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26/05/2023 | FRANCE | N°20/01303

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale c salle 3, 26 mai 2023, 20/01303


ARRÊT DU

26 Mai 2023







N° 759/23



N° RG 20/01303 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TAPO



GG/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

26 Mai 2020

(RG F 19/00112 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 26 Mai 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



S.A.S. STOCKOVER

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Judith OZUCH, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉ :


...

ARRÊT DU

26 Mai 2023

N° 759/23

N° RG 20/01303 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TAPO

GG/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

26 Mai 2020

(RG F 19/00112 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 26 Mai 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A.S. STOCKOVER

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Judith OZUCH, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. [H] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par M. [I] [W] (Défenseur syndical)

DÉBATS : à l'audience publique du 18 Janvier 2023

Tenue par Gilles GUTIERREZ

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

Le prononcé de l'arrêt a été prorogé du 31 Mars 2023 au 26 Mai 2023 pour plus ample délibéré

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, Conseiller et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 28 Décembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

La SAS STOCKOVER assure une activité d'acquisition et de vente en gros d'appareils électroménagers. Elle a engagé par contrat à durée déterminée à temps partiel du 17/09/2015 M. [H] [B], né en 1985, dans le cadre d'un contrat initiative emploi, en qualité d'employé, niveau I, échelon I de la convention collective des commerces de gros.

Il convient de préciser que le frère du salarié, M. [L] [B], est associé de la société à hauteur du tiers du capital.

La relation de travail s'est poursuivie aux mêmes conditions par contrats des 22/03/2016 et du 01/08/2016, par avenant du 01/12/2016, puis pour une durée indéterminée selon avenant du 07/11/2017.

Les parties ont convenu d'une rupture amiable par convention du 23/01/2019.

Estimant la rupture abusive, M. [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Lens, par requête reçue le 04/04/2019 de diverses demandes indemnitaires relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 23/03/2020, le conseil de prud'hommes a :

-jugé que la rupture conventionnelle de M. [H] [B] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-condamné la SAS STOCKOVER à verser à M. [H] [B] les sommes suivantes :

-1.662€ net au titre de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

-1.662€ net au titre de défaut de procédure,

-1.345,36 € au titre des rappels de salaire août à novembre 2016,

-134,53 € brut au titre des congés afférents,

-995,22€ brut au titre des rappels de salaire de mars à juin 2016,

-99.52€ brut au titre des congés payés,

-1.244 € brut au titre du préavis,

-124,40 € brut au titre des congés payés afférents,

-6.648 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-500 € net au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-dit que le présent jugement est exécutoire à titre provisoire dans la limite maximum de neuf mois de salaire selon l'article R l454-28 du code du travail et fixé à 1.662 euros bruts la moyenne des trois derniers mots de salaire,

-débouté la SAS STOCKOVER de sa demande reconventionnelle,

-précisé que conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la demande pour toutes les sommes de nature salariale, à compter du prononcé du présent jugement pour toute autre somme,

-condamne la SAS STOCKOVER aux entiers frais et dépens de la présence instance.

Par déclarations du 09/06/2020 et du 10/06/2020, la SAS STOCKOVER a régulièrement interjeté appel de la décision précitée.

Les instances ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 17/06/2020.

Selon ses conclusions d'appelant reçues le 05/08/2020, la SAS STOCKOVER demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :

-constater, dire et juger que la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. [H] [B] résulte d'une volonté commune exempte de tout vice de consentement,

-constater, dire et juger que la procédure de rupture du contrat de travail de M. [H] [B] a été parfaitement respectée,

-constater, dire et juger que la mention du volume horaire hebdomadaire ou sein des contrats de travail à durée déterminée à temps partiel de M. [H] [B] est conforme aux exigences des articles L.1242-12 et L3123-6 du code du travail,

-constater, dire et juger que l'action en requalification des contrats de travail de M. [H] [B] est prescrite,

En conséquence,

-débouter M. [H] [B] de l'ensemble de ses demandes,

En tout état de cause,

-condamner M. [H] [B] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens en ce compris ceux de première instance.

