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26/05/2023 | FRANCE | N°21/00615

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale d salle 1, 26 mai 2023, 21/00615


ARRÊT DU

26 Mai 2023







N° 793/23



N° RG 21/00615 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TTBL



PN/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

09 Avril 2021

(RG F18/00265 -section 5)








































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GROSSE :



aux avocats



le 26 Mai 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [W] [T]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Tal LETKO BURIAN, avocat au barreau d'ARRAS





INTIMÉE :



S.A.R.L. ATTILA NORD

[Adresse 1]

[Localité 3]

représent...

ARRÊT DU

26 Mai 2023

N° 793/23

N° RG 21/00615 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TTBL

PN/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

09 Avril 2021

(RG F18/00265 -section 5)

GROSSE :

aux avocats

le 26 Mai 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [W] [T]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Tal LETKO BURIAN, avocat au barreau d'ARRAS

INTIMÉE :

S.A.R.L. ATTILA NORD

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Fabrice VINCHANT, avocat au barreau d'ARRAS

DÉBATS : à l'audience publique du 09 Mars 2023

Tenue par Pierre NOUBEL

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie DOIZE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 16 Février 2023

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

M. [W] [T] a été engagé par la société ATTILA NORD suivant contrat à durée indéterminée en date du 6 janvier 2014, en qualité de chargé d'affaires.

La convention collective applicable est celle du bâtiment.

Par courrier recommandé en date du 31 janvier 2017, M. [W] [T] a reçu un avertissement de la part de son employeur.

M. [W] [T] a été placé en arrêt maladie à compter du 1er février 2017.

A la suite de la visite médicale de reprise en date du 16 novembre 2017, M. [W] [T] a été déclaré inapte par la médecine du travail en ces termes : " capacités restantes : 1) Travail à temps partiel maximum à mi-temps en demi-journées, 2) Contre-indication au travail en hauteur et à la conduite de véhicule, 3) Contre-indication à tout port de charges, 4) Possibilité d'être formé à un poste de type administratif ".

Par courrier en date du 22 novembre 2017, M. [W] [T] a été convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, fixé au 4 décembre 2017.

Suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 décembre 2017, il a été licencié pour inaptitude.

Le 17 septembre 2018, M. [W] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Lens afin :

- de juger qu'il a été victime d'une discrimination en raison de son état de santé et d'une discrimination salariale,

- de contester son licenciement ainsi que son avertissement,

- de juger que la procédure relative à son reclassement n'a pas été respectée,

- d'obtenir paiement de diverses sommes.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes du 19 mars 2021, lequel a :

- jugé la demande d'annulation de l'avertissement du 31 janvier 2017 ainsi que la demande de dommages et intérêts corrélatives introduites par l'instance est irrecevable comme constituant des demandes nouvel1es,

- dit n'y avoir pas lieu à jonction de la présente instance avec l'instance n°191276,

- constaté l'absence d'usage en matière de prime de gratification sur résultat,

- débouté M. [W] [T] de sa demande de rappel de prime de gratification sur résultat au titre de l'usage,

- constaté l'absence de discrimination illicite et l'absence de violation du principe " à travail égal, salaire égal ' ',

- débouté M. [W] [T] de sa demande de dommages intérêt pour discrimination illicite et inégalité de traitement,

- débouté M. [W] [T] de sa demande de complément d'indemnité de licenciement,

- jugé le licenciement de M. [W] [T] pour inaptitude médicale au poste et impossibilité de reclassement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [W] [T] de sa demande de dommages intérêt pour licenciement abusif et de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis,

- condamné la société ATTILA NORD à payer à M. [W] [T] la somme de 1.000 euros à titre de dommages intérêts pour défaut d'information écrite relative aux motifs qui s'opposent au reclassement,

- débouté en équité les parties en ce qui concerne leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir pas lieu à l'exécution provisoire ni aux intérêts judiciaires,

- condamné la société ATTILA NORD aux entiers frais et dépens.

