariée. En outre, les fiches versées à compter du mois de janvier 2016 comportent une colonne « nombre d'heures de travail hebdomadaire » qui n'est pas renseignée. Enfin ces documents ne comportent aucune indication des heures supplémentaires pouvant être effectuées par les salariés de l'entreprise, dans le contexte d'une activité de restauration.

Il s'ensuit, au regard des éléments produits par la salariée et de l'argumentation respective des parties, que la cour se convainc de la réalité d'heures supplémentaires non rémunérées. Mme [U] n'a pas inclus dans son décompte les période non travaillées du fait d'arrêts de travail. La demande de rappel d'heures supplémentaires doit donc accueillie pour la somme réclamée de 7.522,13 € bruts outre 752,21 € au titre des congés payé y afférents, ainsi que l'a retenu le premier juge. Le jugement est confirmé.

-Sur le travail dissimulé

L'appelante indique que l'élément intentionnel ne peut pas être présumé mais doit être démontré.

L'article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié. L'article L.8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Les bulletins de paie font apparaître le paiement d'heures supplémentaires structurelles de 17,33 heures par mois. L'existence d'un litige relatif au volume d'heures supplémentaires est insuffisant à caractériser à lui seul l'élément intentionnel du délit de travail dissimulé. Il convient donc d'infirmer le jugement. Mme [U] sera déboutée de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé.

-Sur la demande de rappel de congés payés

L'appelante indique que le jugement n'est pas motivé, que les congés acquis ont été rémunérés comme le mentionne le bulletin de paie du 13/02/2017, la salariée ayant bénéficié de ses congés.

Mme [U] indique n'avoir bénéficié que de quatre semaines de congés payés sur une période d'un an et sept mois de travail.

Le bulletin de paie de février 2017 fait apparaître le paiement d'une indemnités de congés payés de 1.512,54 €, dont le paiement n'est pas contesté. En outre, le bulletin de paie d'avril 2016 fait apparaître un solde de 27,5 jours de congés acquis. Contrairement à ce qui est soutenu, c'est bien à l'employeur de veiller concrètement et en toute transparence à ce que le travailleur soit effectivement en mesure de prendre ses congés annuels payés, en l'incitant, au besoin formellement, à le faire, tout en l'informant de manière précise et en temps utile pour garantir que lesdits congés soient encore propres à garantir à l'intéressé le repos et la détente auxquels ils sont censés contribuer, de ce que, s'il ne prend pas ceux-ci, ils seront perdus à la fin de la période de référence ou d'une période de report autorisée. La charge de la preuve à cet égard incombe à l'employeur. Il n'est aucunement justifié de cette information, en sorte que les congés non pris sont dus. La demande en paiement de la somme de 1.627,04 € est fondée. Le jugement sera confirmé, sauf à compléter ce dernier montant.

-Sur la non compensation des jours fériés

Au préalable, la SARL LES ARCADES estime que cette demande est irrecevable en cause d'appel, faute d'appel incident.

En vertu de l'article 548 du code de procédure civile, l'appel peut être incidemment relevé par l'intimé tant contre l'appelant que contre les autres intimés.

Dans le dispositif de ses conclusions, Mme [U] demande à la cour de « confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de VALENCIENNES le 28 septembre 2020 sauf en ce qui concerne le quantum des sommes allouées », et sollicite la condamnation de la SARL LES ARCADES à lui payer « au titre de la non-compensation des jours fériés : 1 200 euros ».

Il se déduit de cette formulation que Mme [U] a formé appel incident du jugement l'ayant débouté de cette prétention. Sa demande est donc recevable. La SARL LES ARCADES sera déboutée de sa fin de non recevoir.

Mme [U] réitère son argumentation de première instance afférente au bénéfice du paiement de jours fériés travaillés indiquant avoir travaillé tous les jours fériés en 2015 et 2016 sans compensation, soit 10 jours fériés.

Il ressort de l'article 26 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants du 30/04/1997 et de l'avenant n°2 du 05/02/2007 relatif à l'aménagement du temps de travail prévoient que le 1er Mai travaillé ouvre droit à une indemnité proportionnelle au moment du salaire correspondant à cette journée (non compris les avantages en nature) pour les salariés payés au fixe, ou une indemnité égale au montant de la répartition du service pour cette journée pour les salariés payés au service.