Selon ses conclusions reçues le 08/10/2020, M. [B] demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire et juger que la rupture conventionnelle repose sur du harcèlement moral aux torts de l'employeur et est un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en conséquence condamner la SAS STOCKOVER aux sommes qui suivent :

-1.662€ net à titre de requalification,

-1.662€ net à titre de défaut de procédure,

-995,22€ à titre de rappel de salaire du 1er contrat et CP 99,52 €,

-1.345,36 € à titre de rappel de salaire du 2ième contrat et CP 134,54 €,

-6.648 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-3.324 € à titre d'indemnité de préavis, et les CP attenant 332,40 €,

-2.200 € net au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-dire que les sommes allouées au titre de salaire et accessoires de salaire porteront intérêt légal à compter de la demande et pour les autres au prononcé du jugement,

-condamner la SAS STOCKOVER en tous frais et dépens et éventuels frais d'exécution.

La clôture de la procédure résulte d'une ordonnance du 28/12/2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère, en vertu de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur l'exécution du contrat de travail

-Sur la demande de requalification de la relation de travail à temps complet.

L'appelante indique que la mention des horaires journaliers est facultative, que seule la répartition de la durée du travail en volume doit être indiquée ce qui a été fait, que le salarié recevait un planning hebdomadaire.

L'intimé explique que les contrats du 22/03/2016 et du 01/08/2016 ne comportent pas les horaires journaliers, la relation de travail étant présumée être à temps complet.

Sur quoi, l'article L3123-14 du code du travail devenu L3123-6, dispose que :

« Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.

Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

Le contrat de travail du 22/03/2016, à terme au 21/06/2016 stipule que :

-la durée mensuelle du travail est fixée à 130 heures,

-cette durée sera répartie de la façon suivante entre les semaines du mois :

semaine 1 : 30 heures

semaine 2 : 30 heures

semaine 3 : 30 heures

semaine 4 : 30 heures

-les horaires de travail pour chaque journée travaillée seront communiqués au salarié par la remise d'un planning écrit qui sera remis pour chaque semaine et/où pour chaque mois.

Des stipulations identiques figurent au contrat du 01/08/2016 à terme au 30/11/2016.

Contrairement à ce qu'affirme l'appelante, les contrats de travail ne comportent pas de répartition au sens de l'article L3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable et devenu L3123-6, puisqu'on ignore la répartition des horaires par jour de travail, ce qui est nécessaire dans la mesure où le contrat prévoit bien une répartition hebdomadaire à hauteur de 30 heures, le salarié devant pouvoir connaître avec précision les jours travaillés qui lui sont assignés. Faute de précision sur ce point, le salarié doit se tenir en pratique à complète disposition de l'employeur. Enfin, aucun planning n'est produit par l'employeur.

Il en résulte que les contrats de travail doivent être présumés à temps complet, ainsi que l'a retenu le premier juge.

En conséquence, M. [B] est fondé à obtenir les rappels de salaire qui suivent pour les périodes considérées sur la base d'un temps complet, étant précisé que le salarié calcule le rappel en se basant sur une période de 120 heures, alors que le contrat stipule 130 heures par mois, et que les bulletins de paie afférents ne sont pas produits :

-22/03/2016 au 21/06/2016 : 680,97 €, outre 68,97 € de congés payés

-01/08/2016 au 30/11/2016 : 920,54, outre 92,05 € de congés payés afférents.

Il convient d'infirmer le jugement et de condamner la SAS STOCKOVER au paiement des sommes précitées.

-sur la demande de requalification de la relation de travail à durée indéterminée

L'appelante explique qu'aucune disposition légale ne sanctionne le défaut des mentions des mentions obligatoires encadrant l'usage du temps partiel par une requalification à durée indéterminée, qu'en outre le délai de prescription de deux ans court à compter de la conclusion du contrat puis que le défaut d'une mention obligatoire est invoqué, que le premier juge ne s'est pas prononcé sur ce point.

L'intimé indique que le contrat de travail du 22/03/2016 mentionne une « augmentation de volume d'activité » et que les horaires journaliers ne sont pas précisés, que le contrat ne respecte pas les articles L1241-1 et suivants du code du travail, que le contrat du 01/08/2016 ne précise pas les horaires de travail. Il n'est pas répondu au moyen tiré de la prescription.