Vu l'appel formé par M. [W] [T] le 5 mai 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de M. [W] [T] transmises au greffe par voie électronique le 2 août 2021 et celles de la société ATTILA NORD transmises au greffe par voie électronique le 28 octobre 2021,

Vu l'ordonnance de clôture du 16 février 2023,

M. [W] [T] demande :

- de juger qu'il a fait l'objet d'une discrimination en raison de son état de santé,

- de juger qu'il a fait l'objet d'une discrimination salariale,

- de juger que la société ATTILA NORD aurait dû lui payer sa gratification sur le résultat pour l'année 2016,

- de juger que la société ATTILA NORD n'a pas respecté son obligation préalable de rechercher une solution de reclassement,

- de juger qu'il n'a pas été réglé de l'intégralité de ses droits au titre de l'exécution comme de la rupture de son contrat de travail,

- de juger qu'il n'a pas fait l'objet d'une information écrite sur les motifs s'opposant à son reclassement,

- de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- de juger que son avertissement notifié le 31 janvier 2017 est injustifié,

- d'annuler son avertissement du 31 janvier 2017,

- d'infirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société ATTILA NORD à lui payer 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral lié à l'absence de délivrance de l'information écrite sur les motifs s'opposant à son reclassement,

- de condamner la société ATTILA NORD à lui payer :

- 3.000 euros bruts au titre de la gratification sur résultat non versée pour l'année 2016,

- 3.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la discrimination dont il a fait l'objet,

- 255,22 euros nets au titre du complément d'indemnité légale de licenciement,

- 12.985,75 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5.194,30 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 519,43 bruts au titre des congés payés y afférents,

- 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral lié à l'absence de délivrance de l'information écrite sur les motifs s'opposant à son reclassement,

- 1.500 euros à titre de dommages et intérêts à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de l'avertissement injustifié,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de juger que les sommes dues au titre des salaires, de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et de l'indemnité de licenciement, porteront intérêts judiciaires au taux légal à compter de la présente demande,

- de juger que les sommes dues au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemnité pour frais non répétibles, porteront intérêts judiciaires à compter de l'arrêt à intervenir,

- de juger que les intérêts dus plus d'une année se capitaliseront pour produire eux-mêmes des intérêts,

- de condamner la société ATTILA NORD aux entiers frais et dépens.

La société ATTILA NORD demande :

- de juger la demande d'annulation de l'avertissement du 31 janvier 2017 ainsi que la demande de dommages et intérêts corrélative totalement irrecevables comme constituant des demandes nouvelles,

- de débouter M. [W] [T] de sa demande d'annulation de l'avertissement du 31 janvier 2017 ainsi que la demande de dommages et intérêts corrélative,

- de confirmer le jugement déféré, sauf en ce qu'il l'a :

- condamné à payer à M. [W] [T] 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information écrite relative aux motifs qui s'opposent au reclassement,

- débouté de sa demande d'indemnité procédurale,

- condamné aux frais et dépens,

Statuant à nouveau :

- de débouter M. [W] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut d'information écrite relative aux motifs qui s'opposent au reclassement,

- de condamner M. [W] [T] à lui payer 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M. [W] [T] aux entiers frais et dépens, en ce compris les frais et dépens de première instance,

- à titre complémentaire, de lui donner acte du versement à M. [W] [T] d'un complément d'indemnité de licenciement d'un montant de 440,08 euros.

SUR CE, LA COUR

Sur la recevabilité de la demande formée par M. [W] [T] relative à l'avertissement du 31 janvier 2017

Attendu qu'aux termes de l'article 70 Article du code de procédure civile, " les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l'absence d'un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l'excès le jugement sur le tout " ;

Attendu qu'en l'espèce, M. [W] [T] a initialement saisi le conseil de prud'hommes le 13 septembre 2018 sur des demandes relatives au non versement d'une gratification, à des de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, comme il en résulte de la lecture du jugement entrepris ;

Que les demandes destinées à voir annuler l'avertissement du 31 janvier 2017 et à obtenir réparation du préjudice y afférent ont été formées postérieurement à la saisine du conseil ;

Qu'elles constituent donc des demandes additionnelles ;