Pour les autres jours fériés, l'article 26.2 prévoit qu'il est accordé au salarié 5 jours fériés garantis, outre 3 autres jours fériés.

La condition d'ancienneté de un an a été remplie à compter du 28/03/2016.

Mme [U] ne précise pas les jours fériés qu'elle estime non payés ou non compensés. L'examen du tableau récapitulatif et des bulletins de paie versés aux débats font apparaître que le lundi de Pâques (28/03/2016) a été compensé par une demi-journée de repos, le jeudi de l'Ascension a été travaillé (05/05/2016) ainsi que la Fête Nationale le 14/07/2016.

La demande est donc fondée pour 3,5 jours soit 262,35 €. Le jugement est infirmé. La SARL LES ARCADES est condamnée au paiement de cette somme.

-Sur la visite médicale d'embauche

Ainsi que l'indique l'appelante, Mme [U] ne justifie d'aucun préjudice tenant à l'absence d'organisation de visite médicale d'embauche. Le jugement est infirmé et la demande est rejetée.

Sur la rupture du contrat de travail

Il découle de l'article L. 1231-1 du code de travail que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Seul un manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail est de nature à justifier la prise d'acte. Il incombe au salarié d'établir la réalité des faits qu'il invoque à l'appui de sa prise d'acte.

Les griefs démontrés, tenant à l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées, et de jours fériés non compensés, sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. La lettre de prise d'acte du 09/02/2017 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est confirmé.

Sur les conséquences indemnitaires de la rupture

L'indemnité compensatrice de préavis au regard de l'ancienneté de la salariée comprise entre 6 mois et deux ans, est de un mois, soit la somme de 1.466,65 € et de 146,66 € de congés payés afférents. Le jugement est infirmé. Ces sommes sont mises à la charge de la SARL LES ARCADES.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée (1.466,65 €), de son âge (31 ans), de son ancienneté (1 an et 10 mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, Mme [U] ne précisant pas sa situation postérieurement au licenciement, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-53 du code du travail dans sa rédaction applicable une somme plus exactement fixée à la somme de 1.500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnisant le préjudice résultant de la perte de l'emploi.

Ainsi que le fait valoir l'appelante, l'article L1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable dispose que ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives :[...] 3° Au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l'article L. 1235-4, en cas de méconnaissance des articles L. 1235-3 et L. 1235-11.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné le remboursement par la SARL LES ARCADES des indemnités de chômage.

Sur les autres demandes

Succombant la SARL LES ARCADES supporte les dépens d'appel, les dispositions de première instance étant confirmées.

Il est équitable d'allouer à Mme [U] une indemnité de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, les dispositions de première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déboute la SARL LES ARCADES de sa demande d'annulation du jugement et de sa fin de non-recevoir afférente à la compensation des jours fériés,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Valenciennes du 28/09/2020, sauf en ses dispositions relatives à l'indemnité pour travail dissimulé, aux dommages et intérêts pour non-organisation de la visite d'embauche, à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au préavis et au remboursement par l'employeur des indemnités chômage,

Complète le jugement et précise que la SARL LES ARCADES doit payer à Mme [I] [U] la somme de 1.627,04 € au titre de l'indemnité de congés payés,

Infirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Déboute Mme [I] [U] de sa demande au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

Condamne la SARL LES ARCADES à payer à Mme [I] [U] les sommes qui suivent :

-262,35 € de rappel de salaire au titre de la compensation des jours fériés,

-1.466,65 € d'indemnité compensatrice de préavis et 146,66 € de congés payés afférents,

-1.500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute Mme [I] [U] de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'absence d'organisation de visite médicale d'embauche,

Dit n'y avoir lieu au remboursement par l'employeur au Pôle emploi des indemnités de chômage versées à Mme [U],

Condamne la SARL LES ARCADES à payer à Mme [I] [U] une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL LES ARCADES aux dépens d'appel,

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

P/LE PRESIDENT EMPECHE

Le Conseiller

Muriel LE BELLEC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 20/02123
Date de la décision : 30/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-30;20.02123 ?
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