Au préalable, s'agissant de la prescription, l'article L1471-1 du code du travail dispose que toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Dans la mesure où le salarié invoque d'abord le motif du recours au contrat à durée déterminée du 22/03/2016 (« M. [H] [B] est engagé afin d'aider la société à faire face à une augmentation temporaire du volume d'activité de l'entreprise ») et les dispositions des articles L.1241-1 et suivants du code du travail, et L.1245-1 du code du travail, puis dans un second temps l'absence de mention des horaires, il s'ensuit qu'il conteste le motif du recours au contrat à durée déterminée.

Dès lors, il est constant que le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat.

En l'espèce, le contrat du 22/03/2016 s'est poursuivi par un contrat du 01/08/2016, puis par un avenant du 01/12/2016, à terme au 30/11/2017, cette date constituant le point de départ du délai de prescription compte-tenu de la succession de contrats. En l'état d'une saisine de la juridiction le 04/04/2019, la demande n'est pas prescrite. La fin de non recevoir tirée de la prescription sera rejetée, et le jugement sera complété, le premier juge ayant omis de statuer.

En l'absence de toute justification du motif de recours au titre d'une « augmentation de volume d'activité », l'employeur ne justifie pas du surcroît d'activité ayant justifié le recours à un contrat à durée déterminée. C'est donc à bon droit que le premier juge a requalifié la relation de travail pour une durée indéterminée et a alloué au salarié une indemnité de requalification de 1.662 €. Le jugement est confirmé.

Sur la rupture conventionnelle

Le salarié conteste la rupture conventionnelle en faisant valoir d'une part l'irrégularité de la procédure en l'absence de tout entretien préalable à la signature de la convention, et en second lieu des faits de harcèlement moral viciant son consentement.

-Sur la procédure

L'appelante explique qu'aucun formalisme particulier ne régit la tenue des entretiens prévus en vue d'une rupture conventionnelle, que la convention peut être signée lors d'un seul entretien, que les parties ont négocié l'indemnité de rupture, que le salarié a été convié à un entretien fixé au 23/01/2019, à l'occasion duquel le formulaire CERFA a été signé.

L'intimé demande confirmation du jugement lui ayant alloué une indemnité pour procédure irrégulière et réitère son argumentation selon laquelle en vertu de l'article L1232-2 du code du travail, l'employeur qui envisage de licencier un salarié doit le convoquer à un entretien préalable, le salarié congédié pouvant invoquer le maximum de droits auquel il peut prétendre en vertu de l'article L1235-2, qu'il n'a été convoqué à aucun entretien préalable à la signature de la convention.

Sur quoi, en application de l'article L1237-11 du code du travail, l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.

La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties.

Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties.

Il ressort de l'article L1237-12 du code du travail que les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister :

1° Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, qu'il s'agisse d'un salarié titulaire d'un mandat syndical ou d'un salarié membre d'une institution représentative du personnel ou tout autre salarié ;

2° Soit, en l'absence d'institution représentative du personnel dans l'entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.

Lors du ou des entretiens, l'employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait lui-même usage. Le salarié en informe l'employeur auparavant ; si l'employeur souhaite également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.

Ainsi que le fait valoir la SAS STOCKOVER, et contrairement à ce que soutient M. [B], l'article L1237-12 précité n'instaure pas de délai entre, d'une part, l'entretien au cours duquel les parties au contrat de travail conviennent de la rupture du contrat et, d'autre part, la signature de la convention de rupture prévue à l'article L. 1237-11 du code du travail. Il s'ensuit que la convention pouvait être signée lors du seul entretien du 23/01/2019 dont la réalité n'est pas contestée.

De plus, M. [B] a été assisté par un conseiller du salarié durant l'entretien, peu important qu'il indique n'avoir pas reçu la convocation à l'entretien. La procédure n'est donc pas irrégulière. A supposer la rupture conventionnelle nulle, une indemnité pour procédure irrégulière ne pouvait aucunement être allouée au salarié sur le fondement de l'article L1235-2 du code du travail dans sa rédaction applicable. Le jugement est infirmé. La demande d'indemnité pour procédure irrégulière est rejetée.