Attendu que leur objet, visant à contester une sanction n'a pas la même nature que les prétentions formées dans le cadre de l'exploit introductif d'instance et n'ont pas de lien suffisant avec elles ;

Qu'il s'ensuit qu'en application des dispositions légales susvisées, celles-ci doivent être déclarées irrecevables ;

Sur la demande au titre de la gratification sur résultat pour l'année 2017

Attendu que les pièces versées au dossier font apparaître que chaque année, les salariés était amenés à percevoir une prime en fonction de leurs performances au cours de l'année  

Que s'il est exact que cette prime revêt un caractère de régularité et de généralité, il n'est pas établi que celle-ci est un caractère fixe :

- alors qu'il apparaît que M. [W] [T] a perçu 2.000 euros pour 2015 et 1601 euros pour 2016, sans qu'il soit établi une corrélation déterminable entre les résultats du salarié pour chaque exercice et le montant de ces gratifications,

-que dans le cadre de son courrier du 26 janvier 2018 adressé au salarié l'employeur a précisé qu'à l'issue de chaque entretien individuel, il décidait de verser ou non une gratification bénévole d'un montant déterminé librement, variant d'un salarié à un autre et d'une année sur l'autre ;

Qu'il s'ensuit que la gratification octroyée par l'employeur ne constitue pas un usage au sens strict du terme ;

Que toutefois, celle-ci constitue, à la lecture du courrier susvisé un engagement unilatéral de l'employeur, qui n'a pas été remis en cause ;

Attendu toutefois que les pièces produites par M. [W] [T] ne démontrent pas en quoi la société ATTILA NORD n'a pris en compte majoritairement et prioritairement les chiffres réalisés par chaque salarié plutôt que leur comportement général et leur aptitude globale à mener à bien leur mission ;

Qu'il s'ensuit que la détermination finale du montant de la prime litigieuse relève du seul pouvoir de direction de l'employeur ;

Attendu que la demande formée par M. [W] [T] est constitutive en réalité d'une demande de dommages intérêts consécutive de l'emploi abusif de ce pouvoir ;

Que ce manquement se résout en des dommages-intérêts ;

Qu'en l'espèce, il résulte du courrier du 26 janvier 2018 que l'employeur justifie le versement de la prime en cause en ces termes :

" En 2017, j'ai reçu chacun des salariés présents en entretien individuel et j'ai décidé de verser les primes au mois de juin 2017. Les salariés présents qui ont bénéficié de cet entretien, ont, dès lors perçu une prime d'un montant variable une nouvelle fois selon les circonstances. Malheureusement, et comme je vous l'ai indiqué, faute d'avoir pu vous rencontrer à l'occasion d'un entretien individuel, aucunes primes ne vous a pas été versée en concomitamment au versement des primes aux autres salariés. Toutefois, comme vous l'avez constaté en prenant connaissance de l'annexe de votre solde de tout compte, j'ai néanmoins décidé de vous verser à titre exceptionnel une prime d'un montant de 150 € bruts. Dans ces conditions, dès lors qu'il s'agit là d'une gratification laissée totalement à ma libre appréciation, et non pas d'un élément de votre rémunération contractuelle, et dès lors que je vous ai versé une prime exceptionnelle d'un montant de 150 € à l'occasion de votre départ de l'entreprise, vous ne pouvez plus rien réclamer d'autres et je suis malheureusement contraint de ne pouvoir faire suite à votre réclamation à ce sujet. " ;

Qu'il ressort des termes de ce courrier que le non versement de la prime puis le paiement limité à 150 euros se voit exclusivement justifié par l'impossibilité pour l'employeur d'avoir procédé à un entretien annuel sans qu'il apparaisse que le montant de la gratification ai été justifiée par un autre motif ;

Que dès lors que l'absence du salarié n'avait pas de caractère fautif, la faiblesse du montant de cette prime au seul motif de l'impossibilité de s'être entretenu avec le salarié revêt un caractère abusif ;

Que la perte d'une chance d'obtenir paiement d'une gratification après débat contradictoire sera réparée par l'allocation de 900 euros ;

