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22/06/2023 | FRANCE | N°21/00473

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 22 juin 2023, 21/00473


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 22/06/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/00473 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TM5T



Jugement rendu le 14 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Douai







APPELANT



Monsieur [T] [H]

né le 13 août 1973 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]



bénéficie d'une aide juridictionne

lle totale numéro 591780022021001387 du 09/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai



représenté par Me Sebastien Petit, avocat au barreau de Douai, avocat constitué



INTIMÉE



Madame [C] [D]

demeurant ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 22/06/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/00473 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TM5T

Jugement rendu le 14 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Douai

APPELANT

Monsieur [T] [H]

né le 13 août 1973 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 591780022021001387 du 09/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai

représenté par Me Sebastien Petit, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

INTIMÉE

Madame [C] [D]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Frédéric Massin, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 16 janvier 2023 tenue par Camille Colonna magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023 après prorogation du délibéré en date du 13 avril 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 juin 2022

****

Suivant certificat de cession du 8 novembre 2014, M. [T] [H], garagiste, a vendu à Mme [C] [D], moyennant 3 000 euros, un véhicule automobile de marque Citroën, immatriculé [Immatriculation 4], mis pour la première fois en circulation en avril 2005.

Faisant état de désordres apparus immédiatement après la vente et se prévalant d'une expertise 'amiable', Mme [D] a fait assigner M. [H] devant le tribunal d'instance de Douai par acte du 11 janvier 2016 aux fins d'obtenir la résolution de la vente et la restitution du prix ainsi que des dommages et intérêts.

Par jugement avant dire droit du 3 août 2016, le tribunal a ordonné une expertise judiciaire dont le rapport a été déposé le 19 février 2020 puis, par jugement réputé contradictoire en date du 14 décembre 2020, a, sous sa nouvelle appellation de tribunal judiciaire :

- prononcé la résolution de la vente,

- condamné M. [H] à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros en remboursement du prix de vente,

- condamné Mme [D] à restituer à M.'[H] le véhicule litigieux à charge pour ce dernier de venir le récupérer à ses frais avancés, une fois réglée la totalité des sommes mises à sa charge,

- condamné M. [H] à payer à Mme [D] les sommes de :

1 789,71 euros au titre des frais d'assurance exposés, avec intérêts légaux à compter de la décision,

2 820 euros au titre du préjudice d'immobilisation, avec intérêts légaux à compter de la décision,

800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

M. [H] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 22 juillet 2021, demande à la cour, abstraction faite de demandes de 'dire' et 'constater' qui ne sont pas de véritables prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, de réformer ladite décision en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de le dispenser de toute condamnation au titre des frais d'assurance et du préjudice d'immobilisation, de lui accorder le bénéfice de délais de paiement les plus larges qui soient pour s'acquitter des sommes mises à sa charge, de dire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts au taux légal et, en tout état de cause, de débouter l'intimée de l'ensemble de ses demandes et de statuer ce que de droit quant aux dépens.

Il soutient principalement qu'en application des articles 1645 et 1646 du code civil, en tant que vendeur qui ignorait l'existence des vices, il ne peut être condamné, en vertu d'une simple présomption de connaissance des vices affectant le véhicule, à l'indemnisation des frais d'assurance et du préjudice d'immobilisation sollicitée par Mme [D].

Au visa de l'article 1343-5 du code civil, il sollicite que lui soient accordés des délais de paiement en considération de la précarité de sa situation.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 8 juin 2021, Mme [D] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de condamner l'appelant au paiement d'une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens.

Elle fait essentiellement valoir que selon la jurisprudence, le vendeur professionnel est présumé, de manière irréfragable, avoir connaissance de l'existence du vice affectant la chose, de sorte que la contestation des sommes réclamées en remboursement du prix de l'assurance et du préjudice d'immobilisation élevée par M. [H] ne peut prospérer.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résolution de la vente, le remboursement du prix et la restitution du véhicule

Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1644 du même code dispose que, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

En l'espèce, aux termes de son rapport, l'expert judiciaire identifie notamment, outre une panne de transmission qu'il ne peut dater, une instabilité moteur au régime ralenti outre des émissions excessives de fumée blanchâtres se dégageant de l'échappement en phase d'accélération, un défaut d'étanchéité des injecteurs n°3 et 4 côté distribution, une neutralisation sauvage du filtre à particules engendrant la perturbation du fonctionnement normal du véhicule, une coupure de l'alimentation électrique du compresseur de climatisation, désordres existants au moment de la vente, non décelables par un profane de l'automobile, rendant le véhicule impropre à son usage et dont le montant des réparations serait supérieur au montant de la transaction.