-le harcèlement moral

L'appelante fait valoir qu'aucun vice de consentement tenant à des faits de harcèlement moral ne peut être retenu, qu'il a été constaté des détournements par le gérant M. [L] [B] ce qui a conduit à la révocation de son mandat en novembre 2018, qu'une sécurisation des normes et procédures de sortie et d'entrée des biens de l'entreprise ayant été effectuée, qu'il n'appartenait pas au salarié d'ouvrir et de fermer l'entreprise, que le salarié a souhaité quitter l'entreprise tout comme son frère et sa mère.

L'intimé explique que le gérant n'était pas souvent là, que les plannings ne sont pas fournis, qu'il n'avait pas le code pour entrer dans la cour, qu'il avait la « signature pour les banques », que les deux autres associés ont voulu s'approprier la société, qu'il a commencé à avoir des problèmes le 11/12/2018 avant le licenciement de son frère, qu'il a été écarté de la vie de l'entreprise et mis au placard.

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de fait qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il appartient au juge de se prononcer sur l'ensemble des éléments retenus afin de dire s'ils laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral.

Le juge ne doit pas seulement examiner chaque fait invoqué par le salarié de façon isolée mais également les analyser dans leur ensemble, c'est-à-dire les apprécier dans leur globalité, puisque des éléments, qui isolément paraissent insignifiants, peuvent une fois réunis, constituer une situation de harcèlement.

Si la preuve est libre en matière prud'homale, le salarié qui s'estime victime de harcèlement moral est tenu d'établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants qu'il présente au soutien de ses allégations afin de mettre en mesure la partie défenderesse de s'expliquer sur les agissements qui lui sont reprochés.

M. [L] [B] produit :

-la lettre de licenciement pour faute grave du 13/12/2018 adressée à son frère M. [L] [B],

-un compte rendu d'entretien préalable du 07/12/2018 dans la procédure concernant son frère signé par M [W] conseiller du salarié.

Ces éléments des faits, qui sont les seuls versés aux débats, établissent la possible existence d'un litige opposant la SAS STOCKOVER et son gérant. Il n'est toutefois produit aucun autre élément, militant dans le sens d'une « mise au placard » du salarié par l'employeur, permettant de présumer l'existence de faits de harcèlement moral. Aucun vice du consentement n'est en conséquence démontré.

Il s'ensuit que la rupture conventionnelle n'est pas nulle et ne produit pas les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est infirmé. Il convient de débouter M. [B] de ses prétentions relatives à la nullité de la rupture conventionnelle.

Sur les autres demandes

Les créances salariales produisent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement.

Succombant pour partie, la SAS STOKOVER supporte les dépens d'appel, les dispositions de première instance étant confirmées.

Il n'y a pas lieu en cause d'appel de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les dispositions de première instance étant confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Complète le jugement le jugement du 23 mars 2020 du conseil de prud'hommes de Lens et déboute la SAS STOCKOVER de sa fin de non recevoir tirée de la prescription,

Infirme le jugement du 23 mars 2020 du conseil de prud'hommes de Lens, sauf en ce qu'il a alloué à M. [H] [B] une indemnité de requalification de 1.662 € et en ses dispositions concernant les frais irrépétibles et les dépens,

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Requalifie à temps complet les contrats à temps partiel des 22 mars 2016 et 1er août 2016,

Condamne la SAS STOCKOVER à payer à M. [H] [B] les sommes suivantes :

-680,97 € de rappel de salaire outre 68,97 € de congés payés, pour la période du 22 mars 2016 au 21 juin 2016,

-920,54 € de rappel de salaire outre 92,05 € de congés payés afférents, pour la période du 01/08/2016 au 30/11/2016,

Déboute M. [H] [B] de ses demandes de nullité de la rupture conventionnelle, d'indemnité pour irrégularité de la procédure, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis, et de congés payés afférents,

Dit que les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de jugement,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS STOCKOVER aux dépens d'appel.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

P/LE PRESIDENT EMPECHE

Le Conseiller

Muriel LE BELLEC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale c salle 3
Numéro d'arrêt : 20/01303
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-26;20.01303 ?
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