Sur les demande de dommages-intérêts pour discrimination

Attendu que conformément aux dispositions de l'article L1132-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison notamment de sa santé ;

Qu'il résulte, en outre, de l'article L1134-1 du même code que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Qu'ainsi, il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence. Il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination étant rappelé que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés ;

Attendu qu'à cet égard, M. [W] [T] réclame le paiement de 3000 € à titre de dommages intérêts en raison de la discrimination dont il a fait l'objet ;

Qu'en l'espèce, le salarié fait valoir en substance qu'il existe un lien de causalité entre son état de santé et la rupture de son contrat de travail, tout en rajoutant, de façon assez contradictoire, que l'employeur n'a pas pris son état de santé au " sérieux " ;

Que toutefois, le fait d'avoir demandé à M. [W] [T] prendre des congés entre deux arrêts maladie et l'affirmation de l'existence de lien susvisé, sans pour autant développer cette argumentation ne suffit pas à considérer que les arguments avancés par l'appelant sont constitutifs d'indices laissant présumer l'existence d'une discrimination en raison de son état de santé ;

Attendu qu'en outre, M. [W] [T] fait valoir que l'employeur a fait 'uvre de différence de traitement dans le cadre du versement de la prime de résultat ;

Que toutefois que les arguments avancés par le salarié, et tout particulièrement le fait que la secrétaire de l'entreprise et bénéficier des largesses financières à cet égard ne suffisent pas à établir l'existence d'une différence de traitement au regard de collègues se trouvant dans une situation d'emploi identique ou pour le moins comparable à la sienne ;

Que dans ces conditions, la demande sera rejetée ;

Sur le bien-fondé du licenciement

Attendu que conformément aux dispositions de l'article L1226-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ;

Que cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté ;

Que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Qu'il appartient à l'employeur qui prétend s'être trouvé dans l'impossibilité d'effectuer un tel reclassement d'en rapporter la preuve. Cette recherche de reclassement doit être mise en 'uvre de façon loyale et personnalisée.

Qu'il s'ensuit que, quoique reposant sur une inaptitude physique d'origine non professionnelle régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement n'est légitime que pour autant que l'employeur aura préalablement satisfait à l'obligation de reclassement mise à sa charge par ce texte ;

Attendu qu'en l'espèce, par courrier du 7 décembre 2017, l'employeur a procédé au licenciement de M. [W] [T] suite à l'avis d'inaptitude du médecin du travail en date du 16 novembre 2017 ;

Que dans de cet avis, faisant suite à une visite effectuée dans le cadre de l'article R.4624-34 du code du travail, Madame le médecin du travail [O] [L] a déclaré l'appelant inapte à son poste, en précisant les capacités restantes suivantes :

- travail à temps partiel maximum à mi-temps en demi-journées,

- contre-indication au travail en hauteur et à la conduite de véhicules,

- contre-indication à tout port de charges,

- possibilité d'être formé à un poste de type administratif ;

Attendu que pour justifier avoir satisfait à son obligation de reclassement, la société ATTILA NORD fait valoir en substance :

-que l'incapacité de conduire des véhicules ne sont pas compatibles avec le poste de chargé d'affaires, celui-ci nécessitant un déplacement constant auprès de la clientèle,

-qu' aucun poste administratif n'était disponible au sein de l'entreprise ,

-qu'il avait eu l'occasion de discuter à plusieurs reprises avec le médecin du travail sur les difficultés de reclassement du salarié au sein de l'entreprise ;

Attendu cependant que nonobstant les démarches effectuées par l'employeur auparavant, l'obligation de reclassement commence à courir à compter de l'avis d'inaptitude ;

Qu'en l'espèce, force est de constater qu'il s'est écoulé un laps de temps de 6 jours entre le constat d'inaptitude et la date de la convocation de M. [W] [T] à l'entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, lequel s'est tenu le 4 décembre suivant, pour une rupture de contrat de travail effectif au 7 décembre 2017