C'est par des motifs détaillés et pertinents, que la cour adopte, que la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés a été prononcée, de même que les restitutions en découlant, étant observé que M. [H], bien que sollicitant 'la réformation du jugement en toutes ses dispositions', ne soulève aucun moyen ni ne développe aucune critique à l'égard de la résolution de la vente et des restitutions prononcées, de sorte que celles-ci apparaissent implicitement acquises par l'appelant lui-même et seront confirmées.

Sur les demandes indemnitaires de Mme [D]

Aux termes de l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Il est constant que le vendeur professionnel est présumé connaître les vices affectant la chose qu'il vend. Cette présomption est irréfragable.

M. [H] étant donc présumé, en sa qualité de vendeur professionnel, avoir eu connaissance du vice, il est tenu de tous les dommages et intérêts à l'égard de l'acquéreur, et ce, sans qu'il soit besoin de démontrer l'existence d'une faute de sa part dans l'entretien du véhicule ; il est donc indifférent que M. [H] démente en avoir eu connaissance ou que l'expert judiciaire, indiquant qu'il 'est fort probable qu'il avait connaisance de ces défauts et vices qui sont purement techniques', ne soit pas catégorique sur ce point.

En ce qui concerne l'indemnisation des frais d'assurance, Mme [D] en produit les justificatifs (copies des dispositions particulières du contrat d'assurance en date du 19 novembre 2014 et du 16 août 2016 de la société AMV Assurance, réédition en date du 24 février 2020 des avis d'échéance, copie des conditions particulières de la société ACM IARD en date du 7 mai 2019).

C'est par un calcul pertinent que la cour adopte que le tribunal judiciaire de Douai à arrêté le montant des frais d'assurance dont il est justifié à hauteur de 1 789,71 euros pour la période du 9 novembre 2014 au 14 décembre 2020.

En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice d'immobilisation, l'expert judiciaire évalue un tel préjudice depuis 2017 en fonction de la valeur du véhicule et du nombre de jours d'immobilisation à la somme de 2 820 euros TTC. Si M. [H] demande à être dispensé de la condamnation à verser ladite somme à Mme [D], il ne critique, en revanche, ni le montant proposé, ni la méthode de calcul employée. Nonobstant l'effet rétroactif de la résolution de la vente, Mme [D] a nécessairement subi un préjudice lié à l'immobilisation de son véhicule depuis 2017 puisqu'elle n'a pas pu en jouir, préjudice imputable à M. [H]. Par conséquent, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes d'indemnisation des frais d'assurance et du préjudice de jouissance de Mme [D] à hauteur de la somme évaluée par l'expert.

Sur la demande de délai de paiement de M. [H]

Aux termes de l'article 1343-5, alinéas 1 à 3 du code civil, 'le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge'.

En l'espèce, M. [H] produit les pièces suivantes :

- un extrait du site 'procédurecollective.fr' dont il ressort que par jugement du tribunal de commerce de Douai du 10 avril 2018, sa société, Jm Auto, a été placée en liquidation judiciaire,

- son avis d'imposition du 21 janvier 2020 sur les revenus de l'année 2018 faisant apparaître un revenu fiscal de référence nul,

- une attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales datée du mois d'avril 2021 indiquant pour le mois de décembre 2020 le versement à son profit de l'allocation aux adultes handicapés (902,70 euros),

- une attestation sur l'honneur de sa mère en date du 20 mai 2019 certifiant qu'elle héberge son fils.

Mme [D] n'a pas répondu à la demande de délais de paiement de M. [H].

Compte tenu de ces éléments et du bénéfice de l'aide juridictionnelle totale accordée à M. [H] dans le cadre de la présente procédure, celui-ci n'apparaît pas en mesure de payer l'intégralité de la somme due à Mme [D] en un seul versement et il y a lieu de faire droit à sa demande de délai suivant les modalités précisées au dispositif.

Sur les autres demandes

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, M. [H], partie perdante, est tenu au paiement des dépens et doit être condamné à payer à Mme [D] une indemnité procédurale de 800 euros, les chefs du jugement fondés sur ces dispositions devant être confirmés.

PAR CES MOTIFS

La cour

confirme le jugement entrepris,

autorise M. [H] à s'acquitter de sa dette à l'égard de Mme [C] [D], incluant la condamnation en remboursement du prix de vente du véhicule (3 000 euros), l'indemnisation des frais d'assurance (1789,71 euros) et du préjudice de jouissance (2 820 euros) et les indemnités allouées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en 23 mensualités de 350 euros et une dernière mensualité destinée à solder la dette en principal, intérêts et frais,

dit qu'à défaut de paiement d'une seule de ces mensualités, la dette redeviendra immédiatement exigible dans son intégralité,

rappelle que la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier,

condamne M. [T] [H] aux dépens et au paiement à Mme [C] [D] d'une indemnité de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 21/00473
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;21.00473 ?
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