Que pendant ce laps de temps, la société ATTILA NORD ne justifie que de l'envoi de 3 courriers de demandes de reclassements auprès des agences du réseau ATTILA, recherche pour laquelle il n'avait également aucune obligation,

Que si l'employeur soutient qu'auparavant, il avait saisi la médecine du travail de la situation du salarié, force est de constater que les lettres qu'il a envoyées n'avaient pour objet que de contester l'avis d'aptitude du salarié et de souligner son impossibilité de reclasser M. [W] [T] eu égard aux conclusions d'aménagements du médecin du travail ;

Qu'en aucun cas l'employeur ne justifie pas n'a sollicité l'avis au médecin du travail suite à la notification de son avis inaptitude, lequel préconisait la mise en place d'un mi-temps à temps partiel, en soulignant la possibilité d'être formé un poste de type administratif ;

Attendu que s'il est exact que la société ATTILA NORD est une petite entreprise, il n'en demeure pas moins que la liste des mouvements du personnel de janvier 2011 à octobre 2018 fait apparaître qu'il existait au sein de la société deux salariés occupant le poste de chargés de clientèle ;

Qu'il n'apparaît à aucun moment que l'employeur soit interrogé sur les possibilités de modification et de transformation d'emploi, éventuellement dans le cadre d'un horaire beaucoup plus restreint, afin de lui permettre d'occuper un emploi en lien avec celui de chargé d'affaires ;

Que dans cette optique, il n'a pas sollicité ce titre la vie du médecin du travail ;

Que dans ces conditions, même si l'on peut admettre que la tâche était des plus difficiles, il convient néanmoins de considérer, au vu de l'ensemble de ces éléments, que l'employeur ne rapporte pas la preuve d'avoir pleinement satisfait à son obligation de reclassement ;

Que ce manquement a pour conséquence de rendre le licenciement de M. [W] [T] sans cause réelle et sérieuse ;

Que dans ces conditions, la demande formée au titre de l'indemnité de préavis et celles au titre des congés payés y afférents doivent être accueillies à concurrence de 4694,30 euros outre les congés payés y afférents, faute de décompte précis de la part du salarié ;

Que compte tenu du décompte produit par l'employeur, et des sommes versées par ce dernier, qui n'ont pas d'incidence sur l'assiette des sommes dues au titre de l'indemnité de licenciement, la demande réclamée à cet égard n'est pas due ;

Attendu que la cour a les éléments suffisants compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié (celui-ci ayant perçu un salaire de base de 2347,15 euros) de son âge (pour être né en 1959), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son

ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci (moins de 11 salariés), pour fixer le préjudice à 4.000 euros, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour absence d'information écrite sur les motifs s'opposant au reclassement de M. [W] [T]

Attendu que l'employeur ne justifie pas avoir satisfait aux exigences l'article L 1226-2-1 du code du travail ;

Que ce manquement n'a pas permis au salarié de tenir compte de la teneur des informations que la société ATTILA NORD aurait pu lui donner sur les motifs de son impossibilité de reclassement :

Que celui-ci sera réparé par l'allocation de 500 euros ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

-dit la demande d'annulation de l'avertissement du 31 janvier 2017 et la demande de dommages-intérêts y afférents irrecevables,

- débouté M. [W] [T] de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination et inégalité de traitement,

L'INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau,

DIT le licenciement de M. [W] [T] sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société ATTILA NORD à payer à M. [W] [T] :

- 4694,30 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 469,43 euros au titre des congés payés y afférents,

- 4.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 500 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut d'information sur les motifs s'opposant au reclassement du salarié,

- 900 euros au titre de la " gratification sur résultats " pour l'année 2017,

DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,

CONDAMNE la société ATTILA NORD aux dépens de première instance et d'appel,

VU l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société ATTILA NORD à payer à M. [W] [T] :

-2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles,

DÉBOUTE la société ATTILA NORD de sa demande au titre de ses frais de procédure.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRÉSIDENT

Pierre NOUBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale d salle 1
Numéro d'arrêt : 21/00615
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-26;21.00615 ?
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